Chapitre 20

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-Tu vas m'écouter attentivement. Tu ne vas pas me couper la parole et tu ne vas pas faire de tête bizarre. Une fois que j'aurais fini de te dire ce que j'ai à te dire tu pourras me donner ton avis. Compris ?

Andrew hoche la tête. Il a l'habitude de ce genre de conversation. Il sait que je vais lui révéler un secret et ses yeux brillent déjà d'impatience.

-Tu devrais t'assoir.

-Viens avec moi soeurette on va se mettre confortablement dans le salon.

Il m'attrape par la main et je suis contrainte de le suivre. J'ai les boyaux en vrac mais c'est pour la bonne cause. Une fois installée, je prends une profonde respiration.

-OK alors j'y vais. Je me lance. Tu m'écoutes hein ? Mais tu ne parles pas d'accord ? Tu te souviens de Julian l'associé de Ash ? Et bien lui et moi, au fil des jours, on a commencer à se tourner autour et puis un jour BAM on a craqué. On s'est sauté dessus. Enfin non c'est lui qui m'a sauté dessus. Il m'a sauté tout court d'ailleurs mais passons. C'était le soir de la fête dans le bar de Maya. Tu sais le fameux soir ou j'ai pleuré comme une madeleine. Je ne dis pas que c'est à cause de ce qu'il s'est passé entre Julian et moi mais enfin ça a un lien tu comprends ? Bref. Du coup ça a été un peu tumultueux entre nous et finalement après plusieurs épisodes, que je te raconterais dans les détails plus tard, on a décidé de commencer quelque chose lui et moi. Ce qui va être terriblement problématique à cause d'Ashton mais pas grave je prends le risque. J'ai l'impression que ce que je vais vivre avec lui va être important alors il faut que je me lance tu vois ? Le seul soucis c'est que je ne veux plus vous cacher les choses, alors je dois vous le dire mais j'ai les chocottes. Avec toi c'est plutôt facile parce, toi et moi on est pareil et je sais que tu ne comptes pas me juger mais les autres, j'ai peur qu'ils se fâchent contre moi. Du coup je crois que j'aurais vraiment besoin de ton soutient...

Je suis à bout de souffle et vue la tronche de mon frère, je ne suis pas convaincue qu'il est compris tout mon monologue.

-Andrew ? Tout va bien ? Tu as compris ou je dois répéter plus lentement ?

-Humhum. Pour moi oui, mais pour eux, je pense qu'il va falloir répéter ...

-Comment ça pour eux ?

Je me retourne pour voir de qui il parle quand je remarque deux tête qui me fixent avec des yeux plus ronds qu'une bille. Merde. Je n'avais pas prévue que ça se passe comme ça, mais en même temps ils vivent avec nous donc j'aurais du sentir le truc. Peut être qu'avec un petit sourire ça va passer ...

-Salut les gars. Vous allez bien ? Vous êtes là depuis longtemps ?

Pas de réponse. Bon j'imagine que ça va. Ou qu'il sont la depuis le début.

-Venez vous assoir avec nous qu'on en discute s'il vous plaît.

Ils m'écoutent sagement et viennent entourer Andy sur le canapé. OK. Vu leurs têtes ça va pas être une partie de plaisir.

-Je ...

-Dis nous que c'est une blague. Tu te tapes le pote d'Ashton ?

-Cha c'est pas possible ? T'as pas fait ça ?

Ils ne savent encore rien mais ils ont déjà l'air en colère. C'est à moi de me défendre maintenant.

-Ne commencez pas je vous en prie. Laissez moi au moins vous parler de ce qu'il se passe vraiment.

-C'est l'autre playboy qui vient des Etats-Unis ? Il t'a retourné la tête avec sa belle gueule et son fric c'est ça ?

-Jayden ! Tu me connais mieux que ça quand même ... Laissez-moi vous expliquer les garçons...

-Ashton il est au courant ?

Mais c'est pas vrai je vais avoir le droit d'en placer une dans cette conversation ?

-Non pas encore mais il est prévu que Julian et moi ...

-Julian et toi ? Ah parce que c'est officiel vous êtes ensemble ?

