Chapitre 8 : Les lumières de la face cachée

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Maintenant, Ned possède une nouvelle piste : direction la face cachée. Plus simple à dire qu’à faire. Surtout que le casino est l’un des endroits les plus huppés de la station, lui-même n’y était allé qu’une seul fois pour y laisser la moitié d’un salaire… Avec sa tenue d’ouvrier, il n’irait pas bien loin. Ses yeux lorgnent du côté des quatre cadavres encore fumants, plus particulièrement celui d’Edouard…

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— Bon retour à la civilisation Monsieur Nodles.

Le guichetier lui rend ses nouveaux papiers d’identité. Le costume cintré d’Edouard le gène un peu. Feu son collègue n’a jamais été très large d’épaules. Il réajuste sa veste et, passé le portique de sécurité, entre dans la première botcar disponible. Ned pose une mallette chromée sur ses genoux. Il devrait faire ses courses au marché noir plus souvent, son arme est passée comme dans du beurre !

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La console en face de son siège s’allume.

— Où souhaitez-vous aller ? lui demande une voix synthétique.

— Au casino ! Je me sens en veine.

Le fin tube de métal glisse sans bruit sur le côté et part droit vers le centre-ville. Ned peut voir les lumières bleues et blanches des immeubles au loin. Il jette encore un coup d’œil à ses papiers.

« Manuel Kelloy, drôle de nom mais je vais pas m’en plaindre, pense-t-il. »

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La botcar le dépose à quelques rues du casino, à cause du balais incessant des véhicules privés cherchant leur place sur un parking trop petit. Ned n’avait jamais fait attention au silence, mis à part le bourdonnement à peine audible des voitures, les rues restent silencieuses. Un éclat de voix, de temps en temps ou le bruit des pas sur le béton. Et puis le casino.

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Un édifice imposant. Une tour rectangulaire s’élevant en pointe de flèche sur une centaine de mètres. Le dernier étage, entièrement vitré, est comme un phare d’où partent des rayons de lumière multicolores. Ses fenêtres en triangle dessinent un sourire bigarré sur toute la façade, parfois une silhouette floue apparaît pour fixer les nouveaux arrivants, en contrebas. Ned s’avance vers l’entrée d’où une musique sourde, entêtante s’échappe.

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Un simple mouvement de sa jolie mallette suffit à lui faire ouvrir les portes.

« Imbéciles. »

La chaleur et l’odeur née du mélange d’une trop grande variété de parfum prennent Ned à la gorge. À cela s’ajoute la fumée de cigarette, le casino est le seul endroit de la station où fumer est autorisé. Il n’a jamais compris cette manie, il préfère l’alcool de toute façon. En tout cas il faut qu’il trouve un chemin jusqu’à William.

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Ned slalom entre les tables de jeux jusqu’à un ascenseur transparent. Il faut qu’il monte au dernier étage, de là il pourra atteindre le bureau du directeur. Si la sécurité est la même qu’à l’entrée…

Il entre dans la cage d’ascenseur, accompagné d’un homme entre deux âges, une jeune femme accrochée à son bras comme si elle allait tomber. Ce qui serait sans doute le cas à la vue de ses joues rougies et de son regard perdu dans le vague.

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— Quel étage ? demande l’homme.

— Au dernier, répond Ned, laconique.

Une lueur d’intérêt s’allume dans les pupilles de son interlocuteur.

— Oooh ! Enfin quelqu’un d’intéressant dans ce bouiboui ! C’est votre première fois ? Je ne crois pas vous avoir déjà vu.

— Normal. Je reviens d’un séjour…pénible dans le bloc usine. Pour affaire.

Ned agite légèrement sa mallette.

— Je vois. Pénible je n’en doute pas ! Quel horrible endroit ce doit être.

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Cet ascenseur est décidément trop lent… L’homme continu.

— Toute cette pauvreté, ce chaos. Heureusement que nous sommes à l’abris de tout ça. À notre place.

— Je ne vous suis pas.

L’autre a un léger tic, un bruit de succion entre ses dents et sa lèvre inferieur. Irritant.

— Prenez les eux, par exemple.

Il montre les personnes en contrebas.

— Eux resterons en bas, à leur place. Quant à nous…

Il lève son doigt vers le ciel.

— Si vous le dites.

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Les portes s’ouvrent enfin. Dernier étage. Ned a déjà repéré son but. Un escalier en métal qui monte le long de la paroi de verre. Le bureau de William doit se trouver au-dessus. Il esquisse un bref salut à l’adresse de l’homme et de sa compagne.

— Bonne soirée Monsieur ! Nous voici maintenant à notre place !

— Ouais ! s’exclame la jeune femme. Les déchets avec les déchets !

— J’aurais pas mieux dit, siffle Ned entre ses dents.

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Il grimpe lentement l’escalier. Pas le moindre agent de sécurité en vue. Tant mieux. Il serre sa mallette alors que la rage recommence à bouillonner dans son crâne. William, cet incapable mal luné a enfin trouver un travail à sa mesure. Heureusement avec cette musique, personne ne l’entendra crier. Quel horrible vacarme d’ailleurs. Ned ne vois plus que le bout de l’escalier, une porte en vrai bois marquée d’un nom : William Radus.

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Ned ouvre sa mallette sort son arme avec un sourire carnassier et pose doucement une main sur la poignée. Comble de la chance, la porte est ouverte. Une partie de son esprit, moins imprégnée de colère, se met à le démanger. Mais il écarte ces pensée parasites , tourne la poignée et ouvre violemment la porte.

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Le bureau est impeccable. Murs matelassés pour l’insonorisation, planché parfaitement ciré, quelques bibelots rangés par ordre de grandeur sur une fausse cheminé avec une précision maniaque et enfin un large bureau en bois massif sur lequel est appuyé… Le cœur de Ned manque un battement.

— Arthur ?!

Son ancien ami l’accueille avec un immense sourire d’une oreille à l’autre.

— Salut Ned.

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