Chapitre 4 : Chloé - Nuit épique

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Nous filâmes dans sa chambre et nous dépouillâmes dans la hâte de nos vêtements, tout en essayant de ne pas réveiller Allan et Archie. Elle était debout devant moi. Nue. Avec un peu de pudeur. Son regard avait presque touché mon âme tant elle était gênée de notre promiscuité. Je m’accolai à elle pour la réconforter, pour lui dire que tout allait bien se passer. Elle me serra très fort, comme si elle avait eu plus peur de me perdre que de ce qui allait suivre.

Nos esprits, enivrés par l’alcool de la soirée, nous avaient mené là, face à face. Elle se glissa dans son lit, ajusta la luminosité de la pièce et m’invita à la rejoindre. Nous n’étions pas ensemble, mais on se connaissait. Pas dans une telle intimité. Elle me fixa tendrement, puis d’un geste mécanique, saisit ma tête et m’embrassa avec passion. Un baiser surréaliste. Je ne résistai pas à ses lèvres et passai ma langue dans sa bouche vermeille. Sa langue agile témoignait de son excitation. Et ses passages lents et langoureux, étaient d’une incroyable douceur.

Nous étions cachés sous les draps. Je descendis ma main vers ses seins. Je la dessinai en caresses précises. Sa poitrine se soulevait à mes passages affleurants, et sa main me cajolait à mes délicates intentions. Elle me demanda de m’allonger sur le ventre. Ses doigts pianotèrent le long de mon échine créant la douce ondulation et une bienveillante chaleur. Puis elle visita ce dos de ses lèvres carmines. Elle stoppa net son exploration.

—Mon dieu Ale ! Toutes ces cicatrices !

Sa main se répandit sur ma peau à la recherche de tous les stigmates. Ma tête tourna dans sa direction. Mon regard s’était changé, presque paniqué.

—Je vis avec des blessures qui n’ont jamais cicatrisé. Elles ont des racines profondes que je tente, tant bien que mal, de cacher.

Mon désir commençait à s’estomper à l’évocation de ce trop lointain passé. Et je me sentais gêné de ces gants de rose qui flirtaient avec elles. Je n’aurai pas eu la même réaction avec une inconnue. Mais là, c’était Chloé. Elle décela aussitôt mon malaise.

—Ferme les yeux. Me dit-elle.

J’obéis et je sentis à nouveau sa bouche se poser sur toutes ces scarifications de l’existence. Chaque approche se révélait en baume apaisant. Elle pouvait sentir mon goût, et je ressentais sa dévotion à me soigner. Son tactile prenait le contrôle de mon corps. Jamais une femme ne m’avait touchée comme ça. Non, j’avais beau chercher, je ne m’en souvenais pas. Elle me retourna sur le dos et me fixa droit dans les yeux. Sa poitrine frôlait la mienne en passages lents et sensuels. À cet instant, j’étais à elle. Elle était magnifiquement mise en valeur par la danse des lumières feutrées.

—Regarde mes yeux posés sur toi. Soupira-t-elle.
—N’aie pas peur de nous, Ale, de nos corps enlacés. On ne fait que combler notre vide et en cette nuit, je te désire plus que tout.

Ses mots m’avaient fait défaillir. Nos peaux se cherchaient et se troublaient de chaleur. Le mat de la mienne mêlé au blanc de la sienne. Elle humait mon odeur. Je caressais sa douceur.
Les langues virevoltaient entre les souffles qui s’entrecoupaient et les pouls qui s’accéléraient. Ce regard sur moi, enveloppant de bienveillance, masquait son désir féminin d’être prise toute entière. Elle adorait voir mon excitation lorsqu'elle me caressait l'entre-jambe. Et elle se glissa finalement sur cet objet du désir et nos mains se rejoignirent. Je la ressentis comme elle me sentait. Son corps ondula et ses yeux basculèrent en mi-clos, comme pour ressentir chaque émotion que lui procurait mon intime intrusion. Sa cadence hypnotique prolongeait l'instant et je ne voulais pas brusquer sa délicatesse du moment. Dieu sait que j’en mourais d’envie. Elle s’approcha de mon oreille et susurra :

—Fais-le…

En galant homme, guettant et attentif à ses gestes de femme, je lui demandai ce qu’elle voulait.

