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Cinq minutes qu’il patauge, j’entends ses frappes nerveuses sur les touches du clavier.

Le docteur qui s’est mis en retrait, s’approche de l’infirmier, j’entends comme étouffé le son de leurs voix, ce casque isole vraiment.

« Et alors ? Il se passe quoi ? Vous y arrivez? »

Je vois sur son visage un peu de nervosité, ils regardent tous les deux quelque chose à l’écran, je ne peux pas savoir, je suis à l’opposé.

« Regardez, on voit bien les graphiques, mais on dirait que le signal ne passe pas dans le casque, je ne comprends pas, ça marchait tout à l’heure. Je vais faire quelques tests, ça devrait aller vite. »

« Bon, je vous laisse quelques secondes, dépêchez-vous je reviens de suite, un coup de fil à passer. »

Sur ce, il part dans le couloir, je crois qu’il a claqué la porte, parce que j’ai entendu un peu de bruit. L’infirmier continue de s’activer, je le vois tourner et retourner autour du boîtier principal, de temps en temps il se tourne vers moi attendant une réponse autre que négative, et il se penche de nouveau sur son appareillage, refrappe sur le clavier, j’ai même vu un moment, un peu d’énervement, donner un petit coup sur son ordinateur, c’est sûr que ça va aider. Je suis toujours assis, mais je commence à m’ennuyer, je lui dirais bien de revenir une autre fois, mais ce n’est pas mon rôle, et puis l’autre devrait avoir fini son appel.

« Je ne comprends pas, c’est quoi ce truc ? Ça marchait y a une heure. Tu vas te débloquer connasse. »

je commence à sourire, un peu d’amusement, il est en train d’insulter sa machine, de là à ce qu’elle lui réponde, j’esquisse un léger sourire que je réfrène, je n’ai pas envie qu’il croit que me moque de lui. Justement il est en train de me regarder, il ne demande rien, je crois qu’il réfléchit.

« Ne bougez pas, je vais débrancher la prise et tout relancer. »

Il s’approche de la prise murale qu’il avait utilisée auparavant en entrant, il tire d’un coup sec attend quelques secondes et rebranche son cordon.

Rien ne se passe au début, j’entends un craquement comme une radio qui perd sa station, un long chuintement comme un son qui vient de loin, je me concentre, cherchant le moindre bruit parce que c’est le silence, d’un seul coup, comme un son, une grande vibration, quelque chose de si bas, quelque chose de si fort, rien ne vient de mon casque, pas dans les écouteurs mais en plein dans la tête, je suis tellement surpris que je tombe de la chaise, je me mets à crier.

L’infirmier se précipite vers moi, je ne vois rien, j’ai tout lâché, je sens ses mains qui enlèvent les lunettes et le casque, pousse la chaise et m’installe sur le lit, j’entends la porte qui s’ouvre, la voix du professeur, des pas qui viennent vers moi.

« Qu’est-ce qu’il s’est passé ? Pourquoi il a crié ? Allez dans le couloir chercher une infirmière, bougez-vous ! »

Il est en train de me tenir le poignet, je crois qu’il mesure mon pouls, il sort de sa poche un stylo qu’il pointe sur mes yeux et une raie de lumière m’inonde.

« Que s’est-il passé mon garçon, comment vous êtes tombé ? »

« Je ne sais pas trop, il a branché sa machine, et d’un seul coup le son était très fort, j’ai juste été surpris. »

« Bien, bien, vous allez bien, juste un peu choqué par la chute sans doute, votre circulation est un peu rapide. Vous avez mal quelque part ? »

« Rien du tout, je suis tombé c’est tout. »

C’est vrai que j’allais bien, mais je le retiens l’autre avec ses prises de courant, il m’a fait une peur, et c’est à ce moment qu’il entre dans la chambre avec une infirmière.

« Vous pouvez y aller mademoiselle, je suis désolé, une simple chute sans gravité. »

S’adressant à l’infirmier, qui se faisait tout petit derrière son écran.

« Mais qu’est ce qui vous à pris, le matériel est défectueux ? Vous ne pouviez pas faire attention ? »

Les mains posées sur son clavier, il devait sans doute chercher les causes de la défaillance de son ordinateur, il n’avait pas l’air d’écouter.

« Venez voir professeur, j’ai un drôle de truc à l’écran. »

Je ne vois plus entièrement leurs visages, ils ont les yeux rivés sur quelque chose que je ne vois pas.

« Et alors ? Je ne vois rien, expliquez-moi. »

« Regardez ce graphique inversé, le programme a généré des ondes Delta de très basse fréquences, quelque chose de complètement inaudible pour l’oreille humaine, et regardez en dessous, le casque n’était pas capable de les recevoir. Je ne sais pas ce qu’il s’est passé, je ne comprends pas. »

Une tête se soulève au-dessus de l’écran, je vois le professeur qui me regarde et ses yeux qui se plissent, je détourne le regard il va falloir que je trouve quelque chose pour qu’il me foute la paix, je ne suis qu'un enfant. Quelque chose dont je me souviens maintenant, je savais que j’avais déjà entendu cette voix. Quand l’infirmier s’est penché vers moi, j’ai vu son nom sur la blouse, Michel Mallard le musicien apprenti, encore un autre qui dort pendant le travail. Mon ordinateur commence à s’étoffer de notes et de visages.

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