Chapitre 05 - Marielle

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Les yeux rivés au plafond, je n’arrive pas à dormir. Le poids dans mon bas ventre est trop pesant. J’ouvre mon tiroir et sors de quoi me délivrer. 6 ans que je l’ai et il est toujours aussi efficace. Mais impossible de virer les images que j’ai en tête. Impossible de ne pas vouloir ressentir son corps contre le mien. J’écarte bien mes cuisses, mords ma couette et pose le sextoy sur mon clitoris. Oh mon dieu que c’est bon !!! Je le retire avant de jouir pour faire durer cette délicieuse torture puis le repose. Je me cambre sur mon lit, et glisse deux doigts dans mon vagin mouillé. Je veux Mick’ !!! Je le désire si fort, je veux le sentir entre mes cuisses, je veux qu’il aille au fond de moi !!! Oh ouiiii Mick’ !!!! Mick’ !!!! J’en veux bien plus alors je sors ce qui a remplacé le sexe de Mick’ et de n’importe quel homme. Je m’agenouille et l’enfonce au fond de moi. Puissance maximum et tout se contracte, je cogne le fond de mon vagin, là oui juste là où Mick’ jouirait. Sa propriété, son territoire qui est désormais celui de mon accessoire. Je prends la serviette que je garde près du lit, quand je sens que ça va sortir. Je suis devenue une vrai pro pour ça et c’est comme ça que je soulage le poids dans mon bas ventre. Je n’ai même pas la force de ranger mes accessoires que je m’effondre de sommeil, jusqu’à ce que le réveil sonne.

- Ouhhhh nuit coquine ou nuit courte ? Me lance Lisa

- Cauchemars.

- Ah merde, encore. T’as revu le docteur Berkley ?

- Non.

- Marielle, tu devrais reprendre quelques séances.

Pendant quelques années j’ai été suivie par un psychologue pour m’aider à avancer. Car lorsque Mick’ m’a quitté, j’ai pété les plombs, je ne me supportais plus, je n’arrivais plus à me regarder dans un miroir. Je regrettais d’avoir couché avec le proviseur pour rien, et j’ai fini par me dégouter de moi-même. Les images me hantaient sans cesse, j’avais l’odeur de son after shave qui était resté coincé dans mon nez, l’endroit où il m’avait touché me brulait. Avec toujours cette impression d’avoir trahie l’homme que j’aimais pour rien. Je ne voulais plus vivre et pourtant je le devais. Heureusement que je suis tombée sur une équipe au top au centre et qui m’ont aidé à m’en sortir. Petit à petit j’ai réussi à toucher mon corps que je détestais tellement que je lui faisais du mal. Je frotte mon bras sentant encore les brulures que je m’infligeais lorsque je m’ébouillantais ou me brulais.

- Oui bonjour je souhaiterai prendre rendez-vous avec le Docteur Berkley, c’est urgent s’il vous plait. Dit ma collègue alors que je suis plongée dans mes souvenirs.

Je n’arrive plus à contenir mes larmes et Lisa me fait amener par une autre collègue dans mon bureau.

- T’as rendez vous cet aprem. Tu vas rentrer chez toi te reposer. Me dit Lisa.

- J’ai des trucs à faire, Vanessa doit voir son médecin…

- Eh, on va gérer, toi tu vas aller te reposer et pas de bêtise ok ?

- Faut que je reste ici Lisa. Dis-je effrayée par mes pensées.

- Ok. On est là d’accord ?

- J’ai tellement mal Lisa. Pourquoi ça ne s’arrête pas ? Pourquoi il doit toujours être dans ma tête ? Pourquoi j’ai fais ça !

- Respire, ce qui est fait est fait Marielle, maintenant tu vas t’allonger sur le canapé et respirer doucement. Voilà c’est bien.

Lisa me caresse le bras comme elle faisait lorsque j’étais la fille paumée et je finis par m’endormir. Lorsqu’elle vient me réveiller c’est pour aller voir mon psy. Pendant 2h je lui raconte mes cauchemars, mes envies et mes remords. On fait quelques exercices et me conseille de faire aussi un peu de Yoga avant d’aller me coucher.

- Je vous donne aussi l’adresse d’un confrère sexologue. Parlez-lui de votre fort besoin de masturbation qui vous gâche la vie.

En effet, je me masturbe bien trop souvent à mon goût. Je mets mon réveil toujours à l’avance pour une séance de masturbation, impossible de commencer ma journée sans ce petit plaisir. Puis ensuite je vais prendre mon petit déjeuner et à la douche je me masturbe de nouveau. Lorsque je suis au travail, à chaque fois que je vais au toilette je me touche comme Mick’ le ferait. Parfois même je remplace une pause déjeuner pour une séance de masturbation. Le soir lorsque je rentre, je me masturbe aussi. Et puis la nuit il peut m’arriver de me réveiller plusieurs fois pour me masturber. C’est devenu une addiction qui me gâche ma qualité de vie car entre mes cauchemars et mes plaisirs solitaires, je dors très peu. Ensuite je suis fatiguée et je finis par craquer comme aujourd’hui. Mais je suis prise dans ce cercle vicieux car la seule chose qui me raccroche à Mick’ c’est le sexe solitaire. Je peux l’imaginer, revivre ce qu’on faisait, avoir cette sensation qu’il est toujours là.

