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J’ai résumé au mieux le peu que j’ai compris, j’ai montré le pansement, je lui ai demandé d’appuyer, je ne sentais plus rien, elle a touché plus loin pour faire la différence, j’ai senti un doigt froid ça m’a fait sursauter, hormis la sensation, je suis en train de penser que si jamais ils mettent une grosse aiguille, je ne sentirais rien, mais je n’ai pas osé le dire.

Des petits coups à la porte, un infirmier entre en poussant un fauteuil roulant tout gris et moche comme tout. Après nous avoir dit bonjour, il me demande de m’installer et si je veux prendre une petite couverture pour les jambes, je n’en vois pas l’utilité, je m’assieds tout content de passer pour un grand malade, et je le laisse nous conduire à l’étage inférieur, ma mère nous suit derrière, elle a tenté un moment de mener le fauteuil, aussi amusée que moi par ce nouveau jouet, elle me sentait sans doute un tout petit peu stressé et voulait me détendre, j’avais laissé mes bras appuyés sur les accoudoirs et tentais de comprendre comment tourner les roues, on a rasé un mur, tapé sur le côté de la porte d’ascenseur, j’ai vite rentré les mains, elle a rendu les poignées au professionnel de la chose, mais on a bien rigolé, je la soupçonne d’ailleurs de l’avoir fait exprès.

Une grande porte devant nous, une lampe rouge et une lampe verte allumée placés juste au-dessus, un drôle d’auto-collant placé en plein milieu, l’infirmier appuie sur une sonnette, on entre dans une pièce avec plusieurs écrans, une personne est en face assise sur un fauteuil, il tape sur un clavier face à une grande vitre, on dirait un petit vaisseau spatial juste derrière, j’ai l’impression d’entrer dans un film de science-fiction, mais je redescends vite quand je vois le professeur foldingue qui parle avec une infirmière juste derrière l’espèce de capsule. Je reconnais celui qui est venu me parler de la séance d’IRM, il se lève et se dirige vers nous, il nous serre la main, deux mots à l’infirmier qui repart et referme la porte.

« On va commencer dans peu de temps. Vous n’avez pas de bijoux ou de choses métalliques, j’ai déjà dû vous en parler, mais un petit rappel quelquefois on oublie. »

Maman me regarde en souriant, elle sait que j’ai horreur de ça.

« Non, non, je n’ai rien. »

« Bien, si vous avez besoin d’aller aux toilettes, prenez vos précautions, ça risque de durer un peu. »

« Non merci, ça va bien, mais combien de temps ça va prendre ? »

« Entre trois quarts d’heure et une heure. Bien, j’appelle le professeur et l’infirmière, ils vont vous expliquer pour vous installer. »

Il se tourne vers son clavier, appuie sur une touche et parle dans un micro.

« Professeur, mademoiselle, on vous attend, le jeune homme est ici. »

« Bonjour madame, ça risque d’être un peu long, prenez la chaise là-bas, vous pourrez tout voir à travers la vitre, quoique je vous rassure, il ne se passe pas grand-chose, je vous emprunte votre fils, on va le préparer dans la salle. »

En s’adressant à moi.

« Vous venez avec nous s’il vous plaît, l’infirmière va s’occuper de vous. »

Je suis assis sur une chaise à côté de la machine, un peu intimidé, de temps en temps je me tourne vers la vitre pour voir si ma mère me regarde. Je serre un peu les dents, mais ça ne sert à rien, quand on me fait pencher, je n’ai pas senti la piqûre. L’infirmière me demande si je veux mettre des bouchons d’oreilles, je lui réponds que non, à vrai dire, j’ai répondu au hasard, je suis plus inquiet de voir le lit coulissant et le tunnel ou il va m’amener. Une fois avec leur aide, installé sur le dos, ils m’expliquent que j’ai deux boutons à portée de mes mains, sur la droite et la gauche, à ne manipuler que si je sens un problème, ils rapprochent deux coussins qui doivent m’empêcher de remuer la tête, et me disent de ne surtout pas bouger même si ça semble long, j’entends un bourdonnement, je suis seul dans la salle je regarde le plafond, je rentre dans le tube des lumières clignottent, tout le bruit devient grave, mes tempes battent en cadence et je ferme les yeux.

