Chapitre X :

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— Je n’en reviens pas d’être de retour ici, murmurai-je.

À seulement une dizaine de mètres, de l’autre côté de la route à sens unique, se trouvaient les portes de mon université. Ou plutôt de mon ancienne université. Même avec la meilleure des volontés, je n’étais pas certain de reprendre un jour mes études dans ce bâtiment gris et austère que j’avais appris à apprécier. J’eus un pincement au cœur en songeant à tout ce que j’y avais vécu, que ce soit mes fous rires avec mes amis, nos pauses à la bibliothèque où nous embobinions Maël pour qu’il nous paye un café, ou encore nos parties de cartes enflammées dans les couloirs. Que n’aurais-je pas fait pour revenir quelques mois plus tôt, avant que je ne devienne l’hôte d’un dieu ?

Même les cours assommants de biologie cellulaire me manquaient !

Rabats ta casquette ! me somma Astérion. Je te rappelle que tu es toujours qualifié de dangereux hors-la-loi tant que le président n’aura pas clarifié la situation !

J’obéis sans détourner les yeux de l’entrée de l’école.

— Elle ne va pas tarder, soufflai-je.

Au même instant, les portes vitrées s’ouvrirent et un flot d’étudiants en jaillit. Ils s’éparpillèrent sur le trottoir et le parking, le sac sur le dos et le sourire aux lèvres. Ils étaient, pour la plupart, enfin en vacances. Si certains se précipitaient pour grimper dans les bus les plus proches, les autres au contraire prenaient le temps de discuter avec leurs amis et se souhaiter de bonnes fêtes. Je regrettais que Matt, Maël, Antoine et Florian ne soient pas là, mais avec leur départ imminent pour la Californie, ils avaient cessé d’aller en cours ces derniers jours pour préparer leurs affaires.

Je balayai la foule du regard qui grossissait à vue d’œil et me laisserait difficilement apercevoir Emilie. Pourtant, lorsque ce fut à son tour de sortir, mes yeux furent attirés comme un métal vers un aimant. Elle était aussi belle et radieuse que dans mon souvenir. Ses longs cheveux bruns ondulés encadraient les deux saphirs qu’étaient ses iris. Son petit nez, droit et fier, se dressait au milieu de son sublime visage pâle dont les joues étaient rougies par le froid. Ce fut comme si le temps avait ralenti pour me permettre de la contempler. Rien d’autre n’importait, il n’y avait plus qu’elle.

Elle s’avança au soleil en compagnie d’amis et rit à la blague d’un garçon blond qui l'accompagnait. Je grinçai des dents. Qui c’était celui-là ?

Ma parole, tu es jaloux !

La ferme, Astérion !

Je la suivis du regard et, à mon grand soulagement, le jeune homme finit par quitter Emilie qui rejoignit une bande de filles. Elle souriait en écoutant ses camarades discuter et rabattit une mèche de cheveux derrière l'oreille. Elle paraissait si heureuse et détendue, rien ne laissait penser qu’elle avait frôlé la mort quelques mois plus tôt. Comme si rien n'était arrivé.

Pendant un horrible instant, j’hésitai. Avais-je le droit de revenir après de longues semaines d’absence et lui annoncer que le Xenos qu’elle avait vu n’était pas unique ? Que leur maître était terriblement plus effrayant et menaçait de nous assujettir ? Et allait-elle seulement me croire ? Me pardonner de l’avoir mise en danger ? Tant de questions se bousculaient dans ma tête sans que je sache à laquelle répondre en première. J’aurais souhaité un conseil d’Astérion, mais il resta silencieux. Il m'avait déjà donné son avis dans le désert, désormais c’était à moi de prendre la décision.

Et je l’avais prise en quittant Thorlann : j’avais juré de ne plus fuir. Je devais prendre les devants et prévenir Emilie avant qu'elle ne l'apprenne d'une autre manière. En la maintenant dans l'ignorance, je ne la protégerai pas de la vérité. Résolu, il me fallait capter son attention sans alerter ses amies. Je ne pouvais pas encourir le risque de m’avancer dans la foule et de l’interpeller. Ni me ruer sur elle et ordonner aux vents de nous éloigner. J’avais déjà assez à me faire pardonner, je ne souhaitais pas rajouter kidnapping à la liste. Après quelques instants de réflexion, une idée germa dans ma tête. Je cherchai un morceau de papier froissé de ma poche et demandai un crayon à une passante. Elle en sortit un de son sac à main que je lui rendis après avoir griffonné quelques phrases sur la feuille.

