Chapitre 4

8 minutes de lecture

Ça y est, il était temps de partir. Ash ne me laissa que quelques minutes. Juste le temps de prendre des affaires qui rentraient dans mon sac de cours. Il m'indiqua que ce n'était pas la peine de prendre des habits car il fallait que je me fonde dans le paysage et les gadgets électroniques étaient inutiles, rien ne fonctionnait là-bas.

Si j'avais su que je vivais mes derniers instants d'une vie normale, j'en aurais profité plus que ça. Je n'aurais jamais imaginé atterrir dans un monde fantastique. Et en même temps, je ne pouvais nier que j'avais hâte de voir ce que ce nouveau monde avait à m'apporter. Puis je partais avec Ash, j'avais confiance en lui pour me protéger. Il l'avait déjà prouvé à plusieurs reprises.

C'était dur de choisir quoi prendre. Nous n'étions pas de grands aventuriers, donc je ne voyais pas ce que je pouvais emmener d'utile. C'était essentiellement des choses sentimentales.

Je redescendis le cœur lourd avec une pointe d'impatience. Je ne voulais pas quitter mes parents mais il fallait bien quitter le nid. Dommage que ce ne soit pas par choix et dans des circonstances si incertaines.

— Vous voulez qu'on vous dépose quelque part ? demanda mon père.

— Merci Monsieur mais nous ne pouvons vous révéler l'emplacement de la porte, nous allons marcher.

— Ok, répondit-il en baissant ses yeux rougis.

Ma mère, quant à elle, reniflait et se tamponnait les yeux avec un mouchoir. C'était le temps des adieux. Nous ne savions pas quand nous allions nous revoir, ni même si nous en aurions la possibilité. Nous nous serrâmes les uns contre les autres, et les larmes se mirent à couler. Je ne sus dire combien de temps nous restâmes ainsi, si c'était le temps d'un battement de coeur ou d'une éternité. Dans tous les cas, ça me parut trop court.

— Ellie, on doit y aller, m'interpella Ash d'une voix douce.

Je me détachais avec difficulté de l'étreinte de mes parents. D'un pas lourd, je le suivis et nous nous mîmes en route. Nous n'échangeâmes pas un mot durant le trajet, chacun perdu dans ses pensées. Je lançais quelques coups d'œils vers lui. Ça lui allait bien cet air concentré et déterminé. Je me demandais vers où j'allais, je ne savais même pas ce qu'on attendait de moi.

Après une heure de route, j'avais mal aux pieds quand il m'annonça que nous étions arrivés.

— Tu vois les deux arbres entrelacés ? C'est entre eux qu'on doit passer.

Je hochais la tête en observant les alentours. Nous étions dans un parc où je n'étais encore jamais venue. A cette heure, il était désert. Forcément. Ils étaient tous au chaud dans leur lit sans se douter de qui vivait juste à côté d'eux. J'en frissonnais. Ash me prit par surprise en m'entourant de ses bras. Je ne mis qu'un instant à me détendre et à lui rendre son étreinte. Je sentais ses muscles fins et fermes sous mes mains, son odeur emplissait mes sens et me détendait. J'entendais son cœur battre contre mon oreille.

— Je suis désolé de t'arracher à tout ce que tu as toujours connu. J'espère que tu te plairas à la cour. Sache que je serais toujours là pour toi.

Mon cœur papillota et fondit à ces paroles. Je ne sus que répondre et le serrais juste un peu plus fort. Je finis par me détacher de lui à regret. Il était temps de revenir à cette douloureuse réalité et d'y aller.

— Merci d'être là pour moi Ash. Que devons-nous faire ?

— Tu as juste à me suivre.

Il s'approcha l'arbre puis sortis un couteau d'une de ses poches. Qu'est-ce qu'il allait faire ? Il s'entailla le bout du doigt avant de l'appliquer sur l'un des nœuds de l'arbre. Et il n'avait même pas l'air de souffrir. Il baragouina dans une langue étrange et la surface entre les deux arbres parus se distordre.

