Chapitre 8 - Home of the Panthers

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— Thomas ?


Une douce voix arriva aux oreilles de Thomas. Il sentit un léger souffle sur sa joue, qui le tira de son sommeil. Il ouvrit timidement ses yeux mais la lumière au plafond l’obligea à les refermer.


— Il est quelle heure ? demanda-t-il

— Il est 5h30. Réveille-toi, tu sais bien qu’aujourd’hui il faut absolument qu’on soit en avance.


Thomas sentit la présence d’une main sur son épaule droite, il se tourna de façon à éviter la lumière du plafonnier de sa chambre puis ouvrit une nouvelle fois les yeux. Il vit alors une silhouette devenir de plus en plus nette à mesure qu’il émergeait, puis lui sourit. Alicia se tenait debout devant lui, habillée simplement d’une petite nuisette noire aux reflets satinés. Le vêtement restait assez ample, ce qui ne permettait pas à Thomas de distinguer les courbes de l’adolescente. Elle lui rendit son sourire puis s’approcha de la porte.


— Va prendre une douche, ça te fera du bien, dit-elle. J’irai après avoir mangé.

— Ok, à tout de suite, répondit Thomas.


Après qu’Alicia eut quitté la pièce, il se leva de son lit, non sans difficulté. Dehors, la lumière du jour peinait encore à traverser l’obscurité de la nuit. Les quelques jours qui passèrent depuis son arrivée lui avaient permis de nouer une complicité avec Alicia, mais aussi de se familiariser avec les habitudes de sa famille d’accueil. Il avait peu à peu pris ses marques, et connaissait désormais parfaitement les règles de la maison.


Afin qu’il puisse découvrir Orlando, autrement que par la vitre du bus scolaire qui l’amènera chaque jour au lycée, James et Tracy lui avaient proposé d’aller parcourir la ville lorsqu’Alicia assisterait à ses cours du soir. Thomas, bien que surpris, n’était pas réfractaire à cette idée. Cela lui permettra sans doute de voir la ville sous un regard neuf, loin de l’agitation du lycée, et, seul, de pouvoir s’en imprégner à son rythme. Il resterait de toute manière joignable et n’était de toute façon pas du genre à prendre des risques inconsidérés, d’autant plus dans un endroit qu’il ne connaissait pas.


Aujourd’hui était synonyme d’une nouvelle étape pour Thomas. Le jour qu’il attendait depuis tant de temps, le jour d’un rêve qui se concrétisait enfin, le jour du début d’une nouvelle aventure. Aujourd’hui, il s’apprêtait à vivre une expérience qu’un grand nombre de jeunes de son âge lui enviait. Aujourd’hui, il mettait fin à une vie de procuration pour embrasser complètement ce qui lui semblait encore inimaginable il y a quelques temps.


La tête encore un peu dans les nuages, Thomas prit des affaires propres dans son placard puis sortit de sa chambre. En pyjama, il remonta le couloir de l’étage puis ouvrit la porte de la salle de bain. Il posa ses affaires sur un petit tabouret près de la douche, puit tourna le loquet de la porte.


Une quinzaine de minutes plus tard, Thomas sortit de la salle de bain, habillé d’une chemise blanche et d’un jean noir fraîchement repassé. Il se dirigea vers l’escalier et croisa Alicia dans la descente.


— En voilà quelqu’un de bien habillé, dit Alicia. Je vais faire tâche à côté de toi.


Thomas n’eut pas la répartie de répondre à ce qui semblait être un compliment pour lui et une critique pour elle. Au lieu de ça, il ne put que sourire bêtement tout en continuant à descendre les marches.


Lorsqu’il arriva dans la cuisine, il vit James en plein nettoyage du plan de travail.


— Ah, te voilà Thomas, s’exclama-t-il. J’ai fait une grosse tournée de pancakes, n’hésite pas à te servir.


Ravi de cette délicate attention, et tout aussi heureux de ne pas avoir à se faire son petit déjeuner lui-même, Thomas se rendit au frigo, l’ouvrit, et en sortit une grande bouteille de jus d’orange. Il se servit un verre, remercia James, puis piocha trois pancakes dans le tas qui lui faisait face. Il prit un tabouret haut et vint s’asseoir devant l’îlot central de la cuisine. Enfin, il arrosa son assiette de sirop d’érable, prit fourchette et couteau, et commença à manger. En voyant le sirop qui dégoulinait, Thomas se rappela le caramel qu’il avait l’habitude de mettre sur des crêpes encore chaudes. La couleur était similaire, mais le sirop était plus liquide, presque mielleux.


