Noctalya

5 minutes de lecture

Je passe les deux mois suivants à essayer de maîtriser mes dons. Ce n’est vraiment pas facile : je n’ai personne pour m’aider. Selon le livre, je suis censée être en apprentissage avec un maître qui corrigerait mes erreurs. Seulement, dans mon monde ce n’est absolument pas le cas. J’apprends donc seule : je maîtrise le feu à la perfection, c’est mon élément préféré. En revanche, j’ai beaucoup de mal avec l’eau : cette dernière est vraiment trop capricieuse ! Le plus difficile est de retenir les formules : il y en a tellement !

En me promenant dans la forêt, j’ai découvert une petite clairière assez éloignée du manoir : c’est ici que je m’entraîne. Lorsque je l’ai vu pour la première fois, elle était verdoyante et fleurie : aujourd’hui c’est devenu un terrain vague… Je me suis promis de lui rendre son aspect d’origine dès que j’aurai maîtrisé la totalité des mes pouvoirs. Étant élémentalienne, cela ne devait pas être trop compliqué pour moi…

Je peux y passer des journées entières, essayant diverses formules, m’acharnant sur celles que je n’arrive pas à effectuer. Je m’améliore de jour en jour, enfin c’est ce que je pense. Je suis capable de maintenir une flamme dans le creux de ma main avant de prononcer une formule pour la transformer en boule et la lancer. Je sais aussi transformer la terre en boue et la compacter aussitôt pour en faire des blocs. J’adore jouer avec le vent : parfois juste une petite brise pour jouer dans mes cheveux, parfois une véritable bourrasque pour faire plier les pins alentour. Avec l’eau, j’arrive à peine à la transformer en vapeur ou en glace…

Il faut croire que ce qui s’est passé dans la salle de bain n’était qu’un pur hasard…

Hormis la maîtrise de mes pouvoirs d’élémentalienne, je m’essaie aussi aux autres formules : je ne m’y prends pas trop mal… Chaque invocation est accompagnée d’une description précise de l’effet attendu. Le livre est vraiment bien détaillé.

En l’espace de deux mois, j’ai dévoré le livre en entier : je connais chaque formule par cœur. Abigaëlle n’en revient pas : selon elle, il a fallu plus d’un an à mon père pour les maîtriser et il était considéré comme un bon élève. De plus, il avait un maître. Je dois dire que je suis assez fière. Je décide d’emmener Abigaëlle sur mon terrain d’entraînement afin qu’elle puisse juger par elle-même.

Je commence par aplanir le terrain et le rend malléable avant de demander aux graines présentes dans le sol de bien vouloir grandir : apparaissent alors diverses fleurs, crocus, lys, roses des bois , violettes… le tout sur un parterre de gazon et de fleurs des champs. De la rivière voisine, je fais élever plusieurs filets d’eau grâce au vent avant de les éparpiller en des millions de gouttelettes sur la clairière de nouveau verdoyante, créant ainsi un arc-en-ciel. Abigaëlle est subjuguée et je ressens à ce moment-là une immense fierté et une joie sans pareille.

Les jours suivants sont ternes : le temps est à la grisaille et il n’arrête pas de pleuvoir. Je me sens un peu désœuvrée à présent : ces deux derniers mois ont été tellement intenses en découvertes et en apprentissage ! J’erre dans le manoir, en quête de choses à faire ou à découvrir.

La nuit est tombée et la pluie a enfin cessé. Assise dans les escaliers, mon livre à la main, je m’arrête sur la carte de Noctalya. Fairya, Akurya, Lymerya… En quoi ces continents sont-ils différents de Tensya ? Je lève les yeux et m’aperçois que la carte peinte au plafond est justement celle de Noctalya.

Grâce à mon sort de lévitation, je m’approche du dôme en verre, jusqu’à l’effleurer. Dehors, le ciel est encore lourd de nuages noirs, annonciateurs encore de pluie. Je soupire et m’allonge dans les airs, le livre sur ma poitrine et les mains derrière ma tête. Je redescends doucement jusqu’à voir la carte en entier. Je lève la main droite et la passe devant le dôme espérant effacer les nuages et que le ciel étoilé apparaisse comme sur la carte du livre. J’effectue le geste lentement, en fermant les yeux et en soufflant doucement.

Quelle ne fut pas ma surprise en ouvrant les yeux de découvrir une pleine lune majestueuse ! Je me rapproche de la verrière et constate que les nuages ont complètement disparu. Je souris. Reprenant ma position initiale, je remarque une petite phrase écrite en argenté sur le pourtour du dôme. Je la lis en pensée et là… magie… la carte se met à se mouvoir devant mes yeux ébahis.

J’entends la mer turquoise se vider vers le gouffre de Nymphea et des petits animaux s’ébattent tout autour. Je regarde de plus près : incroyable ! Ce sont des sirènes ! Tous masculins !

Je me déplace un peu plus vers Fairya : j’y vois des petites maisons bleues, toutes rondes avec des petits jardins où des arbres aux fruits colorés poussent. J’aperçois les habitants : chevelures soient blondes très claires soient d’un noir corbeau, une peau blanche aux reflets bleutés, des yeux immenses où il n’y que la pupille, aux couleurs invraisemblables. Ils ressemblent à des elfes avec leurs oreilles pointues…

Je me dirige vers Limerya : il s’agit d’une immense forêt sombre aux arbres immenses formant comme un énorme dôme feuillu d’un vert rubis où l’on entend plus que l’on voit les animaux. Ils n’ont pas l’air très commodes d’ailleurs…

Akurya est plus sombre malgré ses couleurs chaudes : il ressemble à un immense désert. Je ne vois pas ses habitants mais une ville toute noire avec en son centre un château digne d’un film de Dracula…

Je ne m’y attarde pas et traverse le lac Rosea vers Tensya : les plaines y sont verdoyantes, couvertes de cultures et de petits bois. Je vois aussi des routes et une immense ville appelée Arachnya. Je remarque un château blanc immense vers lequel je me rend. Je suis comme… attirée… là une personne semblant s’apercevoir de ma présence se retourne vivement et je ne vois de lui que ses yeux d’un bleu océan me traversant l’esprit et je perd le contrôle de mon sort de lévitation.

Je reprends juste à temps. Je finis quand même par chuter lourdement sur le sol mais à un mètre de celui-ci à défaut de quatre… Aïe mes fesses ! Je lève les yeux sur Noctalya mais celle-ci est redevenue immobile… Je souris bêtement au plafond. Je suis pleine de visions du monde de mon père et j’en suis si heureuse ! Quelle est d’ailleurs cette sensation étrange que j’ai ressentie tout à l’heure ? J’ai comme l’impression que quelqu’un m’a vu depuis Arachnya… Je suis bête… c’est complètement insensé ! Je me relève et part rejoindre Abigaëlle pour le dîner.

Annotations

Vous aimez lire Angel ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0