Chapitre 2 : Alteanne

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Les rayons du soleil passent à travers l’habitacle de la fenêtre. Je tremble face au froid que la maison a dégagé toute la nuit.

Les radiateurs étaient en panne. Génial !

En bougeant sous les cinq plaids, je sens – un, deux, trois… six abdominaux – qu’une tablette de chocolat se presse sur mon dos, des doigts pincent la peau de mon ventre et un entrejambe rigide vient de se plaquer contre mon postérieur.

J’ouvre rapidement les paupières et découvre un long tatouage sur le bras du mystérieux inconnu qui souffle contre ma nuque.

Je n’ai pas le souvenir d’avoir invité quelqu’un, hier soir, pensé-je en me frottant le visage.

Je me redresse subitement puis me retourne en giflant le type qui dort paisiblement.

D’un seul coup, il se réveille en sursaut, mal luné. Puis il hurle tellement que la sonorité de sa voix résonne en écho dans l’enceinte du foyer.

— La prochaine fois que tu me fais un truc comme ça, je t’égorge, connasse !

— Mais putain ! Qu’est-ce que tu fous dans mon pieu déjà ?

— Eh bien, mademoiselle a pris toutes les couvertures rien que pour elle et elle m’en a pas laissée une seule donc je me suis glissé dans son lit pour me réchauffer.

Mais quel enfoiré !

Il aurait pu me le dire hier, je lui en aurais filé une ! La communication, ce n’est pas pour les chiens !

Il est typiquement le genre de mecs qui n’arrive pas à avoir une conversation, nous laissant deviner ce qu’il pense.

Je n’ai pas encore la capacité d’être devin et heureusement cela m’arrange plutôt bien !

Je repousse violemment sa main. Je me relève en prenant appui sur le matelas et en jetant une œillade rapide vers le réveil.

5h.

Je me réjouis, je suis debout en avance ! Ok… Serait-ce cette indépendance qui me rend tout à coup heureuse ? Sûrement !

D’un pas pressé, j’attrape mes vêtements et me dirige dans la salle de bain pour me pomponner en oubliant la vision du frère d’Adam à moitié à poil collé contre mon corps.

D’après mon nouveau colocataire, je serais une traînée… Le mec – qui m’a prise dans ses bras – doit être en manque d’affection alors !

Chassant ses pensées, je finis par boucler mes cheveux blonds grâce au fer à lisser et vérifie à travers le miroir si je me suis bien maquillée.

Je suis une personne qui aime entretenir son corps, bien qu’au lycée, je me suis laissée aller pendant deux ans. C’est grâce au soutien et à la patience de mes proches que j’ai réussi à reprendre confiance en moi. Je ne sais pas ce que je serais devenue sans eux.

Il ne vaut mieux pas y penser ! Je dois me concentrer pour construire mon avenir sur de bonnes bases.

Je sors de la salle d’eau tandis que je vois Jagger traîner dans les pièces du logement en boxer et il se gratte les fesses sans faire attention au fait que je sois dans les parages.

À cet instant, j’aimerais être aveugle ! J’ai l’impression de voir mon ex en face de moi.

Finalement, les hommes sont presque tous pareils.

Je roule des yeux au ciel et vais dans la cuisine pour préparer un petit déjeuner.

J’extirpe un mug dans le buffet et sors le jus d’orange du frigo tout en croquant dans un cookie. J’ai cuisiné des œufs brouillés avec du bacon, la spécialité des brunchs pour les Anglais, j’espère que Jagger va apprécier.

— Jagger, viens voir ! m’écrié-je assez fort pour qu’il m’entende.

Encore dans le coaltar, Jagger bâille et vient s’asseoir sur la chaise en me fixant d’un air outré.

— T’es plus sexy au naturel, me dit-il avec un large sourire.

Je soupire en versant le café dans ma tasse.

— Ton avis, je m’en contrefous !

—Ouais, mais j’aime pas le bacon ! Tu t’en fichais pas quand tu m’as confondu avec un oreiller, et que tu t’es dandinée plusieurs fois contre moi. Elle, ma queue, s’en souvient de ton joli petit cul bien rebondi.

Par contre, je suis assez déçue qu’il refuse ! D’habitude, je prépare un repas rien que pour moi !

Clairement, il vient de m’avouer que je lui faisais de l’effet, ma main me démange tellement que j’ai envie de lui redonner une autre claque dans la figure.

Garde ton calme Alteanne !

Avant de quitter l’appartement, Jagger m’a demandé si je voulais monter en voiture avec lui pour qu’on aille au campus, ensemble.

J’ai de suite refusé sa proposition, car ma meilleure amie, Cameron, m’attend depuis une bonne vingtaine de minutes à l’entrée du parc qui se situe pas très loin de chez moi.

