Chapitre 15 - Homecoming Ball partie 3

5 minutes de lecture

« Qui était-elle ? ». Cette question ne tarda pas à tarauder Thomas. La vision qu’il venait d’avoir fut si brève qu’il crut un instant à un mirage. Il était pourtant bien réveillé, alerte, mais ceci lui paraissait étrange comme un rêve. Son coeur battait à vive allure et ses jambes étaient toujours collées au sol. Il continua de fixer au loin, vers cet endroit où il n’y avait désormais plus personne. Un sentiment nouveau le gagna. Ce n’était pas la même excitation à l’idée de rejoindre les Etats-Unis, la même angoisse en pensant à sa future famille d’accueil ou la même joie qu’en découvrant son nouveau lycée. C’était autre chose.


— Tiens, je t’ai pris un verre, dit une voix au creux de son épaule gauche.

Thomas se tourna dans sa direction et vit Alicia qui lui tendait un verre jetable.

— C’est quoi ? demanda-il, tout en essayant de reprendre ses esprits.

— T’inquiètes, c’est du Coca.


Thomas la remercia, prit le verre, puis la suivit à l’écart de la piste de danse.


* * *


Alors que la soirée continuait sur un tempo plus lent, quittant le rythme endiablé des chansons rock pour le rythme doux du slow, Thomas sentit son téléphone vibrer dans sa poche. Il dégagea ses mains des hanches d’Alicia et s’écarta de quelques centimètres pour le prendre en main.


— Qu’est-ce qui se passe ? demanda Alicia.

— C’est tes parents, ils sortent du ciné et passent nous prendre dans cinq minutes.


Thomas et Alicia se rendirent alors vers le buffet pour prendre une dernière part de brownie. Ils se dirigèrent ensuite vers la sortie du gymnase, et Thomas s’arrêta un court instant pour contempler une dernière fois la décoration, les lumières et l’ambiance qui se dégageait. Des gouttes d’eau saisirent instantanément les deux adolescents au moment où Alicia ouvrit la porte de sortie.


— Tiens, prend ma veste, dit Thomas.

— Merci, marmonna Alicia, essayant tant bien que mal de finir sa part de brownie tout en protégeant son visage.


Thomas installa sa veste au-dessus de la jeune fille, comme une cape. La fierté qu’il retirait de son geste chevaleresque lui permettrait sans doute d’occulter la pluie pendant quelques minutes, le temps de retrouver James et Tracy. Les deux adolescents remontèrent l’allée d’un pas décidé afin de revenir à l’intérieur du lycée au plus vite. Alicia maintenait du bras droit le col de la veste de Thomas pour éviter d’être trop mouillée, tout en prenant conscience que sortir dans une telle tenue, à laquelle elle n’était pas habituée, n’était peut-être pas une si bonne idée. Ils poussèrent un ouf de soulagement en arrivant dans le réfectoire. Thomas constata que sa chemise blanche avait pris l’eau à de nombreux endroits, et laissait partiellement entrevoir sa peau. Alicia avait eu plus de chances et seuls le bas de sa robe était mouillé par cette pluie soudaine. Tout deux pouvait désormais tranquillement regagner l’entrée principale du lycée, où James et Tracy ne tarderaient pas à les attendre.


— Pourquoi tu as voulu faire ce slow ? s’interrogea-t-il.

— Je n’aime pas trop ça, mais je ne pouvais pas te laisser te ridiculiser seul sur la piste de danse, ricana-t-elle.

— Très drôle

— Mais attention, c’était en tout bien tout honneur. Je te rappelle qu’on est frère et soeur, rajouta-t-elle avec un sourire.


Thomas lui rendit son sourire, amusé.


— Tu as aimé ta soirée ? T’avais pas l’air dans ton assiette au début, lui demanda-t-elle.

— Oui, c’était cool. J’étais juste un peu stressé par tout ce monde, mais ensuite ça allait mieux.

— Tant mieux, j’ai bien aimé cette soirée aussi. Mieux que l’année dernière.


Arrivé devant la porte de l’entrée principale, Thomas reçut un appel. « James » était affiché sur le téléphone.


