Chapitre 4

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Il me fallut quelques secondes pour reconnaître le boucher. Il semblait très fatigué et était vêtu d'un sombre costume noir qui masquait l'étendue de son corps. Il entra dans la pièce et lança un regard circulaire ; ses yeux semblaient enrobés de tristesse et exprimaient de la compassion. C'est à ce moment-là que mes souvenirs refirent surface. En voyant la cicatrice sur sa joue gauche, je me rappelai le kidnappeur de ma sœur.

Dans un élan de rage, je m'élançais dans sa direction afin de lui faire cracher le morceau, et ainsi obtenir des informations sur le lieu où était détenue ma sœur. Mais mes blessures bloquèrent toute tentative, me faisant atrocement souffrir. Je n'avais pas encore complètement récupéré.
Il s'avança et prit la parole sans se soucier de mon comportement.

-J'ai quelque chose à vous dire, cela concerne Richard, ton père, dit-il en me fixant de son regard perçant.
Il venait de monopoliser toute notre attention. Nous restions muets, guettant le moindre mouvement de ses lèvres. Il reprit la parole :

-Je suis William, un vieil ami de Richard, et il faut que je vous dise quelque chose à propos de lui...

Il y a quelques mois, nous avons fait une grande découverte. Nous venions de trouver l'emplacement d'un objet très ancien perdu depuis des siècles, mais nous avons eu quelques problèmes. N'ayant plus de ses nouvelles, j'ai commencé à m'inquiéter. Dans le cas où il devrait lui arriver quelque chose, ton père m'a demandé de te remettre cette lettre. Même si nous ne le montrions pas, nous étions très proches. Ce que tu trouveras dans cette lettre va très certainement changer l'image que vous vous faisiez de nous, ajout a-t-il en sortant un petit morceau de papier usé de la poche intérieure de sa veste.

Il s'approcha de moi et me tendit la lettre que je m'empressais de lui arracher des mains, en lui lançant un regard noir, je l'ouvris sans ménagement curieux de savoir ce qu'elle renfermait.

Le papier semblait avoir subi les ravages du temps et comportait plusieurs plis, il avait sûrement été manipulé plusieurs fois et avait dû longuement séjourner dans sa veste. Je reconnus immédiatement l'écriture de mon père, une écriture propre et soigné en à l'image de son propriétaire.
Agacé, l'homme croisa les bras en soupirant et ouvrit la bouche en posant un pied sur le mur près de la porte. Au même moment jack entra dans la pièce comme une flèche, de petites gouttes de sueur perlaient sur son front, il lui coupa la parole :
-Désolé, je n'ai rien trouvé dans tes affaires, mise à part tes clés et deux, trois piécettes.
Ce n'est qu'après ces mots qu'il remarqua la présence du boucher et le dévisagea, intrigué par sa présence.

- Qu'est-ce qu'il fait là, lui, j'ai loupé un épisode ?

Il y eut un long silence : tous les regards se portèrent sur mon ami qui était devenu le nouveau centre d'intérêt.

Wendy se releva, en tenant ma mère par l'épaule, et d'un regard, fit comprendre à Jack qu'il devait la fermer et aller s'assoir. Elle avait toujours su se faire comprendre rapidement, et il était vivement déconseillé de la contredire. D'un pas qui se voulait lent pour exprimer son mécontentement, ce dernier dépassa le boucher, en lui lançant un regard en biais et vint s'écraser au bord de mon lit en croisant les bras. Le boucher ne le lâcha pas du regard et lâcha :

- C'est bon ? Tu as fini ?

Jack continuait de le fixer, une pointe de défi dans les yeux. Je l'attrapai fermement par le bras, je le savais provocateur. Ce n'était pas le moment de jouer, la vie de ma sœur était en jeu. Mon geste me fit grimacer de douleur. Il me jeta un bref regard, et se retourna en direction de notre interlocuteur et hocha la tête en signe d'approbation. Mon pseudo parrain reprit la parole en soupirant grossièrement.
- Ton père et moi étions archéologues. C'est d'ailleurs à l'école que nous nous sommes rencontrés.
Je renonçais provisoirement à ma lecture, curieux de savoir quel mensonge il allait encore nous raconter. S'il pensait pouvoir me berner si facilement, il se mettait le doigt dans l'œil.

-Nous étions tous deux très intéressés par les objets de grande valeur, c'en était même devenu une obsession, ce qui nous as permis plusieurs grandes découvertes. Mais nous étions très frustrés par le fait de ne pas pouvoir posséder ces objets inestimables.

