Marcher

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Mes collègues et moi-même avançons tranquillement – quand je dis tranquillement c'est d’un pas lent et en silence –, nous marchons en occupant toute la largeur d’une route lambda, sans guère nous soucier de la présence d’un quelconque trottoir. Par chance, rassurez-vous, aucune sordide faucheuse voiture ne s’immiscera dans cette abracadabrantesque mais non moins formidable histoire. Est-ce une promesse ? Oui, pour ceux qui voudront bien y croire.


Nous marchons… à ce rythme vous vous dites – vos éloquentes pensées endolorissent mes réceptives oreilles – que c’est parti pour des kilomètres ; mais pas du tout, vous vous m’éprenez !


Nous marchons, pas depuis longtemps, apparemment sans but – ou ça aussi je ne m’en souviens plus – et sans que je sache d’où nous venons. Je ne ressens en tout cas aucune notion de fatigue. Marchons-nous depuis longtemps ? Peut-être, peut-être pas.


Je vous entends braire, pester : « quelle est donc cette histoire, sans queue ni tête, où le conteur ne sait rien ? » Comme vous braillez. Mais je ne peux vous donner tort, vous avez même parfaitement raison : je marche et ne sais alors pas grand chose ! C’est comme si on – ce fameux "on" – venait de me placer, de me téléporter, de me transférer, encore une fois, choisissez la formule qui vous conviendra mais comprenez que, d’un claquement de doigt, c’est comme si on venait de m’éveiller, là, sans la moindre explication !


Que fais-je ici ? Ou plutôt devrais-je dire "que faisais-je ici ?". Car alors que je marche, cette question ne me préoccupe guère, ne m’intéresse pas, ce n’est que maintenant que je me la pose ! Alors que je marche, je me fous, me contrefiche, me fiche et me contrefous de savoir d'où je viens et où je vais ! Par contre, sur le moment, ce dont je suis sûr c’est que ma présence est requise. Je dois être là où je suis, c’est impératif. Je marche et ne doute pas qu’on souhaite me savoir en ce lieu.


Il ne m’est donc pas venu à l’idée de me retourner pour voir le chemin parcouru ; j’ai aujourd’hui l’absolue certitude que derrière moi il n’y avait de toute façon rien. Il n’y avait rien que le néant. Rien qu’un décor vide. Il ne viendrait pas à l’idée d’un cinéaste de créer toute une toile pour l’arrière de sa caméra, pour le hors-champ, si ? Non. Et bien là, c’est pareil, tout se passe devant moi : je marche, en compagnie de collègues, sans me préoccuper du passé ou de l’avant, vers l’évènement à venir mais dont j’ignore pour l’instant tout.

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