Chapitre 4 : Alteanne

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— Mais quand va-t-il rentrer ce petit enculé, je vais le tuer ! s’écrie Andrew en claquant son poing sur le plan de travail.

Je réprime un fou rire face à Andrew qui hurle dans la cuisine.

La table basse et le sol sont jonchés de canettes de bière vides comme un tapis d’ordures. Le parquet est en piteux état à cause des liquides renversés sur ce dernier, le canapé maculé de taches, des capotes sorties de leur emballage traînent sur le plancher, puis le plafond ainsi que la télévision ont eu le droit d’être rebaptisés par le mot « Bitch » à l’encre cramoisie.

Les enfoirés de Vikings ! pensé-je réellement en serrant ma mâchoire.

J’extirpe les gobelets rouges de la crédence en les jetant dans un gros sac poubelle.

Hors de question de paraître faible vis-à-vis de Jagger !

Mais c’est quoi ces putains de conneries !

Un long soupir s’échappe de mes lèvres en constatant que cette situation m’interroge.

Pourquoi dois-je partager le studio avec un mec qui ne respecte pas mon espace personnel ?

Ce n’est pas sorcier d’aller dormir dans un canapé sans rejoindre sa colocataire en pleine nuit !

Je discerne Andrew qui commence à sortir des plats du buffet et des aliments du réfrigérateur.

— Andrew, tu fais quoi là ? lui demandé-je perplexe.

Sa mâchoire se crispe et ses poings se serrent brutalement avant qu’il n’allume la plaque de cuisson.

— J’avais envie que tu goûtes à mes talents culinaires. Ça fait longtemps que je n’avais pas fait un repas au lieu d’être tous les jours cloîtré dans un restaurant par fainéantise.

Soudain, son comportement m’intrigue de plus en plus, il n’a jamais été aussi mal à l’aise depuis que je le connais.

Brusquement, je sors mon portable qui vibre dans ma poche et découvre que Jagger m’a pondu un message d’excuses tandis que je visionne le clip qu’il a expédié par erreur.

Sans crier gare, Andrew prépare la mayonnaise maison tandis que je regarde la vidéo.

Je suis sûre qu’il a fait exprès de m’envoyer sa verge en érection.

Au moins, j’ai la conscience tranquille et n'ai pas l'esprit mal placé.

Ma devise : pas de plans cul, pas de mecs.

— Andrew, est-ce que tu peux trouver un autre appartement pour ton neveu ? Disons que le gars est venu me rejoindre pendant que je dormais et il m’a fait comprendre que mon corps l’excitait.

— T’en fais pas Alteanne ! Demain, je ferai le nécessaire, sinon je peux te proposer la villa qui n’est pas très loin de la fac. Mais là, c’est un coup en plus, tu devras trouver un travail pour assurer tes propres dépenses.

J’ai autre chose à faire : réussir mon année et mon avenir par exemple.

Je lui réponds.

— C’est génial comme idée, je pourrais aller voir mon père pour qu’il m’embauche !

Andrew explose de rire.

— Je plaisantais ! Tu n’as pas besoin d’un boulot. J’aime bien les jeunes femmes comme toi, vous avez une sacrée détermination pour avoir ce que vous voulez.

— Andrew, on m’a appris à ne jamais lâcher nos ambitions et il faut en avoir à notre époque pour s’assurer un minimum de confort dans la vie active.

— Je vois que tu n’es plus la petite fille qui passait son temps à se droguer.

— Merci à toi de m’avoir aidée.

Je finis par poser le téléphone sur la table et décide de donner un coup de main à Andrew pour le repas de ce soir.

Après avoir mangé et l’avoir raccompagné à son véhicule, je suis rentrée à la maison et me suis réfugiée dans mon lit devant Netflix.

Demain sera un nouveau jour.

Je lutte pour comprendre l’histoire qui se déroule sous mes yeux, mais la fatigue est bien plus forte que moi.

Tout à coup, quand je commence à m’assoupir devant une série dramatique, quelqu’un tambourine à la porte.

L’enfoiré londonien est de retour.

Je m’extirpe péniblement des draps et déambule à travers les pièces en ouvrant le battant.

Il est là, le sourire aux lèvres alors que, moi, je le toise d’un regard noir.

— Ah enfin ! J’ai cru que j’allais dormir dehors. Et désolé pour la vidéo, cela ne t’était pas destiné.

Je secoue la tête, désespérée d’être en colocation avec un type pareil.

Je me fiche d’avoir vu la taille de son engin !

Mes pas martèlent le sol et je fouille dans la buanderie pour prendre les couvertures que j’ai rangées en les donnant à Jagger.

— J’espère que monsieur n’aura pas froid cette nuit, lui expliqué-je d’un air faussement agréable. Ne viens plus dans mon lit ! Si ton sexe te démange, tu vas voir une autre fille pour te soulager.

— Oh, mais c’est qu’elle mordrait en plus !

J’ai envie de commettre un meurtre là.

Je grommelle brutalement et ne prends pas le temps de lui adresser de l’importance. Ce type est aberrant.

