Chapitre 8. ♤

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Hope marche d’un pas léger, frôlant les murs, son ombre se fondant dans le décor comme si elle ne faisait qu’un avec les murs en crépis de l’hôpital. S’appuyant sur sa béquille comme Docteur House, elle parvient à atteindre le couloir où psychologues et psychiatres en blouse blanche déambulent, d’un pas tantôt pressé tantôt somnolant, en quête de leurs patients. Hope tourne, se collant pratiquement aux parois, pour arriver dans la salle d’attente où de nombreuses affiches médicales décorent les murs ternes de cette pièce qui est sans vie. Des affiches de campagnes contre le tabac, l’obésité, le harcèlement, la mutilation, la dépression ou encore les maladies sexuellement transmissibles. La teinturée s’assoit avec déplaisir sur la même chaise de d’habitude, celle qui est contre la fenêtre, avec vue sur la fontaine placée dans la cour de l’hôpital. Cette chaise entourée d’une dizaine d’autres, est inconfortable et grince à chacun des mouvements de Hope.

Quand Hope séjournait dans cet hôpital, qui la laissait totalement indifférente, elle se sentait à l’aise à cet étage-ci. Elle connaissait toutes les facettes de ce qu’elle considérait comme étant sa nouvelle maison, à cette époque-là. Son air fantomatique et invisible lui permettait de passer inaperçue ce qui était pratique quand elle s’ennuyait, qu’elle souhaitait espionner les autres et apprendre leurs petits secrets, découvrir de nouveaux lieux. En effet, la jeune Bâle prenait plaisir, contrairement aux personnes normales, à se balader dans les couloirs et s’asseoir sans parler ni bouger.

Maintenant qu’elle ne vit plus ici, elle se sent étrangère à cet endroit qui fut son refuge il y a peu. Elle ne se déplace ici seulement pour les rendez-vous avec le docteur Gemma, sa psychiatre depuis deux ans – après que Nolan soit devenu officiellement son petit-ami et qu’il ait été désigné comme plus apte à pouvoir s’occuper d’elle correctement. Toutes les deux s’entendent très bien, n’ayant même pas dix ans de différence, agissant avec elle comme avec une sœur. Avec Gemma, Hope n’a même pas eu envie de la tester, de l’ignorer, de lui faire du mal. Au début, elle ne parlait pas, elle la regardait seulement dans les yeux mais ce calme était reposant l’une comme pour l’autre. Puis quand Hope a eu son déclic et elle n’a pas eu honte d’être honnête en toute circonstance avec la blonde. Quand elle s’est enfin libérée de ce poids, de ce stress, elle a pu lui parler de ses idées noires comme joyeuse, elle a pu évoquer et apprendre à aimer ses souvenirs, ou même ses cauchemars les plus terribles.

Il leur arrivait parfois de se rejoindre dans un café pour discuter de chose futile et apprendre à se connaitre. Avec le temps, Gemma et elle sont devenues amies, c’est donc à ce titre que Hope a décidé de lui parler de son cancer. Hope redoute le moment où elle va devoir confier son plus grand secret à son amie. Comment va-t-elle réagir ? Que va-t-elle dire ? Hope se sent vaciller sous le stress. Elle pose sa tête contre sa fenêtre, faisant glisser puis remonter ses mains sur ses cuisses pour réchauffer ses mains et enlever les picotements qui lui brûlent les doigts. Elle ferme les yeux et essaie de se calmer en se concentrant sur sa respiration, comme elle le faisait avant ses compétitions.

  • Crise de panique ?

Demande une petite voix toute timide provenant d'un coin opposé à Hope. La teinturée aurait pu sursauter sous la surprise, pensant être seule comme d’habitude dans les heures creuses du midi, mais la voix si calme, si tendre et si faible comme un souffle. Cette douceur met en confiance Hope qui regarde d’un regard interrogateur et bien veillant la petite rousse aux yeux caramel. Hope n’a pas pitié d’elle, elle essaie seulement de comprendre pourquoi cette fille est là, ça l’intrigue, elle aime savoir ce genre de chose. C’est pour cela que Hope commence à examiner de la tête au pied la rouquine en faisant des hypothèses sur elle. C’est peu utile mais ça a le mérite de faire passer le temps, au moins.

