Chapitre 15

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  De retour chez lui, Cleve sortit du frigo deux nouvelles bières qu’il décapsula d’un geste habile.

  Marialie s’enquit de rejoindre la salle-de-bain. Rapidement, l’agent entendit l’eau couler dans la cabine de douche, et il profita d’être seul pour inspecter la puce électronique. À première vue rien ne semblait anormal, si ce n’est les quelques taches de sang qui la recouvrait. L’agent l’essuya avec la pointe d’un torchon, délicatement pour ne pas abimer les circuits. Il avait beau l’observer minutieusement, en somme elle ne comportait rien d’étrange. Il la reposa dans son film plastique qu’il laissa sur la table basse du salon, puis alluma la télévision. Une publicité louait les bienfaits du soda de la marque Skoja ; une femme presque nue se prélassait sur une plage au sable jaune immaculé, et frottait la canette sur son torse de sorte à se rafraichir la peau, sans toutefois goûter à son contenu. Puis une nouvelle annonce, moins sensuelle, ventait une marque de plats préparés lorsque Cleve décida de passer à la chaîne suivante. Et il pressa spasmodiquement les boutons de la télécommande, jusqu’au moment où Marialie arriva dans le salon. Elle s’était vêtue d’un large sweat qui lui tombait au niveau des genoux. Sur elle, le vêtement faisait office de robe ample. Une serviette recouvrait ses cheveux pour s’élever en torsade. Elle attrapa sa bière et s’installa à son tour sur le canapé, étendant ses jambes le long de la table basse.

  — Alors, dit-elle en réajustant la serviette au-dessus de sa tête, t’en as pensé quoi de notre binôme ce soir ?

  Aucun mot ne vint à l’esprit de Cleve, absorbé par une chaine de télé-achat. Il préféra finalement se taire, au détriment de l’enthousiasme de la jeune femme, avachie sur le canapé, la tête relevée au maximum.

  — Je t’ai promis de m’éclipser une fois la nuit passée, rappela Marialie, comme si elle soupçonnait son hôte de la vouloir partit au plus vite.

  — C’est ce que nous avions convenu.

  Marialie s’étendit plus encore et inclina sa tête sur le côté. Ses yeux se fermaient par intermittence. Rapidement elle succomba à la fatigue. Cleve lui retira la bière des mains avant que celle-ci ne glisse des doigts de la jeune femme, plongée dans une profonde léthargie. Aussi, il la souleva du canapé afin de la transporter dans la chambre, de sorte à ce qu’elle profite d’un meilleur sommeil.

  L’agent retourna dans le salon et termina sa bière, quand sur l’écran était diffusée une émission sur la cybercriminalité. La fatigue le rattrapa peu avant que les lumières extérieures ne faiblissent, et que les stores ne s’abaissent pour plonger le salon dans l’obscurité.

  Au matin, l’ouverture s’enclencha à sept heures précises. Comme convenu, Marialie n’était plus là. Les draps défait du lit trahissaient sa récente venue. Par habitude, Cleve profita d’un petit-déjeuner en solitaire. Il alluma la cafetière et sortit du frigo une brique de lait qu’il déboucha pour renifler le goulot, s’assurant qu’aucune odeur étrange ne prédisait son dépérissement.

  Sur le bar se trouvait encore le dossier que Jenner lui avait déposé la veille. Il le glissa de sorte à l’avoir devant les yeux en ouvrant la première page. Jusqu’à présent rien de bien nouveau ; en tournant les autres feuilles il découvrit quelques renseignements de plus sur les prétendus réseaux qui – pour la plupart – n’étaient en réalité que de simples chimères. En feuilletant plus loin, Cleve tomba sur le rapport d’autopsie de Jazz. Au sommet de la feuille, un trombone venait relier la photo sur le papier, l’image représentant le corps du junkie, étendu sur le sol.

  Le café était prêt et Cleve se servit une tasse. Il y ajouta une petite dose de lait et y jeta deux sucres ronds. Sans touiller il en but une grosse quantité avant de poser la tasse à proximité du dossier qu’il continua de parcourir. Finalement, l’agent se rassura de sa décision. L’enquête proposée par Lonee lui permettrait de s’éthérer un moment de son travail. Il pourra ensuite repartir d’un œil nouveau, et peut-être même y mettre fin. Mais cette pensée s’envola rapidement.

  Cleve profita d’une douche rapide. Après quoi, il visualisa son reflet dans le miroir. Sur son visage, la fatigue paraissait d’autant plus ostensiblement qu’elle avait pris possession de ses traits, les creusant plus profondément encore. La pâleur de sa peau était proche de celle d’un corps sans vie, et la couleur de ses cernes tournait au bleu. Pour tenter d’en dissimuler une partit, il appliqua deux glaçons là où des petites poches semblaient pendre sous ses yeux. Il les laissa là, suffisamment longtemps pour que les cubes glacés aient provoqué à ses doigts une paralysie passagère.

  L’agent termina de se préparer en enfilant des vêtements qu’il sortit de la machine à laver. Une forte odeur de lessive s’en dégageait, ce qui lui fit douter de la dose prescrite au dos de la bouteille.

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