Chapitre 10 : L'ennemi m'a trouvé !

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Mercredi, jeudi et vendredi passèrent aussi rapidement qu'un battement de cil. Pendant de longues heures, ces derniers jours je m’étais exercé à la télékinésie. C’en était même devenu un jeu en réalité. Mon téléphone se trouvait dans ma chambre ? Allez hop, il venait de lui-même dans ma main ! La brique de lait était à l’autre bout de ma table ? Elle glissait dans ma direction sans un mouvement. Plus de papier toilettes après un besoin pressant ? Il suffit de demander !

J’admets que cela me fut bien utile ce jour-là.

Le vendredi soir j'étais capable de faire léviter jusqu’à trois objets, pas plus lourd qu’une bouteille d’eau pleine, à plusieurs centimètres du sol pendant une bonne minute. Ce qui m’épatait le plus c’était la facilité avec laquelle me venait cette faculté et les étonnants progrès que je réalisais. Mais Astérion me l’avait bien précisé : en débloquant la capacité, sa maîtrise me viendrait relativement facilement.

En parallèle de la joie que m’apportait cette capacité, j'avais organisé mon voyage dans la foulée. Astérion et moi étions tombés d’accord pour partir dimanche matin. Je dus piocher sur l'argent mis de côté grâce à mes heures de travail le week-end pour prendre un billet d'avion sur internet destination les États-Unis. J’espérais que les Elementaris en valaient le coup vu le prix du billet. Une fois là-bas, Astérion m’assura être capable de me guider jusqu'à eux. Le seul problème était le moyen de transport arrivé sur le continent américain. Je n'étais jamais allé aux USA. Étant donné que nous avancions sans destination précise, s'il fallait que j'aille jusqu'en Californie, je risquais de ne jamais y parvenir.

Mon ami immortel tenta de me rassurer en certifiant que ce serait peut-être eux qui nous trouveraient. Il était vraiment très optimiste, je ne savais pas s'il se rendait vraiment compte de la taille des États-Unis. Et encore, en espérant qu'ils soient là-bas et pas au Brésil ou au Canada parce que là autant dire que c'était fichu d'avance : j'en aurais pour des mois, voire des années ! Or, je ne comptais pas partir pour un voyage de plus de quelques semaines maximums. La seule question que je me posais, hormis si j’allais devoir vendre l’un de mes reins pour le billet retour, était : Comment ces créatures pouvaient vivre à notre insu depuis si longtemps ? Même Astérion n’en savait trop rien, mais il percevait une grande source d’énergie semblable à la sienne à l’ouest et semblait certain que c’était eux. Malheureusement, comme il aimait s’en plaindre, sa forme restreinte dans mon corps réduisait ses capacités sensorielles et donc la précision de ses exactitudes.

Le samedi matin, la veille de mon départ, je me décidai à déposer ma démission au restaurant où je travaillais le week-end. Cela faisait deux ans maintenant que j’y travaillais, et m’y rendre me fit un pincement au cœur. Encore une fois je demandais si tout cela, ce voyage et les récits prophétiques d’Astérion, en valaient le coup.

Avant de me défiler, je m'y rendis à l'heure d'ouverture et me dirigeai au comptoir. Sam, le patron, faisait les comptes à la caisse. Ce fut avec surprise qu’il me vit approcher.

« Ah Peter ! me lança-t-il. Mi amigo ! Je ne savais pas si tu viendrais travailler aujourd'hui après ton accident ! Tu madre m’a tout expliqué ! Tu as l'air d'aller bien mieux ! »

Sam était le patron de rêve pour un jeune comme moi. D'origine espagnole, il était à la fois gentil et conciliant. Il m'avait engagé rapidement en tant que serveur malgré mon manque de qualification. J'avais appris sur le tas et il avait su être patient, tandis que d'autres ne m'auraient pas laissé ma chance. Ma mère m'avait prévenu qu'elle l'avait appelé pour lui expliquer mon accident et lui dire que je ne pourrais peut-être pas venir travailler durant quelques week-ends, d’où sa surprise.

« Bonjour Sam, répondis-je avec un sourire. Oui je vais beaucoup mieux après quelques jours de repos. Je suis désolé mais je ne suis pas venu travailler, je venais t'annoncer que je démissionnais. »

Il parut déconcerté.

« Tu démissionnes ? Mais por qué ?

— Je vais voyager pendant quelques temps, je ne peux donc pas conserver cet emploi, désolé. Je ne peux pas garder une place qu’un autre rêverait d’avoir.

— Voyager ? Après ce qui t'es arrivé ? Ce n'est pas très sage de ta part alors que tu viens seulement de sortir del hospital. »

Je souris à nouveau. Cela me touchait qu'il s'inquiète autant.

« Je vais mieux ne t'en fais pas, lui assurai-je. Je te remercie beaucoup pour ta gentillesse et ta patience durant ces dernières années et te souhaite une bonne journée. »

Je lui donnai le papier qu'il prit avec regret.