Jayden semble furax. Mais qu'est ce qu'il lui prend ?

-Il est rien prévu du tout Charlie. Tu ne vas rien dire à Ashton. Un point c'est tout. Tu peux faire tes petites affaires dans ton coin et que ça dure le temps que tu voudras mais il est hors de question d'ameuter toute la ville pour ça. Tu risquerais vraiment de t'attirer les foudres d'Ash juste pour un petit flirt de rien du tout ? Arrête ça immédiatement avant que tout parte en couille Cha.

Knox s'en mêle lui aussi. C'est la première fois que j'entend mon petit frère me parler comme ça.

-Knox, tu es mignon et je t'aime beaucoup mais là tu vas trop loin. Il s'agit de ma vie privée et j'ai encore le droit de fréquenter qui je veux.

-Attendez là! Calmez vous. Laissez lui une chance de nous expliquer correctement ce qu'il s'est passé et on avisera ensuite. Pas vrai Charlie ?

Comment ça on avisera ? Même Andrew s'y met ? ON ne va pas aviser. JE vais profiter de cette petite part de bonheur qui m'est offerte. Mais je crois rêver. J'ai cru qu'ils allaient être contents que je rencontre enfin quelqu'un et c'est tout le contraire. J'assiste silencieusement à mon procès alors que je voulais simplement leur faire part de ce que je vis en ce moment. La colère commence à gronder en moi. C'est la première fois de ma vie que je ressens ça pour eux.

-Mais vous vous entendez parler ? Qu'est-ce qu'il vous prend là ... Vous savez que j'ai encore le droit de faire ce que je veux ... Vous n'êtes pas mes parents ! Je vous demande juste d'être un peu heureux pour moi c'est tout. Maintenant si effectivement vous ne voulez pas en entendre parler je ne vous dirais rien mais je ne comptes pas me cacher du reste du monde éternellement et Ashton finira forcément par être au courant pour Julian et moi.

-Tu sais ce qu'on va subir à cause de toi quand Ashton va l'apprendre ? Il va te trucider et nous avec. Mais c'est hors de question cette fois Charlie. Je ne te laisserais pas nous entrainer dans tes histoires. Je suis le premier à te défendre quand il va trop loin avec toi mais là c'est toi qui fou volontairement la merde. Alors non je ne veux rien savoir et si Ashton me demande des explications je lui dirais la vérité. Je ne cautionne absolument pas cette relation.

Jayden est le premier à quitter le salon.

-Il a raison. Ashton va vous tuer tous les deux. Qu'est-ce qui t'ai passé par la tête cette fois ci Cha ? La première fois ce n'était pas une bonne idée et le résultat en ai la preuve mais tu ne le savais pas d'avance. Là tu viens de creuser ton propre trou. Y a des milliers de mecs rien que sur Paris alors pourquoi lui ? Reconnais que c'est une mauvaise idée... Fais le nécessaire avant qu'il ne soit trop tard. Pense un peu à Romy bon sang !

Suivit de près par Knox qui se lève et s'en va, blaser. Alors même mes frères me lâchent maintenant ?

-Charlie, il ne faut pas leur en vouloir. Ils ont juste peur pour toi.

-Peur ? Peur de quoi, d'Ashton ? Mais merde ça ne regarde personne d'autre que moi. Et puis si Ashton n'est pas content ce ne sera que contre Julian et moi, vous n'avez rien à voir la dedans. Je ne comprends pas leurs réactions.

-Peur que l'histoire se répète je suppose. On a tous mal vécu l'histoire avec Valentin et même si ce que tu fais ne nous regarde pas au final, tu restes notre petite soeur qu'on a envie de protéger. On doit sûrement en faire trop je le reconnais, mais on ne sais pas faire autrement. Laisse leur du temps pour encaisser, tu verras tout ira bien. Ne t'en fais pas.

-Et toi ? Tu n'as pas ton avis à me donner ?

-Je ne crois pas que tu aie envie de le connaître ... Surtout après avoir entendu tout ça ...