Nous avons décidé de nous mettre à notre compte, renonçant du coup à toute subvention et partant à l'aventure avec un simple sac à dos et le strict minimum nécessaire à notre survie. Lors de nos voyages, nous avions découvert plusieurs artefacts, dans des lieux qui furent plus hostiles les uns que les autres. Parfois, les missions étaient très périlleuses. Mais ton père ne renonçait jamais devant la difficulté ou le danger, tu tiens sûrement de lui.

Je vais m'arrêter là et te laisser lire la lettre car le temps est contre nous, fit-il en faisant tourner sa main dans ma direction, ce qui sonnait comme une invitation.

Je repensai à cette sombre nuit au fait qu'il était le suspect idéal de l'enlèvement de ma sœur. Je restai sur mes gardes et choisis de laisser mes craintes et mes doutes de côté, et me mis à lire la lettre à haute voix. Tous les regards se portèrent alors sur moi :
« A toi mon garçon, si tu lis cette lettre, c'est sûrement que je suis dans une situation difficile. Je suis désolé de ne pas avoir été là et de t'avoir caché tant de choses, mais je le devais pour ne pas vous mettre en danger. Je te demande de faire confiance au boucher qui n'est autre que ton parrain. Tu sais sûrement la vraie nature de mon travail maintenant, avec les années je me suis associé à des personnes peu recommandables, comme des escrocs. Des voleurs et toutes sortes de criminels. Quelle que soit la situation actuelle, tu auras l'aide de ton parrain. Je te demande de protéger notre famille et de t'éloigner de ce village si ça n'est pas trop tard...
Je suis actuellement à la recherche d'un vase très ancien appartenant à un empereur chinois, cette mission m'a été confiée par un homme d'affaire très influent, faisant du commerce d'objets précieux dans tous les pays. Il était connu pour son extrême cruauté et son impatience, mais il paye bien : c'était ce qui m'importait. J'aimerais pouvoir revenir en arrière mais cela est malheureusement impossible. Alors je te demande de réparer mon erreur car je n'ai sûrement pas été à la hauteur. Tu trouveras dans mon bureau une clé ouvrant une trappe, au fond du puits près de notre maison. Elle te permettra d'obtenir des informations sur la position du vase et sûrement aussi la mienne. Je suis tellement désolé de mettre un tel poids sur tes épaules. Mais tu es mon fils, le seul qui peut réussir là où j'ai échoué. Je t'ai aussi laissé plusieurs indices que toi seul comprendras et que tu trouveras sur ton chemin. Je vous aime
Papa.

J'avais à peine fini ma lecture que ma mère a éclaté en sanglots. Un petit anneau doré a glissé de ses doigts et roula jusqu'au pied de l'homme qui était mon parrain, selon mon père. Il se baissa pour le ramasser et l'observa en détail : il le manipula dans tous les sens et eut alors l'air d'avoir compris quelque chose. Je l'interpellai sur un ton accusateur :

-C'est toi qui as kidnappé ma sœur, je t'ai vu près de notre maison et dans la forêt. Si mes amis ne m'avaient pas retrouvé, je ne serais sûrement plus là pour en parler.
En entendant mon accusation, l'homme mit sa main devant sa bouche et baissa son regard en direction du sol.

-Je comprends ton inquiétude et tes doutes mais tu te trompes ! Je ne suis pas celui que tu as vu. Cette personne s'appelle Jason Kinley. C'était un de nos amis communs. Nous étions quatre, ton père moi Jason, et Kate. Tu te demandes sûrement à quelle Kate je fais allusion ?

Je jetai un coup d'œil en direction de Wendy. Non ! Cela ne pouvait pas être sa mère ? Devinant sûrement à qui nous devions penser il ajouta :
-Oui, c'est bien elle !
Wendy l'écoutait attentivement et ses yeux se mirent à se remplir de larmes. Puis elle leva la tête, fixa notre hôte, se leva brusquement et curieusement s'en alla en courant. Mon présumé parrain sourit et se déplaça légèrement pour la laisser passer. Jack fut bien plus vif que moi et partit aussitôt à sa poursuite.
Il reprit alors sa place dos au mur.