« N'hésite pas à revenir si tu recherches du travail. Buen viaje ! »

Je me retournai pour me diriger vers la sortie lorsque la porte s’ouvrit. Je me figeai aussitôt face à la nouvelle venue. La fille qui entra était tout simplement magnifique ! Et je disais rarement qu'une fille était magnifique, croyez-moi. Jolie ou mignonne, oui. Mais magnifique, ou sublime, j’avais très rarement dit cela.

Pourtant cette fille là l'était, sans aucun doute. Ou en tout cas, à mes yeux, elle paraissait extraordinaire. Ses longs cheveux brun clair bouclaient légèrement et tombaient comme une rivière autour de son visage d'une beauté à couper le souffle. Le bleu de ses yeux était semblable à l'océan dans ses beaux jours. C'en était même difficile de ne pas la fixer. Un peu plus petite que moi, elle portait un manteau gris clair ainsi qu'une écharpe blanche autour du cou pour se protéger du froid, ce qui mettait ses yeux encore plus en valeur.

Bizarrement elle me semblait familière. Mais je devais me tromper, une jeune femme pareille je l'aurais reconnue tout de suite !

« Concentre-toi ! me lança Astérion. Retourne préparer tes affaires pour demain au lieu de rester figé là ! »

Je secouai la tête pour me sortir de ma rêverie. Quel idiot j'étais ! Je la regardai pourtant encore un instant, toujours un peu dans les vapes, tandis qu'elle-même jetait des coups d’œil à l'intérieur comme pour chercher une table libre. Je soupirai et m’avançai vers la sortie, passant à côté de la jeune fille qui ne me prêta aucune attention.

Qu'est-ce que j’espérais ?

J'allais prendre la poignée de la porte et sortir lorsque :

« Excuse-moi mais… tu es Peter Leroy ? »

Je me retournai, surpris. La jeune fille venait de m’appeler. Elle s'était arrêtée en plein milieu du restaurant, me regardait et venait de m'appeler ! Moi-même je n’en revenais pas et me demandais si elle ne parlait pas à un autre Peter Leroy. Oui, j’étais stupide.

Elle s'approcha de moi et me regarda dans les yeux. Pendant un instant je me perdis dans l'azur de ses pupilles. Très déstabilisant. En la voyant de plus près, je me rendis compte que j'étais incapable de trouver un défaut à son visage. Tout, de son petit nez droit, presque arrogant, à ses joues rougies par le froid, me semblait magnifique. Même la façon qu'elle avait de marcher et de se tenir droite me semblait parfait chez elle. Un frisson étrange me parcourut et un sentiment de gêne, comme si quelque chose n’allait pas, me traversa. Je n’arrivais pas à déduire la source mais je m’en fichais. C’était probablement cette jeune fille qui faisait débloquer tout mon organisme.

« Je suis heureuse de voir que tu vas mieux, ajouta-t-elle de sa douce et belle voix. »

Je continuai de la regarder comme un parfait crétin, ignorant ce malaise secondaire qui hérissait mes poils. J’étais à la limite de garder la bouche ouverte. Totalement incapable de lâcher le moindre mot, mon cerveau semblait être passé en mode veille et incapable de se remettre en marche.

« Reprends toi espèce d'idiot ! me relança Astérion avec entrain. Donc tu bouges ta mâchoire ainsi que ta langue et tu prononces des mots ! »

La raillerie eut l'effet escompté et me fit réagir aussitôt. Je clignai des yeux plusieurs fois avant de sortir de mon état d'ébahissement pour finalement articuler :

« Excuse-moi mais… on se connaît ? »

Elle pinça ses lèvres, comme si elle était gênée. Ce qui la rendait encore plus mignonne à mon grand dam.

« Oui… et non. Je m'appelle Emilie. On est en cours ensemble dans certaines matières, comme la microbiologie, sauf que moi c’est pour devenir pharmacienne. Et c'est moi la fille qui t'a réanimé après ton accident, la semaine dernière. Surprise ! conclut-elle en rigolant gauchement. »

Comme surprise, j’avais vu bien pire ! C'était pour cela qu'elle me semblait un peu familière ! Je me rappelais vaguement avoir vu une silhouette avant de m'évanouir.

« Ah cool… dis-je, toujours en train de l'observer en détail. »

Oui je sais, ce n'était pas la réponse la plus adéquate. Mais pour ma défense, elle me perturbait. J'avais l'impression de ne pas être capable de parler sans bégayer. Alors certes j’avais toujours eu un faible pour les filles aux yeux clairs, mais je n’avais jamais eu autant de soucis à aligner deux mots devant quelqu'un ! Et je détestais ça ! J’avais l’air d’un parfait abruti !

« Allez, sombre crétin ! me secoua de nouveau Astérion au bord de l’exaspération. Dis quelque chose d'autres au lieu de rester planter là à la dévorer des yeux !

— Je ne la dévore pas des yeux ! m’exclamai-je en pensée.