La jeune fille s'asseoir en face de Hope. Elle a l'air d'avoir à peine plus vielle que dix-huit ans. Elle a de long cheveux roux, lisse attaché en queue de cheval basse, encadrant son fin visage aux joues creuses et les yeux cernés de bleus preuve que ses nuits sont courtes et mouvementées. Elle est de taille moyenne, habillée d’un jean délavé, de baskets démodés et d’un gros pull en laine dont elle ne cesse d’agripper les bords pour les rallonger. Elle bouge frénétiquement les jambes, les faisant sautiller sur la pointe des pieds, nouant ses doigts entre eux, fuyant le regard de Hope, quasiment recroquevillée sur elle-même. La rouquine a ce tic qui perturbe Hope, n’arrêtant pas de frotter par-dessus son pull ses poignets qu’elle soupçonne être une des raisons pour lesquelles la jeune femme se trouve en présence de Hope aujourd’hui. La rousse déglutit et essaie de sourire à l’ancienne brune.

  • Un mauvais moment à passer, rien de grave.

Lui rétorque enfin Hope. La nouvelle arrivante se tourne vers l’ancienne championne et lui sourit, rassurée que celle-ci se décide enfin à briser le silence. Mais tout de suite, Hope se tourne de nouveau vers la fenêtre, oubliant l’intrue et le calme revient dans cette atmosphère des plus pesante. Mais l’écorchée ne parvient pas à penser à autre chose qu’à la rouquine qui n’a de cesse de faire du bruit en mangeant ses ongles.

  • Pourquoi es-tu là ?

Ose demander bêtement Hope, la curiosité ayant repris le dessus sur la politesse.

  • Dépression. J’ai subi un violent harcèlement scolaire et je me suis scarifiée alors quand mes parents l’ont découvert, ils ont décidé de me faire consulter une psy.

Déclare la rouquine avec une facilité déconcertante comme si cela était tout à fait banale. Hope hausse les sourcils et recule comme si elle venait de se prendre un coup. Cette fille n’est pas normale, se dit-elle à elle-même.

  • Et toi ?

Hope se mort la lèvre. Parler de sa vie, comme ça, à une inconnue n’est pas banale mais Gemma le lui a souvent répété « Il faut en parler pour ne plus souffrir. » alors l’assistante sociale prend une grande inspiration et répond à la requête de la jeune femme avec tout le sérieux dont elle est capable.

  • Un accident de voiture qui a foutu ma vie en l’air. Un conseil, si tu veux vraiment t’en sortir, il n’y a que le temps, les traitements, tes proches et un travail sur toi-même qui peuvent te faire guérir. J’ai pu trouver un équilibre, alors ne néglige pas ton bien être.
  • On dirait un slogan pour une pub sur les problèmes digestifs !

Eclate de rire la rouquine. Hope grogne un peu, blessé et mal à l’aise face à cette réaction inattendue après un discours si encourageant. Mais elle finit par se détendre, trouvant le rire de la rouquine amusant. Hope se permet même d’esquiver un timide sourire.

  • Pourquoi tu te fais harceler ?
  • Je ne sais pas
  • J’ai du mal à te croire. On ne harcèle pas quelqu’un sans raison, quand même !

C’est au tour de Audrey de froncer les sourcils, visiblement blessée par les dires de Hope, se sentant visée parce que Hope se permet de retourner sa propre histoire contre elle.

  • Parfois il n’y a pas vraiment de raison. Tout ce que je sais c’est que j’étais la petite nouvelle, une jolie rebelle populaire avec de bonnes notes. Je ne peux pas réellement te dire quand et comment tout cela a dérapé et que j’ai perdu pied mais voilà le résultat.

Dit-elle en remontant les manches de son pull pour montrer ses coupures à Hope qui ne s’y intéresse que très peu. Le résultat l’importe peu, elle, elle veut connaitre la vérité.

