Partie VI [Spoil/Final] - 1 - Lutte psychique Karel/Serymar

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[SPOIL]

Enfant, Karel avait déjà vu la terre trembler de manière apocalyptique. La première fois avait été lors de ce maudit jour où il avait brutalement découvert la vérité, et que Phényxia avait attaqué Serymar et ses serviteurs. La seconde avait été sur le chemin du retour à la fin de sa première semaine à l'Académie de Magie de Sheyral, moment qui avait marqué sa première rencontre avec l'un des Dragons. Enfin, la dernière, il l'avait vécue peu avant le début de son long périple, lorsque le village de Var s'était retrouvé anéanti.

Si Karel avait toujours su avoir une image positive des panoramas désolés, aujourd'hui, ce fut un sentiment tout inverse qui l'anima, de part une différence de taille : il avait l'impression de voir un sombre paysage de guerre.

Les 7 Dragons recouvraient le ciel de par leurs majestés et leurs tailles imposantes. Les forêts brûlaient autour des ruines encore fumantes de cet horrible machine déguisée en totem. Il avait cru que les choses se termineraient là, par cette victoire sur cet homme horrible et son Arme.

Son coeur se serra en voyant le combat qui faisait rage dans le ciel, dévoilant à la face du monde le terrible secret que les Dragons avaient toujours voulu dissimuler : l'existence d'un Dragon supplémentaire. Ou plutôt, d'un demi-dragon.

- Maître...

Les choses ne pouvaient pas se terminer comme ça. Karel ne pouvait pas l'accepter. Si les Dragons étaient enfin libérés de leur malédiction, ils seraient condamnés à un autre éternel combat s'il ne tentait pas quelque chose. "Un Dragon ne peut tuer un autre Dragon, particulièrement quand ils sont de même sang". Sous peine de se retrouver maudits.

- C'est de ma faute...

La culpabilité l'étouffait. Si son ancien mentor était dans cet état, c'était de sa faute. Karel sentit les larmes lui ruisseler les joues.

§§§§§

- Si jamais nous échouons, Karel, surtout, n'hésite pas à ma sacrifier.

Karel lui avait répondu par une expression vivement indignée. Serymar l'avait interrompu d'un simple geste de la main :

- Je suis à moitié immortel. Quoique je subisse, j'y survivrai, contrairement à tes compagnons.

Le jeune homme avait secoué la tête avec vigueur tout en exécutant le signe "jamais". Serymar le darda d'un regard menaçant et lui saisit le col à deux mains :

- Sois pragmatique, Karel, et laisse tes sentiments d'humain de côté ! Ton sentimentalisme coûtera à tout le monde et te détruira ! Tu perdras tout, tu te dois de garder la tête froide !

Karel se débattit. Serymar le relâcha et lui tourna le dos. Il s'éloigna de quelques pas et finit par conclure :

- Arrête donc de t'en faire. J'ai survécu à bien pire.

§§§§§


- Non, ça ne peut pas se terminer comme ça ! se morigéna-t-il avec violence.

Le jeune homme tenta le tout pour le tout et envoya une puissante onde psychique en direction du ciel afin d'attirer l'attention des Dragons sur lui. Il s'aida de son artéfact en pointant la lame de l'épée le plus haut possible au-dessus de sa tête.

Aucune réponse. Karel recommença. À nouveau, aucun retour. Grimaçant d'angoisse, il recommença plus fortement encore. Cette fois, une ombre gigantesque le recouvrit et la terre trembla sous ses pieds, manquant de lui faire perdre l'équilibre.

Karel se retourna vivement en direction d'Illuyankas.

- J'ai entendu ton appel, Enfant de la Prophétie. Les choses ont pris une tournure inattendue.

- Je refuse de me laisser abattre ! rétorqua Karel avec force, nous ne pouvons pas le laisser dans cet état-là !

- Hélas. Sang-Mêlé est perdu, nous ne pouvons plus rien pour lui.

Karel se laissa déborder par la colère et riposta avec violence :

- Il se nomme Serymar ! C'est un nom draconique qu'il a choisi en votre honneur après que l'ayez instruit et protégé ! Ne pas l'accepter, c'est refuser ce qu'il est pour vous ! Votre fils ! Et vous seriez encore prêts à le laisser dans cette souffrance pour l'éternité ? Vous lui en avez déjà imposé pendant un siècle dans le vide !

- C'était le seul moyen pour que l'Arme n'entre jamais en marche sans nous maudire en le tuant, et tu le sais, Enfant de la Prophétie.

- Cela ne vous a pas empêché de vous faire maudire malgré-tout en lançant un assaut sur cet homme !

