Chapitre 18 - Prédiction

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La blessure de la jeune femme avait presque disparue. Le prêtre qui s'en était occupé avait fait du bon travail. Il ne resterait plus qu'une légère cicatrice.

— Merci Valadir. J'espère que ce qu'il reste de douleur sera supportable.

Le jeune homme hocha la tête.

— Le plus dur est passé. Mais si vous sentez que ça ne va pas, n'hésitez pas un seul instant à revenir.

— Très bien.

Elle le remercia avant de sortir dans la cour. Le soleil allait bientôt disparaitre à l'horizon et Jaelith se demanda si elle devait retourner au donjon pour avoir une discussion avec Freyki. Elle savait que ce dernier était borné et qu'il ne plierait pas devant elle. Elle eut un pincement au cœur en repensant à une journée lointaine...

La jeune fille suivait son père à travers la grande rue du village. Elle observait les habitants avec curiosité. Elle ressentait que certains d'entre eux étaient différents. Garas était un village sans histoires, mais quelque chose lui semblait étrange. Jaelith se tourna vers son père.

Est ce que c'est normal que je ressente autant de puissance dans cet endroit ?

Jaelen hocha la tête, un léger sourire sur les lèvres.

Parmi les humains que tu peux côtoyer ici, certains sont des dragons.

Des dragons ?

Oui... Ils reviennent ici de temps à autre pour réunir leurs clans.

Et tu as déjà vu des dragons ?

La jeune fille attendait une réponse, les yeux remplis de curiosité.

Bien entendu. Je me suis même lié d'amitié avec certains d'entre eux. Je n'arrive toujours pas à comprendre pourquoi les elfes les haïssent tant.

Parce qu'ils ont peur ?

L'elfe haussa les épaules.

Peut être... Mon peuple n'est pas vraiment ouvert.

C'est pour cela que tu es parti ?

C'est une des raisons.

Jaelith n'avait que seize printemps. Pourtant, elle était avide de connaissances et son père avait bien du mal à la freiner lorsqu'elle entrait dans une bibliothèque. Mais cette fois-ci, ce n'étaient pas les livres qui l'attiraient. C'était autre chose.

La dame aux longs cheveux blancs était assise en tailleur à même le sol, à l'ombre d'un mur. Un voile couvrait son visage. D'une main, elle fit signe à la jeune elfe de s'approcher.

Tu es spéciale mon enfant.

Jaelith la salua brièvement, mais la femme lui attrapa la main.

Attends... Laisse-moi lire ton avenir... Il a l'air intéressant.

La jeune fille tourna la tête vers son père qui hocha légèrement la tête. La femme chantonna dans une langue qu'elle ne comprenait pas, et au bout de quelques minutes, elle lâcha la main.

L'avenir qui t'attend est semé d'embûches jeune fille. Je vois beaucoup de combats, un terrible dragon noir qui met le monde à feu et à sang... Un autre dragon sera ton protecteur.

Elle reprenait son souffle avant de continuer :

Une grande forêt. Des elfes derrière toi. Un grand démon venu de la fin fond des ténèbres de la déesse Hel en personne. Et un homme prêt à mourir pour toi.

Un homme ?

La petite voix de Jaelith tremblait. La femme continua

Un homme à qui tu briseras le cœur. A tout jamais. La souffrance, et la mort.

Jaelith sentit son cœur se serrer. Elle avait parlé de cette prédiction à Freyki, mais il s'en fichait complètement. Sans faire attention, elle avait pris le chemin du donjon, par habitude. Elle salua les gardes qui se trouvaient là puis se rendit dans sa chambre. Dans leur chambre. Le souverain ne s'y trouvait pas. La jeune femme en profita pour se laver et se changer. Alors qu'elle passait une tunique propre, elle observait la nouvelle blessure qui s'était ajoutée aujourd'hui. Elle souffrait beaucoup moins, Valadir avait fait du bon travail. Son regard se tourna vers le balcon et elle s'y rendit, observant la cité sur laquelle le soleil se couchait. Elle respira un grand bol d'air frais et se sentit mieux. Jaelith resta pendant de longues minutes au balcon, les yeux perdus dans le vague. Quelqu'un ouvrit la porte de la chambre et elle se retourna. C'était Freyki. Il semblait enfin calmé. En voyant sa compagne, il demanda d'une voix surprise :

— Cela fait longtemps que tu es là ?

