Chapitre 13 - 1265 -

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Assis en tailleur sur le lit d’une probable chambre d’amis de la maison, je me goinfre de fraises Tagada. La pièce est plutôt vieillotte, la tapisserie fanée. Je n’ai pas réussi à allumer autre chose qu’une lampe de chevet qui éclaire mal, car l’ampoule du lustre est grillée. Marion s’est allongée, bercée par les cris des adolescents et la musique de fond qui provient du rez-de-chaussée. Nous nous remémorons nos deux années de lycée et ça nous fait rire.

— Et quand tu as bombardé le plafond de chiques de papier toilette et qu’une est tombée pile-poil au moment où le CPE a claqué la porte.

Notre classe se trouvait juste à côté des toilettes et pendant une récréation, j’avais fabriqué des chiques énormes. Le plafond était tapissé quand notre CPE est venu se présenter et faire son discours d’accueil. C’est là qu’une chique lui s’est écrasée sur les pieds.

— Oh putain, oui ! Je commençais bien la seconde !

— C’était ta première convocation, non ?

— Oui, première colle, aussi !

Marion s’attaque à un sachet de Dragibus, ses bonbons préférés. Étendue sur le dos, elle me regarde en réfléchissant.

— T’as beaucoup changé ! finit-elle par me dire.

Directement au goulot, j’avale une gorgée de vodka orange puis je lui tends la bouteille. Elle boit à peine et pose le mélange par terre tandis que je retire mes Converse. Je m’allonge sur le ventre et me rapproche au plus près de mon amie si bien que nos jambes se touchent.

— Comment ça, j’ai changé ?

— Bah, déjà physiquement !

— J’ai grandi !

— Pas que ! C’est sûr que niveau taille, ça fait bizarre. On a toujours fait la même taille et en un an tu as pris au moins quinze centimètres de plus que moi !

— T’es restée une naine !

— Oui ! me répond-elle en mimant de pleurer. Mais t’as les cheveux plus courts aussi et t’es devenu hyper musclé !

Je remonte aussitôt mon T-shirt pour découvrir mes abdos.

— Ça te fait rêver, pas vrai ?

— J’ai les mêmes !

— Ah oui, c’est vrai ! Montre !

Je commence à tirer sur ses vêtements pour la déshabiller. Elle éclate de rire et se débat en me lançant :

— Je suis en robe, tu crois quand même pas que je vais la lever !

— Bah si ! Je pourrais voir ton string comme ça !

— Mais non… et qui te dit que j’ai un string ?

Je lâche Marion pour terminer mon sachet de Tagada en calmement puis je le pose sur le chevet. Je me tourne vers elle qui est désormais silencieuse en m’appuyant sur un coude. J’ai envie qu’elle m’avoue qu’elle m’apprécie, que je compte beaucoup pour elle, autant qu’elle compte pour moi.

— C’est tout pour mes changements ?

— Non ! T’es différent ! Tu fais moins de conneries !

— Je suis devenu sérieux !

Je fais parfois des efforts, pas vraiment souvent, mais disons que maintenant j’ai peur de perdre les gens que j’aime à cause de mon comportement, alors j’essaie d’être plus attentif.

— Quand même pas… mais tu réfléchis plus peut-être. Tu t’énerves moins !

Me retrouver seul avec elle me paraît une aubaine, cela fait si longtemps que ça ne nous ait pas arriver. Tandis qu’elle me parle, mes yeux sont attirés par sa bouche en cœur, ses lèvres douces que je connais par cœur. C’est à ce moment précis que le désir de l’embrasser me reprend. J’ai envie de lui dire que quand on est ensemble que tous les deux, j’arrive pas à penser à autre chose et pendant qu’elle continue inlassablement son monologue sur mes changements, je brûle de l’intérieur.

— Avec les gens aussi, t’es moins dans la provocation. Avant, tu faisais tout pour qu’on te voie, maintenant tu es plus ouvert aux conversations.

Je suis plus ouvert à toi, Marion. Je suis bloqué sur tes lèvres qui s’agitent vivement et que j’ai terriblement envie de toucher avec ma langue.

— Et ce qui est bien, c’est que tu deviens raisonnable en soirée. Tu te mets moins minable qu’avant…

Je ne peux pas résister. Tant pis si elle me jette. Je m’avance rapidement et je pose un smack sur sa bouche sucrée. Elle ne réagit pas et reste concentrée sur son analyse. Je marque un point, elle ne m’a pas rembarré, mais j’ai l’impression qu’elle ne s’est rendu compte de rien.

— À un moment, tu étais bourré avant même que les fêtes démarrent.

J’humidifie mes lèvres et recommence. Je l’embrasse à nouveau, furtivement. Elle réagit enfin et me sourit.

— Ça faisait longtemps qu’on s’était pas embrassé… je murmure.

J’ai le cœur qui tape fort dans ma poitrine et tellement besoin de la prendre dans mes bras, de la serrer contre moi.

— Six mois ?

— C’est long !

Alors qu’elle fait la moue, ses fossettes apparaissent.

— Tu embrassais d’autres filles…

— J’avais envie d’embrasser que toi…

Nos regards s’affrontent et Marion me dévisage. Elle ne me répond pas et accepte que je l’approche à nouveau. Je déglutis et m’avance encore, très lentement, vers ses lèvres. Ma bouche caresse la sienne délicatement et lorsque je la vois fermer les paupières et se laisser faire, je suis soulagé. Je profite de ce baiser comme si c’était le dernier. Je cherche sa langue qu’elle m’offre sobrement. Je ne la quitte pas des yeux pour savourer ce moment que j’attends depuis des mois. Elle a ce goût unique que je ne trouve chez aucune autre fille. Quand j’embrasse Marion, je perds tous mes moyens, je ne pense plus à rien. Ce baiser dure longtemps. Très longtemps. Comme pour rattraper les jours gâchés. Aucun de nous ne souhaite qu’il se termine. Puis à bout de souffle, Marion rompt le charme et pose sa tête dans mon cou.

Tant de choses que je n’arrive pas à traduire me traversent le cœur !

— Je ne veux plus qu’on reste aussi longtemps sans s’embrasser… je lui murmure.

À cet instant, c’est tout ce que je sais, tout ce que je suis en mesure de lui dire.

Tandis qu’elle ne me répond toujours pas, j’enlace ses doigts et la serre contre moi. Son index chatouille la paume de ma main. Je ne sais pas quoi penser de ce qu’il se passe, est-ce que Marion m’aime ? Je ne saisis rien, car elle reste désespérément muette. Elle finit par sommeiller contre moi pendant que je me pose mille questions sur notre relation. Même si je ne comprends pas où nous allons, je voudrais que cette nuit ne se termine jamais. Je ne dors pas pour ne rien perdre de ce bien-être que je ressens en tenant Marion contre mon corps. Les bruits ont cessé dans la maison, j’en déduis que tout le monde s’est assoupi. Je joue avec une mèche de cheveux blonds alors que la nostalgie de ce baiser m’envahit. Et si c’était le dernier ? J’ai peur de demain. J’ai peur de l’avenir.

Marion ne m’a rien laissé entendre et maintenant, je suis assailli de doutes, j’ai peur qu’elle me repousse encore. Il faudrait que je lui pose la question franchement, mais l’angoisse qu’elle ne ressente rien pour moi me paralyse.

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