-Vas y balance. Je ne suis plus à ça près. Et puis, après tout, c'est de ton avis dont j'avais vraiment besoin à la base.

Il souffle. Il ne sait pas comment me dire les choses sans me faire du mal. Je le connais par coeur, je connais ses réaction et les mots derrières chacun de ses gestes.

-Toi non plus tu n'es pas content pas vrai ?

-Non Charlie. Je ne suis pas ravi de cette situation. Mais si tu me dis qu'il peut te rendre heureuse alors je veux bien faire un effort pour essayer de l'accepter. Mais je ne suis pas certain que tout ça ne fasse pas plus de mal que de bien. Comprend moi. Tu es peut être heureuse sur le moment mais crois-tu que si Ashton l'apprend il va être content ? Tu risquerais de perdre ton frère pour toujours. C'est ça que tu veux ? Je me souviens bien la première fois que tu nous à dis que tu fréquentais Valentin. Ashton s'est mis dans tous ces états et il n'arrêtait pas de te dire que tu faisais une bêtise. On a tous payé quand vous vous êtes séparés. Attention je ne te reproche pas le comportement d'Ashton vis à vis de nous mais il faut dire que nous avons pris ton partis plutôt que le sien. C'est pour ça que les garçons ne sont pas contents. Ils ont peut être peur d'avoir à nouveau à choisir entre vous deux. Alors la seule chose que je te demande c'est de bien réfléchir avant qu'il ne soit trop tard.

Les larmes me bouchent la vue et l'air dans mes poumons commence à se fait rare. Je ne comprend pas ce qu'il vient de se passer. Je suis rentrée de l'hôtel de Julian le coeur léger et des papillons plein le ventre et je me retrouve triste et incomprise en arrivant chez moi. Suis-je si égoïste que ça de vouloir ma part de bonheur ? J'ai enfin rencontré quelqu'un qui ne me juge pas sur mon physique et je devrais renoncer à lui pour ne pas blesser mes frères ?

-Trop tard ?

-Avant que tu ne tombes amoureuse de lui.

Ah ça ... Si seulement il savait que c'est déjà trop tard. Mais je me garde bien de lui dire. Après tout, je viens peut être seulement d'en prendre conscience moi-même.

*****

Je l'attend sagement devant son hôtel. Après lui avoir envoyé un message plus tôt dans l'après midi, nous avons prévue de nous retrouver pour un petit tête à tête. J'ai le ventre serré depuis hier soir. La conversation avec mes frères n'a pas arrêté de tourner en boucle dans ma tête. Du coup ma nuit à été pourri et la journée n'a pas été mieux. Heureusement que j'ai retrouvé mon acolyte qui m'a été d'un soutient immense et tellement réconfortant. J'ai pu me confier à elle autant que je voulais étant donné que les garçons ont passé leur journée en rendez vous à l'extérieur du cabinet. Le problème c'est que je suis encore plus embrouillé que la veille. Ma tête et mon coeur ne sont pas d'accord et je ne sais toujours pas qui va gagner au final.

-Tu m'attends depuis longtemps ?

Julian me sort de mes pensées au moment ou il se plante devant moi. Il est beau et plein d'assurance. J'aime ce côté puissant chez lui.

-Quelques minutes ne t'en fais pas. On rentre au chaud ? Je ne sais pas pourquoi, mais je n'arrête pas de frissonner depuis tout à l'heure.

-Je te fais tant d'effet que ça ?

-Arrête tes bêtises et emmène moi la haut.

-Vos désirs sont des ordres, mon trésor.

Le sourire qui s'étend sur mes lèvres est franc et naturel, il a le don de me réchauffer le coeur. Je ne sais pas combien de temps ça va durer mais lorsqu'il me prend la main pour m'entrainer dans le hall de l'Hôtel, à ce moment précis, je suis heureuse.

