7/8 — Brad

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J’avais rencontré Claudia lors d’une soirée à laquelle Jade et moi avions été conviés. Le motif de l’invitation m’échappait complètement, tout comme je ne me rappelais pas de la personne chez qui la fête fut organisée. J’avais beau y réfléchir encore et encore, mes souvenirs convergeaient vers Claudia et notre rencontre ; certains la nommeraient « coup de foudre ».

Elle m'attira comme aucune femme avant elle. Une pulsion sexuelle, en premier lieu. Dès l'instant où j'avais posé les yeux sur elle, je la désirai. J'entrai dans un jeu de séduction sans m'en rendre compte, prêt à la conquérir par simple besoin charnel.

Cette soirée marqua, à n'en pas douter, la fin de ma relation et de mon envie de vie rangée avec Jade.

Claudia et Jade, connaissances de longue date, bien que perdues de vue depuis peu, s’étaient retrouvées ce soir-là et avaient partagé de nombreuses anecdotes avec une joie manifeste. L’atmosphère terne et ennuyeuse qui nous étreignait fut égayée par leurs larges sourires, véritables, sincères, beaux et rayonnants. Elles passèrent une grande partie de leur temps à s’envoyer des fleurs, à se reprocher de ne pas s'être donné plus de nouvelles, à discuter de tout et de n'importe quoi, et souvent plus de n'importe quoi que de tout. Une amitié se renouait naturellement et la soirée retrouvait du charme.

Légèrement désinhibé — j’avais consommé beaucoup d’alcool, comme à l’accoutumée —, je dévorais Claudia des yeux avec une discrétion moyenne. Mon regard fut vite attiré par sa silhouette parfaite et sensuelle, son sourire intimidant, sa gestuelle, expressive et gracieuse. Je ne la quittai plus des yeux. J’espérais intimement que Jade et elle conserveraient ce contact qu’elles venaient de rétablir, dans mon seul intérêt. Je ne voulais pas que Claudia ne soit qu'un fantasme passager.

Je reprochais souvent à Jade son manque de féminité : cause de nombreuses disputes entre nous. Elle ne prenait pas suffisamment soin de son apparence, et cela me gênait, dans le sens où je pensais qu'elle ne cherchait pas à me plaire. Me séduire lui paraissait probablement inutile depuis que nous formions un couple. Mais cela me manquait. Elle était naturellement belle, certes, mais elle ne le mettait pas assez en valeur. Malgré mes nombreuses piqures de rappel à ce sujet, elle n'en avait jamais tenu rigueur.

A contrario, Claudia transpirait l’élégance. Lors de cette soirée, elle portait une courte robe en soie, affriolante, qui mettait en évidence sa finesse et ses jambes sublimes. En outre, son teint resplendissait. Sa peau semblait soyeuse. Son attitude franche, confiante, ajoutait à sa beauté une forme de suffisance. Décomplexée, elle affichait fièrement ses atouts. Elle en jouait même un peu.

Elle ne détourna pas les yeux lorsqu’elle remarqua que je la dévisageais. Au contraire, elle donnait l’impression d’aimer cela. De le vouloir. Elle chercha aussitôt à devenir mon centre d’attention, en me lançant à son tour des regards de plus en plus équivoques. De par ses gestes, son sourire, ses paroles... elle dévoilait ses intentions à mon égard. Nous flirtions ensemble sans que je ne l'eus remarqué. Je ne parvins pas à faire machine arrière. Je ne sais pas si j'avais été une proie docile ou un dragueur hors-pair, mais nous semblions sur la même longueur d'ondes. Nous voulions du sexe. Intensément.

Nous discutâmes un court moment ensemble, échangeant de simples banalités de circonstance, comme pour essayer de freiner nos envies, de cacher nos pulsions le plus longtemps possible. Nous l’avions vite compris, chacun de nous. Nous parlions de choses inutiles sans même en écouter le moindre mot. Nous nous posions des questions rhétoriques, en surface, mais en nous grandissait une appétence sexuelle insatiable, d’une puissance insoupçonnée. Je n'entendais pas ce qu'elle disait, mais je regardais ses lèvres s'ouvrir, se fermer, se toucher, puis s'écarter. J'oubliai tout le reste.

Nous avons couché ensemble en cachette, ce soir-là. Rapidement. Violemment. Frénétiquement. Nous nous étions faufilés dans une chambre, lorsque Jade fut accaparée par d'autres vieilles connaissances. Claudia avait bu et était ivre. Au moins autant que moi. Elle se donna entièrement, sans complexe, avec une envie folle. Notre discrétion laissait à désirer, mais pas notre plaisir.

À notre retour, Jade n’avait pas l’air de se douter de quoi que ce soit. Elle sirotait un cocktail à base de Martini. Elle ne buvait de l'alcool qu'à de très rares occasions. Retrouver Claudia semblait en être une. Nous finîmes notre soirée à trois et les filles discutèrent longtemps.

Nous repartîmes tardivement. Je raccompagnais Claudia chez elle — elle avait bien trop bu pour rentrer seule. Je mémorisai aussitôt son adresse et ne tardai pas à lui rendre visite. Nous nous revîmes de nombreuses fois par la suite.

Quelques mois plus tard, Jade et moi nous étions séparés, et je demarrai une histoire plus conventionnelle avec Claudia. Mais notre appétence finit par s’estomper. Très vite, notre relation s’approcha inévitablement de son terme, et s’il existait entre nous le moindre sentiment, je n'en étais pas à l'origine.

En repensant à cette soirée, à Jade, à ce qui je lui avais fait ce soir-là, je cherchais l’attitude à adopter face à Claudia, qui me harcelait au téléphone. Je me demandais si je ne devais pas profiter de cette altercation pour tirer définitivement un trait sur cette histoire. Quitter Jade pour Claudia avait été une erreur qu'il fallait réparer.

Mon comportement était impardonnable, mais je voulais vraiment me racheter.

« Tu vas me répondre ? hurla Claudia, qui interrompit mes pensées. Qu’est-ce que tu foutais avec Victor, Brad ? Pourquoi tu parlais avec le frère de ton "ex" ? Tu lui veux quoi, à la fin ? Et ne me dis pas que tu revois encore cette folle, compris ? »

Je raccrochai et débranchai le téléphone. J’éteignis également mon portable. La solitude était la seule réponse ; toute querelle avec Claudia, une perte de temps.

Si je n’avais pas eu le courage de mettre un terme à notre relation, j’avais au moins écourté cette discussion inutile. Un bon début, mais la suite risquait de devenir plus complexe.

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