SAM (2 / 3)

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Valentine fixait le tournoiement des pales, terrifiée.

— C’est quoi, ce délire ? Parler de quoi ? Tu me fais flipper, là. Ce truc tourne tout seul et ça te fait ni chaud ni froid.

— Je n’ai jamais voulu aborder le sujet tant que rien ne m’y poussait. Mais avec Sam, j’ai la sensation que je le dois, maintenant. Ma mère, Daniella, était sourcière. Ça, je te l’avais déjà dit. Mais elle était également médium. Tu n’es pas sans savoir que, parfois, les dons se transmettent, même deux ou trois générations plus tard.

— T’es en train de me dire que Sam verrait des...

— Possible. Et a priori, ils les attirent aussi.

Valentine se laissa tomber sur une chaise, décontenancée.

— Il faut le dire à Max ?

— Il vaudrait mieux. De toute façon, il ne pourra pas nier de telles évidences, souligna Maude, le doigt tendu vers le rideau le plus proche de Sam en pleine ondulation. Il y avait plein de phénomènes de ce type chez nous à l’époque, rien d’agressif ni de méchant, même si ça pouvait porter à confusion. Un vase qui tombe, une assiette qui vole…

— Mais moi, je suis pas habituée à ça. Et je veux tout simplement pas vivre avec des fantômes.

— Des entités, pour être exact. Tu n’auras sûrement pas le choix.

Un silence pesant s’ensuivit. Valentine scrutait son bébé, lequel détourna les yeux du plafond pour mieux les plonger dans ceux de sa grand-mère.

Visage figé. Plus aucun battement de paupières. Une statuette de chair et d’os.

Le tournoiement des pales gagna subitement en vitesse, créant de puissants courants d’air. Puis, toutes les ampoules se mirent à clignoter. Quelques unes éclatèrent. Les rideaux virevoltaient dans tous les sens. Valentine hurla, paniquée :

— Sam ! Arrête ! Arrête !

En vain.

— Seigneur Dieu ! Venez-nous en aide !

Le ventilateur atteignit une vitesse extrême. Les vibrations engendrées provoquèrent l’apparition de fissures autour de la fixation.

— On doit sortir de là ! cria Maude, tirant sa fille par le bras. Allez !

— Et Sam ?

— Viens, je te dis !

Les rares vases disposés çà et là chutèrent, comme poussés par des membres éthérés. Les cadres suivirent.

Maude et Valentine coururent vers la porte d’entrée. La clé tourna devant leurs yeux. Impossible d’ouvrir.

— Ma fille, ce gosse n’est pas un médium. C’est un…

Le miroir à la droite de Maude, ainsi que la vitre située en haut de la porte, explosèrent, soufflés par l’arrière. Valentine hurla comme jamais. D’innombrables éclats de verre venaient de transformer le visage de sa mère en un masque difforme et ensanglanté. Celle-ci s’effondra à ses pieds. Depuis le côté exposé de son cou sinuait un rouge sombre dont l’abondance forma rapidement une flaque.

— Maman ! Maman ! Au secours !

— Ma f...fille, gargouilla Maude, ton fils... est un…

Tous les bouts de verre s’enfoncèrent en une fraction de seconde, achevant la vieille dame. Le chaos ambiant cessa aussitôt. Un étrange calme régnait à présent dans ce rez-de-chaussée que l’on eût cru frappé d’un séisme de magnitude élevée.

Valentine se tenait recroquevillée devant le corps inerte de sa mère dont les vêtements s’imprégnaient de sang à mesure que les secondes passaient. En larmes et prise de tremblements, la jeune femme ne savait plus quoi faire. Tétanisée.

Elle jeta tout de même un œil derrière elle. Sam était là, sur le ventre, en appui sur ses avant-bras.

Sourire aux lèvres.

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