Puis je me retournai vers Emilie qui n’avait pas bougé.

Je pliai le mot en quatre, la portai à ma bouche et soufflai. Malgré l’absence de vent, le message s’envola et zigzagua entre les voitures comme par magie. Puis, une bourrasque le fit changer de trajectoire. Il s'ouvrit et se plaqua sur le visage d’Emilie. Pour capter son attention, c’était réussi. Surprise, elle saisit la feuille qui lui obstruait la vue tandis que ses amies gloussaient. Je croisai les doigts pour qu’elle le lise. Ma bonne étoile devait faire des heures supplémentaires, car la jeune fille se mit à le parcourir. À chaque mot, ses sourcils se fronçaient encore plus.

Lorsqu’elle eut terminé, elle pivota vers moi, les yeux écarquillés.

Au risque d'attirer l'attention, je lui fis un signe de la main. Un inconnu qui demandait à une autre personne de le rejoindre seul n'avait probablement pas de bonnes intentions et ne pouvait qu'entraîner de la méfiance. Pourtant, elle devait être trop curieuse pour faire preuve de prudence, car elle bafouilla quelque chose à ses camarades et traversa la route, le visage tendu.

Elle s’approcha lentement et se risqua, incrédule :

— Peter ? C’est toi ?

Après une hésitation, je retirai ma casquette.

— Oui, répondis-je en me mordant la lèvre. Ça fait longtemps.

Elle me dévisagea avant de s’écrier :

— Mais où étais-tu ? Et que t’est-il arrivé ? Je…

Sa voix se brisa.

— J’ai cru que j’allais devenir folle, bafouilla-t-elle.

Je voulus la serrer dans mes bras et la rassurer, mais je me retins. Je n’en avais pas le droit, j’étais la cause de sa peur et de son traumatisme.

— Je suis là pour tout te raconter, lui garantis-je. Je suis désolé de ne pas l'avoir fait plus tôt, les choses ont été périlleuses ces derniers temps.

Je jetai un œil aux alentours et aperçus un salon de café plus loin.

— Tu acceptes que je t’offre enfin ce café ?

Nous nous assîmes dans des fauteuils moelleux autour d’une table basse en bois où fumaient nos boissons. L’établissement, un salon aux murs imitation brique semblait sortir tout droit des années 80. Des photos d’acteurs de cette même époque étaient placardées un peu partout, éclairées par des lampes jaunes qui se reflétaient sur les tapis rouges à motifs. Ils me rappelaient celui douillet de mes grands-parents sur lequel je m’allongeais pour regarder des films avec mon frère.

Diable que j’étais nostalgique depuis mon retour !

Emilie ouvrit la bouche pour dire quelque chose, mais se ravisa et but une gorgée de son cappuccino crémé pour se réchauffer. Je fis de même, préférant attendre qu’elle me pose des questions. Non pas que j’avais peur de me lancer, au contraire j’avais terriblement envie de me soulager de cette culpabilité qui m’opprimait la poitrine. Néanmoins, je ne désirais pas lui balancer toutes les informations d’un coup. J'envisageais d'y aller étape par étape et la laisser décider des réponses qu’elle souhaitait obtenir.

Finalement, elle se racla la gorge et demanda :

— Je n’ai pas imaginé cette chose qui t’a attaqué, n’est-ce pas ?

Je secouai négativement la tête.

— Qu’est-ce que c’était ? ajouta-t-elle après une hésitation.

— Un Xenos. Un monstre chargé de me tuer.

Elle déglutit.

— Un monstre cherche à te tuer ?

— Une armée, en fait.

Elle scruta mes yeux comme pour y déceler une trace d’ironie, mais je restai de marbre pour lui prouver mon honnêteté. Elle prit une profonde inspiration, posa sa tasse sur la table les mains tremblantes et s’enquit :

— L’armée de qui ? Et pourquoi toi ?

— Les Xenos composent les troupes d’un dieu, Emilie. Un dieu qui cherche à m'éliminer parce que je suis le réceptacle de son frère.

— Toi ? Tu es le réceptacle d’un dieu ?

Le fait qu'elle répète chacune de mes phrases n'était pas de bon augure. Je posai la main sur la table, paume ouverte sur le côté, et mon mug se déplaça d’une trentaine de centimètres pour se loger entre mes doigts sans que je le touche.