  • Tu as l’air totalement détaché de tout ça pourtant ces coupures sont encore fraîches et peu profondes.

S’exclame la colorée en pointant du doigt les coupures écorchant la peau boursouflée des poignets de la rouquine.

  • Je le suis. Tu sais, à force de me faire du mal, je suis parvenue à me séparer de mon corps lorsque je me mutile pour éviter de trop souffrir.

Hope ne peut s’empêcher plus longtemps de retenir son fou rire et son ricanement ne tarde pas à résonner dans la pièce, brisant l’atmosphère mélodramatique qu’a installé au fur et à mesure la bouclé.

  • Je ne comprends pas le principe. Te couper ne te sers donc pas à exprimer ta douleur ni à souffrir d’une autre manière que psychologiquement, ça ne te sert pas à te défouler alors à quoi cela sert de te faire autant de mal ?
  • Ce sont des raisons banales que tu évoques. C’est superficiel tout ça.

Hope regarde attentivement la jeune fille et commence à s’impatienter face au regard désemparé et exagéré qu’affiche la rouquine.

  • Tu mens. Tu ne peux pas parler aussi aisément de dépression et de scarification sans en ressentir une vive douleur dans la poitrine si tu ne l’as pas vécu comme un honteux exutoire.

Déclare avec un regard suspicieux Hope, mettant ses coudes sur ses genoux pour lui permettre de pencher son buste en avant. La rouquine laisse un fin hoquet de surprise s’échapper de ses lèvres avant de reprendre son air hautain.

  • Peut-être parce que je ne trouve pas cela honteux. Et puis, tu ne peux pas comprendre quand tu ne l’as pas toi-même vécu…

Hope lève les yeux au ciel et soupire d’un air las face à la mine mélodramatique dont use la rouquine.

  • Crois-moi, je l’ai vécu. C’est pour ça que je me permets de penser que tu es aussi bête et folle que ceux qui t’ont poussé à commettre de telles atrocités à ton corps.

La rouquine recrache un rire mauvais et dévisage Hope d’un air sûr d’elle.

  • Et alors ? Tout le monde n’est pas comme toi !

Lui rappelle la rousse en la pointant du doigt en plissant des yeux.

  • Je n’ai pas dit ça mais ça parait logique de regretter, d’avoir honte et d’avoir des difficultés à en parler aussi aisément. On dirait que tu me parles avec la même indifférence dont on peut parler de quelques choses de futiles. Tu utilises la dépression et la scarification non pas comme signal d’alerte mais comme un moyen d’exister auprès des tiens. Ton frère te cache, pas vrai ? Il t’étouffe alors que tu étais la petite merveille de tes parents avant qu’il ne devienne un grand sportif avec une bourse pour aller faire ses études à l’étranger. Ça te fait mal d’être relégué au second rôle, pas vrai ? Mais c’est la vie, c’est comme ça et on n’y peut pas grand-chose. Un jour, tu es la meilleure et le lendemain, sans prévenir, tu n’es plus rien ni personne.
  • Ne mélange pas ma vie avec la tienne, tu serais bien gentille. En plus, d’où tu me juges ? On ne se connait même pas ! Arrête de faire ta pseudo psy à deux balles, meuf !
  • Pas besoin de te connaitre pour savoir qui tu es. Des filles comme toi il y en a des milliers. Elles ont tous pour elles mais elles veulent toujours plus et la seule manière qu’elles ont trouvés pour exister aux yeux des autres et être plaintes c’est de s’inventer des problèmes. Tu es pathétique.
  • Tu as l’air d’avoir cerné mon personnage aussi vite peut-être parce que tu es comme moi. Je me trompe ?
  • J’étais comme toi, nuance. Mais j’ai grandi et rassure-toi, les psychologues ne sont pas bêtes, ils vont vite comprendre si tu leurs mens. Même en faisant toutes les recherches que tu veux sur le sujet, rien ni personne ne peut aussi bien parler et exprimer ce que tu dis vivre que la personne concernée.
  • Que du blabla sans fond. Ennuyeuse à mourir en plus d’être une hideuse créature.
  • Salope en plus d’être pathétique.
  • Pense ce que tu veux, ton avis m’importe peu.