—Cesse de bafouiller et peut-être que tu seras crédible ! ricana-t-il en retour. »

Je me concentrai de nouveau sur Emilie en tentant d'être plus sûr de moi et non pas aussi stupide. Où se trouvait donc ma fichu nouvelle assurance lorsque j'avais besoin d'elle ?

« Excuse-moi, repris-je d'une voix un peu plus assurée tout en souriant. Je voulais dire que je suis heureux de te rencontrer. Je ne savais pas du tout que c'était toi et je ne m'attendais pas à te voir ici, mais je souhaitais vraiment te rencontrer afin de te remercier ! »

Elle eut un nouveau sourire à faire tomber en me répondant :

« Je voulais venir te voir à l'hôpital mais je me suis dit que c'était peut-être un peu tôt, alors j'ai voulu passer en fin de semaine. Mais j'ai appris par le biais de tes amis que tu étais sorti plus tôt que je ne le pensais. Tu as récupéré très vite ! Je suis donc venu à ton travail puisqu'ils m'ont dit que tu travaillais ici le week-end, en espérant te voir à l'ouverture. »

Elle était venue ici exprès pour moi ? Aussi tôt un dimanche ? Je me sentais idiot de ressentir une telle excitation, comme un gamin. Je ne croyais pas au coup de foudre, je n’avais jamais beaucoup aimé les romances comme Twilight. Même si les loups-garous sont cool. Et pourtant, il fallait admettre qu'elle ne me laissait pas indifférent.

« Ça me touche que tu sois venue prendre de mes nouvelles. Je te remercie du fond du cœur, sans toi je ne serais pas là aujourd'hui.

— N’exagère pas… me glissa Astérion avec agacement. J'ai dit qu'il y avait quatre-vingts pour cent de chance que ton cœur se relance de lui-même ! »

Je ne lui répondis pas. Concentré sur Emilie, je poursuivis :

« Pour te remercier, je peux t'offrir quelque chose ? Un café ou une autre boisson chaude ? Ce n'est pas grand-chose mais bon…

— Mais tu ne dois pas commencer ton service ?

— Je ne travaille plus ici, j'ai certains projets et je ne pouvais pas garder ce travail. Par contre je connais le patron et on devrait avoir des réductions sur les boissons ! »

Elle me sourit à nouveau sans pour autant m'en demander davantage. Il n'y avait pas à dire, je comprenais ce que mes amis avaient insinué : elle était juste… waouh !

« Je n'ai rien de prévu donc avec plaisir ! »

C’est à peu près à ce moment-là que tout se gâta.

Après tout, une jolie fille acceptait mon invitation sans rechigner ! L’univers ne pouvait pas rester ainsi sans réagir ! Si j’avais un peu de chance, même de temps en temps, ce ne serait pas drôle !

« On va… reprit Emilie avant de s’interrompre subitement. »

L’instant où elle suspendit sa phrase coïncida au moment même où un nouveau frisson, plus fort cette fois, me parcourut de long en large. Les poils de ma nuque s’hérissèrent et un sentiment de dégoût fit monter la nausée. Je ne pus l’ignorer plus longtemps et, cette fois, c’était avec certitude que je sus que cela n’avait aucun rapport avec Emilie.

Le regard de la jeune femme fixa alors quelque chose derrière moi et ses yeux s’écarquillèrent. De par notre proximité, je ressentis sa surprise et sa peur comme si elles étaient miennes, m'enveloppant entièrement et éveillant mes sens. Le temps sembla ralentir. Mes capacités se remirent en marche en un claquement de doigts, m'alertant que quelque chose se rapprochait dans mon dos. Je ne savais pas ce que c'était, mais c'était très gros et cela approchait très vite.

Mes réflexes prirent le dessus. Je parcourus le mètre qui nous séparait elle et moi sans hésiter, avant de la saisir dans mes bras. Puis je sautai, le plus loin possible, poussant de toutes mes forces sur mes jambes. Durant mon saut, j'entendis la vitre de l'avant du restaurant se briser dans mon dos, sous l'impact de quelque chose de très lourd. Mon saut nous emmena plus loin que je ne le pensais, passant de l'autre côté du comptoir. Des morceaux de verres se mirent à pleuvoir dans tous les sens. Je me couchai sur Emilie afin la protéger des débris. Par chance, aucun ne vint se planter dans mon dos même si beaucoup ricochèrent.

« Tu vas bien ? lui demandai-je lorsque tout redevint calme. »

Elle hocha de la tête, mais la peur brillait encore dans son regard en alerte. Son anxiété continuait de me parcourir, ajoutée maintenant à la mienne.

Tâchant de contrôler ma peur, je lui dis avec fermeté :

« Reste cachée là et ne bouge pas, je te dirai quand tu peux sortir. »

Sam, mon ancien patron, était couché un peu plus loin. Il s'était lui aussi caché derrière le comptoir, les mains sur la tête afin de se protéger au mieux. À première vue, il n'avait rien, ce qui était un véritable soulagement. Je me relevai doucement en jetant un coup d’œil par-dessus le comptoir. Une voiture cabossée noire se trouvait à présent en plein milieu de la pièce, entouré de débris de verre. Heureusement le restaurant venait simplement d'ouvrir et pour le moment nous étions seuls à l’intérieur. Autrement il aurait pu y avoir des blessés graves, voir des morts vu l'impact et la trajectoire du projectile qui avait écrasé plusieurs tables et chaises au passage.

