I - Espoir (partie 4)

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  Il heurta une branche des jambes, puis une autre de l’estomac. Encore une autre lui érafla le visage. Son calvaire cessa lorsque son parachute s’emmêla dans les branchages, le coinçant ainsi à plusieurs mètres du sol. Il apprécia la distance qui le séparait de la terre ferme et faillit recracher son cocktail. Haytham songea tout d’abord à rester ici, pensant que le reste de l’équipage ou qu’un passager viendrait le secourir. Il réalisa qu’il y avait un problème : hormis Mariah, il ne connaissait personne. Le soleil ne se lèverait pas avant trois bonnes heures et il pensait que personne n’irait le chercher dans le noir. De toutes manières, s’il restait dans cette position de croix, tout ce que le personnel navigant trouverait serait un cadavre.

Il décida alors, la raison l’emportant sur la peur, de se détacher. Il se balança vivement dans la pénombre pour atteindre de son seul bras libre les sangles. Avant de réaliser qu’il les avait pressées, il fut précipité vers le bas, s’écrasant sur le sol dans un désordre de douleur et de feuillages craquants. Il se releva laborieusement, s’essaya à faire quelques pas avant qu’une souffrance à sa cheville droite ne le ramène à terre. Soutenant sa jambe en gémissant, il sentit son sang perler sur son front et ses bras. Il s’allongea dans la masse végétale, laissant ses forces s’évanouir. Son souffle faiblissait et son corps se détendait peu à peu ; il luttait pour garder ses paupières ouvertes.

 Dans cette nuit devenue silencieuse, une lumière vint agresser son œil. Les mots du steward résonnèrent en lui comme un ordre : suivre le signal lumineux. Pas question d’abandonner.

Dans quelque ultime effort, Haytham se redressa, en quête de ce rai de lumière qui oscillait entre le ciel et la forêt. À chaque mouvement, une douleur venait le paralyser. Elle était telle qu’il reconsidéra plusieurs fois d’attendre ici, avant de réaliser que son instinct de survie l’avait déjà mis debout.

 Il fit un pas, manqua de tomber. Puis un autre, cherchant constamment son équilibre et titubant en direction de la source lumineuse. Un pas après l’autre, le temps de reprendre son souffle. Il arracha une manche de sa chemise afin d’en faire une éponge pour son front puis un bandage pour son bras le plus touché. À mesure qu’il avançait, la lumière semblait maintenir la distance de manière décourageante. Ébloui et la sylve s’assombrissant trop pour ses yeux semi-ouverts, il ralentit pour éviter la chute – il risquerait de ne plus se lever.

Sur sa droite, un crissement. Cela venait des tréfonds de la forêt. Il bloqua sa respiration. Sans prévenir, dans une bruyante confusion, un corps lancé à pleine vitesse le heurta violemment, l’assommant presque, et tous deux se retrouvèrent projetés au sol. Quelques secondes plus tard, il sentit l’objet sous lequel il était jonché se mouvoir. Ce qui se révélait être un homme bondit aisément sur ses pieds. Très sonné, il réalisa avec horreur qu’il avait presque tué quelqu’un. La silhouette tira sans résistance Haytham du sol, ce dernier étant à peine conscient, puis sortit d’une sacoche accrochée à sa ceinture une bouteille d’eau et la donna au polymathe. Haytham ouvrit les yeux, puis s’empara de la bouteille et but à grandes gorgées.

— Merci.

— Pas de souci. Désolé pour la bousculade... Je m’appelle Raphaël.

— Merci beaucoup, Raphaël, gratifia-t-il à nouveau, reprenant un peu ses forces.

— Ben dis donc, t’es sacrément amoché. T’es le premier type que je vois dans les environs. Je n’ai vu que des insectes. Ils étaient aussi gros que ma tête ! Déjà que je ne suis pas fan.

— Toi aussi, tu es le seul.

Raphaël sourit.

— Je me disais bien que garder cette bouteille d’eau serait utile. Rien à carrer des précautions bizarres des stewards.

  Quand il remarqua que Haytham était en meilleur forme, Raphaël le prit par le bras le moins blessé et tous deux se dirigèrent vers le faisceau de lumière. Raphaël était un jeune homme svelte, à l’allure désinvolte et décontractée, mais à la forte musculature. De longs cheveux noirs luisant aux lueurs de la lune et de la nuit lui tombaient presque devant les yeux et lui caressaient le dos. Son teint doré rappelait des origines maghrébines ou hispaniques mais ce qu’avait remarqué Haytham était ce léger sourire, constamment collé à son visage.

— D’après toi, on est encore loin ? demanda Raphaël.

— Je ne sais pas trop, j’espère que d’ici une vingtaine de minutes on y sera. J’ai hâte de sortir d’ici.

Ils discutèrent alors pendant le quart d’heure qui suivit : sur la façon dont ils étaient arrivés là, d’où ils venaient… Cependant, et cela s’entendait, ils évitaient soigneusement le sujet du remaniement par méfiance. Sur le billet imprimé qu’ils avaient reçu il y a un mois avait été noté, en lettres presque blanches : « Soyez prudent. Ne divulguez jamais plus d’information que nécessaire. »

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