Chapitre 8

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11 août 2020


Ma sœur vient de me réveiller. Elle m’a sauté dessus sans prévenir. Elle veut jouer avec moi. Elle vient de partir dans sa chambre récupérer un jeu de société.


Il est quatre heure, du matin. Je vais la tuer.


*


Miracle ! Julie est finalement allée se recoucher. J’étais allé la border en m’assurant de ne pas déranger mes parents. Ce que ma mère supporte le moins après le désordre, c’est d’être réveillé en pleine nuit. J’avais pu me recoucher sans problème. Cette fois, je ne fis aucun cauchemar. Ce qui est vraiment étonnant, étant donné que j’ai découvert une tombe pas plus tard qu’hier. Mais je ne vais pas m’en plaindre. C’était une nuit -ou plutôt une fin de nuit- reposante.


Je me suis réveillé à neuf heure. Julie m’a rejoint dans la cuisine une demi-heure plus tard. Ma mère finissait de préparer son repas de midi. Lorsqu’elle nous laissa entre nous, ma sœur me demanda si elle pouvait aller à la cave pour jouer avec Adélie. Je lui avais promis que je l’y amènerais, même si l’idée de savoir que ma sœur joue avec un esprit ne me rassure pas tellement. Nous nous étions tus quand ma mère était revenue. Ma petite sœur devenait courageuse. Elle avait toujours eu une peur bleue des escaliers sombres. Il faut croire que cette terreur lui a passé.


À peine ma mère était-elle partie, que Julie me pressa de descendre. J’attendis une trentaine de minutes avant de prendre la moindre décision. Je ne voulais pas que ma génitrice débarque -pour une raison quelconque- alors que nous étions en bas. Je pense qu’elle me liquéfierait sur place si elle découvrait que Julie était descendue avec moi. Avant d’y aller, je fis promettre à ma petite sœur que nous ne resterions que vingt minutes. Il y a des limite à ce que je peux supporter !


Elle avait pris un jeu puis était descendu avec moi, main dans la main. Pour une fois, la cave n’était pas glaciale. On s’y sentait aussi bien qu’en haut. Julie a ouvert la porte et s’est mise à parler à voix basse. Je n’étais pas terrifié comme je le suis habituellement. Il y avait beau y avoir les mêmes ombres tout autour de moi, c’était différent. C’était peut-être dû au fait qu’il n’y avait pas cet air froid qui nous faisait dresser les cheveux sur la tête. Non, cette fois l’atmosphère était plutôt détendue. Je traînais sur les réseaux sociaux pendant ce temps. Mon meilleur ami devait rentrer bientôt. Il me tardait de le revoir. Il devait sans doute avoir pleins d’histoires à me raconter !


Un froid menaçant est apparu sans raison particulière. Puis, soudain, ma sœur a refermé la porte et est remontée à toute vitesse. Je l’ai suivie sans comprendre ce qu’il s’était passé. Elle était recroquevillée dans un coin de sa chambre. Dans sa main, elle tenait son doudou préféré. Elle semblait effrayée. C’était forcément Adélie qui l’avait mise dans cet état.


« Qu’est-ce qu’elle t’a dit Julie ?


- Elle n’a pas aimé ce que tu as fait hier. Elle a dit que ça ne te regardait pas. Elle m’a dit qu’elle t’avait vu un endroit interdit. Tu as trouvé l’endroit où elle se repose. Elle ne veut pas que tu y retournes.


- Je n’y retournerai pas. »


J’avais eu la peur de ma vie en voyant cette tombe. Hors de question de réitérer l’expérience ! Julie m’avait regardé avec ses petits yeux d’enfant.


« Merci grand frère. Elle m’a dit que, sinon, elle ferait en sorte que tu la vois. »


Mon cœur rata un battement et ma gorge devint sèche. C’était une menace de mort. J’avais tenté de réprimer mon effroi pour ne pas plus perturber ma sœur.


Pour nous détendre, nous avions joué à la dînette. J’ai même autorisé Julie à me maquiller. Ma mère met de côté tous les fonds de crème ou de tube de rouge à lèvre dans une petite trousse. Comme ça, ma sœur peut jouer avec si l’envie lui en prend. Mes parents ont beaucoup rigolé en me voyant. En même temps je les comprends. J’étais à peine reconnaissable. Je n’ai pas été aussi rapide. Mon père a dégainé l’appareil photo trop vite. Tant pis, je détruirai les photos quand elles seront développées. Hors de question qu’on garde un dossier de moi dans les albums de famille !


On a ensuite regardé un film tous ensemble, après avoir mangé. À vingt-deux heure trente, j’étais dans mon lit avec un autre carnet. J’espère y trouver des informations et pas d’autres questions. Au bout de une heure trente de lecture acharné, j’ai finalement trouvé quelque chose.


Cher journal,


J’ai vu une silhouette dans la cave. Je n’ai pas rêvé. Je l’ai vu ! Le diable habite cette maison. Je voulais m’en approcher, pour enfin en être certaine. Mais Hector est apparu et j’ai dû partir.


