Le souterrain

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Nous étions descendus dans le passage piéton. Linh et Luv gardaient les issues. J"étais avec Babo devant la porte de fer. Babo s'était vanté de pouvoir crocheter n'importe quelle serrure, un don hérité de son père. Il le voyait peu, car il était souvent en prison. Mais sur son temps libre, il donnait à son fils une éducation qui, disait-il, devait cruellement lui manquer. Il fallait rattraper le retard.

  • Ch'est pas fachile... Heureujement, j'ai toujours le matériel chur moi.... Et puis ch'est pas une cherrure diffichile cha !

Babo fourrageait dans la serrure, tenant d'une main une fine tige métallique et de l'autre un trombonne, et il serrait une lampe de poche entre ses dents.

Cha y est ch'est ouvert ! Cha a fait cliche...

J'étais vraiment admirative, toute Déesse que j'étais, je n'avais pas le quart du pouvoir d'ouvrir une porte. Mais je me souvins que, pas plus tard qu'il y a quelques jours, je traversais les murs. Et l'on m'avait tiré dessus sans dommage. Peut-être me faudrait décider, sérieusement, de mettre moi aussi mes talents à l'épreuve, et voir enfin ce que je savais faire ? Et, peut-être, m'améliorer ?

Luv arriva, puis Linh, et nous ouvrîmes la porte, avant de la refermer. Il faisait sombre, et le faible pinceau de lumière n'éclairait qu'une toute petite partie du souterrain.

  • Il n'y a pas de lumière ici ?

Babo balayait les murs à la recherche d'un interrupteur. Mais il n'y avait que des bouloches de vieilles toiles d'araignées, et de l'humidité qui suintait de la voute au dessus de nous.

Marcher dans l'obscurité n'est pas la chose que je préfère. En fait, je crois même que c'est la dernière des choses que je préfère. Babo éclairait, avec une toute petite lampe, un couloir bien trop large. Nous étions un point de lumière flottant dans le noir.

Lorsque le faisceau éclaira le squelette d'un chat qui souriait, je frémis, et je poussais un cri perçant. Heureusement, le squelette était mort, allongé par terre.

  • Béatrice, s'il y a quelqu'un ici qui ne risque rien, c'est toi. Si le danger est trop grand, tu finiras par passer à travers les murs. Et c'est nous qui serons allongés à côté du chat, avec un joli sourire !
  • Pardon.

Je rougissais, dans la pénombre. Si j'étais une Déesse, une Quantique, un truc comme ça, il allait falloir que j'apprenne à maîtriser mes nerfs. Et puis, les Déesses, est-ce qu'elles disaient "pardon, excusez-moi" ? Il faudrait que j'en rencontre d'autres, pour être sûre. Il devait y avoir une sorte de club, avec des cours de maintien. Et puis des couturiers aussi, qui font des robes de Déesses. Voilà ce qu'il me faudrait ! Bien sûr ! Avec une super-robe, j'aurais beaucoup plus d'assurance. Mais qu'est-ce qui se passe ? Il fait noir ?

  • Zut... C'est la pile. Plus de lumière. La poisse !
  • On fait quoi ?
  • Heu...
  • On avance en se donnant la main ? Deux minutes après, nous étions dans le mur.
  • Tu es sûre qu'on vient de là ?
  • De là peut-être ?
  • Concentrez-vous. L'important, c'est là où on va.
  • Et on va où, alors ? De toute évidence, je n'avais aucun pouvoir de vision nocturne. Gal ! Gal ? Répond ! Mais rien à faire. Si, là !
  • Là !
  • Béatrice ? Tu as un pouvoir de vision nocturne ?
  • Non. Mais je crois qu'il y a vraiment une lumière au bout de couloir.

Et en effet, une lumière grossissait, grossisait. Au bout d'une minute, une main apparut, tenant une lampe à hauteur d'un visage barbu et de cheveux en broussaille.

  • S'lut... Vous faites quoi ici les jeunes ? C'est vous qu'avez crié ? Vous aimez l'aventure on dirait. Sans lumière, c'est risqué ici. Il nous dévisageait l'un après l'autre. Il ajouta. Je suis Max, je vis dans la rue. Enfin, sous la rue, hé hé !
  • Nous souhaitons juste traverser.
  • Ben, le passage piéton, c'est pas ici. Ici, c'est le passage d'évacuation de la Salle des Fêtes, enfin du Peuple, comme on disait avant. Ben voilà. Y'a plus de Peuple et c'est la Fête. C'est toujours fermé. Mais pas pour moi, hé hé !

Il dirigea la lumière vers un matelas et des cartons, sur un des côtés.

  • Je sais pas pourquoi vous allez là-bas, mais je veux bien vous faire traverser. Je poserai pas de questions. Quoique, y'a des choses bizarres, qui se passent ici. C'est pas mes affaires. Suivez-moi.

Il fit un signe de la main, et peu après nous étions au bout, près d'une porte.

  • Les trucs bizarres, c'est là-haut que ça se passe. Et y'a du monde ! Faut pas y aller maintenant. C'est pas des jolis-jolis, ces gens là.

Il désigna un soupirail, d'où filtrait de la lumière.

  • Ecoutez-moi ce qu'y racontent ! Vous comprenez quèque chose, vous ?
  • Gal ! Un soupirail !
  • Oui Béatrice, un soupirail, qui donne sur la salle de réunion.

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