Emilie hoqueta.

— Oui, réaffirmai-je. Je suis l’hôte d’un Immortel dénommé Astérion.

— Comment as-tu fait ça ? s’exclama-t-elle. Ce…

— Si les Xenos me recherchaient, c’est parce qu’ils savaient que je développerais des pouvoirs comme la télékinésie, ce dont je viens de te faire la démonstration. Hepiryon, leur maître, craint que je l’empêche de se réincarner dans le corps d’un humain.

Elle se pencha en arrière et se prit la tête entre les mains.

— C’est du délire, Peter…

— Je n’y croyais pas non plus au début. Et c’est à cause de mon déni que tu t’es retrouvée en danger : je n’ai pas fait confiance à Astérion alors qu’il m’avait averti que les Xenos se mettraient à ma recherche. Je suis désolé.

Elle me dévisagea. Sa peau était devenue terriblement pâle, mais ses traits demeuraient impassibles.

— Je t’en voulais de m’abandonner avec tant de questions, confessa-t-elle, les yeux dans le vide. Les médecins n’ont cessé de me répéter que c’était à cause de la peur que j’avais imaginé ce monstre. Ils m’ont assuré que tu étais le seul coupable. Pourtant… Je ne pouvais m’ôter ces images de la tête ! J'en perdais le sommeil, chaque nuit m'apportant son lot de cauchemars ! Mais si je persistais à déclarer que j’avais vu cette chose abominable, ils auraient fini par me prendre pour une folle. Ce que j’avais déjà l’impression de devenir…

— Tu n’es pas folle, la rassurai-je.

— Mais où t’es-tu caché tout ce temps ? Les recherches après ta fuite n’ont rien donné.

— Je me suis rendu en Californie où j’ai vécu avec un peuple de créature pacifique engendré par Astérion il y a des millénaires.

Elle rit nerveusement.

— Si je n’avais pas vu le Xenos de mes yeux, honnêtement, je penserais que tu as un pète au casque.

Je souris.

— Ces êtres qui m'ont recueilli se nomment Elementaris, expliquai-je. C’est dans leur cité invisible, Thorlann, que j’ai appris à me battre.

Je vérifiai que personne ne nous épiait et sortis de mon sac mon épée offerte à Thorlann. Emilie la regarda, les yeux ronds.

— C’est une vraie ?

— Évidemment ! Fais attention à la lame ! C’est de la Némélithe, une roche unique presque aussi résistante que le diamant.

Elle prit l’arme avec prudence et la soupesa.

— C’est si léger !

Après quelques gestes peu assurés, elle me la rendit.

— Tu me permettras de rencontrer les Elementaris un jour ?

— Deux d’entre eux m’ont accompagné, mais ils sont occupés avec leur mission respective. La première, Kalya, voyage avec le président pour avertir les états étrangers de l’existence d’Hepiryon et de son armée, tandis qu’Elysion, le second, s’apprête à s’envoler pour Thorlann escorté de militaires pour aider aux préparatifs de son peuple.

— C’est… Incroyable !

Elle se pencha en avant, les yeux braqués sur moi et commença à m’interroger, de plus en plus intriguée. Nous discutâmes de toutes mes péripéties durant près d’une heure. Elle n’était pas avare de questions, preuve que plus nous parlions, plus elle se détendait. J’étais rassuré qu’elle me fasse confiance et ne me tienne pas pour responsable de sa mésaventure. Et, plus que tout, j’étais heureux d’avoir une conversation avec elle, sans me sentir guetté ou en danger. Même Astérion s’était retiré pour nous offrir de l’intimité. Nous aurions presque pu passer pour deux amis normaux discutant de sujets normaux.

Elle s’inquiéta lorsque je décrivis mon arrivée désastreuse à New York.

Elle s’émerveilla lorsque je dépeignis un portrait de Thorlann.

Elle s'esclaffa lorsque je lui racontai mes premiers entraînements douloureux avec Kalya et Elysion.

Et ses traits s’affaissèrent en apprenant l’attaque des Xenos et la mort de centaines d’Elementaris, dont Eonia.

— Ça n’a pas dû être facile… souffla-t-elle. Je suis désolée.

— Le plus difficile fut d’admettre que je n’avais pas été capable de faire mieux, répondis-je, la gorge nouée au souvenir de la bataille. Je m’étais tant amélioré que je me pensais apte à réaliser des exploits, mais j’avais tort. Je reste un homme.

