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Décidément c’est la journée des visites surprises, tout au moins de ce matin.

J’étais en train de penser à l’histoire du professeur foldingue, et je suis désolé pour lui, mais ce n’est pas mon problème, quelqu’un entre dans la chambre, elle n’a pas dû frapper ou je n’ai pas entendu, au début, je pense que c’est pour débrasser, mais c’est mon infirmière habituelle, elle porte déjà un plateau de métal, j’aperçois un chariot de soin juste devant la porte.

« Bonjour jeune homme, vous avez bien dormi, je viens pour la pommade. »

« Bonjour, la pommade, quelle pommade ? »

Elle pose son plateau sur la table et rajuste ses gants, je la vois qui coupe avec des ciseaux des enveloppes transparentes, je ne sais pas ce que c’est.

« Il ne vous a rien dit ? Je l’ai croisé dans le couloir tout à l’heure, je pensais qu’il venait de chez vous. »

« Mais vous parlez de qui, du docteur ? »

« Oui bien sur, c’est lui qui va vous suivre tout à l’heure dans la salle, ce n’est pas vraiment important, mais il aurait dû vous le dire. Vous vous êtes lavé ce matin ? »

« Non, pas encore, mais c’est quoi cette pommade ? »

« Bon, je vais vous expliquer alors, je dois étaler un produit anesthésiant et poser un patch transdermique pour garder l’endroit propre. Juste avant l’examen, on doit vous injecter un produit de contraste pour mieux voir dans la colonne vertébrale au niveau de votre ancienne blessure. Ne soyez pas inquiet, c’est vraiment rien du tout, mais il aurait dû vous le dire. »

« Je n’ai pas tout compris, ça veut dire quoi ? On va me faire des piqûres ? »

« Une seule, mais vous ne sentirez rien, ils vont juste injecter un produit à base de gadolinium, c’est de l’eau pour faire simple, c’est-à-dire qu’ils vont beaucoup mieux voir sur l’écran votre ancienne blessure, vous voyez ce n'est rien du tout. Par contre, ne vous lavez pas le dos dès que je vais étaler le produit. Penchez-vous s’il vous plaît, et levez votre pyjama dans le dos, ça devrait être à la bonne température. »

Je sens un liquide gras dès que je me suis penché, ce n’est pas vraiment froid, mais la sensation du produit dans le dos me chatouille légèrement.

« Vous vous êtes trompé, c’est plus haut que j’ai été blessé. »

« Non, non, ne vous inquiétez pas, ils vont faire une toute petite piqûre ici, et ça va s’étaler tout le long. Voilà, c’est fini, on viendra vous chercher d’ici une demi-heure, dans un fauteuil roulant. »

« Ah bon ? Mais je marche avec des béquilles, ça va aller. »

Elle remballe ses outils et ses gants, enferme le tout dans une poche qu’elle met dans une autre petit sac, il ne reste plus rien de visible.

« Oui, je sais, mais ça n’a rien à voir, vous devrez rester sans bouger pas loin d’une petite heure, et je sais que certains ont des fourmis partout à rester immobiles, pour une fois qu’on vous conduit, vous n'aurez rien à faire, vous aurez droit à un chauffeur. »

Comme c’est devenu la journée du grand chambardement, je suis allé me laver les dents dès qu’elle est partie, un petit coup sur le visage et j’ai tenté de voir dans le miroir ce que j’avais dans le dos. Pas grand-chose à vrai dire, un carré de pansement presque sur le bas du dos et j’avais l’impression que la crème étalée luisait sous l’éclairage, rien de sensationnel en fin de compte, par contre elle ne m’a pas dit si je devais m’habiller ou rester en pyjama, dans le doute je reste comme je suis. Je me déplace le dos creusé, comme si j’avais trop mangé, je n’ose pas faire frotter la veste sur le produit, je ne sais pas quoi faire en attendant. Je me redresse par petites touches pour voir si rien ne colle, pas vraiment concluant, je tire sur le vêtement pour qu’il frotte, je n’ose pas mettre mes doigts, au final je m’appuie sur l’angle de la porte et je pousse le tissu, j’ai une drôle d’impression, tout en haut et plus bas, je sens bien la pression, mais juste sur le pansement je ne sens pas grand-chose, c’est vraiment marrant ce truc.

Il me reste plus qu’à attendre mon chauffeur attitré avec le véhicule, je n’ai jamais été dans un fauteuil roulant, encore un truc nouveau.

Deux petits coups à la porte, j’étais en train d’ouvrir l’écran de mon ordinateur, je ne prends même pas le temps de me retourner, je réponds juste oui, de toute façon ils entrent comme ils veulent, il n’y a jamais eu de serrure sur la porte, ce doit être mon chauffeur de taxi.

« Et alors, on me tourne le dos, on fait encore la gueule ? »

« Maman ? Je croyais que tu ne pouvais pas venir. »

Le temps que je me lève, elle est déjà sur moi et m’embrasse sur le nez, j’ai dû bouger trop vite quand j’ai entendu sa voix, elle a raté le front.

« Toi, tu ne lis pas tes messages, et j’ai pris le sac cette fois-ci. »

Qu’elle se met en devoir de ranger dans le petit placard tout en vidant et rangeant des affaires à boire et à manger.

Je la regarde faire, trop content qu’elle soit là avec moi, je n’ai encore rien dit, je suis vraiment content. Elle fouille dans son sac, en ressort un billet, qu’elle met dans le tiroir attitré tout en me le montrant.

« Ne va pas faire de folies avec ça, et tu me montres les factures. »

Elle s’approche de moi avec un grand sourire, cette fois elle a touché le front d’un tout petit baiser, en me plaquant sur elle.

« Si tu prenais le temps de lire au lieu de regarder la télé, tu saurais que Jérôme m’a libéré ce matin, je n’allais sûrement pas te laisser jouer avec du matériel tout seul dans ton coin. »

Tout en baissant le ton :

« Et je ne vais pas laisser mon seul fils découpé en rondelles pour le bien de la science. »

« Maman, c’est pas marrant, c’est juste pour vérifier que je n’ai plus rien, comme ça je peux sortir très vite. »

« Je sais, je sais, c’est une blague, tu as vraiment le sens de l’humour de ton père. Bon, on attend quoi, qu’est-ce qu’on t’a dit ? »

Je m’assieds sur le lit, elle s’installe sur le fauteuil et le tourne pour me faire face.

« On va me faire une radio, et me mettre un liquide pour mieux voir, c’est tout ce que j’ai compris. Je croyais tout à l’heure qu’on venait me chercher. Ah si, je vais être sur un fauteuil roulant pour pas me fatiguer . »

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