Chapitre 3 - 1274 -

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Je suis pendu aux lèvres de Marion comme jamais. Mon cœur s’emballe et plus rien ne compte, même pas Max qui m’appelle depuis la porte d’entrée pour me dire que mon vieux nous attend immédiatement tous les trois…

— On peut en parler après, si tu préfères ! propose Marion.

— Non, il peut poireauter, c’est pas urgent !

— Comme tu veux… en fait, c’est ma sœur qui m’a poussée à te prévenir.

Sa sœur ? Qu’est-ce que sa sœur peut bien venir foutre dans notre histoire ? Marion mord sa lèvre inférieure et cette petite habitude la rend encore plus craquante. Elle est mal à l’aise et je devrais l’aider, mais elle m’a tellement friendzoné ces derniers temps qu’il est hors de question que je l’ouvre…

— Sophie ?

— Bah oui, j’ai qu’une sœur ! Ça concerne Paulo…

Sophie et Paulo ? Marion coince ses cheveux derrière ses oreilles puis elle farfouille dans son sac de cours pour en tirer son téléphone.

— Elle veut ressortir avec Paulo ou quoi ?

— Mais non ! Elle a tourné la page, surtout vu comment ça s’est fini leur histoire… mais elle l’aime bien ! Enfin Tonio, c’est normal, quoi ! Ils ont toujours été dans la même classe depuis la première année de maternelle ! C’est un peu comme nous deux…

Bon, je ne comprends pas du tout où elle veut en venir. En tout cas, c’est sûr qu’elle m’annoncera pas qu’elle a finalement changé d’avis à mon sujet. Je soupire, un brin déçu, même si au fond de moi j’espère encore un miracle. Elle cherche un message dans son portable puis me le tend.

— C’est Sophie qui m’a envoyé ça à midi !

Sophie : Paulo fait n’importe quoi sur Bordeaux C’est très grave Parle avec Tonio stp

Marion : Il fait quoi ? Je sais pas quoi dire à Tonio

Sophie : Marion, y a que Tonio qui peut le raisonner Paulo s’est shooté à la coke tout le we ! Ça va mal finir !

Merde ! Merde ! Merde ! C’est donc ça l’explication de l’attitude et la dégaine de Paulo, ce matin au lycée. Tout s’éclaircit : Paulo était bien défoncé de la veille comme je l’avais perçu, mais je savais pas que c’était à ce point. Putain de merde ! La coke quand même ! Je rends le téléphone à Marion et je laisse tomber ma tête contre le dossier du banc. Je n’ai pas envie d’être confronté à cette situation, je ne veux pas voir la vérité en face. Je ne peux pas imaginer une seule seconde que Paulo, le beau gosse séducteur à la cool attitude, celui que j’admire, mon pilier, mon soutien de toujours, ne va pas bien. Le ciel au-dessus de moi est bleu. Ce bleu pur et limpide que j’aime. Des pigeons volent au gré du vent et des courants d’air. Il faudrait que je surfe, c’est le temps idéal pour ça… Il fait froid, car c’est encore l’hiver, mais c’est la meilleure saison pour profiter de l’océan. Pendant quelques instants, je m’évade, j’enfouis en moi ce nouveau problème qui surgit.

— Tonio ?

Marion pose sa main glacée sur mon visage. Ses doigts caressent ma joue. Je ne sais pas quoi lui dire comme je ne sais pas quoi dire à mon frère. Je comprends juste que le Paulo que j’ai vu ce matin n’est pas mon frangin, mais un pauvre type paumé. Il me fait peur, oui, j’ai peur pour lui !

— Merci de m’avoir prévenu !

Je me lève du banc et ferme mon blouson. Moi qui ai toujours chaud, je frissonne en découvrant mon paternel qui fume sa cigarette sur le perron.

— Tu vas lui parler ? m’interroge Marion.

J’esquive de lui répondre, car en aucun cas, je ne sais quoi faire.

— Je dois y aller, mon vieux m’attend…

Je m’éloigne d’elle pour rentrer chez moi. Au dernier moment, je lui fais un signe de la main pour la saluer avant de devancer mon père qui ferme la porte.

Je jette mon sac de cours dans son bureau qui est presque devenu le mien, car j’y passe presque plus de temps que lui.

— Direction le salon, merdeux ! m’indique mon vieux sévèrement.

Je ne lui obéis pas de suite pour lui montrer qu’il n’a pas de véritable emprise sur moi. Il trépigne en me suivant lorsque je me rends à la cuisine pour me servir un bol de céréales.

— Dépêche-toi, bordel !

— Oh, ça va ! Détends-toi, y a pas le feu ! je lui réponds la bouche pleine.

Je mange mon bol de Trésor en m’asseyant sur le canapé entre Paulo et Max. Le premier est complètement dans le cirage, alors que le deuxième est concentré sur son portable. En jetant un œil par-dessus son épaule, je reconnais la photo de profil de sa Hollandaise…

— Bon ! commence mon père en faisant les cent pas face à nous trois.

J’ai les yeux rivés dans mon bol qui diminue à vue d’œil. J’ai toujours la dalle quand je rentre du lycée et rien n’est jamais plus important que de me rassasier, mais cela va être compliqué d’aller me resservir durant la sérénade du vieux.

— C’est du n’importe quoi, les gars ! Vous allez pas me casser les couilles longtemps, c’est moi qui vous le dis ! Donc à partir de maintenant, vous allez filer droit ! Au moindre problème, à la moindre remarque, c’est direct la porte. Et si ça vous convient pas, et bah c’est pareil !

Mon bol est vide. Putain, j’en ai rien à battre de sa soudaine crise d’autorité. J’ai juste envie de bouffer. Je tente de me lever pour aller récupérer le paquet de céréales quand mon père gueule de plus belle :

— J’ai pas fini, merdeux ! Tu t’assois !

Il a les yeux qui lui sortent de la tête et au moment où je me mets debout, Max tire sur ma ceinture ce qui m’oblige à retomber dans le canapé.

— Donc Paulo, jusqu’à nouvel ordre, tu me rends les clefs de la voiture de maman.

Paulo cherche dans ses poches et lui balance le trousseau que mon père saisit au vol.

— Parfait ! Et pas de surf pour tout le monde jusqu’à nouvel ordre ! Et pour finir, ici c’est chez moi ! Donc je fais ce que je veux ! J’amène qui je veux et quand je veux !

Je ne supporte pas d’en entendre davantage. Cette fois-ci, je me lève pour de bon. Je pourrais lui casser la gueule. Il me donne envie de gerber. Il est clairement en train de nous dire qu’il va faire venir sa pouffe ici, je la vois déjà débarquer avec ses valises et dormir dans le lit de ma mère. Cette image me détruit, me brise en mille morceaux. Je ne peux pas accepter ça, l’autoriser à la remplacer. Personne n’aura jamais sa place dans sa maison. Je me le jure, je ne laisserai jamais qui que ce soit s’installer chez moi.

— T’es chez toi ? Mais vas-y ! Respecte-nous et on te respectera ! Ramène-la ici et tu perdras à mes yeux le peu de dignité qu’il te reste ! Donc vas-y ! Ramène-la qu’on rigole !

— Arrête Tonio, arrête ! me supplie Max qui me tire jusqu’à l’escalier pour me pousser dans ma chambre.

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