Emilie me regarda avec compassion.

— Que vas-tu faire maintenant ?

— Ce soir, j’accompagnerai Elysion et mes amis prendre leur avion pour Los Angeles. Et demain, je me rendrai en Allemagne pour découvrir si les Xenos sont bien responsables de l’évasion d’Hans Becker. Si c’est le cas, je devrai être prudent : il ne faut pas qu’Hepiryon change d’avis. Si c’est bien lui qui l’a enlevé, il n’a certainement pas fait tant d’efforts pour rien. Cet homme doit lui plaire et maintenant que j'ai un nom, je ne veux pas qu'il porte son choix sur quelqu'un d'autre.

— Et le jour de la réincarnation, tu... tu le tueras ?

Elle avait dit cela calmement, mais je la sentais nerveuse.

— J’aimerais l’éviter, lui confiai-je. Abattre des Xenos, c’est une chose. Je veux dire, ils sont déjà morts, simplement envoûtés par la magie d’Hepiryon. Mais tuer un homme de sang-froid, même s’il a commis des actes abominables, me répugne. Astérion ne cesse de dire que si je désire que notre plan fonctionne, il le faudra bien, mais je cherche d'autres options.

— Et tu en as d’autres ?

Je secouai tristement la tête.

— Pas pour le moment.

Je jetai un œil à ma montre. Comme le temps passait vite !

— Je vais devoir m'en aller, m’excusai-je. Je dois me rendre chez Antoine et attendre une voiture qui nous escortera à l’aéroport.

— Je comprends, répondit-elle en se levant.

Nous payâmes et sortîmes de l’établissement.

Je rabattis la casquette sur ma tête et me tournai vers Emilie.

— Merci d’avoir accepté de me revoir et de ne pas me reprocher… tu sais quoi. Je m’en voulais tant après…

— Tu es revenu, m’interrompit-elle. Et tu as été franc avec moi, c’est tout ce qui compte.

Je souris. Cette fille n’était décidément pas banale.

Voici le moment idéal pour lui proposer un second rendez-vous, s’immisça Astérion.

Je levai les yeux au ciel.

Quand cesseras-tu de…

Simple conseil qui fonctionne depuis des millénaires !

Je me raclai la gorge et bafouillai :

— Je vais rester dans le coin encore quelque temps. Je dois m'entraîner pour empêcher la réincarnation d’Hepiryon, mais lorsque je ne suis pas en train d'exploser un désert et que tu t'ennuies…

Elle sortit un mouchoir et y inscrit quelque chose avant de me le tendre.

— Voilà mon numéro. Appelle-moi et, si je suis libre, ce sera une joie de rediscuter avec toi de la manière dont Kalya a rendu ta fesse gauche plus plate que la droite à coups de bâton !

Je ris.

— Avec plaisir !

Elle se détourna et je la suivis du regard jusqu'à ce qu'elle me fasse un signe et tourne à l'angle d'une rue.

Je jetai un œil au bout de papier que je tenais encore et qui valait de l'or. Je souris et le glissai dans ma poche.

J’avais rarement eu le cœur aussi léger.

— Bon sang, il fait si froid ! s’agaça Florian. Quelle idée de prendre un avion à vingt et une heures du soir !

— T’inquiète pas, s’enquit Matt. Il fera plus beau et chaud à L.A !

— Tu rigoles ? s’indigna le rouquin. On a huit heures d’avance sur eux ! Avec le décalage horaire, on arrivera, non pas à huit heures du matin mais à deux heures ! C’est l’heure où je me couche habituellement !

— Arrête de te plaindre et pense à cette incroyable aventure qui nous attend !

Notre grand gaillard était bien le seul à arborer un large sourire. Florian grelottait et grommela une réponse où il était question de réchauffement climatique, Maël rabattit son bonnet pour protéger ses oreilles de la fraîcheur et Antoine resserra son écharpe avant de cacher ses mains dans les poches de son épais manteau. S’ils avaient tous hâte d’arriver à Thorlann, les visages fermés des quarante militaires aux tenues de camouflage kaki qui nous encadraient leur avaient bien fait comprendre qu’ils ne se rendaient pas en Californie pour passer des vacances.

Leurs affaires avaient été déjà déposées dans la soute de l’avion que nous ne tardâmes pas à distinguer. Un impressionnant engin d’une quarantaine de mètres d’envergure pour tout autant de longueur, doté de deux paires d’hélices à chaque aile et de quatre turbines pour lui permettre d’atteindre Los Angeles en un peu plus de onze heures.