Arrivés dans la chambre, nous discutons de tout et de rien pendant un bon moment. Il me confit des détails sur son enfance et je fais pareil de mon côté. Nous parlons un peu de mes parents mais je ne suis pas très expressive lorsqu'il s'agit d'eux. Ça fait un moment que je ne veux plus qu'ils fassent partis de ma vie et parler d'eux ne fait que remonter à la surface de mauvais souvenirs. Le ton est plutôt léger sur tout le reste de la conversation et je me surprend même à rire aux éclats plusieurs fois. Pourtant, au fond de ma tête, une pointe vient percer cette petite bulle d'allégresse et en une fraction de seconde mon coeur se serre. Je sais que je suis en train de les trahir. Il faut que je lui fasse part de tout ça mais je ne sais pas comment amener les choses. Tout ce bouscule dans ma tête, les sentiments pour mes frères, forts et sans limites, contre ceux que je ressens pour Julian, naissants et fragiles.

-Tout va bien Charlie ?

-Accepterais-tu de connaître une part de moi que je n'ai jamais révéler à personne ?

Il semble surpris mais se reprend aussitôt.

-Si tu me fais suffisamment confiance pour te confier à moi, alors je serais le plus attentif des confidents.

Encore une fois, ces mots touchent mon âme. Je ne sais pas comment il fait pour trouver les mots justes. Ils sont d'une telle simplicité et pourtant ils résonnent en moi.

-Lorsque Valentin et moi nous nous sommes séparé, j'ai pris une claque monumentale. Je n'avais rien vu venir. Nous devions passer notre vie ensemble, c'est ce qui était prévu depuis que nous avions dit oui tous les deux. Lorsqu'il a commencer à me balancer toute ses saloperies j'ai pris conscience de certaines choses. Il n'avait pas tout à fait tord dans ce qu'il disait. Je n'avais plus le corps dont il était tombé amoureux. Je ne ressemblait plus à la fille qu'il avait épousé quelques années auparavant. J'ai commencé à me répéter chacune de ses phrases et j'ai finis par me voir à travers ses yeux. J'ai vu ce qu'il voyait. J'ai vu cette masse flasque qui pendait de mon ventre. J'ai vu ces vergetures qui marbrait la blancheur de ma peau. J'ai vu ces bourrelets disgracieux qui définissait mon profil. J'ai vu ce visage élargie par le poids que j'avais pris. Et il y a eu un moment ou tout à basculer. Je ne pensais qu'à ça. J'était incapable de voir quoi que ce soit de joli ou de désirable chez moi.

Ma gorge ce serre. Je n'avais encore jamais formuler toutes ces choses à haute voix.

-Dans les moments les plus sombres, je rêvais de prendre un couteau et de me trancher la graisse pour ne plus jamais le voir, ce corps dégueulasse. C'est horrible je sais, mais j'ai eu une période noire. Je ne pouvais plus me regarder dans le miroir. Pire que ça, me déshabiller était devenu une réelle souffrance, une torture. Quand mes mains frôlait mon corps lorsque je me savonnais sous la douche, il n'était pas rare que je me mette à pleurer. Encore aujourd'hui, je n'aime pas ce que je vois dans le miroir même si je me fais violence pour vivre avec.

Les mots ont du mal à sortir. C'est une douleur qui est encore encrée au plus profond de moi. Et même si aujourd'hui j'arrive à ne plus me voir comme un tas de graisse ambulant, les séquelles émotionnelles restent pourtant graver dans mon esprit. Quand à Julian, je vois bien qu'il est peiné de mon aveux et je sens même une lueur de colère traversé son beau regard. Il ne m'interromps pas, et me laisse suffisamment de temps pour reprendre mes esprits et poursuivre la discussion.

-Les garçons ne s'avaient plus quoi faire. Ils voyaient bien que je m'occupais parfaitement de la petite mais qu'au fond de moi je dépérissais. Et tu sais qui a réussit à me faire sortir la tête de l'eau ? Eux. Ils m'ont entouré de toute leur bienveillance et de tout leur amour. Ils se sont dresser contre Valentin. Quand ils ont appris tout ce que Val m'avait balancé, ils sont devenus fous. Du coup, ils essayaient de me rassurer tous les jours en me complimentant. Ils m'ont permis de me reconstruire petit à petit. Et ce n'est pas tout. Ils ont pris en charge certaines nuits difficiles lorsque Romy faisait ses dents pour que je puisse me reposer. Ils m'ont accompagné à certains rendez vous de contrôle concernant la maladie de la petite. Ils m'ont soutenus encore et encore jour après jour pour que je me remette de tout ça. Ils ont pris partis contre Ashton qu'ils jugeaient trop sévère envers moi quitte même à se le mettre à dos également.