Hope soupire et lève les yeux au ciel, trouvant cette fille de plus en plus pathétique. Elle s’invente clairement une vie et des problèmes pour rien !

  • Mon frère a des posters de toi dans sa chambre.

Hope relève la tête et fronce les sourcils, prenant un air menaçant qui fit frémir la jeune fille.

  • Tu es bien Hope Bâle, non ? Adolescent, mon frère était amoureux de toi, il s’est même mis à faire du surf dans l’espoir de te croiser sur la plage. C’était assez drôle de le voir espérer !

Eclate-t-elle de rire. Hope déglutit, se sentant de plus en plus mal à l’aise, remettant derrière son oreille une mèche de cheveux.

  • Quand tu as eu ton accident, mon frère était effondré comme une fanatique de Justin Bieber apprenant que son idole arrêtait la musique pour se consacrer à la religion ! C’est fou quand même, non ? Tu ne connaissais même pas son existence pourtant lui il savait pratiquement tout de toi. Il achetait tous les magazines et journaux locaux où tu apparaissais, il allait à chacune de tes compétitions et à quasiment tous tes entraînements. Il était toujours dans le deuxième rang des supporters, assez loin pour pouvoir te regarder comme il le souhaitait mais assez près pour que tu le remarque. Ce que tu n’as jamais fait, si je ne me trompe pas. Après tout, tu avais beaucoup de fan, tu ne devais même pas connaitre la moitié des gens qui te suivaient sur les réseaux sociaux et qui commentaient ta pseudo vie parfaite avec ta famille aisée, ton magnifique frère avec qui tu étais si fusionnelle, ton splendide petit-ami sportif et étranger, ton équipe avec qui tu étais tout aussi liée et ta bande de copain avec qui tu faisais toutes tes fêtes et voyages. Ouais, une vie comme dans les films et les livres. Paradoxalement, je t’enviais autant que je te détestais pour toutes ces paillettes et faux semblant que tu nous vendais comme quelque chose de réelle, comme si la vie pouvait être aussi belle et sans bavure.
  • Où veux-tu en venir ?
  • Désolée je dérive. Tout ça pour dire que tu avais de l’influence sur les gens, sans même en avoir réellement conscience. Tu savais que tu étais aimée, suivie, écoutée mais tu n’avais pas compris l’impact que tu pouvais avoir sur tes suiveurs. Tu leur vendais du rêve, de l’espoir à foison et de l’ambition.
  • Je ne vois pas ce qu’il y a de mal dans ça ? Pourquoi ne pas aider les autres quand tu en as la possibilité ?
  • Tu ne devais pas être aussi parfaite au naturel ! C’était injuste !
  • J’ai travaillé dur pour avoir cette vie ! Où est l’injustice dans tout cela ?

La jeune fille laisse son discours, suspendu dans ce long moment de latence, sous le regard sévère et de défi d’Hope.

  • Tu sais Hope, au fait je peux t’appeler Hope, n’est-ce pas ?

Lui demande-t-elle sans pour autant attendre la réponse de la concernée. Elle claque sa langue contre son palais et regarde par la fenêtre, un sourire aux lèvres, les bras croisés se perdant dans l’épaisseur de son pull.

  • Tu seras à jamais une championne même si tu es sûre que non c’est pourquoi je me suis demandée comment toi, qui voulais tant aider les autres, tu peux être aussi égoïste sur certaines choses comme celle-ci qui paraissent pourtant si normale. Tu aurais pu entraîner et nourrir les apprentis de ton savoir, faire grandir les plus expérimentés, révéler des vocations, alimenter l’espoir, créer des rêves mais au lieu de faire cela tu as préféré gâcher ton talent en t’enfermant dans des bureaux, fuyant sans doute les espaces d’eau et les bords de plage où les cabanes de surf y sont à foison. Tu as encore beaucoup de connaissance dans le milieu sportif, encore beaucoup d’influence, tu aurais pu agir et faire ce que tout le monde attendait de toi. Si tu as survécu, certes, ce n’était pas nécessairement ton heure mais c’est sans doute parce que tu as encore des choses à faire, ici ou ailleurs.

