Chapitre 4 : Recommencer de zéro

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Chapitre 4 : Recommencer de zéro

En me retournant vers chez moi, je vus que ses murs étaient fissurés, ce qui n'était pas le cas avant. Cette demeure avait pourtant toujours était parfaitement entretenue. Avant que je ne puisse approcher de quelques pas, la maison s'effondra sur elle-même dans un vacarme de bruit et de poussière. Je protégea mon visage des projections de débris avec mes bras. La maison dans laquelle j'avais passé toute ma vie n'était plus. Encore un coup du démon ?

- Ell-

- Oui, c'est bien là mon œuvre. De ce qu'il s'est passé, il n'y aura aucune preuve.

- Tu te mets à parler en rimes, maintenant ?

- J'explore les créations humaines, aussi insignifiantes soient-elles.

- Bref ! On dois vivre ensemble, n'est-ce pas ? En ce cas, communique ! Ne fais pas ce qui te plaît sans m'en parler avant !

- Oh, mais c'est qu'il s'énerve, le petit ! C'est adorable. Mais, avant de me réprimander, ose au moins me dire que la perte de cette maison t'attriste.

- Non, en effet. Cela m'importe peu. Mais étant désormais obligé de vivre avec la chose que tu es, je veux que nous nous mettions d'accord sur tout avant d'agir. Entendu ?

- Hmmm, je suis dans ce monde pour être libre, et je compte bien le rester. Donc non, je continuerais d'agir à ma guise.

Je ne répondit pas, il était énervant. Mais je ne pouvais rien y faire, sans savoir au préalable comment annuler la possession. Je n'en avais même pas envie. J'étais lié à lui par le destin. J'en étais persuadé.

Bien, maintenant, il était temps d'aller chercher de quoi passer inaperçu. Je n'avais que peu d'argent sur moi, mais je ferais comme possible. Même si c'est impossible. Après tout, depuis la dernière demie heure, ma vision du possible et de l'impossible a complètement changé.

Je partis en courant de mon quartier avant que les voisins ne sortent voir d'où venait le bruit.

Le trajet jusqu'au centre-ville était compliqué pour deux raisons : le soleil qui m'aveuglait, et les gens qui me jugeaient sur mes yeux ou ma cicatrice.

Je rentra dans une petite boutique de textile où on m'accueillit avec un chaleureux «bienvenue» à l'entrée. Enfin me protéger du soleil me faisait un bien fou. Je trouva rapidement un grand manteau noir, qui descendait jusqu'aux chevilles. J'étais en train de me demander si je n'allais pas avoir l'air plus louche avec cet énorme manteau en plein jour un moi d'été que sans. Quoi qu'il en soit, je me dirigea vers la caisse et donna le manteau à la caissière qui me regarda en souriant :

- Elles sont jolies tes lentilles. Tu te les as acheté où ? Ça te va super bien !

- Merci, je les ai trouvé dans un magasin de farce et attrape.

- D'accord, d'accord. Et sinon, pourquoi acheter ce manteau ? En plein mois d'août, c'est étrange.

- Je prépare un voyage au grand nord. Le mois prochain.

Il ne fallait laisser aucun soupçon. Il était venu le moment de payer. Problème, mon achat coûtait cinq fois la valeur de mon budget.

- Il y a une réduction sur le manteau, n'est-ce pas ?

- Euh, non désolé, je n'en vois pas. Ça fera cent cinquante euros.

- Il me semblait pourtant. Tant pis.

- Du coup, tu fais quoi ? On le repose ? Ça va gêner ton voyage...

Il me le fallait. Quelle solution me restait-il ? En chercher un moins cher dans le magasin ? C'était le moins cher. En chercher un autre ailleurs ? Non, sortir me faisait souffrir. Le voler ? Envisageable, mais la caissière saurait sans doute me reconnaître. Je voulais éviter de lui faire du mal.

Pas nécessaire. J'entendis le souffle de l'hôtesse de caisse se couper. De même que sa tête. Ça devait encore être un coup de mon parasite. Sans que je ne vois rien se passer, la tête de la caissière se vit tranchée net et tomba au sol. Le corps fit de même, et le bruit de sa chute attira l'attention d'une autre cliente présente dans la boutique. Elle lâcha un cri et me regarda avec des yeux emplis de terreur tout en reculant, les larmes aux yeux.

- Ne- Ne me faites pas de mal ! Je vous en pris ! Je ne dirai rien de ce que j'ai vu. Laissez-moi, s'il vous plaît.

- Je ne suis nullement responsable dans cette incident. Je vous prie de me croire. C'est très étrange, et déplorable, certes. Mais je n'y suis pour rien. Bon, sur ce... Je vous souhaite une bonne soirée.

Il fallait que je parte vite. Le cri de la demoiselle avait attiré du monde. J'enfilai mon nouveau manteau, mis ma capuche et partis à grands pas.

- Ell-Naoh ! m'écriais-je. Va falloir arrêter d'en faire qu'à ta tête.