La conversation commence à être bien trop intense. Je ne sais pas si j'arriverais au bout sans m'effondrer totalement.

-Il faut bien que tu comprennes Julian que tu es un rayon de lumière qui a traversé mon existence. Mais je ne peux pas leur faire ça ...

-Attend je ne comprends pas ... Qu'est-ce que tu veux me dire au juste Charlie ?

-Je suis désolée. Tellement désolée ... Je ne peux pas leur faire revivre ça une deuxième fois.

Mes larmes me brouille la vue encore une fois. Je sais que Julian est perdu. Il faut que je lui avoue ce que je ressens.

-Je ne peux pas me permettre de les blesser à nouveau. Pas après tout ce qu'ils ont fait pour moi. Il ne pourra jamais y avoir de toi et moi Julian. C'est à mon tour de protéger mes frères, quitte à mettre de côté mon bonheur personnel. Je me dois de leur rendre tout ce qu'ils m'ont apportés au court de ma vie. Être ensemble serait les trahir, et je refuse.

-Pourquoi le fait d'être avec moi trahirait tes frères ?

-Nous le savons toi et moi, Ashton n'acceptera jamais de nous voir ensemble et les garçons seront encore une fois au milieu de notre conflit. Et si ça ne marchait pas entre nous ? Si nous devions nous séparer en mauvais termes ? Si le même scénario devait se reproduire ? Je ne le supporterais pas une deuxième fois et eux non plus.

-Tu penses vraiment que je pourrais agir comme ce fils de pute ? Tu as si peu d'estime pour moi ? Tu penses vraiment que je pourrais me comporter comme un connard merdique qui, pour se donner un peu de contenance, serait prêt à écraser la femme qu'il a aimé ? C'est comme ça que tu me vois ?

Il à l'air furieux contre moi. Mais je dois rester ferme, il le faut.

-Ils ont déjà trop souffert à cause de moi. J'ai fais le choix du coeur la première fois, je leur doit de choisir la raison aujourd'hui...

-Et tu ne pouvais pas t'en rendre compte avant ? Charlie putain c'est toi qui à chercher tout ça ... C'est toi qui voulait aller plus loin. C'est toi qui m'a dit que tu ne voulais pas te cacher et que tu étais prête à faire face à Ashton pour nous. Je t'ai dis que je n'était pas le genre petit ami et pourtant tu as insisté, tu m'as fais changé d'avis. Tu m'as même donné envie d'y croire à nouveau et maintenant tu te rétractes parce que tu as peur pour tes frères ? Et moi au juste dans l'histoire je suis quoi ?

-Je suis désolée Julian ...

-Répond moi ... Je suis quoi pour toi ?

Il hausse la voix et j'entend la colère et l'incompréhension à travers cette question. Mais je suis incapable de lui répondre ! Je lui enveloppe les deux mains dans les miennes pour qu'il m'écoute attentivement.

-Tu es le rêve que je croyais inaccessible. Tu es celui qui aurait pu me réconcilier avec l'amour. Ne m'en veux pas je t'en prie...Je peux supporter de cacher mes sentiments mais je ne supporterais pas de t'avoir briser...

Il arrache ses mains des miennes et se lève en direction de la fenêtre. Un long silence nous enveloppe. Il est bienvenu et effroyable à la fois.

-Rentre chez toi, Charlie.

Quoi ? Non pas déjà. Nous n'avons pas finis de parler.

-Julian je ...

-Je t'interdis de me dire encore une fois que tu es désolée. Rentre simplement chez toi, s'il te plaît.

Je me lève à mon tour et me dirige vers la porte d'entrée. Je quitte la chambre d'hôtel sans un regard en arrière. J'ai pris la bonne décision. Je l'ai prise pour eux, mais ça ne m'empêche pas de sentir les regrets me dévorer le ventre.