Illuyankas gronda. Karel ne cilla pas, malgré l'appréhension qu'il pourrait se faire tuer d'un simple coup de griffe presque aussi grande que lui.

- Tu n'es pas de son sang, mais tu as ce même regard désagréable, gronda Illuyankas avec mépris.

Karel n'en fit rien. Si autrefois, se faire comparer à Serymar l'avait souvent fortement dérangé, aujourd'hui, ce n'était plus le cas : s'il avait survécu jusqu'ici, c'était en majorité grâce à ses enseignements. Karel avait enfin réussi à accepter son passé et à être le résultat de deux influences différentes : celle de Serymar et celle de sa propre famille.

- Je vous en prie, finit-il par lui demander, emmenez-moi à lui.

- Sang-Mêlé est perdu ! s'écria le Dragon dans un rugissement, je viens de te dire qu'il n'y a plus rien à faire pour lui ! Le Traître l'a empoisonné avec mon propre sang pour anéantir sa part mortelle, la seule qui le préservait encore dans un état stable ! Il n'est plus qu'un monstre et l'ombre de lui-même, il est trop tard.

- Emmenez-moi à lui, insista Karel, je sais peut-être comment vous épargner un combat éternel.

- Es-tu conscient que tu risques d'en mourir ? gronda le Dragon.

Karel acquiesça :

- Je prends le risque. Je lui dois bien ça.

§§§§§

Karel s'aggripa à la corne de l'imposant Dragon. En temps normal, il aurait trouvé cette position incroyable et le moment exceptionnel, mais son esprit était concentré sur ce point sombre qui grossissait et prenait une forme de plus en plus précise à mesure qu'Illuyankas s'en approchait.

Un dragon noir, avec de légers reflets rouges sur les écailles. D'une taille tout de même respectable même si elle était loin d'égaler le gigantisme des Dragons.

Tout autour, les autres Dragons qui essayaient de le contenir en réfrénant une partie de leurs pouvoirs.

Karel sentit son coeur se serrer. Le semi-dragon ne maîtrisait pas son corps et chacun de ses mouvements désarticulé témoignait d'une douleur atroce, comme une torture interne. Il attaquait, aussi vindicatif que brutal les autres Dragons avec cette idée d'en finir.

Illuyankas s'approcha. Le semi-dragon l'attaqua aussitôt en l'attaquant à la gorge. La violente secousse manqua de faire tomber Karel dans le vide qui s'accrocha avec force contre la corne du Dragon d'or. Une autre secousse lui fit malheureusement lâcher prise.

Il n'eut pas le temps de penser à une solution que son corps heurta violemment une surface écailleuse. Meurtri, Karel découvrit qu'il se trouvait à l'intérieur de la patte du Dragon, coincé entre ses imposantes griffes.

Comme si elle avait compris le stratagème, Crystal fondit en-dessous d'Illuyankas et de Serymar et ses yeux bleus fixèrent Karel, comme une invitation à sauter. Le jeune homme n'hésita pas. Il se glissa entre deux griffes et se jeta dans le vide, aussitôt rattrapé par la Dragonne d'argent. Celle-ci s'éloigna et reprit de l'altitude, de manière à se retrouver au-dessus des deux autres dragons.

- Tu es notre dernière chance, Enfant de la Prophétie, entendit-il résonner dans son esprit, nous comptons sur toi.

Karel acquiesça, l'expression grave. Crystal fit en sorte de s'approcher le plus possible, et une fois ue Karel jugea la distance raisonnable, il bondit de la tête de la Dragonne à celle du semi-dragon.

Il ne perdit pas de temps. Il ne devait plus hésiter. S'il avait la moindre chance, même infime, de rattraper son erreur et de sauver le pays, il la saisirait.

Ne sachant toutefois comment procéder sur un tel sort de haut niveau, Karel réfléchit rapidement. Sans savoir si ça fonctionnerait, il s'entailla de lui-même la paume de la main contre la corne du semi-dragon, ses écailles ne disposant pas de la dureté d'un Dragon à part entière.

- Désolé, Maître.

D'une poigne, il arracha quelques écailles du semi-dragon qui sentit à peine la plaie, occupé à attaquer les autres Dragons. Karel en profita pour lui causer une blessure, sur laquelle il posa sa paume ensanglantée.

Sa théorie fut la bonne, en voyant une lumière intense émaner de la fusion de leurs sangs : le monde se dissout tout autour de lui, il sentit l'énergie de son corps se faire draîner dangereusement, alors que les ténèbres l'emportèrent.

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