Elle secoua la tête.

— Pas vraiment. J'appréciais un peu d'air frais au balcon.

L'homme à la cicatrice s'approcha d'elle, l'air gêné. Il se gratta la tête et s'excusa d'un air penaud.

— Je suis désolé pour ce matin.

— Tu as failli tuer un apprenti paladin.

— Je sais... Je me suis emporté.

Elle soupira avant de la prendre dans les bras comme elle le ferait avec un enfant. Ils restèrent dans cette position quelques instants avant quelle souverain ne se recule pour mieux la regarder dans les yeux.

— Jaelith... Je pense que tu ne te rends pas compte à quel point je t'aime.

— Si. C'est même ce qui me fais peur.

Freyki allait ouvrir la bouche pour répliquer, mais elle continua.

— Je sais qu'il est plaisant de savoir que celui que j'aime serait prêt à tuer quiconque me déplairait, mais moi... Ça ne me plait pas. Pas du tout. Un jour, cet amour causera ta perte...

— Tu repenses à cette prédiction idiote ? Depuis le temps que tu me connais, tu devrais savoir que je suis prêt à prendre ce risque. Mourir pour toi serait la plus belle des morts. Ce serait préférable à une vie sans toi.

Décidément, l'homme qu'elle avait choisi d'aimer était aussi têtu qu'elle. Elle haussa les épaules avant de s'allonger dans le lit.

— Est-ce que tout va bien Jaelith ?

— Je suis juste fatigué. Dormir un peu plus tôt me fera le plus grand bien.

Elle courait à en perdre haleine. Le couloir ne semblait pas avoir de fin. Ses mains tenaient fermement deux adolescents. A sa gauche, il y avait une jeune fille qui lui ressemblait un peu et dont le regard était remplit de peur. A sa droite se trouvait un jeune garçon aux cheveux noirs. Ses deux grands yeux bleus étaient remplis de larmes. Jaelith s'entendit crier :

Plus vite ! Courez plus vite sinon il va nous rattraper !

La peur lui dévorait le cœur. Soudain, le garçon lâcha sa main. Elle se retourna pour le voir tomber à terre. Derrière lui, quelqu'un arrivait. C'était un loup. Un énorme loup à la fourrure épaisse et noire comme le plumage d'un corbeau. Il s'était jeté sur le jeune garçon et l'avait déchiré en deux sans qu'elle ne puisse réagir. Jaelith hurla, tout comme la jeune fille qui était en larmes. Le loup s'approchait d'elles, et elle le détailla de plus près. Une immense cicatrice lui barrait le museau. Il ouvrit la gueule et se jeta sur elle.

Jaelith se réveilla en sursaut. Cela faisait plusieurs jours que le même cauchemar revenait la hanter. Elle ne comprenait pas la signification de ses rêves, mais elle savait qu’ils étaient importants. Et celui-ci était particulièrement ignoble. Elle se leva rapidement, s’habilla, puis se dirigea vers la fenêtre. Dehors, l’air d’automne était frais, et elle se sentit mieux.

— Tu as encore fais un cauchemar ?

La jeune femme se retourna. Dans l’encadrement de la porte se tenait Freyki. Ce dernier lui lança un large sourire.

— Ce n’est rien… Juste un mauvais rêve. Cesse de t’inquiéter pour moi comme si je n’étais qu’une enfant !

— Tu as toi-même dis qu’il fallait que tu fasses attention à tes rêves.

— Je sais, mais… Si à chaque fois que je rêve de la fin du monde, cela doit arriver, alors la cité aurait été anéantie des centaines de fois.

Le regard de Jaelith se tourna vers l’extérieur. Dehors, tout était calme. Le soleil brillait malgré la fraicheur du vent. Quelque chose n'allait pas pourtant. La jeune femme avait un très mauvais pressentiment.

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