— Viens et surtout ne me lâche pas, dit-il. Ca ne fait pas mal ne t'inquiète pas.

J'eus l'impression de plonger dans l'eau glacée. Tous mes muscles se tétanisèrent et je pensais que je n'allais jamais pouvoir respirer. Heureusement que j'avais machinalement pris une grande inspiration avant de plonger dans ce portail.

Je m'effondrais en arrivant de l'autre côté. C'était injuste, Ash était toujours aussi digne et debout, avec maintenant un petit sourire moqueur. Je reprenais difficilement mon souffle. J'étais éblouie, nous avions quitté la nuit pour arriver le jour, sympa le jet-lag.

— Tu aurais pu me prévenir que c'était gelé ! grommelais-je en me relevant. Un rire fit tressauter ses épaules.

Tout en époussetant mes habits, je regardais autour de moi. Un désert à perte de vue. Il n'y avait pas que du sable mais aussi des blocs de roches desséchées et craquelées. Le paysage était certes magnifique, mais comment allait-on faire ? Nous n'avions pas ni eau, ni nourriture. S'il m'avait prévenu, nous aurions pu faire des provisions avant de partir.

— On a atterri où ?

— Eh bien il semble que nous soyons arrivés à Phantom Vale. Pas le meilleur endroit mais pas le pire non plus.

— Sympa comme nom. Tu ne savais pas où allait le portail ?

— Celui-là non. Certains ont des destinations fixes mais d'autres font un peu comme bon leur semble. En plus, la magie entre la terre et l'Ether n'est pas toujours stable.

— On aurait pu finir en morceau en fait ?

— Non ! Mais si tu m'avais lâché, j'aurais pu finir à un endroit et toi à un autre.

— Ok, et pourquoi ce nom ?

— Tu es bien curieuse, s'amusa-t-il. Commençons à avancer et je t'explique.

Il lui fallut cinq bonnes minutes pour arriver à se repérer. Je prenais mon mal en patience en attendant. J'en profitais pour détailler le paysage autour de moi, un désert aride à perte de vue, pas un poil de verdure pour égayer tout ça. En plus, je commençais déjà à cuire. Il recommença dans la langue de tout à l'heure avant d'indiquer par où aller.

— Par là ! montra-t-il du doigt. Alors pour reprendre, Phantom Vale s'appelait autrefois Ezekie. Cette terre a toujours eu la particularité de choisir sa dynastie régente. En général elle perdurait dans une lignée mais si trop d'éléments perturbateurs apparaissaient, elle pouvait en changer. Le dernier roi qu'elle eut disparu sans laisser d'héritiers derrière lui et après lui. L'Ezekie n'arriva pas à désigner un roi ou une reine digne d'elle. Certains s'y essayèrent, se disant que la terre se rendrait bien compte de leurs compétences, mais aucun d'entre eux ne ressentit l'Appel. Elle les repoussa du règne et se mit à se flétrir. C'était l'un des royaumes les plus prospères qui se mit à décliner. La terre se mit à moins produire, les animaux à dépérir, les habitants s'exilèrent vers d'autres royaumes. Seule une poignée d'irréductibles nomades tente de continuer à choyer cet endroit qui les a abandonnés C'était il y a près de 500 ans et l'Ezekie continue d'attendre son souverain.

A cette histoire si triste, une larme solitaire coula de mes yeux pour s'écraser sur le sol. Ma gorge était nouée et j'avais l'impression de sentir le désespoir de cette terre déchirée. Je toussotais avant de lui répondre.

— C'est tellement triste, soufflais-je. Et quels sont les autres territoires ?