***

Évidemment le lendemain, je me suis levée avec une migraine pulsatile infernale. Comme si l’on me rouait de coups sans jamais s’arrêter.

Aujourd’hui va s’annoncer catastrophique avec le surmenage émotionnel que je suis en train de vivre depuis le réveil.

Ma nuit n’a pas été aussi réparatrice que j’en aurais eu besoin. Mentalement, mon moral est claqué pour le restant de la journée.

Difficile d’être concentrée pendant les cours.

Je frotte mon visage et jette un coup d’œil aux valises qui sont déjà prêtes. Andrew doit arriver d’une minute à l’autre pour les récupérer.

Dans la cuisine, je ne fais pas attention à Jagger et me dirige vers le meuble pour prendre des anti-inflammatoires espérant atténuer la douleur.

— Le bonjour est-il attribué aux chiens ?

Il va recommencer celui-là…

— Quand tu arrêteras d’envoyer ta petite queue en vidéo à ta colocataire, on en reparlera.

Il ne réplique pas et décide d’aller ouvrir la porte avant que je n’entende Jagger blêmir faiblement face à Andrew.

Je bois la dernière gorgée de mon café et me précipite pour lui donner mes baluchons.

Un nouvel endroit.

Il faut que je dise la vérité sur ce que je sais sur Andrew. J’ai joué la comédie durant deux années consécutives. Je voulais que ça soit lui qu’il me l’annonce en face, mais je vois qu’il n’est toujours pas prêt à me l’avouer.

— Bonjour Alteanne, me répond-il en souriant.

Un rictus narquois s’affiche sur mes lèvres charnues. Je me hisse sur la pointe des pieds et lui chuchote quelques mots au creux de son oreille.

— Salut papa.

Andrew écarquille les iris, abasourdi par ma révélation. Ensuite, il darde une œillade meurtrière à Jagger qui ne comprend pas pourquoi il le regarde comme ça.

Sur le coup, je m’interpose entre les deux pour éviter qu’une bagarre n’éclate dans le studio.

— Depuis vingt-quatre mois, je sais que tu es mon père biologique à cause du test d’ADN que j’ai effectué, lui affirmé-je en prenant sa main. Jack m’a dit que tu étais trop jeune pour assumer un enfant à quatorze ans et surtout ta vie d’avant qui était trop toxique pour ma mère et moi. Malgré que tu aies pu me cacher un truc pareil depuis que je suis gamine, je comprends désormais pourquoi tu es constamment là pour moi.

Sans qu’il prononce un mot, il me file les clés du nouveau logement et je lui tends mes sacs en signalant que mon amie m’attend.

J’arrive dans le parc et me dirige vers Cameron qui donne du pain dur aux animaux.

— Alors comme ça tu lui as dit ? me questionne Cameron, en caressant un chat qui vient de sauter sur le rebord du petit muret.

— Ouais, mais c’est aussi grâce à toi et tes comparaisons. C’est vrai qu’en regardant mieux, je tiens plus d’Andrew que de mon beau-père. Ça m’a mis la puce à l’oreille, donc quand j’ai eu les preuves, j’ai demandé à Jack de m’affirmer la vérité. D’ailleurs comment as-tu fait pour sortir et coucher avec lui ?

Pourquoi prends-je aussi bien leur ancienne relation ? Ma pote qui se tape mon géniteur, ce n’est pas rien, mais qui suis-je pour juger ma meilleure copine.

Cameron mord sa lèvre inférieure et lève les yeux au ciel avant de me donner la raison.

— J’ai eu une invitation à une soirée par erreur et je me suis rendu compte que c’était une cérémonie de PDG ou des gens du même genre, tu vois ? J’étais hyper gênée, Andrew m’a prise à part puis il m’a demandé pourquoi j’étais là… le malaise quoi !

— Du coup, il te harcèle depuis que tu l’as quitté ?

— Tous les jours ! J’ai beau changer de numéro, déposer plainte, il arrive à s’en sortir et à me retrouver sur les réseaux.

C’est pour ça que j’apprécie Cameron. Elle me raconte tout, mais pour Andrew c’est grave. D’autant plus, qu’il a fauté d'après elle. Andrew n’est pas bien méchant. C’est un homme qui a tout ce qu’il veut. Il est mal tombé avec mon amie, ce n’est pas une fille naïve, Cameron.

— Tu penses que c’était mieux de refuser de cohabiter avec la sororité ? m’interroge mon amie. Et du coup les Sullivan, c’est ta famille ?

— Andrew a été adopté donc pour moi, je n’ai aucun lien de sang avec eux. Et revenir sur le fait que je n’ai pas voulu aller dans la fratrie, c’est juste une question de principe. Les nanas écoulent le plus clair de leur temps à inviter des mecs et à faire des soirées. Personnellement, ayant un lourd passé, j’ai préféré m’abstenir de tout ça.

À l’instant où nous franchissons le portique du parc, je reçois un message d’un inconnu.

[Je n’arrive toujours pas

à croire que tu ne puisses

pas t’en souvenir.]