— C’est un Airbus A400M Atlas, nous informa Florian.

— Ravi de l’apprendre, marmonna Maël.

— Vous saviez que les hélices de chaque demi-aile tournent dans un sens opposé ? Ça a plusieurs avantages, notamment celui de pallier la dissymétrie en cas de panne d’un des moteurs. Pour éviter qu'on se crashe, en somme.

— Tu cherches à nous faire peur ou quoi ? s’agaça Matt.

Le rouquin l’ignora et poursuivit son explication :

— L’Atlas peut transporter jusqu’à cent seize soldats avec leurs équipements, comme ceux qui nous escortent, ou encore une soixantaine de civières et une équipe médicale d’une vingtaine de personnes en cas de besoin. Ah, et ses commandes sont totalement électriques, ce qui le rend aussi manœuvrable qu’un biréacteur.

— Où as-tu appris tout ça ? demandai-je, toujours impressionné par ses connaissances.

— Sur le Net, pendant les cours de microbiologie. Ils m’auront au moins été utiles une fois dans ma vie.

— Tu es épuisant à tout savoir, s’exaspéra Maël.

— C’est ce qui fait tout mon charme ! se réjouit le rouquin.

Elysion lui jeta un regard de travers tandis que je souriais. Il allait devoir tenir Florian à l’œil ou il deviendrait un véritable trouble-fête.

Nous arrivâmes à l’arrière de l’appareil où des hommes s’affairaient à le charger de chariots de munitions et d’armes, de provisions, de bivouac et de survie par l'énorme porte d'embarquement. En connaissance du consensus entre les humains et les Elementaris, les conseillers du président lui avaient suggéré de ne pas s’immiscer trop brutalement dans leur quotidien, et donc de ne pas leur demander refuge, mais plutôt de solliciter l'autorisation de camper à proximité de leur cité et de parlementer la journée. Elysion et moi avions approuvé ce choix : s’introduire dans la vie des Elementaris s’avérait déjà délicat, mais en brusquant les choses, nous risquions de gâcher les négociations avant même qu’elles ne commencent. Or, il en valait de notre survie qu’elles aboutissent.

Alors que nous attendions des instructions, une femme militaire aux cheveux blonds et courts s’approcha.

— Je vais vous mener à vos places et vous expliquer les procédures, déclara-t-elle à mes amis. Une fois arrivé à l’aéroport, vous resterez avec l’équipe médicale et vous serez sous leurs ordres, suis-je clair ?

Mes camarades acquiescèrent.

— Nous décollons dans vingt minutes, conclut-elle. Je vous donne quelques instants avant d’embarquer.

Puis elle s’éloigna, nous laissant tous les six.

Matt jeta un œil à l’intérieur de l'Atlas et soupira :

— Je parie qu’il n’y a pas d’hôtesses de l’air…

— Les soldats me paraissent charmants, ricana Florian.

— Pas mon genre, rétorqua Matt en plissant le nez. Ils seront plutôt au goût de Maël.

Ce dernier, qui scrutait les militaires, lui lança un regard mauvais. Matt rit et se tourna vers moi.

— On te tiendra au courant régulièrement, une fois là-bas.

— Et on tâchera de faire bonne impression aux Elementaris, comme tu nous l’as demandée, ajouta Antoine.

— J’ai peur, avouai-je, que, malgré les négociateurs qui vous accompagnent, voir des Hommes armés débarquer ne va pas les enchanter. Elysion était censé rentrer seul pour les informer. Leur forêt et leur cité sont sacrées, tout autant que leur indépendance. Tu feras de ton mieux pour les intégrer, n'est-ce pas ? demandai-je à l'Elementaris.

Il acquiesça.

— Et si vous vous proposez de partager vos connaissances médicales, ajoutai-je, ils seront plus enclins à vous accepter. Il faudra simplement leur accorder du temps pour qu'il vous tolère.

— J’espère que tu as raison, glissa Maël. J’aimerais revenir entier.

— Je m’en assurerai, promit Elysion. Vous n’aurez rien à craindre avec moi.

— Voilà qui est réconfortant ! s’exclama Florian.

Puis, les uns après les autres, ils m'enlacèrent.

— On se revoit bientôt ! achevai-je. Faites attention à vous.

Ils hochèrent la tête et montèrent dans l’engin.

Avec un pincement au cœur, je les suivis du regard.

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