« Jeune homme, jeune homme. »

Je sens qu’on me secoue, j’ai dû m’endormir profondément, j’ai du mal, j’ouvre péniblement je rassemble mes idées, je ne sais pas ou je suis, ah si, tout me revient d’un coup, trois têtes autour de moi.

« Maman, tu es là? »

« Je suis là mon chéri, juste à côté de toi. »

C’est le radiologue qui reprend la parole, je reconnais sa voix.

« Et bien dites donc jeune homme, on ne me l’avait jamais faite celle-là, c’est bien la première fois que je vois quelqu’un dormir dans ma machine, il faut un début à tout. Si vous pouvez vous lever, on va vous installer sur le fauteuil, pour ma part c’est fini, on va finir de regarder votre scanner, le professeur vous donnera les résultats définitifs, pour ma part, il n’y a rien de spécial, vous pouvez y aller. »

Le chauffeur du fauteuil est venu prendre son rôle, je me tourne de côté juste avant de partir, mais déjà ils ne me regardent plus, l’infirmière est en train d’essuyer là ou j’étais couché, les deux autres semblent en grande discussion, en pointant par moment des choses sur les écrans, ma vision s’arrête là, j'ai eu un temps de vide pendant tout l'examen je n'ai aucuns souvenirs.

Maman est restée avec moi toute l’après-midi, on est descendu manger au fast-food du patio, je l’ai fait rigoler quand j’ai tendu le bras comme pour serrer une main en tenant une feuille d’un arbuste, en lui disant au revoir à la fin du repas, tout allait pour le mieux quand on est revenu dans la chambre.

La présence du professeur foldingue n’a pu nous dérider quand il est arrivé quelques minutes après un dossier sous le bras.

« Je pense que vous n’allez plus beaucoup me croiser maintenant, vos résultats sont apparus corrects sur l’imagerie IRM, vous devrez sans doute nous quitter dès la semaine prochaine, je vous ai d’ailleurs amené les photos, ce sera un mauvais souvenir à oublier. »

Maman prend le dossier qu’il lui tend, l’ouvre et regarde des images de mon intérieur.

« Le petit éclat est toujours présent, tenez je vous le montre, mais il aurait dû se diluer sans doute dans l’avenir. Par contre, vous remarquerez une zone plus claire qui le relie à la base de l’encéphale, un défaut du produit qui s’est mal réparti d’après mon collègue. Quoi qu’il en soit, n’hésitez à revenir vers nous si vous sentez quelque chose qui ne va pas, je serais toujours à votre disposition. Jeune homme, pensez bien à grandir, vous êtes en bon chemin maintenant, vous verrez que plus tard le monde est compliqué, soyez une bonne personne, rêver de choses d’enfants ça ne doit pas faire de mal. »

Nous avons attendu qu’il se soit éloigné plus loin dans le couloir, maman regardait le dossier, je ne sais pas ce qu’elle voyait, elle relève la tête et se met à éclater de dire.

« Tu as raison mon chéri, j’ai eu du mal à me retenir, il n’est pas vraiment normal, mais c’est bientôt fini. Bon, il va falloir préparer ton déménagement, tu as entassé tellement de choses. Je viendrais avec des sacs la prochaine fois, on va vider par petits tas. Il faudra que je demande quand tu pourras partir, je vais demander à ta sœur de m’aider. »

Elle m’a embrassé sur le front, comme à son habitude, juste avant de partir, je n’ai pas vraiment ri, un semblant de grimace, je repars dans le monde, j’ai un super pouvoir.

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