—Fais-moi l’amour… Fais-moi l’amour mon gentleman, mais comme le loup que tu deviendrais la nuit. Ne te retiens pas parce qu’on se connaît.

Elle avait des mots de femme qui s’adressait à son nouvel amant, mais dont elle connaissait le passé. Ses mots eurent une portée explosive, une saveur de folie, une furieuse envie de moi.
Mon regard lui disait « Que tu es belle ! » Et elle se sentait jolie. Sa pudeur initiale avait cédé à une forme de confiance dans ses désirs de femme. Sous mes caresses, elle se lovait et s’abandonnait. Mes instincts dominants se révélèrent, tel un Phoenix renaissant de ses cendres. Elle ne me connaissait pas ainsi. Uniquement lors de nos confessions intimes. Et ce soir, elle allait en connaître davantage.

Je déchaînai mes fureurs à coups de reins, mes mains plantées dans ses hanches. Ses gémissements m’encourageaient à donner plus, à vouloir plus d’elle. Mes râles l’accompagnaient dans sa détresse lubrique. Elle me noyait dans notre torride moiteur entre morsures, griffures et baisers. Elle avait déclenché un brasier ardent au creux de mes entrailles que je peinais à contenir. Elle pénétrait mon âme. Elle le savait. Pour la première fois, peut-être, je n’avais aucune crainte.

—N’aie pas peur. Me disait-elle.

Peur de quoi ? Son sourire, entre deux souffles courts, illuminait notre nuit. Elle me mordit le cou lorsque j’accélérai la cadence. Puis ses mains caressèrent mon visage. Ce n'était pas que du sexe. Il y avait une complicité, une attention réciproque aux moindres détails, une tendresse surprenante, contrastant avec la bestialité de notre acte. Ses doigts se crispèrent, s’agrippèrent au drap blanc.
Ses lèvres vermeilles se soudèrent aux miennes. Elle ferma les yeux. Moi non. Je ne pouvais que la regarder, dans sa nudité entière, dépouillée de tous ses maux. Je l’aimais la voir ainsi. À cet instant, je sus que j’étais bon. Je sus surtout qu'elle était bonne.

Chloé rouvrit les yeux. Elle rougissait. Elle rougissait du plaisir qui commençait à torturer son ventre. Je fondais en elle et la libération était proche. Nos reliefs enlacés, nous prîmes un plaisir aux allures d’éternité, mais courte pause dans nos vies bousculées.

Nos corps s’affalèrent sous le poids du relâchement et elle se blottit dans mes bras. Je me surpris moi-même à la regarder droit dans les yeux. Le silence. Juste un regard. Ses doigts esquissaient sur mon corps toutes ces minutes volées. Puis elle s’endormit paisiblement. Je m’échappai de son étreinte durant son sommeil et regagnai ma chambre. Des pensées se bousculaient dans ma tête, mais la fatigue eut raison de moi.

Le réveil prit des allures de calvaire. Une journée chargée m’attendait. Archie avait préparé un petit-déjeuner copieux. Tant mieux ! J’avais besoin de reprendre de l’énergie. Allan s’activait et semblait nerveux. Il recevait dans son magasin l’équipe des Knicks pour une promotion commerciale.

—N’oubliez pas que ce soir, on va au match !

Il se tourna dans ma direction.

—Il faut que je te parle. On mange ensemble ce midi. C’est important.