Hope hausse les sourcils sous la surprise mais ne peut s’empêcher de mordiller sa lèvre inférieure sous la colère qui commence à bouillonner en elle. Elle s’appuie sur sa béquille et se redresse avec fluidité, regardant droit dans les yeux la rouquine.

  • A qui ai-je à faire ? Qui es-tu pour me juger ? Que veux-tu ? Que cherches-tu en venant ici pour m’insulter ?
  • Je ne suis pas ici pour toi mais pour moi, pour me soigner. Tout ne tourne pas autour de ta personne même si ton entourage doit te le faire croire.
  • Pourquoi faire ta gentille pour ensuite m’insulter, me mépriser puis me faire la morale ?
  • Si tu te sens offenser, j’en suis désolée.
  • Foutaise !
  • Tu as raison, je m’en fiche pas mal de te faire souffrir.
  • Qui es-tu ?
  • Pourquoi veux-tu savoir cela ?
  • J’aime savoir le nom des personnes que je vais humilier avant d’agir.
  • Audrey. Je m’appelle Audrey Angon.
  • Alors Audrey, écoute-moi bien parce que je ne vais pas me répéter trois fois. Je ne te dirais pas à quel point ça me fait autant du bien que du mal de savoir que ton frère s’est épanoui dans un sport, en partie grâce à moi. Je ne sais pas vraiment si j’avais de l’influence sur les gens mais si tu le dis, toi qui étais extérieure à tout cela, je veux bien te croire mais je t’interdis de parler de ce que tu ne connais pas comme si tu avais la science infuse.

Audrey sourit directement, comprenant qu’elle avait touché – comme elle le souhaitait – une corde sensible chez sa victime en évoquant son passé de sportive mais elle redescend vite de son petit nuage de satisfaction quand elle ne voit aucune douleur ou aucune joie dans les yeux de Hope, seulement de la neutralité.

  • Souviens-toi, Hope, qu’on ne soupçonne pas son pouvoir jusqu’au jour où l’on se retrouve impuissante parce qu’on l’a perdu.
  • Tu te répètes…

Soupire Hope. Audrey allait rétorquer quelque chose, sans doute d’aussi sanglant qu’à son habitude lorsque la jolie brune aux yeux verts apparaît de l’embrasure de la porte, un doux sourire, une voix posée mais un regard soupçonneux pour accoster son amie.

  • Hope ? Tu es prête ?

Hope se tourne avec le sourire vers la porte et acquiesce.

  • J’arrive Gemma, deux secondes s’il te plaît !

La concernée hoche la tête et attend son amie dans le couloir. Hope perd directement le sourire lorsqu’elle ne voit plus son amie. Elle se tourne vers la rouquine et la pointe du doigt, l’appuyant sur l’épaule de l’accusée.

  • Ne te méprends pas Audrey. Ni les spécialistes ni moi n’allons te plaindre.

La rouquine aux yeux caramel lève les yeux au ciel et soupire d’une façon des plus irritables.

  • Je ne cherche pas ta pitié de toute manière.

Hope soupire en désaprouvant d'un hochement de la tête avant de se redresser et de s'en aller, n’essayant pas de comprendre ce que marmonne la rouquine. C’est à la fois tracassé et très heureuse que Hope retrouve son amie dans les couloirs de l’hôpital. Après une étreinte où Hope s’est permis de dire,

  • Elle, tu vois, tu devrais sérieusement l’interner !

Elles ont ensuite échangé des banalités à la cafétéria de l’hôpital, évoquant la nouvelle couleur de cheveux de Hope ainsi que son nouveau tatouage puis parlant des fiançailles de Gemma avec sa petite-amie ou encore de leur projet d’achat d’une maison en banlieue. C’est donc au moment d’un café bien brûlant que Gemma demande d’un air curieux les raisons qui ont poussé Hope à avancer leur rendez- vous entre copines à ce midi-là.

  • J’ai une nouvelle à t’apprendre.
  • Oh !