- Comment tu vas ? Me demande ma collègue inquiète lorsque je rentre.

- Ça peut aller. Je suis dans ma période déglinguée, ça va passer.

- Tu bosses tellement aussi Marie, faudrait lever le pied un peu.

- Je ne peux pas lever le pied, j’ai besoin de bosser.

Sinon je vais passer mon temps à me masturber comme la fois où j’ai osé me prendre deux jours. Mon dieu que c’était affreux. J’en pleurais tellement j’en pouvais plus de me donner du plaisir alors pour arrêter je me faisais du mal, la sensation de chaleur calmait la douleur de mon cœur brisé. C’était comme une drogue pour moi. Plus jamais je ne prendrais de vacances. Je me redoute tellement. J’ai parfois l’impression que je m’en sortirais jamais, que Mick’ m’a vraiment arraché une partie de moi en me quittant, m’obligeant à ne plus jamais être complète.

- Tu veux que je vienne dormir chez toi ce soir ? Me demande Lisa.

- Si ça ne te dérange pas je veux bien.

Lisa est devenue mon amie, et c’est grâce à elle que j’ai pu avoir ce poste. J’ai fais mes cours par correspondance puis j’ai fais mes stages sur place, ce qui m’a bien arrangé car j’avais tout sur place. Et puis j’ai eu cette envie d’aider les autres comme on m’aidait moi. On a fini par me proposer le poste de responsable du pole qui s’était libéré et on m’a fait suffisamment confiance pour me le confier. C’est une grosse responsabilité mais je suis bonne dans ce que je fais lorsque je ne suis pas en crise. Heureusement mes collègues me connaissent bien et savent comment me gérer dans ces cas là. Pendant des heures avec Lisa je vais lui parler de Mick’, elle a entendu 1000 fois notre histoire mais ça me fait du bien de raconter ma vie d’avant.

- Il devait bien avoir quelques défauts quand même. Ricane-t-elle

- Ouais, il était dealer.

- Non mais à part ça ? Y a quoi chez lui que tu ne supportais pas ?

- Sa cruauté. Mick’ pouvait se montrer sans pitié. Quand il a tout balancé à Brian, il a vraiment fait en sorte de tout détruire.

- Il était jaloux.

- Pas que jaloux, il a ce coté cruel qui est plus fort que lui. Il ne va pas juste te faire mal, il va te bousiller. Dis-je en laissant couler une larme.

Et c’est ce qu’il m’a fait. Il m’a bousillé. Il m’a rendu accro à lui et il est parti sans se retourner. Et moi depuis 6 ans, je survis. J’ai parfois l’impression d’être un poisson en dehors de l’eau, j’agonise et personne ne me remet à l’eau car y a que lui qui peut le faire.

- Et sinon Shen tu en penses quoi ? Me lance Lisa.

- Ah non tu ne recommences pas !

- Mais non dis moi juste ton avis dessus.

- Il est gentil.

- Et mignon, non ?

- Il est pas mal oui mais…non.

- Marie, faut que tu te remettes en selle là, tu vas finir par même plus savoir le faire. Dit Lisa en riant.

Je lui jette un coussin qu’elle me renvoie. Shen est un collègue, un éducateur qui m’apprécie beaucoup. Je sais que si je ne mettais pas des barrières on pourrait tenter quelque chose mais je ne peux pas.

- Peut être que pendant le camp…

- Lisa oublie ça toute de suite. Je serais en poste pour rappel.

- Ouais bah la nuit les gosses dorment.

- Moi aussi.

- Tu dormirais bien mieux après une séance de sexe.

Le sexe…mon addiction. Avoir des relations sexuelles serait comme proposer un rail de cocaïne à un drogué. Ça aggraverait plus qu’autre chose. Je suis condamnée à ne plus en avoir et me contenter de sextoy.

- Je ne peux pas Lisa.

- Ça fait 6 ans Marie, t’as le droit de te reconstruire.

- Je ne sais pas comment faire.

- Tu ne vas pas avoir le choix que de te pardonner ma belle et arrêter de culpabiliser. Ce n’est pas de ta faute ce qu’il s’est passé y a 6 ans Marielle.

Je me recroqueville sur moi-même rien que de repenser à ce qu’il s’est passé. Je n’ai pas eu qu’une seule relation sexuelle avec le proviseur mais plusieurs jusqu’à la validation de l’année, sans ça, à n’importe quel moment, il aurait pu refuser de reprendre Mick’. Il me tenait avec ça, et j’espérais que le sacrifice de mon corps, de ma dignité, allait me permettre d’avoir Mick’ auprès de moi l’année suivante. Combien de fois j’ai entendu cette voix abjecte me rappeler pourquoi je faisais ça.