— Oui, surtout qu'il faut arriver à se dire que c'est un désert avec plein de cours d'eau. C'est ici que se situe la naissance du plus gros fleuve, l'Argentou. C'est un territoire central et tous les autres se situent autour, un peu comme une étoile. Au nord, tu as Lusriven, qui se situe au bord de mer, avec de très nombreux canaux et rivières, son activité principale est la pêche et tout ce qui est maritime. A l'est, nous avons Izover, composé de montagne et ayant des hivers très long. A l'ouest, tu as Ebrem, est un territoire majoritairement marécageux et brumeux, ils font aussi pas mal de commerce mais plutôt dans la piraterie. Et enfin au sud, là où nous allons, tu as Klonenys, recouvert essentiellement de jungles et de fleurs, nous avons aussi pas mal d'agriculture. Nous avons dû nous y mettre après la chute de l'Ezekie.

J'avais écouté religieusement ses paroles. Je voyais ses yeux pétiller à la mention de sa patrie.

— Je ne suis pas certaine de tout retenir ! Tu n'aurais pas un plan ? m'amusais-je.

— Tu en verras plein à la cour ! Nous avons parmi les meilleurs archivistes du royaume, se rengorgea-t-il, fier comme un paon.

— Ça fait longtemps que tu es parti de chez toi ?

Il me fixa dans les yeux comme s'il hésitait à me répondre avant de regarder à nouveau la route devant lui. Sa mine s'assombrit.

— Il y a quelques années que je te cherche, indiqua-t-il.

— Quelques années ? Mais tu n'es pas beaucoup plus vieux que moi, rétorquais-je surprise.

— Ne te fie pas aux apparences, jeune fille ! J'ai déjà 27 ans.

— Quoi ? m'étonnais-je.

Puis mes joues se colorèrent. Je ne pouvais avoir le béguin pour un mec qui avait 11 ans de plus que moi. Au moins ça remettait les idées en place. On était en plein dans le détournement de mineur là.

— Et oui je sais que je fais plus jeune, nous vieillissons beaucoup moins vite que les humains. Je vais garder cette apparence un grand nombre d'année avant de vieillir petit à petit.

— Mais tu n'es pas humain ?

J'étais larguée puissance mille. Il éclata de rire avant de me répondre.

— Enfin Ellie ! Tu n'as pas vu mes oreilles ?

Et là elles m'apparurent dans toutes leurs splendeurs. J'étais vraiment aveugle pour ne pas les avoir vues avant : deux pointes dépassaient de ses cheveux. C'était un putain d'elfe. Legollas n'avait qu'à bien se tenir. Je manquais de défaillir avant de me ressaisir.

— Je ne sais même pas pourquoi ça m'étonne, ronchonnais-je.

Nous continuâmes de marcher jusqu'à ce que la nuit tombe, ne s'arrêtant que quelques minutes pour que je puisse soulager un besoin naturel. Hyper gênée, j'avais attendu de ne plus en pouvoir avant de lui demander. En plus il n'y avait rien pour se cacher ! A peine un buisson desséché ! Bah au moins ça lui ferait de l'eau.

J'étais toujours perdue dans mes pensées avec toutes les révélations que je venais d'avoir. J'aurais pu me prendre pour le messie tient. Ash nous arrêta.

— Je vais monter la tente pour la nuit.

Je cherchais partout autour de moi. Il n'avait rien sur lui, et je n'avais rien dans mon sac. Je n'étais pas sûre de vouloir savoir d'où il allait la sortir cette tente. Mon étonnement dû se lire sur mon visage.

— Je vais devoir la faire apparaître.

Et il s'entailla la main en prononçant quelques mots. Soudain, une tente se dressa juste à côté de moi.

— Cool. Par contre, euh, c'est bien mignon mais tu as pris un abonnement pour des transfusions ou comment on fait ?

Le temps de dire ces mots, l'entaille s'était presque refermée à l'inverse de mes yeux qui ressemblaient à des soucoupes.

— Tu dois donner de toi pour la magie, mais elle guérit aussi.

— Je devrais faire pareil ? Parce que le masochisme merci ! En plus, j'ai toujours eu horreur des piqûres.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire Dinedine59 ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0