— Allo Thomas, par chance on est garé juste devant, vous êtes où ?

— On sort du lycée à l’instant.

— Super, à tout de suite !


Thomas raccrocha puis indiqua à Alicia que les parents de celle-ci étaient arrivés. Une fois sortis, la jeune fille reconnu immédiatement le 4x4 blanc de son père.


— Ils sont là, suis-moi.


Les deux adolescents coururent à vive allure vers la voiture. Thomas, qui avait récupéré sa veste trempée, se précipita avec celle-ci sur le dos, tandis qu’Alicia tenait les pans de sa robe pour ne pas tomber. Tous deux se jetèrent sur la plage arrière et fermèrent leur portière respective d’un vif coup de main. Exténués par leur sprint, ils soufflèrent après avoir enclenché leur ceinture.


— Alors, ça vous a plu ? demanda James, le regard dans le rétroviseur intérieur.

— Oui, très, répondit Thomas entre deux expirations.

— Ravi de l’entendre ! Figure-toi que c’est à ce même bal de rentrée que j’ai rencontré Tracy. Elle était si belle dans cette robe bl…

— Papa ! coupa Alicia

— Désolé, je ne suis pas du genre bavard mais quand ça concerne ma famille… Enfin bref, c’est super si tu t’es amusé.


La conversation continua quelques minutes, puis la voiture arriva à destination, devant la porte blanche du garage. James actionna le bouton d’une télécommande accroché à ses clés et instantanément la porte commença à se lever. Lorsque celle-ci fut complètement ouverte, il se gara à l’intérieur du garage et coupa le contact.


— Il va être temps de se coucher, bailla Tracy.

— Oui, je crois qu’une bonne nuit fera du bien à tout le monde, renchérit James.


Tout le monde sortit de la voiture alors que la porte du garage entamait sa descente. Arrivés dans la maison, James et Tracy se rendirent à la cuisine tandis que Thomas et Alicia se dirigèrent vers l’escalier. Les deux adolescents adressèrent un geste de la main aux deux adultes, assis autour de l’îlot central un verre à la main. Thomas laissa monter Alicia devant puis lui emboîta le pas. Ils firent chacun leur tour un passage express dans la salle de bain, puis se quittèrent sur le pas de leur porte respective en se souhaitant bonne nuit.

Thomas s’assit quelques instants sur son lit pour réaliser ce qu’il venait de vivre. Le voilà, l’un de ces moments qu’il attendait le plus, une étape incontournable de la scolarité américaine. Il avait pu toucher son rêve américain d’encore un peu plus près. Et même s’il fut quelques peu timide au début, devant ce déluge d’accoutrements somptueux et de décorations clinquantes, il était fier d’avoir eu le cran de dépasser son appréhension et avait vraiment le sentiment d’avoir bien profité de sa soirée. La complicité qu’il nouait avec Alicia y était pour quelque chose, et il était ravi d’avoir pu danser avec elle quelques instants. Mais au-dessus de tout ça, une chose accaparait encore plus son esprit.

Il envoya un sms à ses parents, leur indiquant que la soirée avait été formidable et qu’il en était ravi, puis se déshabilla et enfila son pyjama rayé. Il éteignit l’ampoule du plafond, laissant la pièce éclairée uniquement par sa lampe de chevet, posa son téléphone près d’elle, puis se glissa dans son lit, en faisant bien attention de reborder les draps juste après. Il actionna l’interrupteur de la lampe et aussitôt la chambre fut plongé dans une obscurité relative, transpercée par quelques rayons de la lune.

Désormais seul, Thomas se remémora la vision fugace qu’il eut au début de la soirée. Cette jeune fille, vêtue d’une magnifique robe bleue, n’était apparu sous ses yeux qu’un court instant, mais restait désormais figée dans son esprit. Il n’avait pu voir son visage, mais la courbe de son dos nu et ses longs cheveux blond foncé avait fait chavirer le coeur de Thomas, et il chavirait encore. Il ne la reverra probablement jamais, ou n’en aura certainement pas conscience si c’était le cas, pourtant ces quelques secondes avaient déjà laissé en lui une trace indélébile.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire Julien Beaulieu ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0