D’habitude, je suis la personne la plus curieuse du monde. Je fourre mon mobile dans mon sac sans y prêter attention et nous rentrons dans le parc.

L’eau du lac est d’un bleu immaculé, ruisselant par abondance grâce à la cascade. L’herbe revêt de sa vivacité verdoyante. Les oiseaux chantent à tue-tête, le vent frais souffle doucement dans les branches.

Je vis en apothéose dans ce lieu si calme, si paisible et si harmonieux. Je pourrais rester pendant des heures dans la nature, c’est relaxant.

En arrivant dans l’amphithéâtre avec dix minutes de retard, Monsieur Stansky est déçu par mon comportement. Néanmoins, il ne dit rien, j’ai toujours été une élève bosseuse et assidue. J’ai des bonnes notes depuis que j’ai intégré Harvard, peut-être pas la meilleure de la fac, mais je ne m’en plains pas.

Je m’assois au premier rang avec ma copine et à côté Adam pose sa main sur mon épaule. Je sens des regards lourds s’écraser sur ma silhouette, surtout celui de Bethanie. Elle n’est pas ravie d’apprendre que son fiancé vivait avec moi depuis son arrivée. Les bruits de potins fusent à tout-va dans la pièce : « Jagger et Alteanne ont couché ensemble ».

Je me demande même si ce n’est pas le londonien qui a créé ce mensonge pour se faire bien voir.

Ils peuvent penser à n’importe quoi. Merci à Caleb d’avoir détruit le peu d’estime que j’avais pour les autres, je déteste les hypocrites qui s’intéressent à moi juste parce que je suis populaire. Parfois, je n’aimerais pas être cette fille…

— Je suis choquée qu’elle ait pu me faire ça, elle a forcé Jagger pour qu’il couche avec elle ! Maintenant, je suis salie… s’écrie-t-elle en pleurs.

Non, mais c’est l’hôpital qui se fout de la charité, là ! Elle utilise cette fausse rumeur à son avantage alors qu’elle est mal placée pour parler de fidélité.

Adam pose une main sur mon épaule et me sourit tendrement en agitant la tête.

Je fais volte-face vers la fille qui se fait passer pour une victime dans l’histoire.

— Désolé de te décevoir Bethanie ! Jagger et Adam sont mes cousins donc j’estime avoir du respect pour mon entourage.

— Je te considère pas comme un membre de ma famille, Alteanne. Assume un peu ! réplique Jagger.

— Je ne vais pas déclarer quelque chose que je n’ai jamais commis ! Jagger, t’es juste en colère parce que je t’ai dit que tu avais une petite queue.

Il veut se venger par rapport à sa soirée tombée à l’eau et la critique que j’ai omise sur son pénis. Il n’a pas aimé.

Je croyais que les gens friqués étaient plus intelligents que nous. Je me suis fait duper, il y a aussi des putains d’enfoirés comme Jagger Sullivan ! Sale gosse de riche !

De manière prompte, Caleb m’apporte son soutien.

— Arrête un peu de jouer la comédie Bethanie ! Ouais, j’ai fait le con avec Alteanne, je sais qu’elle ne reviendra jamais avec moi à cause des tromperies, elle s’est toujours respectée. Moi, je la crois quand elle dit qu’elle n’a rien fait avec ton mec.

Wow, je suis assez surprise que Caleb me connaisse aussi bien !

Je ne réponds plus aux moqueries et me concentre sur le cours.

Les heures ont défilé à une vitesse ahurissante, je me suis efforcée d’écouter tout mon emploi du temps sans montrer que j’étais complètement ailleurs à cause de la fatigue intellectuelle. Je suis obligée de surmonter ce problème et de prendre soin de moi.

Cameron a décidé de me ramener à la villa et a eu une idée pour affronter Andrew. Ce dernier est parti dans mon ancien appartement pour régler ses comptes avec Jagger, il ne faut pas s’en prendre à sa fille unique. Autrefois, il était dans une organisation pas très clean. Je lui ai demandé de lui mettre la pression pour que Jagger arrête de raconter des conneries sur mon dos.

En traversant le jardin, je suis émerveillée par la vue qui s’offre sous mes yeux bien que Cameron essaye de ne pas rigoler en apercevant la tête que je tire.

Bordel de merde ! C’est une plaisanterie ! Andrew est dingue !

— Ce somptueux palace a été construit juste pour toi et t’est destiné quand tu auras atteint la majorité. Le terrain appartenait aux parents biologiques d’Andrew avant que sa mère ne décède d’un cancer et que son père s’est laissé mourir après la disparition de sa femme.

Au début, j’ai cru qu’Andrew avait abusé de Cameron… Ce soir, je vois une autre fille devant moi, comme si elle n’avait jamais surpassé cette aventure.

— Dis-moi, ta relation avec lui, il n’y avait pas que du sexe entre vous ?

Cameron masse sa nuque embarrassée. Elle m’annonce qu’on devrait entrer pour discuter de tout ça puis des choses qu’on m’a cachées depuis longtemps.

— Alteanne, tu es la seule qui a été là pour moi quand j’étais plus bas à la fac donc je te dois la vérité, ma puce.

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