Ne rien faire, ne rien dire.

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J’ai envie de partir, je sais qu’il ne faut pas, je m’ennuie à mourir, juste un tout petit peu mais je ne ferais rien, je reste autour de moi. Quelques tourbillons sombres, d’autres beaucoup plus clairs qui se bougent près de moi. Je ne sais pas vraiment me situer mais si je pars en face, je sais que c’est le couloir ou ça remue le plus, et quelques sombres à droite et à gauche de ma chambre, des malades sans doute endormis. Je m’approche de certains, je tourne autour, je n’ose pas, mes battements accélèrent mais pas trop, je vais juste regarder mais je ne touche à rien. Complètement à gauche, j’avance doucement, tout est sombre dedans, je ne sens ni couleur, je n’entends pas de sons, je ressors tout de suite je ne sais pas quoi faire je crois que je connais. Je pénètre de nouveau, rien ne bouge, j’ose une légère lumière, pas plus de résultat je suis prêt à m’enfuir, je ressens quelque chose dès que j’ai éclairé, c’est léger très léger je n’arrive pas à définir, je ne vois rien du tout, on dirait un bruit d’eau qui arrive par vagues. J’essaie de bien comprendre, j’ai vraiment du mal mais je ne bouge pas, toujours prêt à m’enfuir. On dirait de la tristesse, je viens de comprendre, ce n’est pas de l’eau, mais des pleurs que j’entends et je ne vois toujours rien. Je me retire d’un coup, tout s’est teinté de blanc, je suis tellement surpris que je sens mon corps qui se crispe quand je reviens, j’entends des pas rapides qui courent dans le couloir, j’ouvre légèrement les yeux croyant que c’est pour moi, ils ne font que passer.

Je suis en train de réfléchir à ce qui c’est passé, drôle de rêve que celui dont je viens, on dirait un espace vide qui ne s’anime que quand je fais quelque chose, je n’arrive pas à comprendre cet endroit. Quelques coups à la porte, je ne l’ai pas vu arriver tout à ma réflexion, elle ne fait qu’entrebâiller.

« Vous allez bien ? Il y a eu un petit pic sur nos écrans tout à l’heure, mais je vois que vous ne dormez pas. »

« Tant que vous êtes là, j’ai entendu courir dans le couloir, il y a eu quelque chose ? »

Elle regarde derrière et pénètre complètement, je ne voyais que le haut de son corps, et referme la porte.

« Juste un petit souci avec un malade, quelques portes plus loin. Il était en train de rejeter son respirateur, ce n’est pas ordinaire, on a cru que l’assistance tombait en panne, mais tout est revenu à la normale. »

« C’est quoi un respirateur, je ne comprends pas ? »

« Un appareil qui aide ceux qui ne savent plus, ou ne peuvent plus. Quelques chambres plus loin, un jeune a subi un grave accident de circulation, il est dans le coma, son cerveau ne commande plus rien, cela l’aide à respirer, c’est vraiment triste, ça me fait de la peine à son âge. »

« Comme moi après l’opération ? J’ai eu ça aussi ? »

« Pas tout à fait, vous étiez en coma artificiel, on a dû vous l’expliquer. »

« Je ne comprends pas tout, j’étais dans le coma ou pas ? »

Je vois qu’elle cherche ses mots, j’ai l’impression qu’elle veut s’arrêter là.

« Je ne sais pas trop comment vous dire. Pendant votre opération et après, votre cerveau continuait à commander toutes vos fonctions basiques, comme respirer ou faire circuler le sang, il y avait toujours quelque chose pour surveiller au cas où, on vous a juste endormi profondément pour que vous puissiez vous reposer. Lui, le pauvre, il ne commande plus rien, il est entouré de machine pour l’aider. Bon, je vous laisse, ne dites rien à personne je pourrais me faire gronder de vous avoir raconté tout ça. Passez une bonne nuit. »

Je n’ai compris qu’à moitié quand elle referme la porte, il faudra que je pense à interroger mon ami Google sur le mot coma. Il est encore tôt, je n’ai pas envie de dormir je repense à ce rêve vide qui ne bouge que si je fais quelque chose, ça n’a pas l’air dangereux, juste un peu surprenant, il faut que j’essaie de savoir ce qui se passe, je pourrais en trouver d’autres ailleurs. Je maîtrise bien mon corps maintenant, je suis à son écoute, je sais quand il a mal, je n’irais pas au-delà, et je pars vers la gauche, je sais ou je dois aller. Je suis sûr que c’est là, pourtant je vois deux cônes de couleurs différentes, le rouge impénétrable, je ne peux rien y faire, je me glisse légèrement dans celui du rêveur pour vérifier que je ne me suis pas trompé. Tout est vide, tout est sombre, donc il y a quelqu’un en plus d’éveillé à côté, je suis au bon endroit.

Ne pas bouger, ne rien faire, ça me donne l’impression de regarder par un trou de serrure. Je tourne tout autour, je tente en plusieurs points de scruter l’intérieur, j’ose même le traverser de paroi de néant en paroi de néant, rien n’y fait rien ne bouge, je m’avance au milieu, je suis prêt à sortir si jamais, rien de rien, pas de sons pas d’images. Je repars sur le bord, il faut que je le fasse bouger pour comprendre, j’ose comme la dernière fois une toute petite lumière mais cette fois je regarde et j’essaie de comprendre. Une grande lumière, plutôt comme un éclair illumine tout le centre, ça dure quelques secondes et je n’ai pas bougé je reste à regarder. D’un seul coup la carcasse d’une voiture, je l’avais déjà vue, apparaît en son centre et j’entends comme un pleur, je ne vais pas rester ce rêve me rend triste, si c’est ça un cauchemar je ne vais pas aimer, je regagne mon corps, je me sens un peu las, j’entends comme dans un songe quelques piétinements, je crois que mes yeux pleurent, je crois que je m’endors.

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