Quelqu'un avait foncé dans le restaurant avec son véhicule ? Ou en avait-il perdu le contrôle ? La voiture était retournée mais le plus étrange était, qu’en m’approchant, je vis qu’il n'y avait pas de conducteur. Ni personne aux alentours qui s’était extrait de la carcasse de ferraille.

Elle n'était pas arrivée là toute seule quand même !

« À moins qu'elle n'ait été lancée, me fit remarquer sérieusement Astérion, à l'affût. Reste aux aguets.

— Qui serait capable de lancer une voiture ? demandai-je avec une inquiétude grandissante.

— Nous allons vite le savoir. Mais si j'ai raison, ce qui a lancé cette voiture est clairement une menace et n'en a pas encore fini avec nous. »

Comme pour lui donner raison, de petites secousses firent trembler le sol.

BOUM BOUM BOUM

Un ultime frisson me parcourut tandis que mon cœur manquait un battement et que mon instinct hurlait au danger comme une sirène d’alarme. La source du bruit se révéla rapidement : c’était les lourds pas d'une créature imposante. Entrant par le passage qu'avait formé la voiture dans la vitrine, elle représentait la terreur même que je ressentais dès que je les revoyais dans ma tête. Et la preuve même que toute cette histoire n’était pas un mensonge.

« Un Xenos, dis-je dans un murmure, au bord de l’effroi et les yeux écarquillés.

— Et pas le plus petit de l'espèce ! précisa Astérion. Hepiryon est véritablement une ordure ! »

Comme si cette information allait m'aider.

La créature mesurait facilement deux mètres. Elle était semblable à ses congénères du souvenir d'Astérion sauf qu'elle ne portait pas d'armure mais une simple tunique en lambeau lui servant de pantalon. Les longues lames blanches qui sortaient du dos de ses mains ressemblaient aux embouts d'un harpon. Des veines noires parcouraient tout son corps, de son crâne chauve à ses pieds ridés. À cause de ses yeux vides et de sa gueule béante ouverte telle un puit d’encre, sa face était vide de toute expression.

C'était un véritable mort habité par une énergie malsaine. Et même si j'avais grandi depuis peu, j'étais loin de faire la même taille que ce géant. Mon sentiment de malaise était total, comme si mon corps tout entier réagissait à la présence démoniaque du monstre.

Sam se releva au même instant, pensant certainement que le danger était écarté. À peine vit-il la créature que ses yeux s’écarquillèrent, prit en proie à une terreur sans nom. Je ne pouvais pas lui en vouloir car j'avais moi-même envie de prendre mes jambes à mon cou et fuir le plus loin possible de cette abomination !

« Dios mio... murmura l’espagnol avant de s'évanouir. »

Le monstre me fixait du regard, sans le détourner une seule fois. Lorsque je reculai d'un pas, il avança à son tour mais sans tenter de m'attaquer pour autant. Il semblait attendre ma réaction avant de se jeter sur moi pour me déchiqueter. Toutes les images que j’avais vues de ces créatures assaillant et mutilant des hommes et femmes lors de la Grande Bataille me revinrent. L'adrénaline monta d'un coup, combinée à ma terreur. Mon corps vibrait à présent sous l'effet de l'énergie nouvelle qui me parcourait et me rendait prêt à combattre.

J'allais en avoir besoin, mais cette fois je n'en avais pas spécialement envie. Me battre n'était pas un plaisir, je le savais depuis l'affrontement avec les motards. Et même si j'y étais contraint, mes nouvelles forces devraient faire de moi une véritable menace pour mes adversaires. Pourtant, même avec toute cette énergie, et mon instinct indéfectible, j'aurais fui devant le monstre. Peut-être aurais-je même été paralysé par la peur si je ne savais pas qu'il y avait Emilie et Sam derrière moi. Ils étaient en danger, je devais les protéger ! Le monstre était là pour moi, pas pour eux. Ils étaient dans cette situation par ma faute, hors de question de les abandonner ! Et en m'enfuyant, rien ne me disait qu'il me suivrait et les laisserait tranquille, je ne pouvais pas prendre un tel risque.

Il n’y avait qu’une solution : je devais arrêter la créature.

Contrôler ma peur et exploser ce monstre. C'était mon plan avec une happy end à la fin. Je tentais de me rassurer en me disant que je pouvais le faire mais mes mains tremblaient comme pour me donner tort. Mais pas de pression, il était tout seul ! C'était qu'un simple combat comme contre les motards quelques jours plus tôt ! Sauf que lui faisait deux têtes de plus, était armé de deux lames longues et tranchantes qui ne souhaitaient que s’imprégner de mon sang et me réduire en charpie.

Ah, et qu'il balançait des voitures. Mais ce n'était qu'un détail.

