La nouvelle

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1er septembre, quand tout vire au cauchemar

Hélène émergeait de son malaise. Elle était couchée sur une banquette du Café des Arts et distinguait tout autour d'elle des visages inconnus. Une voix, d'abord lointaine et étouffée lui posait toutes sortes de questions : si elle l'entendait... Quel jour on était... Si elle avait mal quelque part....

On la touchait... Tout était comme dans du coton. Elle n'était sûre de rien... Elle se laissait faire.... Incapable de réagir... de répondre... Tout était flou et lointain... Seul un nom revenait : Patrick !

Elle sentit soudain qu'on la soulevait pour la reposer. Et le noir.... Le trou noir...

Le lendemain matin

Lorsqu'elle se réveilla, Hélène découvrit une chambre d'hôpital, une perfusion fixée à son bras. Elle portait une chemise blanche à petits motifs gris. Le soleil inondait la pièce réhaussant la blancheur des parois. Elle avait mal à la tête et semblait flotter sur un nuage. Près de la porte, elle remarqua une penderie entrouverte et ses vêtements suspendus à l'intérieur.

Quelqu'un frappa à la porte et entra, sans attendre de réponse. C'était un homme qu'elle ne connaissait pas. Il se présenta. C'était un inspecteur de police. Il venait pour l'enquête à propos de l'accident de son mari. Était-elle en état de répondre à quelques questions ?

Hélène le trouva beau. Il lui rappelait Timothée lors de cette fameuse soirée, mais elle n'avait pas fait attention à son nom.

Elle acquiesca. Il s'assit et sortit un petit calepin de la poche de son blouson et en détacha un stylo-bille.

L'inspecteur lui demanda de confirmer son identité et quelques autres renseignements utiles à son dossier. Elle répondit, au prix d'un gros effort de concentration. Il prit quelques notes et poursuivit en expliquant :

— Nous n'en sommes qu'au tout début de l'enquête, comprenez-le bien, et les témoignages que nous avons récoltés vont tous dans le même sens : votre mari a été percuté par une voiture roulant à vive allure, alors qu'il sortait de chez une fleuriste et traversait la chaussée sur un passage clouté. Il portait un costume de cérémonie et un bouquet de...de roses, selon la fleuriste, précisa-t-il en relisant ses notes.

Il avait pensé à la mise en scène et aux fleurs, se dit Hélène en silence. Elle aurait dû mettre sa robe bleue... Pour le coup, elle s'en voulait. Elle se concentra pour suivre les explications de son visiteur.

Le policier continua :

— La fleuriste a vu l'accident et immédiatement appelé les secours, complètement paniquée. Nous sommes arrivés quelques minutes plus tard et c'est elle qui nous a désigné la voiture de votre mari. Nous avons fouillé et trouvé le téléphone. Alors, j'ai rappelé le dernier numéro reçu. C'était le vôtre.

Hélène essayait de suivre le compte-rendu ; les médicaments que les infirmières lui avaient administrés ralentissant beaucoup sa réflexion. Elle parvenait difficilement à mettre toutes les pièces du puzzle ensemble : magasin de fleurs, passage clouté, costume, voiture, accident...

L'inspecteur marqua une pause, voyant bien qu'elle peinait à assimiler cette avalanche d'informations. Elle lui demanda :

— Vous avez parlé d'une voiture. Vous avez plus de précisions ?

La questions sembla le gêner. Il hésitait à lui répondre, triturant son stylo et feuilletant nerveusement son calepin. Elle insista. Elle voulait savoir.

— Bien. Mais, comme je vous l'ai dit, nous n'en sommes qu'aux premières constatations.... Selon ce que nous ont dit les personnes que nous avons interrogées, il s'agirait d'une Mini jaune avec une bande rouge sur le capot.

Le visage d'Hélène se décomposa. Ses yeux s'agrandirent. Elle se recroquevilla, ramenant ses genoux vers son menton. Elle prit sa tête dans ses mains et se mit à la secouer, tirant sur ses cheveux défaits. Elle cria :

— Non ! Pourquoi ? Pourquoi t'as fait ça !!!! Pourquoi ? Non !!!

Le policier essaya de la calmer, en lui saisissant les poignets. Elle se débattit si fortement qu'elle arracha la perfusion de son poignet et gifla l'inspecteur à la joue. Son visage ruisselait de larmes. Elle articulait des mots incompréhensibles, répétait « pourquoi ? »

— Madame, Madame ! Restez avec moi.... Que se passe-t-il ? Dites-moi. Parlez-moi !

Une infirmière déboula dans la chambre, alertée par les cris. Une autre courait sur ses talons. Toutes deux maîtrisèrent la jeune femme au prix d'un gros effort physique, lui administrant le contenu d'une seringue. Après quelques instants qui parurent une éternité au visiteur, Hélène se détendit et s'endormit. Ses lèvres continuaient de prononcer des mots mystérieux.

L'infirmière s'adressa au policier :

— Il faut la laisser se reposer, maintenant.

Il obtempéra, sortit de la chambre, en se frottant la joue, parcourut le long couloir et prit l'ascenseur. Devant la porte principale de l'hôpital, il tira un paquet de cigarettes et en fuma une, tout en pianotant sur son téléphone.

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