Chapitre 3

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C’est quand même fou ce qui peut se passer en l’espace d’une seconde, non ?
Bon, maintenant que tu sais, on peut passer à la suite, d’accord ? Parce que le monde ne s’arrêtera pas de tourner parce que deux zozos se foutent sur la tronche, on est d’accord.
Alors, voyons ce qu’ils deviennent, ces deux abrutis.

Pour l’instant, c’était le calme après la tempête. Il y avait bien encore un ou deux pots de peinture qui, après avoir longtemps hésité se décidèrent enfin à se jeter dans le vide, dans l’espoir fou de percuter le crâne de Raymond. A part ça, tout était redevenu calme après cet incroyable épisode de la Première Guerre Intergalactique du monde.
Raymond tenta maladroitement de se relever, empêtré dans les décombres épars des étagères en ruine. Il baignait dans une grosse flaque multicolore et visqueuse. Curieusement, et malgré les récentes péripéties de cette soirée dantesque, il avait toujours son Davidoff au clapoir.
Un peu chargé de pigments, certes, mais toujours vaillant !

Le vieillard tenta prudemment de se frayer un chemin dans le bordel. D’un coup de pied rageur, il éjecta un bidon qui lui barrait la route.

  • Alors, où qu’il est le cosmonaute de mes noix ? grommela-t-il d’une voix lourde de menaces.
  • Il est là et il t’emmerde, eh pomme à l’eau! rétorqua une voix un peu nasillarde, au fond de la cave.
  • Mais, tu comprends ce que j’dis ? s’étonna le vieil homme.
  • Qu’est-ce que tu crois ? On traverse pas la moitié de l’univers sans biscuit, sur ma planète !
  • Bon, alors qu’est-ce qu’on fait, maintenant que t’as pu juger de la puissance des armes terriennes ? renifla Raymond d’un ton lugubre.
  • Ben, je pense qu’on devrait s’asseoir autour d’une table et engager des négociations. Qu’en penses-tu ? répondit le scaphandre qui ressemblait à un hérisson avec tous ces clous plantés dans tous les sens.
  • M’ouais…faut voir, répondit ce vieux madré de Raymond. Qu’était-ce qui me dit que tu ne vas pas tenter de me fumer le dargeot pendant une seconde d’inattention ?
  • Le simple fait que mon lance torpille s’est cassé en deux pendant notre duel ! soupira E.T. avec regret, conscient de sa faiblesse.

En fait, aucun des deux n’avait compris qu’un simple concours de circonstances avait donné l’avantage au terrien. Toujours était-il que la paix galactique était temporairement préservée grâce à leur bêtise mutuelle.

  • Dis-donc, machin, comment ça se fait que t’es pas mort alors que ton enveloppe protectrice est percée comme le budget national ? remarqua Raymond en constatant une pluie de clous quand l’extra terrestre se redressa enfin.
  • Bah…attends…j’vais t’dire ça tout de suite. Le temps de consulter mon renifleur cosmogonique interconique à translateur vertico spatial…
  • Ton quoi ? s’étonna le retraité
  • Mon bordel qui mesure l’atmosphère des planètes de merde que je dois me fader à longueur de siècle, eh patate ! rétorqua l’étranger.
  • Fais gaffe à ce que tu dis, bout de zan, sinon je remets le couvert ! menaça Raymond qui n’appréciait pas le ton un peu désinvolte de son ennemi.
  • Ok, ok ! Te fâche pas, camarade, j’suis un peu fatigué, ces jours-ci, répondit l’autre d’un ton soudain radouci.

Tel Buzz l’Eclair qui s’adressait à son improbable base spatiale, l’inconnu consulta un cadran fixé sur son avant-bras gauche. Et ceci fit encore tiquer Raymond.

  • Dis-donc, t’as l’air de vachement ressembler aux terriens, quand même ! T’as une tête, des bras, deux jambes, le tout relié à un tronc qui ressemble beaucoup à celui d’un habitant de cette planète…
  • C’est vrai que c’est pas faux, ce que tu me chantes là, dis-donc, constata l’autre avec étonnement.

Finalement, après quelques bruits étranges, l’avant bras de l’autre éjecta un petit morceau de papier avec de curieux glyphes inscrits sur le recto.

  • Ben…apparemment, constata le mec venu d’ailleurs, ton atmosphère ressemble trait pour trait à la mienne ! C’est cool ! J’vais pouvoir me défaire de cette enveloppe inconfortable et…
  • Bouge pas, connard ! hurla soudain Raymond. Si tu bouges une oreille, je te fume comme un jambon !

Terrorisé par la véhémente menace de son opposé, le scaphandre se figea instantanément. L’avant bras continuait de débiter du papier et une longue guirlande torsadée ne tarda pas à toucher le sol.

  • Arrête-moi tout de suite ton bordel, machin ! J’aime pas que tu pourrisses ma cave avec tes poubelles !
  • Reste calme, camarade, c’est mon analyseur, c’est tout. Est-ce que tu veux bien que je retire mon scaphandre, étant donné qu’il ne me sert plus à rien ? demanda doucement le visiteur de l’espace.
  • Ok... Mais si tu fais l’ombre d'un geste suspect, je te troue la paillasse, c’est clair ? rétorqua Raymond
  • Clair et net ! Je vais le faire doucement, ça te va ?
  • Va-y mais n’oublies pas que je te surveille comme le lait sur le feu !
  • De quoi ? demanda l’autre, incapable de comprendre une telle expression, typiquement française.

L’armure spatiale tomba petit à petit sur le sol, découvrant le corps du visiteur. Ca fit un drôle d’effet à Raymond qui se trouvait, malgré tout, un peu gêné d’assister au décarpillage prudent de son adversaire.

  • Dis-donc, c’est quoi ton nom ? demande le vieux pour briser le silence.
  • Ceux de ma planète m’appellent Conardus Junior, fils de Conardus Sénior, lui-même fils de Pûthe.
  • T’as dis quoi, là ? Tu me traites de fils de pute ? grogna Raymond, l’œil mauvais.
  • Non, non, non…mon grand-père s’appelait Pûthe, c’est tout !
  • Bon, ça ira pour cette fois…recommence pas tes sous-entendus, hein ?
  • Et toi ? C’est quoi ton petit nom ? minauda l’extra terrestre.
  • Moi, ma vieille m’appelait Raymond, de la tribu des Gontier.
  • C’est toi le chef, alors ?
  • Je suis le dernier survivant de cette glorieuse tribu ! Et retiens que je ne suis pas prêt de lâcher la rampe sans un rude combat…balança Raymond, le cigare allant d’un côté à l’autre de ses lèvres.

Impressionné, l’autre se tint sur ses gardes. Il savait, par expérience, que les derniers des mohicans sont toujours des énergumènes assoiffés de vengeance et de sang. Y aurait eu de quoi faire une belle étude sociologique.
Bref, il restait immobile et attendait le bon vouloir de Raymond. Celui-ci s’était approché des vestiges de l’escalier et se demandait comment il allait pouvoir reprendre un peu d’altitude.
Le libéré de son scaphandre perforé s’approcha près du vieux...

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