Cameron et moi arrivons à la fac sans trop de difficultés. Nous avons discuté de tout et de rien durant le trajet et de notre escapade en Arizona, c’était la première fois que je voyageais aussi loin de ma ville natale et j’ai vécu un moment inoubliable avec Cameron. Mais j’étais la seule qui avait eu une trouille bleue de l’avion tandis que Cameron avait éclaté de rire face à ma peur.

Lorsque nous passons les portes de l’université, nous assistons à une véritable vague d’hystérie entre des filles de toutes classes confondues. Les nanas parlent également du nouveau qui vient d’arriver et je peux entendre des trucs incompréhensibles comme « plus beau que…. », « canon », « sex », « engin », « dieu », « soirée » et « stéréo… ».

Elles sont toutes en train de baver pour Jagger. Moi, j’ai gagné le pompon ? J’ai dormi avec lui. Enfin, il a squatté mon lit pendant que j’étais occupée à roupiller.

Je suis sûre qu’elles rêveraient d’être à ma place, si elles le savaient.

Un sourire narquois se dessine sur mes lèvres et s’efface de mon visage en m’apercevant que Lewis et sa clique recommencent à s’en prendre à Pablo.

Sans avertir Cameron, je me rue vers les garçons et me positionne devant Pablo pour le protéger de ses abrutis sans cervelle.

L’espagnol a une belle gueule d’ange, mais sa timidité lui joue des tours. Les gens d’Harvard aiment les hommes qui ont un peu de caractère, sinon ils se font victimiser toute l’année comme ce type qui vient de Castille.

— Dégagez ! grogné-je sèchement après le groupe.

— La capitaine des cheerleaders qui défend Pablo, c’est nouveau ça ?

Enfoirés !

Ils n’ont pas tort. Je ne me suis jamais interposée dans les bagarres, mais Pablo ne peut plus vivre ça.

Je ne sais pas comment il arrive à tenir avec Lewis qui le pousse constamment à faire une connerie. À force d’être la risée du campus, on finit par faire une connerie à cause de ses arriérés.

Je tourne les talons et souris à pleines dents avant d’épouser les lèvres de Pablo.

Tous les étudiants sont éberlués et choqués de m’avoir vue, moi, Alteanne Miller, fricoter avec Pablo. Le groupe se sépare alors que Pablo me chuchote quelques mots au creux de mon oreille.

— Merci, mais je suis gay.

— T’en fais pas ! Je ne suis pas attirée par toi non plus ! Je voulais tout simplement t’aider.

Cameron décide de nous rejoindre et me prend à part loin des autres.

— Hé ! Je ne sais pas, mais je crois que tu intéresses le nouveau et Pablo, tu m’expliques ?

Je grimace et hausse les épaules.

— Ici, on me respecte donc ils vont moins emmerder Pablo. Je te rappelle qu’il y a trois ans, au début, personne ne respectait Caleb, mais quand je suis sortie avec, c’était différent, soufflé-je brutalement. Et pour le frère d’Adam, c’est juste mon colocataire, rien de plus.

Lorsque la sonnerie résonne dans la faculté, je comprends qu’il est l’heure de se diriger vers la salle commune.

Dès que nous entamons un nouveau cycle au sein de l’université, les sportives doivent se réunir pour que le directeur leur fasse son discours. Nous sommes des leaders et nous devons donner une bonne image, car cette école est réputée dans le monde entier.

Pour le cliché des meneuses de troupes, on s’en passera…

Lorsque nous sommes pom-pom girls, nous sommes idéalisées par les autres. Mais clairement, je fais partie d’une équipe étriquée et peut-être encore plus mauvaise que les Stars, un pool de hockeyeurs recalé par Harvard.

Deux heures que le proviseur raconte sa petite harangue ennuyeuse.

Deux heures que je lutte pour ne pas m’endormir, bercée par la douceur de sa voix…

Et… il s’en va après avoir fini son numéro.

Un coup de coude me tape brutalement dans l’estomac.

Brusquement, je lève la tête vers la personne concernée sans grimacer de la douleur qu’elle vient de me procurer.

Il s’agit de Bethanie, une fille de mon groupe, mais aussi la bimbo suspendue au bras de Caleb la veille.

En ce qui concerne la demoiselle : quand elle est arrivée ici, elle a prétendu être fiancée, si mes souvenirs sont exacts. Je crois que cette personne, c’est Jagger. Elle répétait constamment qu’il était riche et qu’il vivait à Londres pendant qu’elle s’est cassée à Harvard, le laissant seul à gérer les affaires familiales.

— Hier, tu ne m’as pas vue avec ton ex, c’est clair ? m’avertit-elle d’un ton faussement agréable.

— Je rêve ou tu me menaces ? répliqué-je en me levant de ma chaise.

Adam accourt aussitôt dans ma direction pour me barrer la route tandis que Bethanie porte sa main sur sa bouche en exagérant la situation.

Elle devrait intégrer le club de cinéma de la fac, elle joue bien la comédie alors qu’elle s’est tapée presque la totalité des mecs qui sont présents et c’est à moi qu’elle vient faire du chantage.