« Pense à l’avenir de ton petit copain, allez cambre toi bien, tu vas voir ça va être bon »

Je rentrais chez moi, resserrant mon bas ventre pour ne pas sentir son sperme couler entre mes cuisses, puis j’allais sous la douche et me lavais. Même propre je me sentais sale, et à chaque fois qu’on m’appelait au bureau du proviseur, je savais ce qu’il m’attendait. Son regard satisfait d’avoir ce qu’il voulait, que je rapplique comme une bonne chienne qu’on siffle. Il ne prêtait pas attention à moi, il se servait de moi, m’obligeant parfois à le prendre trop loin en moi alors que mon corps était trop étroit pour supporter son sexe imposant. Si Mick’ faisait attention et respectait mon corps, l’autre s’en fichait et m’utilisait comme un objet. Il avait beau avoir l’âge d’un père, j’avais beau avoir à peine 19 ans, son seul but était de se finir en moi. Je ne le voulais pas en moi mais je ne disais rien, paralysée par le dégoût de nos corps imbriqués, par le goût de son sperme qui finissait parfois dans ma bouche, de son odeur que je traînais parfois une journée entière lorsqu’il me faisait venir très tôt le matin pour que je rattrape mon retard. Seulement il ne parlait pas de retard scolaire mais sexuel, à 19 ans, il était temps d’après lui de me prendre en main. Il mettait un point d’honneur à me montrer ce qu’un homme expérimenté pouvait apporter à une gamine comme moi.

« allez soulève bien ton bassin, ondule bien tes hanches, tu vois quand tu veux, tu peux me prendre complètement en toi, ton mec sera content de te récupérer expérimentée tu verras »

A chaque fois que je sentais ses testicules claquer contre moi, je demandais pardon à Mick’, chaque larmes que j’épongeais, chaque douleurs que je supportais, chaque fois que je vomissais mon écœurement, chaque fois que j’agrippais ce bureau comme si ma vie en dépendait, je pensais à Mick’, à nous. Alors quand Mick’ m’a appris vouloir partir de la France, j’ai compris que tous mes efforts n’avaient servi à rien. Que je couchais avec cet homme pour rien. Tout s’est effondré et moi avec. J’étais désormais seule face à ma vie, à mes responsabilités. Je voyais Julie rire dans les bras de Jack alors que Mick’ ne voulait plus de moi. J’ai rien dis à personne, trop honteuse d’avoir cru en quelque chose qui n’existait pas. En sortant de chez Mick’ j’étais plus la même, je me suis enfermée chez moi, j’ai refusé de répondre au téléphone, j’ai refusé qu’on vienne me voir, j’ai fermé ma vie à double tour. Heureusement que j’ai croisé Lisa, sans elle, je crois que je ne serais plus là.

- Allez faut dormir Marie. Me dit-elle

J’ai pu m’endormir sans me faire du mal en me faisant du bien. J’ai pu reprendre le fil de ma vie et organiser le camp d’été pour nos jeunes. Des jeunes qui comme moi ont besoin qu’on les soutienne. Je fais vraiment le plus beau métier du monde.

- Bon alors faut qu’on prépare les affaires du camp. Du coup on a dit qu’on prenait 8 filles et 8 garçons.

- Ca serait bien qu’on prenne Lucas, ça mettrait un peu de distance avec Laurine. Dis-je

- Il va péter un plomb et voudra jamais partir loin d’elle. Tu te rappelles la dernière fois, il a fugué, on a du appeler les flics pour le retrouver. La galère quoi.

- Ouais mais elle en a vraiment besoin. Elle est en début de grossesse, il lui faut du calme.

- Ok, donc on prend Lucas. J’avais pensé aussi à Hugo, vous en pensez quoi ? Dit ma collègue

- Trop instable, je ne prends pas le risque de le laisser sortir. Dit son éducateur.

Hugo est un enfant de 9 ans…il est avec nous depuis ses 7 ans après que le juge pour enfant l’ai placé chez nous car y a plus de place dans l’hôpital pedo psychiatrique. Ce gosse me fout froid dans le dos. Faut dire que son histoire est…flippante. Il a été retrouvé dans sa maison a coté du corps de ses parents et de sa petite sœur qu’il a poignardés. Il jouait avec les organes de ses parents quand la police est arrivée. Il est diagnostiqué psychopathe, il a absolument aucun remord et quand il parle de ce qu’il a fait, on voit le plaisir qu’il a pris à faire ça. Non moi je ne veux pas faire de camps avec ce gosse.

- Karim ? Il est cool comme gosse lui.

- Ouais lui je veux bien. Dis-je plus sereine

Après deux heures de réunion, nous arrivons à faire la liste des participants de ce camp et à faire l’inventaire de ce qu’on aura besoin pour cette semaine.

- Et moi je peux venir ?

- Non ma puce, c’est à partir de 7 ans et t’en as que 6

- Ohhh s’il te plait !!!

- L’année prochaine, allez file, t’as rien à faire dans les bureaux toi.

On charge tout dans les minis bus et nous voilà parti avec 16 enfants/ado pour des aventures en pleine nature. Je n’aime pas partir loin de chez moi car ça me rappelle lorsque j’ai fuis ma vie y a 6 ans. J’ai besoin de repères désormais et les camps me les font perdre mais je dois apprendre à gérer ce genre de chose.

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