- Comment ça ? Je ne fais que réaliser tes souhaits. Il fallait que tu partes avec cet habit. Et je sais que la curiosité de cette dame t'irritait. Remercie moi, plutôt.

- Non mais tu t'entends ? Arrête. Comment on annule le pacte ? Autant je me sens lié à toi par je ne sais quelle force, autant ton comportement est insupportable. Sors de moi ! SORS ! Tu penses pouvoir tuer comme ça ?! NON !

Je n'en pouvais plus. Il était inadmissible de tuer quelqu'un de cette manière, sans raison. J'étais essoufflé, et Ell-Naoh me répondit :

- Cela est impossible tans que nous sommes tout deux en vie, j'en ai bien peur. Mais, avant de t'énerver comme ceci, tu devrais plutôt regarder autour de toi.

De quoi parlait-il ? Je regarda donc et vit des gens qui m'observaient parler tout seul. Certains avaient peur. Ça se comprenait, j'avais parlé de tuer. Mais j'étais énervé, et mon regard à leur égard ne fit qu'augmenter leur effroi. Certains partirent lors du croisement de nos regards. Je ne pouvais pas rester.

Je me mis en quête de trouver un endroit vide de monde où je pourrais établir un endroit où crécher le jour, puisque je ne pouvais désormais vivre que de nuit. Je connaissais un lieu non loin du centre-ville où je pourrais trouver quelques ruelles souvent désertes.

J'y étais donc, et il n'y avait en effet personne. L'ombre du bâtiment me protégerai. Il me faudrait juste faire attention à midi, lorsque le soleil est au zénith. Je m'assis donc contre un mur et entama une discussion :

- Ell-Naoh ? Pourquoi ? Je suis sûr qu'il y avait ne serait-ce qu'un autre moyen.

- Non, et je sais que tu le sais très bien. Elle était de toute manière vouée à mourir, cette demoiselle. Mais dis-moi plutôt... N'est-ce qu'une impression, ou tes sentiments commencent déjà à revenir ?

Il avait raison. J'étais presque peiné par ce qui venait de se produire. Je trouvais ça tout simplement injuste.

- Peut-être bien, dis-je. Je n'y peux rien, c'est comme ça. Quoi qu'il en soit, je veux qu'à l'avenir, nous communiquions. Si tu remplis cette simple condition, de ne pas agir tête baissée comme tu le fais, je te suivrai dans tes plans. N'oublie pas que toi aussi, tu es coincé avec moi. Si je décide de ne pas bouger, tu risque de vite t'ennuyer.

- Très bien..., répondit-il avec déception. Je prendrai en compte à l'avenir les répercussions de mes actes sur ta vie en t'en ferais part. Mais ne pense pas me contrôler pour autant. Je conserve une partie de ma liberté.

Une bonne chose de faite. Je sentais que je pouvais lui faire confiance, mais que cette confiance allait se retourner contre moi. Un bien étrange sentiment.

- Ell-Naoh, te voici donc ! S'exclama une mystérieuse voix masculine. Tu fais parler de toi, alors que tu viens seulement d'arriver sur la terre des Hommes.

- Qui est-ce ? Demandais-je en regardant aux alentours pour trouver qui m'appelait.

Soudain, de ma gauche surgit une silhouette blanche, qui se dessina rapidement et devint un homme. J'avais du mal à croire ce que je voyais. C'était un plutôt bel homme, brun, aux yeux verts. Mais là n'était pas le problème. Le problème se situait au niveau de ses ailes blanches, qui semblaient sortir de son dos. Il n'était habillé que d'un pagne blanc et d'une cape. De ce personnage n'émanait que la bienveillance et la pureté.

- Vous êtes quoi ? Demandais-je avec méfiance. Vous me voulez quoi ?

- Elnao, je présume. C'est donc toi qui cache ce petit démon, n'est-ce pas ? Je me présente, Azraël.

Sa voix était douce et chaleureuse. Il n'avait absolument pas l'air hostile.

- Méfie toi, me dit Ell-Naoh, qui ne semblait plus aussi joueur que d'ordinaire. C'est Azraël, l'ange de la mort.

- Oui, c'est bien moi, Ell-Naoh, répondit mon interlocuteur. Je viens en paix, détend toi.

- Tu peux m'entendre ?

- Bien sûr, tu n'échappes qu'aux humains autres que ton hôte. Bien, passons à la raison de ma venue. Pour commencer, tu t'es échappé de ton domaine, mais ça n'est pas dans mon intérêt de t'y renvoyer, ni même mon rôle. Ensuite, tu as tué des humains, soit via ton hôte, soit par toi-même. Cela concerne mon travail, mais ce n'est pas extrêmement grave. Il y a des morts chaque jour. Ce qui me contrarie un peu, c'est quand tu me voles mon travail. Tu as sauvé la vie de ce jeune garçon.

- Où est le problème ? C'est plutôt une bonne chose, non ?

Il m'intriguait. L'ange de la mort. Bien que je ne connaissais pas son nom, je savais que son rôle était de guider les âmes de morts vers leur vie post-mortem.

- Le problème, jeune garçon, c'est que je devais te conduire au Paradis.

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