Je la jetterais bien par la fenêtre, celle-là !

— Calme-toi et ne fais pas de gaffes !

Bethanie glousse alors qu’Adam regarde la brune d’un mauvais œil.

— Ne cherche pas la merde aussi, Bethanie ! lui balance Adam qui enroule ses bras autour de mes épaules.

Je suis à deux doigts de démarrer au quart de tour et Adam me connaît mieux que quiconque. Il sait de quoi je suis réellement capable, c’est pourquoi il me tient fortement contre lui.

Au lycée, je me battais assez souvent…

D’un revers de bras, je repousse Adam et quitte la pièce en tombant sur un Caleb essoufflé. Je ne prends pas la peine de lui adresser un regard alors qu’il se précipite pour me rattraper.

— Une bombe comme toi avec Pablo ? Poupée, es-tu désespérée à ce point ? me questionne Caleb d’un air narquois.

Je déteste ce mot !

Un second sourire moqueur s’affiche sur mes lèvres.

— Non, je ne le suis pas, mais avec toi, je devais vraiment l’être pour en arriver là.

Il m’attrape par la taille et me ramène contre lui.

— Je suis encore fou de toi.

Je soupire d’exaspération. je suis tombée amoureuse du Caleb timide et réservé, pas celui qui passe son temps à faire le macho avec toutes les femmes qu’il peut avoir dans son lit. Il me dégoûte !

— C’est terminé depuis le jour où tu m’as trompée ! Et ne t’avise plus de revenir à la patinoire quand je vais là-bas.

— Tu ne peux pas détruire trois ans de relation, Alteanne.

Mon sang ne fait qu’un tour et je bouillonne de rage.

— Tu te fous de ma gueule n’est-ce pas ? C’est toi qui as tout bousillé, Caleb ! Même pour te taper Bethanie hier soir, hurlé-je à travers la pièce. Sans moi, tu serais encore une putain de victime. Donc oui, je préfère Pablo à toi, c’est quelqu’un de parfait et de différent.

Il faut que je parte d’ici, sinon je vais commettre un meurtre. Je ne dois pas rester dans cet état.

***

L’après-midi a défilé à une vitesse vertigineuse, je n’ai pas décoléré depuis l’altercation avec mon ex. Bethanie s’est vengée sur le terrain.

Un peu plus, elle m’aurait cassé une jambe lors de l’entraînement.

Finalement, j’ai appris que Jagger est le petit copain de Bethanie. Celui qu’elle trompe depuis plus de trois ans.

Marchant dans les galeries de Cambridge, je m’arrête devant une poissonnerie et entre avant que Javier, le nouveau gérant du stand, ne ferme les portes.

— Salut ma grande ! Ça fait longtemps que je ne t’avais plus aperçue !

— Salut Ja ! Ouais, je suis partie en Arizona pendant les vacances et là, j’ai eu un logement donc je n’ai pas eu vraiment eu le temps de te faire un petit coucou.

— Je vois que ton père t’a enfin donné un peu de liberté, j’espère que tu t’es bien amusée durant ton voyage ! Je te mets comme d’habitude ?

— Comme toujours.

Javier se place derrière son comptoir et attrape un gros sac en plastique en insérant ce que je désire le plus au monde. Des salicoques.

Mon papa m’a appris à cuisiner et les crevettes, c’est mon péché mignon !

Muni de mon gros cabas, je frappe brutalement à la porte d’entrée fermée à clé et j’entends des éclats de voix retentir dans la maison.

Ne me dites pas que mon colocataire a invité ses amis pour faire la fête ?

Je tambourine plusieurs fois avant qu’un mec ne m’ouvre.

— Qu’est-ce que tu fous là, toi ? me dit Marc, le défenseur des Vikings.

— Il est où Jagger ? Je dois lui parler et lui dire deux mots pour cette soirée improvisée.

— Tu lui veux quoi ?

— Ici, c'est chez moi ! Quand je demande à savoir où se trouve Jagger, tu me réponds. À moins que toi et tes potes préférez que je bousille le compteur à coups de hache ? Encore mieux, que j'appelle son oncle qui soit dit en passant est le propriétaire ? À moins que, répliqué-je d'un ton sarcastique, j'informe Bethanie que son mec a eu la trique en dormant contre moi, la veille. En conséquence, tu choisis quoi parmi les options que je viens de te citer.

Marc blêmit d'un seul coup et se dirige brusquement vers le salon. Je le vois expliquer la situation à Jagger. À la tête qu'il tire et au coup de poing violent qu'il vient de donner contre le mur, il n'est pas tellement ravi de mes menaces.

Je dois mettre en place des règles pour que notre cohabitation se passe au mieux.

Je n'ai pas envie de rater mon année à cause du type qui partage le même espace que moi.

Pas de soirées improvisées avec une vingtaine de personnes dans un logement tout riquiqui. 20m2 pour être précis.

Bon, je crois bien que je vais passer une soirée mouvementée avec ce phénomène et les Vikings…

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