« Ne panique pas, me souffla Astérion avec assurance. Je te l'ai dit : ils ne sont pas beaucoup plus forts que des hommes. Ils sont simplement plus imposants et plus effrayants. Des humains dépourvus de tes capacités l’ont fait auparavant, tu peux le vaincre ! Je suis là, on se bat ensemble ! »

Je déglutis. Même s’il se voulait rassurant, cela ne fonctionna pas.

La créature finit par céder à l’impatience et avança dans ma direction avant de grogner d'une voix âpre, un seul mot dans la langue des Immortels :

« Meurt ! »

Et il savait parler en plus ! Au moins c'était clair, il ne venait pas pour commander un plat à emporter. Il s’élança vers moi et je fis de même malgré la peur qui me tenaillait, laissant agir mon instinct neuf qui jusque-là m'avait porté chance plus que je ne l’aurais espéré.

Le Xenos tenta de m'embrocher directement avec ses lames mais j’anticipai et glissai sur le sol, passant entre ses jambes et évitant l’attaque mortelle. Je lui saisis une jambe et le jetai de toute mes forces contre la voiture. Jamais je ne me serais cru capable de le soulever et pourtant, il vint s’écraser de tout son poids contre le métal du véhicule qui ploya. Si je l'avais soulevé comme une vulgaire poupée de chiffon, je n'avais pas le temps de me féliciter pour cet exploit qu'il se relevait déjà, pas le moins du monde ébranlé. Il prit une table et la lança comme si elle ne pesait pas plus qu'un ballon de football.

« Arrête là ! scanda Astérion dans ma tête. »

Je levai ma main par réflexe, le regard affolé totalement focalisé sur la table qui approchait. Elle se figea dans les airs à un mètre de moi avant de s’effondrer au sol dans un bruit sourd. Je regardai ma main les yeux écarquillés comme si c'était la première fois que je la voyais. J'avais réussi ! J'avais bloqué la table en utilisant instinctivement la télékinésie ! M'entraîner sur la télécommande de la télé avait donc été finalement utile !

Fier de mon exploit, je pus maîtriser ma peur pour un temps et me remis en position, bien droit. Je fis léviter plusieurs couteaux de cuisine qui se trouvaient quelques mètres plus loin et les envoyai droit vers l'ennemi. Dans mon esprit, les couteaux allaient transpercer de part et d'autre cette saleté de cadavre ambulant. Mais bien sûr, rien ne fonctionnait jamais comme je le voulais.

Les couteaux manquèrent leur cible et ricochèrent contre le coffre de la voiture, ratant le monstre d'un bon mètre.

« Mais quel boulet… grommela Astérion dans ma tête. »

J’étais mort de honte et d’effroi. Non seulement je venais de foirer mon coup, mais en plus je venais de m’épuiser plus que je ne voulais l'admettre et cela avec l’unique résultat d’énerver davantage la créature. Cette dernière regarda d’ailleurs les couteaux avant de me fixer avec un grognement comme pour me dire : « T’es sérieux là ? Tu m'as vraiment raté ? »

Une fois la surprise passée, elle ramassa un des couteaux et me le lança, cette fois avec précision. Sans mes supers réflexes, il m'aurait transpercé le crâne. Sauf que si je n'étais pas encore super doué en télékinésie, mes réflexes étaient opérationnels et vifs, plus encore que ceux du monstre. J’attrapai le couteau par le manche en plein vol, me retournai et le renvoyai à l'expéditeur. Lui n'avait pas d'aussi bons réflexes car le couteau se planta droit dans sa poitrine, à l'endroit même où aurait dû se trouver son cœur. Il émit un nouveau grondement grave mais ne sembla pas réellement gêné, juste agacé. Je croyais qu’Astérion avait dit qu’un coup mortel pour les humains devaient être capable d’en venir à bout ?!

Avant que je ne puisse le questionner, le Xenos arracha le couteau et bondit vers moi après l'avoir jeté par terre. J'esquivai ses deux coups et le frappai dans les côtes. J’enchaînai ensuite pour frapper toutes parties de son corps à ma portée avec mes poings ou mes pieds. Mais je réalisai vite qu'avec une arme à chaque main, il avait un avantage réel. Mes coups frappaient fort et lui brisaient des os à force de m'acharner, je le savais au son horrible que ça produisait, mais il continuait de se déplacer comme si de rien n'était. Comment était-ce possible ? Aucune idée mais il refusait de tomber en poussière comme dans le souvenir d'Astérion. Et en plus de ça, il était toujours aussi rapide, c'était incontestable.

Ce combat n'avait rien à voir avec celui des motards. Contre eux, mes réflexes et ma force me suffisaient à les dominer sans la moindre difficulté. Et ils avaient vite eu peur de moi. Or là, même si je le dépassais en vitesse et en force, mon endurance commençait à s'effriter au bout de plusieurs minutes en combat rapproché à me concentrer pour ne pas finir embrocher. Il était résistant, plus puissant qu'un homme et savait se battre contrairement à moi. Pour ma part, je n'avais eu aucun entraînement martial. Tout ce que je faisais c'était taper là où je le pouvais, et esquiver au mieux ses coups ou en les encaissants.