Thomas engloutit son repas en quelques minutes, pressé par la volonté de ne pas être en retard tout autant qu’excité par ce qui l’attendait. Il déposa couverts, verre et assiette dans le lave-vaisselle, remis la bouteille de jus d’orange au frigo, puis prit la direction de la salle de bain pour finir de se préparer. Arrivé devant la porte, il n’entendit qu’un léger bruit d’écoulement d’eau.


— Tu en as encore pour longtemps, demanda-t-il après avoir frappé à la porte.

— Tu peux venir, je suis presque prête.


Thomas entra dans la salle de bain et vit Alicia face à son miroir, en train de se laver les dents.


— Désolé de te déranger pendant que tu te prépares, s’excusa-t-il.

— Pas de soucis, baragouina-t-elle, sa brosse à dents encore dans la bouche.


Elle cracha dans son lavabo, puis reprit une conversion plus audible.


— Pas de problèmes, il ne faut pas qu’on soit en retard.


Alors que Thomas saisissait sa brosse à dents d’une main et son dentifrice de l’autre, Alicia ouvrit un tiroir et en sortit un sèche-cheveux. Elle l’actionna à vitesse maximum, et rapidement ses cheveux bruns mouillés devinrent secs. Elle donna ensuite un coup d’oeil à son reflet, et prit l’un des produits de beauté éparpillés autour de son lavabo. Tandis que Thomas donnait des derniers mouvements de mains cirées dans ses cheveux pour parfaire sa coiffure, Alicia prit soin de mettre du eye-liner, du fard à paupières noir et du rouge à lèvre effet « nude ». À cet instant, Thomas n’avait d’yeux que pour son regard devenu charbonneux.


— Je vais chercher mon sac dans ma chambre, dit-il.


Visiblement concentrée sur les derniers détails qu’elle appliquait à son visage, Alicia ne répondit pas et se contenta de fixer Thomas dans les yeux à travers le reflet du miroir.


Thomas prit quelques secondes pour vérifier qu’il n’avait rien oublié puis sortit de sa chambre, son sac à dos sur une épaule. Au même moment, Alicia sortit de la salle de bain, et ferma la porte tout en enfilant un bomber rouge bordeaux aux manches blanches. Lorsqu’elle se tourna vers Thomas, celui-ci remarqua qu’elle portait en dessous un simple t-shirt gris accompagné d’un jean noir. Son regard se posa ensuite sur les initiales HB brodés au niveau du coeur. Thomas n’eut pas besoin de pousser la réflexion très longtemps pour en comprendre la signification puisque, laissant Alicia descendre avant lui, il lut « Harvey Benjamin High School » inscrit dans son dos.


Elle attrapa son sac à dos au pied de l’escalier puis le duo rejoignit le garage, où James attendait.


— Vous êtes prêt pour ce premier jour ? demanda-t-il.


Alicia et Thomas acquiescèrent au même moment.


— Alors, en voiture !


Le lycée était situé à une demi-heure environ du domicile de la famille Walker. Si, habituellement, un bus scolaire viendra récupérer chaque jour Thomas et Alicia ainsi que tous les autres adolescents du quartier, aujourd’hui il en était différemment. Thomas et Alicia avait décidé de se rendre plus tôt au lycée afin que cette dernière puisse lui faire une visite rapide de l’établissement. Thomas se souvenait de sa rentrée au lycée en France, en classe de seconde, et de la difficulté de se repérer dans un environnement nouveau, beaucoup plus grand que ce qu’il avait connu jusqu’alors. Avoir un guide à ses côtés et quelques minutes devant lui n’étaient donc pas de refus.


* * *


Le 4x4 ralentit à l’approche d’un immense bâtiment dont la façade était partiellement éclairée par la lumière de quelques lampadaires et du soleil qui se levait. Étant donné l’heure matinale à laquelle ils arrivèrent, James n’eut aucun mal à se garer à proximité.


— Nous y voilà, passez une bonne journée, s’exclama-t-il.


Thomas et Alicia descendirent du véhicule et adressèrent un geste de la main à James, qui leur rendit et prit la route en sens inverse.


Désormais seul avec Alicia, il suivit cette dernière qui avançait à bon rythme, visiblement décidée à ne pas perdre une seconde de la précieuse avance qu’ils avaient avant que ne s’amasse une foule d’adolescents plus ou moins contents de retrouver le lycée. Le soleil levant commençait à dévoiler les contours du grand bâtiment qui faisait face à Thomas. Tandis qu’il avançait dans sa direction, marchant sur un chemin à travers des pelouses fraîchement tondues et de grands palmiers, il distingua une sorte d’arche aux coins pointus, collée au bâtiment. Le soleil commença à la frapper de ses rayons, et Thomas put lire l’inscription qui y était gravée, à des dizaines de mètres au-dessus de sa tête : « Home of the Panthers ».

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