*****

-Glace au chocolat avec double pépite de chocolat. Elle est réservée aux gros bobos celle la normalement. Ou est Romy ?

-Chez Emma. Je ne me sentais pas bien et je ne voulais pas qu'elle me voit dans cette état. Alors je lui ai demandé de me la récupérer chez la nounou et elle la garde pour la nuit.

-Elles vont passé une super soirée toutes les deux mais je peux savoir pourquoi tu ne te sens pas bien ?

-Je crois que j'ai fais la plus grosse bêtise de ma vie Andy.

-OK. Laisse moi prendre une cuillère et on va en discuter tous les deux.

Je renifle bruyamment. Très classe. Il y a aussi un tas de mouchoir usé tout autour de moi. Lorsqu'Andrew revient de la cuisine, il est obligé de pousser du pied les vestiges de mon chagrin pour pouvoir s'installer à même le sol juste à côté de moi. Il m'arrache le pot des mains et prend une bouchée avant de me demander, la bouche pleine de glace.

-Aller Princesse. Raconte moi tout.

Je souris timidement avant de me reprendre une vague de tristesse en pleine poire. Les mots sont coincés. Pourtant il faudra bien qu'ils sortent à un moment ou un autre sinon je vais finir par exploser de chagrin.

-C'est finit. Je l'ai quitté.

-Hum je vois. Pourquoi ?

-Quoi, c'est pas ce que tu voulais ?

-Jamais de la vie. Surtout si ça te met dans cet état ... Je t'ai demandé de voir ce qui était le mieux pour toi. Alors, tu veux me raconter ce qu'il s'est passé exactement ?

Je m'exécute, après tout ça ne sert à rien de lui cacher la vérité. Je lui raconte donc tout dans les détails. De l'étonnement de Julian à sa colère, en passant par son incompréhension. Je sais que je lui ai soufflé le chaud et le froid en l'espace de quelques jours et qu'il doit certainement me détester pour ça. C'est d'ailleurs une des raisons qui me rend autant malheureuse en ce moment. Andrew me prend dans ses bras. Les larmes me submergent. J'ai l'impression de me noyer. Je m'accroche à lui pour ne pas chavirer de désespoir. La porte d'entrée qui claque nous fais sursauter tous les deux.

-On est rentré ... Ça vous dit des sushis ce soir ? J'ai une de ces dalle moi ...

Jay et Knox devaient sûrement être au sport. Ils n'y avaient personne à la maison quand je suis rentrée de l'hôtel. Ils ont l'habitude d'aller courir ensemble le soir et faire quelques exercices en outdoor après le travail. Quand Andy est venu me retrouvé dans le salon, je n'ai même pas pensé à eux. J'étais trop occupée à me lamenter sur mon sort pour me souvenir que je ne vivais pas seule. Je n'ai pas envie qu'ils me voient comme ça. Il va pourtant être difficile de cacher mes yeux tout gonflés et mon visage bouffi par la tonnes de larmes que je viens de verser.

-Andy aide moi, je ne veux pas qu'ils me voient dans cette état.

-Allez prendre votre douche directement les gars, je me charge de passer commande pour tout le monde.

-Elles sont ou les filles ? Romy ? Tonton Knox est rentré ... Tu ne viens pas me faire un bisou ?

Merde, leurs voix se font de plus en plus distincts. S'ils me trouvent assise par terre dans le salon avec cette tête de cadavre, ils vont péter un câble.

-Ah, vous êtes là tous les deux. Ou est la princesse miniature ?

Knox se fige en me voyant, Jayden lui rentre dedans et se stop à son tour.

-Je vais le tuer. Qu'est-ce qu'il t'a fais le playboy à deux balles ?

-Ferme la Knox. Tout est finit. C'est ce que vous vouliez non ? Maintenant foutez moi la paix.

Je me lève et court jusqu'à ma chambre, sans manquer de bousculer mon petit frère au passage.

-Charlie ...

-Laisse la Knox. Elle a besoin d'être seule.