Il finit par m’atteindre en plein estomac avec son genou. J’en eus le souffle coupé. Je reculai précipitamment, mais il ne me laissa pas le temps de me reprendre. J'évitai encore une fois sa lame droite de justesse et le frappai avec mon poing gauche à la hanche une énième fois, en espérant l'immobiliser. Mais mon attaque était plus lente due à mon épuisement croissant. Cette fois il l’évita et en profita pour m’atteindre avec sa seconde lame. J’avais tenté de l’esquiver mais elle m’atteignit l'épaule. Pas assez profondément pour me blesser gravement, fort heureusement, mais assez pour me ralentir. Dans un hurlement de douleur, je reculai encore en restant sur la défensive. Elle brûlait bien plus que la blessure au couteau que j'avais reçue quelques jours plus tôt, alors qu'elle n'était pas beaucoup plus profonde.

Je n’eus pas le loisir de me questionner d’avantage que je devais esquiver un autre de ses coups. Tandis que je le cognai à la jambe afin de répliquer, sa lame gauche me taillada le bas du ventre. Plus profondément cette fois. Avant même que j’aie le temps de faire quoi que ce soit, il me donna un coup de pied si puissant dans l'estomac que j'en décollai du sol pour m’effondrer contre la porte menant aux cuisines, derrière le comptoir. L'impact contre la porte fut si violent qu'il aurait pu me briser la colonne vertébrale. Pourtant je sentais encore mes bras et mes jambes vu le mal de chien qu'elles me faisaient.

Je tentai de me relever mais je retombai, à bout de force. Mon épaule saignait et la blessure ne semblait pas encore vouloir cicatriser. Idem pour celle sur mon ventre qui était plus profonde et dégageait une odeur peu encourageante. Fort heureusement, je n'avais pas peur du sang, mais surmonter la douleur n'était pas une mince affaire. J’étais certain aussi de n’avoir rien de cassé, seulement des plaies qui devraient commencer à guérir sous peu en théorie. Pourtant elles n'arrêtaient pas de saigner.

Pourquoi était-ce si long ? Je pensais avoir compris que je guérissais vite ! Quelque chose clochait…

« Relève toi ! Vite ! m’ordonna Astérion. Tu dois installer une distance entre lui et toi !

Facile à dire, grognai-je les dents serrées. »

Le monstre se dirigeait vers moi. Il ne boitait même pas alors que j'avais dû lui briser au moins la moitié des côtes, une épaule, et sa jambe gauche. Mais non, il continuait de se déplacer comme si de rien n'était ! Et pourquoi est-ce que je n'arrivais pas à me relever ? J’avais certes encaissé une dizaine de coups, mais deux blessures et j'étais vaincu ?! Les pouvoirs d'un dieu ne se limitaient qu’à cela ? Je sentais mes forces me quitter petit à petit et j'enrageais de mon impuissance.

« Sa lame doit être imprégné d'un poison, me dit alors Astérion dont la perplexité et la surprise ne passèrent pas inaperçues. Ton corps essaie de l'éliminer mais il lui faut plus de temps ! Ne le laisse pas t'approcher le temps que tu puisses te relever ! »

Je jetai un coup d’œil à ma droite. Emilie était encore cachée sous le comptoir, recroquevillée et terrifiée. Elle n'était pas sortie de sa cachette, comme je le lui avais demandé, et maintenant elle se trouvait en danger parce que le monstre la verrait bientôt. Je ne pouvais pas prendre le risque qu'il change de cible et l'attaque elle.

Je balançai divers objets vers lui par la pensée, mais aucun n'était suffisamment lourd pour le ralentir réellement. Il les dévia ou les encaissa et, rapidement, il fut devant moi. Son regard restait sombre et indifférent mais je sus qu'il me savait vaincu. Entre la peur, la colère et la détermination, je ne savais pas ce qui était le plus fort. Il leva son poing, lame tournée vers moi. Mon cœur battait si vite que j’en avais la nausée, mais je refusais cela ! Je ne voulais pas mourir de cette manière ! Pas contre un cadavre ambulant !

Dans un excès de colère et de peur, comme ultime tentative, je levai la main lorsqu'il abaissa sa lame pour me transpercer la poitrine. Un éclat doré brilla au bout de ma paume et un rayon de la même couleur traversa le Xenos. Lorsque je levai les yeux, ce dernier s’était figé au-dessus de moi et avait maintenant un trou béant à la place de son ventre. À travers ce qu’il restait de la chair putréfiée, je distinguais les tables renversées et la vitrine brisée. Il lâcha un râle avant de s’effondrer. La lumière disparut immédiatement au bout de mes doigts si bien que je ne pus voir ce que c'était exactement.

« Comment… ? bégayai-je épouvanté en regardant le monstre.