Par réflexe, mes yeux fusèrent vers Chloé. Instinctivement, elle plongea la tête vers son bol. Aurait-il compris ce qui s’était passé ? Chloé lui avait-elle avoué ? Je ne paniquai pas. Nous étions après tout des adultes, consentants de surcroît.

—OK ! Envoie-moi un message et dis-moi où je te rejoins.

Il me fit une tape amicale mais énergique sur l’épaule et quitta l’appartement. Je devais y aller aussi. Un client important m’attendait pour qu’on dessine son bateau. Chloé me lança un clin d’œil complice.

—A plus tard Ale.

Sa réaction me rassura sur un point. In n’y avait pas de gêne entre nous. La matinée fut peu productive. J'avais l'impression que mes fonctions cognitives étaient au ralenti. Surtout, le film de la soirée passait en boucle dans ma tête. Une bande-annonce obsédante en défilement rapide. Et mon client remarqua ma distraction. Finalement, nous parvînmes à peaufiner sa maquette et le résultat n'en demeurait pas moins impressionnant. Une franche poignée de mains plus tard, je partis rejoindre Allan. Il semblait moins nerveux que ce matin et son sourire s'élargit à ma vue.

—Alors cette entrevue ?
—Rien d'exceptionnel. Le rendu final de la maquette lui a plu. Mais ce n'est pas de boulot dont tu voulais parler. Ça avait l'air assez important pour toi.

Entre deux bouchées, il prit un air à peine sérieux.

—Anne a passé la nuit à l'appartement. Scénario habituel. On a fait l'amour et, crois-moi, c'était top, mais je te passe les détails.

Un immense soulagement me parvint du fond de mes entrailles.

—Et ?
—Je n'en reviens pas qu'elle ait filé à l'Anglaise ! C'est mon truc de me défiler avec une excuse sur-mesure made in me et de laisser la fille en plan.
—Quand je disais que cette fille était faite pour toi. Si cela te gêne tant, c'est que tu es peut-être amoureux. L'as-tu envisagé ?

Il était à la limite de l'offuscation.

—Non, non ! Bégaya-t-il. C'est juste que j'ai l'impression d'avoir été manipulé, d'avoir été son jouet, Sérieusement, regarde-moi ! Ai-je l'air du gentil garçon qu'on peut user aisément et à sa guise ?

Je ne pus m'empêcher de rire.

—Laisse tomber Allan. Ce n'est pas grand-chose. Tu la reverras sous de meilleurs auspices. De plus hier, nous étions tous pas mal alcoolisés. Tu as baissé ta garde. No big deal.

Il prit un instant de réflexion, se détendit et enchaîna.

—Tu as sûrement raison. Je m'en fais trop pour peu. C'était une sacrée soirée, soit dit en passant.
—J'avoue. Heureusement qu'on ne fait pas ça tout le temps !
—En parlant de barrières qui tombent, il s'est passé quoi en Chloé et toi ?

Je me figeai.

—Allez, ne fais pas semblant. Non seulement, on vous a entendu, mais je t'ai vu sortir de sa chambre.

Je n'avais aucune option de secours. J'étais démasqué.

—Tout ce que je peux te dire, c'est que je ne sais pas comment on en est arrivé là. Moi-même, je me pose la question. Et pleins d'autres. On est tous amis et je n'ai pas envie de malaise.
—Quel malaise ? Mon meilleur ami qui couche avec ma meilleure amie, c'est juste trop cool. A vrai dire, je croyais que vous l'auriez fait beaucoup plus tôt.

Je pris un air étonné.

—Tu ne te rends pas compte Ale comment elle regarde. Et crois-moi, s'il y a bien une personne qui pouvait passer une nuit avec elle dans cet appartement, c'était bien toi.

Je ne savais pas si c'était censé me rassurer, mais ce ne fut pas le cas. Allan me bombardait de questions aussi futiles qu'intimes et je pris soin de botter un maximum en touche. Il me fallait toutefois éclaircir cette situation avec Chloé.

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