Oui j'ai pas besoin d'être seule. J'ai aussi besoin de dormir et de me réveiller amnésique de ces dernières semaines. La douche d'une demie heure que je m'accorde ne me permet pas d'évacuer toute la douleur qui me coupe le souffle. Et dire que demain je dois aller travailler et que je vais croisé cet homme qui devenait de plus en plus important pour moi et que j'ai finis par rejeter. Etendue dans mon lit, j'espère secrètement qu'il va tenter de me joindre. Qu'il va au moins essayer de me rattraper. Mais l'espoir que Julian me court après malgré tout ne fais que renforcer mon sentiment de culpabilité. Je suis un monstre. Mon portable vibre pour m'indique l'arrivé d'un message. C'est pleine d'espoir que je me jete sur lui pour lire le contenu du SMS.

Valentin : Nous dînons ensemble mercredi soir.
Je dois vous parler les filles.
Ne dis pas non, fais le pour Romy.

L'angoisse me monte encore plus à la gorge. Merde il m'avait dit qu'il voulait qu'on retrourne voir le juge des affaires familiales... Ça y est, il a du prendre ça décision ! Il va vouloir récupérer la petite pour de bon. Qu'est-ce que je vais devenir s'il m'enlève Romy ?

*****

Nous arrivons au restaurant avec dix minutes de retard. Ce n'est pas que je l'ai fais exprès mais l'idée de passer plusieurs heures assise à côté de mon ex mari ne m'a pas fais donné spécialement envie de me bouger les miches pour me préparer. Du coup Valentin nous attend déjà bien sagement assis à une table. C'est lui qui s'est occupé de la réservation et bien sûr il a choisi un petit restau de quartier. Il sait que je raffole de ces lieux vivant ou on partage l'amour des bons petits plats mêlée à la convivialité et la simplicité d'un dîner en famille ou entre amis. Lorsque Romy voit Val, elle se précipite dans sa direction et se jette dans ses bras pour lui faire un câlin.

-Papa !!!!

-Voilà mes deux petites femmes préférées. Bonjour ma chérie.

Qu'est-ce qu'il raconte ? Il a déjà oublié qu'on avait divorcé ? Faut qu'il consulte s'il perd la mémoire à son âge.

-Bonsoir Valentin.

Je suis beaucoup moins enthousiaste pour ma part et me contente d'un petit salut poli de la main avant de m'asseoir à table.

-Charlie, tu es ravissante.

-Moi aussi papa ?

-Tu es toujours belle toi ma puce. Je suis content que vous soyez venues toutes les deux. On va pouvoir passer un bon moment et discuter de notre avenir à tous les trois.

Mais de quel avenir il parle au juste ? Qu'est-ce qu'il est en train de faire là ? Une serveuse vient nous interrompre avant que je ne puisse lui demander des explications. Comme à son habitude, Valentin décide pour tout le monde ce que nous allons prendre pour l'apéritif. Qu'il paterne sa fille s'il le veut mais hors de question qu'il régente encore une fois ma vie. Même pour quelque chose d'aussi futile qu'un simple apéro.

-En fait je vais plutôt prendre un verre de Chardonnay, bien frais s'il vous plaît.

-Tu ne bois plus de champagne ? C'est pourtant ton alcool préféré.

-Oh tu sais, les goûts c'est comme les hommes, on aime bien en changer selon notre humeur...

Si la il n'a pas compris qu'il fallait qu'il reste à sa place ...

-Je vois. Bon je vous laisse choisir alors. C'est moi qui invite, faites vous plaisir les filles, choisissez ce qu'il vous plaira.

-Moi ze veux des frites avec de la viande. Ze peux avoir un jus de fuit aussi ?

-Avec un s'il te plaît ça sera encore mieux Romy. Moi je prendrais une entrecôte avec des frites aussi et toi ma puce ? Euh pardon Charlie ?

C'est pas possible mais qu'est-ce qui lui prend ? Il n'arrête pas avec ses petites réflexion bizarres. Il a pris un chewing-gum à la confiance avant de venir dîner ou quoi ?

-Qu'est-ce que je lui sers à la jolie petite famille ?

