Mère et Cole

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Ma mère s’avança lentement vers moi et me glissa à l'oreille, alors que nous étions seul : « Je dois vous parler, Kerwan !

– Ne serait-il pas préférable d'attendre mon retour ? répliquai-je aussi doucement qu’elle. Je suis attendu quelque part.

– C'est assez urgent, insista-t-elle, d’un air inquiète.

– Si c’est au sujet d’Anna, je vous préviens : je ne suis pas en mesure d’en discuter ! »

Elle secoua la tête nerveusement ; puis, passa délicatement son bras au-dessus du mien et m’emmena vers le salon.

Assise en face de moi, elle respira longuement avant de commencer : « Ce soir… votre père compte vous parler du problème que vous avez causé, au Collins ! »

Mon silence, l’obligea à s’exprimer davantage : « Je veux savoir, Kerwan, si ce que vous apprêtez à dire, risquerait de nous perturber. »

Elle croisa nerveusement les mains, attendant avec supplice mon verdict. Je me levai de ma chaise et marchai quelques pas avant de répondre : « Pourquoi avez-vous laissé écouler autant de temps, avant de me demander des explications ?

– Nous espérions que cela, viendrait de vous, Kewan. J’étais loin d’imaginer qu’un jour… j’aurai à vivre une telle situation… c’est si pénible ! ponctua-t-elle en se redressant brusquement sur son siège. »

Son regard sombre, avait quitté depuis longtemps le mien, quand je décidais de m’approcher d’elle et de me mettre à genoux. Je pris ses mains crispées entre les miennes et déclarai : « Mère, je n'ai jamais eu l’intention de tuer, Elisabeth Collins !

– Votre but, était-il de la blesser ? lâcha-t-elle, effrayé. »

Mon regard perdit soudainement de sa crédibilité. Mon hésitation à répondre, confirmait indéniablement ses craintes. Tant pis, je m’apprêtais, quand même, à mentir. Mais avant de commencer, je pressai de plus en plus sur ses poignets comme si, je la suppliais de me croire en soufflant péniblement ces mots : « Ce qui s'est produit, était purement un accident ! »

Bien que ma parole trahissait mon regard, cette femme, avait fait le choix conscient de me croire. Elle détacha ses poignets de mon emprise et vint de ses mains tendres, me caresser le visage. Je me couvris de ses bras comme pour me cacher de mon propre mensonge.

Le mot accident, avait suffi à la faire taire, sans qu’elle demande les détails. On aurait dit, que même à elle, le mensonge convenait.

Au moment où, je m’apprêtai à monter dans la voiture pour aller rejoindre Andrew, une autre venait de rentrer dans la résidence des Driscoll. Je m’arrêtai, curieux par cette nouvelle visite. Un homme, d’une trentaine d’année, descendît, et me salua chaleureusement.

« Bonjour, Kerwan ! s’exclama-t-il avec un sourire qui ne m'était pas inconnu. »

Etrangement, il ressemblait à celui de Sarah. J’en déduisais, qu’il ne pouvait s'agir que de l’aîné des Collins.

« Cole ! M'exclamai-je avec bonne humeur. »

Me sentant quelque part obligé, alors que ce n’était pas de coutume d’un homme de mon rang de prendre un ami dans ses bras, je le fis, quand même. Lui, un peu surpris par mon geste, hésita un peu avant de me serrer à son tour.

Je l’invitai à rentrer tout en appréhendant cette rencontre. Nous fûmes installés dans le salon, attendant que ma mère, nous rejoigne. Bien qu’elle fût un peu méfiante par sa venue, elle était restée courtoise et chaleureuse envers lui. Il commença par me donner un rapport détaillé, de tout ce qu'il avait entrepris depuis mon absence, dans l'usine de textile de Belfast. J’avais eu un peu du mal à le suivre. Je ne pouvais compter sur les réflexes restant de Kerwan puisque, le monde des affaires, n’était pas aussi intéressant pour moi, que de celui de jouer au piano. Je commentais par-ci par-là, quand je saisissais le sens de ses propos, me forçant de témoigner un quelconque intérêt dans cette conversation.