— Tu dois fuir, Peter ! Nous en parlerons plus tard mais pour l'instant COURS ! tonna Astérion dans ma tête. »

L'entendre crier agit comme un stimulant. Je regardai Emilie et voulus lui dire d'oublier tout cela. Je souhaitais uniquement m'excuser de l'avoir mise en danger. Mais lorsque je vis son regard, je fus incapable de prononcer le moindre mot. Je n'en trouvai pas la force. Elle me fixait à présent avec un regard terrorisé et se tenait assise contre le comptoir, ses jambes ramenées contre sa poitrine, comme si elle souhaitait s'éloigner de moi à tout prix.

Comme si j'étais le véritable monstre.

Peut-être aurais-je dû tenter de lui dire quelque chose mais j'étais blessé, j'avais peur et je compris qu'elle n'avait pas seulement été effrayée par le Xenos, mais aussi par moi et ce que je venais de faire.

Cela me fit plus mal encore que mes blessures physiques.

En serrant les dents et en prenant une grande inspiration, je réussis à me relever. Mon épuisement était palpable, je n’en pouvais plus. Avec une grimace, tout en ravalant un grognement de douleur, je pressai ma main gauche sur mon épaule droite pour arrêter le saignement. Mais la douleur restait horrible. Je ne savais pas comment j'arrivais à la supporter mais je serrai les dents et tins bon. Je ne devais pas m'évanouir, je le savais. Je m’éloignai en pressant le pas, passant à côté du corps de la créature qui commençait déjà à tomber en poussière au niveau de ses membres. L'énergie qui lui avait redonné vie l’abandonnait.

Je me dirigeai vers la sortie d’un pas traînant. À l'extérieur, des voitures s’arrêtèrent face à moi et des policiers en sortirent.

« Il est dedans … commençai-je en leur montrant le restaurant.

— Arrêtez-vous ! Les mains en évidence ! m’ordonna l’un des policiers. »

Je m’arrêtai net, stupéfait. Après le combat que je venais de mener c'était moi qu'ils arrêtaient ? Comment pouvaient-ils penser que c'était moi alors que j'étais blessé et à bout de force ?!

« Celui qui a attaqué est dedans ! répétai-je plus fort, ma colère de plus en plus grande. Et des gens ont besoins d’aide ! »

— Les mains en l'air et les genoux au sol ! réitéra le policier. Maintenant ! »

Il sortit son arme, et d'autres firent de même pour me viser, tandis qu'une autre partie de leur équipe entrait dans le restaurant derrière moi. Mais mon regard était figé sur les agents face à moi.

Ils osaient braquer leurs armes sur moi ?!

« Peter calme toi ! me dit Astérion avec gravité. »

Mais je n'étais pas calme du tout. Je venais d’affronter un véritable monstre qui avait tenté de me tuer. J’étais en état de choc et ils m’accusaient moi d’être l’auteur de l’attaque ? L’un d’eux répéta l’avertissement, ce qui termina d'entamer ma patience :

« Nous ne le dirons pas une autre fois ! Les mains en l'air immédiatement ou nous tirons ! »

Je ne souhaitais pas ce qui se passa ensuite. C'était un accident et je m’en voulus énormément, mais ma fatigue et ma rage prirent le dessus sur la raison et explosa :

« LA FERME ! »

À la suite de mon cri, une vague d'énergie frappa tout ce qui se trouvait autour de moi à moins de vingt mètres. Les policiers, incapables de réagir, furent propulsés de plusieurs mètres dans les airs avant de retomber au sol. Les voitures se retournèrent, percutées par la décharge d'énergie. Même les vitres des immeubles les plus proches se brisèrent tandis que les lampadaires se plièrent comme du caoutchouc, s’arrachant presque du sol. Les passants qui se trouvaient derrière les voitures de police hurlèrent tout en s’enfuyant et en me montrant du doigt.

Je m’écroulai, un genou à terre. J'étais épuisé, mes blessures me brûlaient et ma vue se troublait. Ma respiration était sifflante et je sentais mon esprit vaciller vers l'inconscience. Je n’en pouvais plus, je voulais simplement fermer les yeux…

« Fuis ! Maintenant ! cria Astérion sans hésiter. »

Abasourdi, et plus fatigué qu'en colère, je pris tout de même sur moi pour plier mes jambes et bondir en essayant d'atteindre le toit de l'immeuble le plus proche. C'était un saut impossible et pourtant je réussis à saisir le rebord du toit de justesse, me retrouvant suspendu à plus d'une dizaine de mètres au-dessus du sol. Je forçai sur mes bras pour monter sur le toit non sans difficulté. Je sentais l’esprit d’Astérion qui tâchait de me prêter sa force. Une fois remis debout, chancelant, je me mis à courir et à sauter de toit en toit, comme si ma vie en dépendait. Ce qui était le cas.

Je me sentais au bord de la syncope. Chacun de mes pas et de mes sauts étaient de plus en plus hésitants et suivis de perte d'équilibre. À moitié aveuglé par ma sueur et les jambes en feu, j'avais l'impression d'être une bête traquée. Après avoir atterri sur le toit d’un quatrième immeuble, ou cinquième peut-être, je ne réussis pas à me réceptionner et me laissai tomber sur le sol.

