24 - la montée

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C’est au mois de mars que nous fûmes invités devant un aréopage rassemblant les deux médecins et quatre autres membres du club. William aurait dû en faire partie, mais avait renoncé. J’apprendrai qu’en fait, il refusait seulement de se montrer à nous.

Calmement, ils nous demandèrent si nous renouvelions notre souhait. Nos réponses fusèrent en même temps. Ils nous rappelèrent que le moindre mot, le moindre geste, dorénavant, arrêterait immédiatement le processus. Encore une fois, c’est simultanément que nous hochâmes la tête. Puis ils nous annoncèrent que notre préparation allait débuter. Nous avions une semaine pour nous mettre en disponibilité pour trois mois, faire nos adieux et couper tous nos moyens de communication. Dorénavant, ils devenaient les maitres absolus de nos vies et des conséquences de notre choix.

En sortant, Arthur me tomba dans les bras. J’attrapais la main de Christopher, l’obligeant à partager notre étreinte. Nous étions obligés d’avancer ensemble, no6s avions besoin du courage des deux autres. Christopher se laissa faire, heureux de cette chaleur.

Un mois après, entièrement nus, en signe de soumission totale, les yeux bandés pour nous dire notre éloignement du monde, une voiture nous emmena à la maison. Il faisait froid et nous dûmes attendre sous la pluie l’ouverture des portes. La maison était glaciale. On nous fit descendre dans les caves, et on nous jeta, l’un après l’autre, dans une cellule trop minuscule pour pouvoir s’allonger. L’interdiction totale de retirer le bandeau et de parler nous fut criée.

Accroupi, grelotant, il n’y avait plus qu’à attendre. Ce fut long. L’exiguïté empêchait le repos, haché par des crampes insoutenables. J’ignorais si Christopher et Arthur étaient proches, je perdis rapidement la notion du temps et de ce qui se passait réellement. De temps en temps, certainement pas régulièrement, j’étais sorti de mon cachot, trainé dans les escaliers, puis soumis à une torture inconnue. J’ai tout subi, pensant qu’on me brulait, qu’on m’arrachait les ongles ou la peau. Ou alors, j’étais à terre, ou sur un chevalet et j’étais souillé d’excréments, pris par une multitude d’hommes qui me laissait dégoulinant. Plus rien n’avait d’importance, emporté dans un maelstrom où je ne sentais plus rien, devenant indifférent à mon sort, priant pour que la fin arrive vite. De temps en temps, à la sortie d’une épreuve épouvantable, j’entendais une voix me demandant si je voulais continuer. Il fallait alors que je prononce ma volonté à voix haute et intelligible.

Était-ce cela que j’avais espéré ? Au-delà de tout, quand on ne ressent plus rien, la douleur n’a plus d’importance, mais je n’y trouvais plus aucun secours.

J’étais abreuvé et nourri n’importe quand. Souvent, l’écuelle était introduite pendant une phase de sommeil, et je la renversais, m’obligeant à des contorsions pour laper les miettes ou les dernières gouttes.

Une seule chose résistait encore : le regret de savoir qu’Arthur subissait la même chose, par ma faute.

Quand , après l’indifférence à mon sort, celle à celui d'Arthur me gagna, je perdis pied. Je ne fis plus qu’attendre la délivrance, ayant oublié comment elle allait m’être accordée.

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