-Bon nous ne sommes plus que trois, dit le trouble-fête en faisant une grimace.
Ma mère se leva difficilement et ajouta :
-Où est-il ?! Où a-t-il emmené ma fille ? Dis-le-moi ! dit-elle en secouant violemment William, agrippant fermement son veston au niveau des épaules
Le visage de l'homme s'assombrit et se remplit de tristesse. Je n'avais jamais vu ma mère se comporter de la sorte, elle était hystérique, elle avait perdu tout contrôle. Cette épreuve était en train de la détruire à petit feu, je me devais d'agir de retrouver Anna ! Pour que nous puissions à nouveau vivre en paix.

Je serrai les dents et les poings, j'étais tellement en colère, je fus emporté par courant de haine. Je rêvais de voir ce Jason mort. Je m'imaginais lui ôtant la vie, je me voyais l'étrangler, voir la vie quitter son regard. Je voulais qu'il souffre, comme moi en ce moment même. Ces découvertes ne nous avaient absolument pas avancés, nous faisions toujours du sur place. Ma mère éclata en sanglots pour la énième fois et elle se mit à lentement glisser vers le sol en pleurant.

Le boucher s'abaissa et la prit dans ses bras, se montrant malhabile et hésitant. Après quelques minutes, il considéra à nouveau l'anneau puis le serra fermement dans le creux de sa main et dit :

-Bon j'y vais. Je reviendrai plus tard quand j'en saurai plus. Je te laisse mon numéro de téléphone.
Il déposa une petite carte en papier sur le bord du canapé où avait dormi Wendy un peu plus tôt. Il se retourna et s'avança pour sortir de la pièce. Ma mère, à genoux, tenta de le retenir en s'accrochant à son pantalon, il s'en dégagea sans mal et la regarda s'étendre sur le sol. Ce geste lui avait retiré le peu de dignité qu'il avait. Dans un élan de colère, je lançai :
-C'est ça, barre- toi, on n'a pas besoin de toi !

Je pris le premier objet à ma portée et le lançait dans sa direction. Le vase traversa la pièce et se brisa en mille morceaux contre le mur, manquant de peu le visage de ma mère. L'eau se mit à couler sur le mur et glissa lentement en direction du sol et se mélangea à de petits morceaux de verre éparpillés sur le sol. Au centre se trouvait une belle rose rouge.

Il s'arrêta quelques secondes sans se retourner, et quitta ensuite la maison. Je fixai un instant la porte. Des larmes coulèrent de mes yeux et la douleur me fit à nouveau perdre connaissance.

L'espace d'un instant, je me retrouvais à nouveau dans la forêt, je revivais la scène de l'enlèvement de ma sœur. J'étais allongé sur le sol les mains ensanglantées, il faisait si noir ! Les arbres et leurs branches semblaient si menaçants. Il n'y avait aucun son à part les cris des oiseaux, et le ricanement du kidnappeur qui retentissais sans cesse, me rendant complètement fou. Je me sentais si faible, je ne pouvais pas bouger je revoyais son visage, son sourire machiavélique, ce spectacle était une vraie torture. Le décor changea brusquement : je me trouvais à présent dans ma maison en feu, plus précisément dans la chambre de mes parents. Ma mère était assise sur son fauteuil, fredonnant et tenant la couverture de ma sœur, comme si elle se trouvait blottie à l'intérieur. La fumée emplit alors la pièce jusqu'à que je ne puisse plus rien voir.

C'était à ne rien y comprendre. A présent je me trouvais à mon baptême, mon père, ma mère, et le boucher, se trouvaient dans un coin près d'un arbre sur notre propriété, ils sirotaient des cocktails en riant à l'éclat. Je me trouvais dans notre jardin accompagné d'une vingtaine de personnes, je semblais être là uniquement en tant que spectateur, j'observais la scène en hauteur. Non loin de là se trouvait un homme assez grand qui rigolait de façon très inhabituelle, presque effrayante. Une affreuse cicatrice lui couvrait le visage. Cette image fut pour moi comme un électrochoc :je me rappelai immédiatement l'homme dans la forêt. Je me réveillai en sursaut, le visage dégoulinant de sueur. Mes blessures ne me faisaient plus souffrir, et je me trouvais à nouveau dans ma chambre, enveloppé dans mes draps. Je portais un débardeur blanc et un short noir, mes bras et mon corps étaient toujours recouverts de bandages et de pansements.

Je tiens à remercier Laurence Colin et Camille revlann pour leurs conseils d'écriture et le soutien que vous m'apportez , dieu sais que je peux parfois être difficile à gérer lol. je remercie également toute les personnes qui m'aident et me suivent dans cette aventure. Sachez que vous êtes mon moteur, encore merci et bonne lecture !

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