11 - Armoire

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  J’arrivais face à la porte recouverte d’un stratifié de bois sombre. J’avais pu me glisser par la porte entrouverte à la sortie d’un résident. Quentin allait être surpris de me voir arriver sans prévenir, ni sonner, ce n’est pas dans mes habitudes. Posté face à la porte, j’armais mon bras pour tambouriner sur le panneau, quand j’entendais des bruits dans l’appartement. Je posais doucement mon oreille pour mieux entendre. Des rires, des cris de joie, des pas lourds et pressés. Je reconnaissais la voix de mon frère sans soucis. La seconde m’évoquait des souvenirs flous, je ne parvenais pas à y remettre un visage.

  Je reprenais place et tambourinais à la porte palière. L’agitation se tût à l’intérieur. Je les entendais parler à voix basse de l’autre côté. J’appuyai sur la sonnette, leur signalant ma présence. Quelques pas sourds à l’intérieur, puis la porte s’ouvrit. Quentin était en sueur et essouflé. Son visage rouge trahissait une activité physique toute récente. Il me questionna sur ma présence :

  • Salut frangin. Je ne t’attendais pas de si tôt. Je ne t’attendais pas du tout en fait, je me trompe ?
  • Salut. Non, tu ne te trompes pas, j’ai juste besoin que tu m’éclaircisses un peu sur ce qu’il s’est passé hier soir au bar. Tu sais, après notre “Je n’ai jamais”
  • Ah oui, je vois tout à fait, riait-il, sacré soirée. Et bien, ce n’est pas que je ne veux pas t’accueillir, mais… comment dire… c’est un peu le bazar ici.
  • Oh, ce n’est pas grave, on a vécu ensemble, je te rappelle, je suis habitué à ton désordre naturel. Alors, tu me fais entrer ?
  • Oui, bien sur, vas-y, dit-il en s’écartant du dormant.
  • Merci. Attention, ta braguette est ouverte, l’avertisais-je en me dirigeant vers le séjour.

  Il me suivit en tentant de remonter la fermeture. Je m’installais dans le canapé comme si j’étais chez moi.

  • Je te sers un café ?, demandait-il en bon hôte.
  • Non, merci. Je ne vais pas rester longtemps, tu as sûrement mieux à faire. Tu peux me raconter ce qu’il s’est passé ? La dernière chose dont je me souviens, c’est “Je n’ai jamais mangé sucré-salé”.
  • Oui, s’exclamait-il, et tu as bu la moitié de ta chope cul-sec, se moquait-il. Puis tu devais être trop bourré, tu as vacillé et tu t’es rattrapé à une charmante demoiselle. Tu as voulu la remercier en l’embrassant, mais elle a gentiment décliné ton offre. Ensuite, tu as fini ton verre et tu es parti. Voilà, c’est tout.
  • C’est tout ? Toi et Sarah m’avez laissé partir seul, complétement pété au milieu de la nuit, sans m’accompagner ? Vous n’avez vraiment pas peur.
  • Ne te plains pas, tu es parti sans payer. Tu me dois dix balles, d’ailleurs. Et puis, tu n’es pas parti seul, tu étais en bonne compagnie.
  • J’étais avec qui ?
  • Je ne la connais pas. Tu es parti au toilettes et tu es revenu avec une rousse à ton bras. Elle n’avait l’air très fraîche elle non plus, mais Sarah en aurait bien fait son goûter. On vous a vu partir tous les deux et voilà.
  • Donc, vous m’avez laissé partir avec une inconnue aussi bourrée que moi. Vous n’avez pas peur. Figure-toi que je me suis réveillé tout à l’heure dans une pièce miteuse avec un chat qui…

  Je fus interrompu par un toussotement étouffé, qui ne venait pas de Quentin. Je le voyais tenter de réprimer un sourire.

  • C’était quoi ce bruit ?, demandais-je.
  • Sûrement un voisin, rétorquait-il. Tu sais, mon immeuble n’est pas très bien isolé. Alors, tu disais qu’il y avait un chat ?
  • Il y a quelqu’un d’autre ici ? C’est Sarah ?

  J’entendis éternuer. Je n’avais pas rêvé. Le son venait de ma gauche, près de l’entrée. Je m’approchais de la porte et inspectait l’armoire de l’entrée. Tandis que je m’avançais, je sentais Quentin devenir tendu, il me demandait d’un air soucieux “Tu vas où ? Qu’est-ce que tu regardes ?” Ou encore “Ne va pas là, j’ai caché ton cadeau d’anniversaire”. Il m’en fallait plus pour ne pas ouvrir la porte. Je tirais vivement sur la poignée et me retrouvais face à Sarah, à moitié nue, caché dans l’armoire, cherchant à cacher ses attributs féminins.

  • Ferme la porte, s’il te plait, me suppliait-elle d’une voix timide.

  Je m’exécutai et me tournais vers mon frère.

  • Je crois que tu vas avoir des choses à me raconter. Un jour. Peut-être. Mais pour l’instant, je vais essayer de digérer un peu cette soirée.

  J’ouvrais la porte palière, et avant de sortir, je lui lançais :

  • D’ailleurs, je te confirme, l’acoustique est très mauvaise, on entend tout depuis la couloir !

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