Quant à ma mère, elle se réjouissait du sujet de la discussion. L’usine de son fils, était sa plus grande fierté. De plus, elle se trouvait soulagée de ne pas entendre, l’histoire de Elisabeth évoquée.

Cole, me proposa de faire à tour dans le jardin et sans attendre ma réponse, il se leva, soudainement, et salua ma mère pour souligner la fin de l’entrevue. Surprise par son geste, elle comprit bien vite de quoi, Cole Collins, allait me parler. A peine sortie, voila qu’il me demandait des explications.

« C'était un accident ! répliquai-je avec aisance. En voulant montrer le pistolet à Andrew, la balle est accidentellement partie. Il me semble, qu'il vous en a parlé !

–Oui, en effet, Andrew m'a écrit ! précisa-t-il, en sortant un mouchoir pour essuyait discrètement les gouttes de sueur qui perlaient sur son visage. Seulement, reprit-il, la version de mes frères est tout autrement. »

Il s’arrêta sur le côté et se pencha, à la manière d’un vieux monsieur, sur l’un des rosiers du chemin pour humer ses fleurs. Une main derrière le dos, tenait son chapeau et l’autre effleurait délicatement les pétales de roses.

Il continua, toujours, dans la même posture : « Ils confirment qu’au moment, où vous étiez en train de montrer à Andrew votre nouveau pistolet, vous avez, soudainement, tendu le bras, pointé votre arme dans la direction d’Élisabeth et vous avez tiré.

Il avait détaillé ces évènements en ayant, toujours, le nez sur ses roses, comme si, tout cela ne le concernait pas.

J’avais dû attendre que son regard revienne vers moi, pour lui répondre : « Si j’avais eu l'intention de la tuer, je ne l'aurais pas loupé ! Cole, vous savez très bien que ce n’est pas le cas ! »

Il resta à me fixer sans rien dire

– Qu'ils prouvent ce qu'ils s'avancent, m’exclamai-je, irrité.

– Reprochez-vous quelque chose à Élisabeth ? demanda-t-il, cette fois-ci, d’un air méfiant.

– Pourquoi dites-vous cela ?

– Car c'est ce qu'elle affirme, Kerwan !

–Que vous a-t-elle dit à ce sujet ? »

En étant debout toujours au même endroit, il m’examina pendant quelques secondes puis décida de reprendre sa marche. Cette fois-ci, en s’amusant comme un enfant, affaire valser son chapeau sur son poignet.

« Elle affirme que vos intentions étaient préméditées et que vous cherchiez à la tuer, finit-il par déclarer en balançant, contre toute attente, son chapeau dans les airs.

– Et vous, Cole, l’avez-vous cru ?

– Bien sûr que non ! dit-il en essayant de rattraper son galurin. »

Mais ce dernier venait d’atterrir parterre. Il se pencha pour le ramasser et en même temps qui le dépoussiérait, il rajouta : « Cependant, j'ai aussi du mal à croire que la balle soit partie accidentellement !

– Malheureusement, je n’ai aucun moyen de vous prouver mon innocence ! Laissez-moi la voir, Cole... Pourriez-vous organiser une rencontre entre elle et moi ?

– Justement, je dois vous dire que je ne suis pas venu ici que pour cela. Deux êtres ne peuvent rester fiancé, après une telle histoire. Elle m’a chargé de vous dire, qu'elle annulait tout en engagement envers vous. Je suis vraiment navré, Kerwan ! »

Il avait accompagné sa dernière déclaration par un piteux regard.

« J’espère que la décision prématurée de ma jeune sœur, n’affectera pas notre amitié ! rajouta-t-il, hésitant.

– Bien sûr que non ! le réconfortai-je d’un grand sourire. »

Il me tapa gentiment sur l’épaule pour me témoigner sa gratitude. Je l’accompagnai vers sa voiture tout en essayant de le persuader d’arranger une rencontre avec sa sœur. Il finit par se laisser convaincre et accepta.

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