Chapitre 1 : GABRIEL (3)

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Sur ses mots, il examina un instant les barreaux de l’immense grillage d’acier. Il posa un premier pied, s’agrippant de sa main gauche. Puis, fit de même avec l’autre côté et entama ainsi son ascension.

D’en bas, ses amis le regardaient. Il voyait bien qu’ils hésitaient. Cela n’était pas étonnant, de son groupe, il avait toujours été le plus courageux. Enfin, c’était ainsi qu’il se définissait. Ce qui n’était pas du goût de tous. Certains disaient de lui qu’il était fou, inconscient...

— Gabriel, redescends ! s’écria l’un.

— Non, j’irai chercher mon ballon. Avec ou sans vous. 

Son ballon. C’était tout ce qui lui restait de son père. Et il y tenait, il y tenait tant... le perdre serait comme voir son père disparaître de nouveau. Et cela lui était impossible.

Ignorant les douleurs soudaines qui lacéraient ses membres, et les quelques larmes qui humidifiaient son visage, il continua son ascension.

Il sentit qu’on le suivait. Et en effet, en se retournant, il vit Maxence et Timothée, le talonner, suivis de Léo, ses amis. Il ne put s’empêcher de leur en être reconnaissant, de ne pas le laisser seul et continua de grimper.

Ce grillage était haut pour des enfants de dix ans et Gabriel, de son jeune esprit, l’imaginait comme une immense montagne à gravir. Peut-être l’Everest ? Ou encore le Mont-Blanc ? Quand, enfin, il arriva au sommet, faisant basculer son pied de l’autre côté du grillage, un sourire de satisfaction illumina son visage. Il regarda le sol, quelques secondes et en vint à se demander si les alpinistes avaient déjà eu le vertige.

Le vent continuait de vouloir jouer avec lui, cherchant à le pousser. Gabriel, nullement déstabilisé, songea qu’il aurait tout le temps de s’amuser une fois son ballon retrouvé. Ignorant les hésitations de ses amis qui venaient de le rejoindre au sommet, il bondit de l’autre côté et roula sur le sol, avant de se redresser en un saut.

Tout était sombre autour de lui et il peinait à distinguer les contours des silhouettes menaçantes et imposantes des arbres. Néanmoins, entendre le vent siffler dans les branches, suffit à l’esprit du jeune garçon pour imaginer un monstre aux griffes acérées lui sauter dessus. Ou un géant. Ou pire : un monstre géant. Il sentit son cœur s’accélérer tandis qu’il entendait, juste derrière lui, une présence. Sous les lueurs de la lune, il vit des ombres le recouvrir et il prit peur, se retenant néanmoins pour ne pas hurler.

Les monstres n’existent pas. Les monstres n’existent pas... se répétait-il, tentant de cacher les tremblements de ses membres. Un peu comme s'il essayait lui-même de se convaincre.

— Bah alors, je croyais que les monstres n’existaient pas. S'écria Timothée, d'une voix claire.

— Et que tu n’en n'avais pas peur. Renchérit Maxence avec un sourire.

— Pourtant, tu es tout blanc, comme si tu avais vu un fantôme. Et tu trembles comme si un monstre t’avait couru après. Fit remarquer Théophile en riant de bon cœur.

Gabriel qui était, comme beaucoup d’enfants, très susceptible, leur tourna le dos et avança dans la pénombre, seul et profondément vexé.

Il n’aimait pas que l’on se moque de lui.

En faisant le tour de la propriété, il aperçut une fenêtre ouverte ou plutôt brisée. Et il songea que peut-être son ballon s’était infiltré dans le trou et se trouvait ainsi peut-être à l’intérieur. Sans même attendre ses amis, il se dirigea vers un arbre qui se situait non loin.

Il posa son pied droit sur la première branche, se hissant à l’aide de ses mains, puis le gauche, lui permettant ainsi d’attraper la seconde branche, puis la troisième... il marcha doucement le long d'une branche, mais fut déconcentré par un cri. En se retournant furtivement, il aperçut ses amis, en bas, crier son nom.

— On ne se moquera plus de toi, promis.

Et cela le fit sursauter et il perdit pied, se rattrapant de justesse d’une main. Ses doigts glissaient et souffraient tant qu’il finit par lâcher et s’écroula sur le sol. Il se releva cependant instantanément et recommença à grimper. Arrivé au bout de la troisième branche, il marcha doucement les mains fermement accrochées jusqu’à la fenêtre brisée où il parvint à se hisser. Ses mains glissaient le long du rebord auquel il tentait de s’accrocher avec la plus grande fermeté.

Pris de panique, à l’idée de tomber et retrouver les ombres de la nuit, il se démena davantage pour trouver appui et parvint, avec la force de ses bras, à se hisser sur le rebord, en équilibre.

Il sauta ensuite de l’autre côté et se retrouva dans une pièce semblable à un bureau.

Au centre, il aperçut son ballon qui avait roulé du museau de la bête qui se trouvait en face de lui, le regardant, silencieuse comme la nuit. Gabriel posa alors son doigt sur sa bouche, comme pour intimer à la bête de garder le silence, tandis qu’il se penchait doucement pour ramasser son ballon. Au moment où sa main frôla l’objet, l’animal se mit à gémir et à aboyer, perçant le silence de la nuit.

Gabriel n’eut pas le temps de se sauver. Une voix masculine, de plus en plus forte et donc de plus en plus proche, résonnait :

— Qui est là ?

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