Ma main dans ta gueule pour commencer ? Je sais pertinemment que de l'extérieur on pourrait nous prendre pour une famille parfaite. Mais comme je le dis souvent, il faut parfois attendre d'ouvrir la pomme avant de s'apercevoir qu'elle est pourrie . Ce dîner n'a pas encore commencer que j'ai déjà une envie folle de prendre ma fille sous le bras et de me casser. Aller Charlie, respire c'est qu'un mauvais moment à passer.

Une fois que nous avons commander nos plats, Romy accapare toute la conversation ce qui me laisse la chance de ne pas avoir à communiquer avec son père. Je crois que c'est la première fois que je suis aussi contente qu'elle soit une telle pipelette mais tout change lorsque le repas nous est servit. Et c'est dans un silence de plomb que nous commençons à manger. Dommage que Val décide de le briser.

-Ça vous dirait, les filles, qu'on se retrouve toutes les semaines pour manger ensemble ? C'est agréable de se retrouver en famille comme ça.

-Qu'est-ce qu'il te prend Valentin ? Tu sais bien ce qu'il en ait par rapport à notre famille. Qu'est-ce que tu essaie de faire ?

-Pourquoi tu t'énerves Cha. Je veux juste passer un peu plus de temps avec vous. Vous me manquez et j'aimerais qu'on puisse renouer certains liens si c'est possible. Alors pourquoi ne pas en profiter pour se retrouver de temps en temps ensemble. Ça nous rappellera peut être d'anciens souvenirs et pourquoi pas raviver la flamme entre nous.

Je ne l'écoute qu'à moitié, du coin de l'oeil je surveille ma fille. Elle peine à avaler sa bouchée et j'ai peur qu'elle finisse par s'étouffer.

-Charlie tu m'écoutes ?

Non. Il y a un problème plus grave avec Romy. Je le sens et le vois à son expression qui change. En une fraction de seconde elle vomit tout ce qu'elle vient d'ingurgiter et commence à ce tordre de douleur, tellement qu'elle en tombe de sa chaise.

-Romy ...

Je cris dans le restaurant en me mettant par terre auprès d'elle.

-Romy chérie qu'est-ce qu'il se passe ? Dis à maman ou tu as mal mon bébé.

-Maamaannnnn.

Son cri de douleur me déchire le coeur et les tripes. Qu'est-ce que je peux faire pour sauver ma fille ...

-Val appel les pompiers vite! Ne t'inquiètes pas mon poussin on va t'emmener à l'hôpital d'accord ? Tout va bien ce passer Romy je te le promets. Maman est là mon amour. Maman est là. Je suis là ... Val putain ils arrivent dans combien de temps ?

Je la prend dans mes bras mais elle gesticule tellement sous l'effet de la douleur que j'ai du mal à la garder contre moi. Valentin s'accroupit près de nous et tente lui aussi de calmer et rassurer notre enfant. Il communique en même temps avec le médecin du SAMU. Après lui avoir tout expliqué et indiqué l'adresse du restaurant, il jette son portable à terre et parvient à placer Romy en position de sécurité pour ne pas qu'elle s'étouffe si jamais elle se remettait à vomir. La bile me monte à la gorge et je ferme les yeux pour ne pas pleurer. Il faut que je sois forte pour elle. Romy à besoin d'une maman solide qui la réconforte et qui la soutienne. Je me mets derrière elle dans la même position et la serre fort dans mes bras. Je n'en ai rien à foutre d'être en plein milieu d'une salle de restaurant. Le plus important c'est le petit corps chaud que je tiens fermement au creux de mes bras. Elle sanglote entre deux crises, la douleur lui coupant parfois même le souffle. Son papa tente de la rassurer en lui caressant la joue et les cheveux. Quand à moi je suis anéantie, terrifiée et totalement angoissée. Qu'est-ce qu'il va arriver à mon petit bébé... Elle a suffisamment souffert. Lorsque les pompiers nous transporte jusqu'à son hôpital, je pris silencieusement pour que tout ça ne soit qu'un mauvais rêve. Pitié, faites que ma fille s'en sorte sans trop de difficultés, ce n'est encore qu'un bébé. Pitié...

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