Gemma allonge son « oh » sur plusieurs secondes en jouant des sourcils.

  • Quel genre de nouvelle ? Une bonne j’espère !
  • Euh bah ça dépend de ton point de vue…

S’exclame-t-elle d’un air gêné.

  • Ta tante hyper détestable est morte ?
  • Non non ! Mais quelle garce quand même !

Eclate de rire Hope en songeant à son ignoble tante.

  • Non, plus sérieusement, ça ne concerne que moi. Enfin si on veut…

Hope se gratte l’arrière de l’oreille sentant le malaise qui plane au-dessus d’elle et de son amie. Gemma ouvre grand la bouche et les yeux et pousse un son indéchiffrable. Hope la regarde de travers, la questionnant du regard.

  • Tu es enceinte, c’est ça ? Mon dieu ! J’espère que je suis sur la liste des plausible marraine !

S’écrit toute guillerette la blonde. Hope a dû mal à déglutir et prends un air horrifié puis éclate de rire devant son amie qui a les yeux qui pétillent. On dirait un petit chiot qui remue la queue à cause de la joie qui l’irradie de toute part. Hope fait comprendre par son éclat de rire que la réponse est négative.

  • Non, je ne suis pas enceinte au grand damne de Nolan.
  • Quoi ? Mais alors qu’est-ce que c’est ? Allez, raconte ! Arrête de me faire attendre !
  • C’est délicat Gemma…

Le sérieux et la gêne de son amie inquiète immédiatement la blonde qui arrête de manger sa salade et saisit la main de la colorée, lui caressant la peau grâce à son pouce.

  • Je suis autant ton amie que ta psychiatre, Hope. Alors n’ai pas peur, d’accord ?

Hope baisse la tête mais opine tout de même de la tête, déjà loin dans ses pensées. C’est ainsi qu’elle trouve la force suffisant pour annoncer à son amie les maux de tous ses problèmes et inquiétudes ces derniers temps.

  • Gemma… On m’a diagnostiqué un cancer du poumon au stade trois. Soit, je dois subir des traitements qui vont me pourrir aussi bien de l’intérieur que de l’extérieur soit je ne fais rien. Dans tous les cas, je suis terrifiée à l’idée d’annoncer à ma famille que je suis malade.

Hope relève la tête vers son amie et c’est en voyant la tête de constipée de son amie que Hope retrouve une certaine légèreté autrefois perdue. Une seconde fois durant ce repas du midi, elle ne peut retenir un éclat de rire aussi sincère et pur que le cristal.

  • Bon dieu… Mais ris pas imbécile !

S’exclame le docteur Gemma en sortant de son trouble, ses doigts venant gentiment infliger une pichenette près de l’oreille de son amie.

  • Désolée c’est nerveux.
  • Plus sérieusement, aussi bien en tant que psychiatre ou en tant qu’amie, je te conseille fortement d’avertir tes proches et pas seulement parce que tu vas avoir besoin d’eux mais parce qu’à un moment donné, traitements ou pas, la maladie va être visible comme le nez au milieu de la figure et s’ils apprennent que tu leurs as menti ou caché une chose aussi importante que ça, crois-moi, ça va mal aller pour toi.

Les deux jeunes femmes se lèvent de leurs chaises et vident leurs plateaux. Gemma, en attendant Hope qui met son blouson, elle regarde son biper. Elle le range dans ses poches lorsque son amie se met à ses côtés, prête à partir. Elles marchent l’une à côté de l’autre dans le silence pendant plusieurs minutes avant que la blonde ne raccompagne l’ancienne brune devant l’accueil de l’hôpital. Elles se prennent dans les bras et planifient déjà leur prochain repas.

  • Merci Gemma d’être là pour moi…
  • Tu ferais la même chose pour moi, ma belle. En tout cas, sache que quoi que tu fasses je te soutiendrais dans cette difficile épreuve.

Les deux jeunes femmes s’échangent encore quelques banalités avant que la blonde soit obligée d’aller retrouver ses patients. Hope quitte l’hôpital beaucoup plus légère que ce qu’elle ne pouvait l’espérer.

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