Je ne savais même pas comment j'avais fait pour aller aussi loin. C’était déjà un véritable miracle. J'avais mal partout et je me sentais exténué, plus que je ne l'avais jamais été de toute mon existence. Comme si le plus minime effort allait me faire perdre connaissance.

À peine touchai-je le toit de cet immeuble que je m’effondrai, m’abandonnant à l’inconscience.

« Tu dois te réveiller, Peter ! me souffla une voix douce mais ferme. »

Je repris conscience presque immédiatement, sans pour autant me lever. Si mes yeux s’ouvrirent, mon corps refusa de bouger pour autant. Il me fallut plusieurs secondes pour comprendre que j'étais seul et que la voix était celle d'Astérion. Tout me revint en tête, de l’affrontement au lieu où je me trouvais actuellement.

Je ne savais pas depuis combien de temps j'étais endormi mais j'avais encore mal partout donc cela ne devait pas faire bien longtemps. Une heure ? Ou dix minutes ? Aucune idée.

Je réussis à me rasseoir doucement en grimaçant à chaque mouvement. Ma vue était redevenue nette. Quant à ma tête, elle tournait encore un peu mais beaucoup moins. J'enlevai mon tee-shirt, qui était tellement déchiré qu'il ne couvrait plus beaucoup mon corps, avant de regarder dans quel état j'étais. Des hématomes un peu partout mais rien de grave exceptées les deux blessures empoisonnées. Elles avaient arrêté de saigner mais une croûte noire les recouvrait. Après quatre ans de médecine, je pouvais dire que des croûtes noires comme celles-ci, ce n'était pas bon signe.

« Tu penses que ça va guérir normalement ? questionnai-je Astérion, inquiet.

— Mon énergie est capable de guérir n'importe quoi, me répondit l’Immortel, avec plus ou moins de temps. Ça ne fait qu'à peine trente minutes donc ne t'inquiète pas pour ces blessures. »

Trente minutes ? J'avais du mal à croire que ce qui venait de se produire n'était arrivé qu’une demi-heure plus tôt. Je fermai les yeux et patientai quelques instants en repensant à ce qui s'était produit. Tout s’était passé si vite que je n’avais pas encore tout bien assimilé.

« Astérion, dis-je finalement à haute voix mais faiblement, ce qui s'est passé tout à l'heure…

— Nous en parlerons plus tard, me coupa-t-il par la pensée. Pour le moment nous devons nous cacher afin de prendre l'avion de demain.

— J'ai bien peur qu'après ce que j'ai fait, je sois recherché. Prendre l'avion sera impossible, ils me trouveront avant que je ne monte dedans.

— Alors il faut trouver un autre moyen de partir de cette ville et nous diriger vers la côte ouest, vers l’océan, et ce, sans tarder ! »

J'opinai lentement de la tête, perplexe.

Tant que mon visage n'était pas affiché et diffusé partout, je pouvais encore m'enfuir. Mais pour aller où ? La réponse, c’était Astérion qui me l’avait soufflée : la côte ouest. Je devais m'en rapprocher et espérer trouver un moyen de quitter le pays et me réfugier pendant quelques temps aux États-Unis. C’était totalement dingue mais je n'avais plus le choix, je devais trouver ces fameux Elementaris et espérer qu'ils existent bel et bien.

Si je décidais de rester en France, je savais que je serais recherché, interrogé puis inculpé pour avoir attaqué les agents de police d’une manière que moi-même je ne comprenais pas. Je ne serais plus jamais libre, et personne ne me croirait si je leur racontais l’histoire d’Astérion. Après tout, moi-même je n’y avais pas cru jusqu’à ce que je voie ce Xenos pour de vrai. Les créatures des ténèbres existaient vraiment, et leur maître probablement aussi. Mais ce devait être aussi le cas des Elementaris, ils pouvaient donc m’apporter leur soutien ! C’était ma meilleure chance à présent !

Cependant j'avais quelque chose à faire avant. Une chose que je me devais de faire avant de fuir mon pays comme un fugitif.

Je réussis à me remettre d'abord à genoux avant de me relever. Je fis quelques pas hésitants et, après avoir vérifié que je tenais sur mes jambes, je m’approchai du bord de l'immeuble avant de jeter un regard en arrière, en direction du restaurant.

J'entendais encore les sirènes de police, auxquelles je ne n’avais pas prêté attention jusque-là. Je savais qu'après ce que je venais de faire, je pouvais tirer un trait sur ma vie. Plus rien ne serait pareil désormais. Une larme coula sur ma joue lorsque ma poitrine se serra devant cette évidence. Je l’essuyai et regardai à nouveau devant moi. Je n’avais plus le choix, plus de retour en arrière possible maintenant. Je sautai dans le vide en espérant que mon futur ne resterait pas aussi sombre et décourageant.

Ma fuite commençait.

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