Mon mari n’a jamais été quelqu’un de violent, ni de brutal. Mais ces derniers temps, il est de plus en plus en colère pour tout. Je suis sûre que le diable tente de le pervertir. Je dois descendre pour savoir qui est cette silhouette en bas. Dieu, donnez-moi la force de tenir.


Je ne suis pas folle. Je n’ai pas perdue la tête.


Je plains vraiment cette pauvre femme. Son mari essaye sans doute de la protéger mais elle ne comprend pas la situation.


Je dois aller prendre ma douche, je vais me dépêcher. Je ne suis plus très loin de la vérité.


*


Je… Je sais tout… Tout… Je ne sais pas si je dois pleurer ou crier… C’est juste… Horrible…


Cher journal,


Je ne suis pas folle. Je ne suis pas folle. Je sais maintenant que tout est vrai. Je ne suis pas folle. Je viens de descendre, je sais qui est cette silhouette. Il faut que je vide mon esprit de cette image. Il faut que je couche par écrit mes pensées. Il faut que tout le monde sache que je ne suis pas folle.


Je suis descendu pendant que Hector était dehors. J’ai poussé la porte coulissante. J’ai franchi les marches, le cœur au bout des lèvres. Je suis arrivé devant une porte. Des pleurs venaient de derrière elle. Cela était étrange. Les diables pleurent-ils ? Je n’en savais rien jusqu’alors. Mais maintenant je sais.


J’ai entendu Hector venir dans les escaliers. Je me suis dépêchée d’ouvrir la porte. Il n’y avait qu’une faible lumière à l’intérieur de la pièce. Au départ, j’ai surtout vu les outils de mon époux. Mais après je l’ai vu. Une forme humaine relevait sa tête dans ma direction. Les pleurs avaient cessé. La chose informe était défigurée. C’était un cauchemar à regarder. Il y avait du sang sur ce qui lui servait de vêtement. Tous les cheveux de la chose étaient presque tombés. On voyait son crâne difforme, plein de cicatrices et de boursouflures. Le reste du corps était identique. Je laissai échapper un petit cris de peur. Le diable était devant moi, maintenant je le sais.


La chose ne prononça qu’un seul mot. Un seul mot dit d’un air plein d’espoir :


« Maman ? »


Hector arriva à ce moment. Il me tira violemment en arrière et referma la porte. J’entendis des cris perçant de derrière celle-ci. Je fus prise de nausées. Ma tête me tournait. Hector m’aida à m’asseoir. Le regard de la chose me revint en mémoire. Un mélange d’angoisse et d’effroi m’avait envahi au moment instant :


« C’est Adélie ? Est-ce Adélie ? Elle a ses yeux ! Elle est morte dans l’accident de votre voiture ! Hector, je vous en prie répondez-moi !


- Elle n’est pas vraiment morte. Après le carambolage, notre petite fille était juste gravement blessée. Je voulais l’amener à l’hôpital. Mais j’ai remarqué qu’elle avait presque récupéré entièrement de ses blessures. Oh, Brenda, il fallait que j’étudie son sang !


- Qu’avez-vous fait à ma fille ?!


- J’ai fait des expériences. Beaucoup d’expériences. J’étudie son sang. Il est merveilleux ! J’ai tellement progressé grâce à elle ! Elle m’aide beaucoup.


- Vous la faîtes souffrir ! Son visage et son corps sont totalement déformés ! Laissez-moi la soigner et l’amener au salon !


- Non ! Elle ne souffre pas, elle ne peut pas. Je m’occupe bien d’elle. Je la nourris avec de la viande. Je lui ai fait des injections pour voir comment elle réagissait. Mais son corps n’a pas supporté et des grosseurs sont apparues. Mais je les lui enlève tous les jours. Elle va bien.


- Laissez-moi passer ! »


J’avais tenté de passer par la force. Mais mon époux m’avait forcé à me rasseoir.


« Ma chère Brenda. Ce que tu as vu n’est pas notre fille bien aimé.


- Comment cela ? J’ai reconnu ses yeux…


- Ce que tu as vu devant toi n’es que son corps. Après l’accident, son esprit est monté dans les cieux. Elle repose en paix. Lorsque je l’ai sorti de la voiture, elle n’était pas consciente. Elle n’est revenue à elle qu’après deux jours. Mais son corps a repris vie ! Je suis persuadé qu’une entité l’a possédé. Ne t’en fait pas, je l’attache fermement. Elle ne nous fera aucun mal. Ce que tu as vu n’est qu’un corps vide de substance. Ce n’est plus qu’un monstre.


- Mais…


- Regardez. »


Il avait ouvert la porte. J’avais entendu des bruits de chaînes. Les pleurs s’étaient arrêtés. Hector poussa Adélie devant moi. Elle était horriblement laide et repoussante. Ma fille n’était pas comme ça.


« Mon épouse, pouvez-vous me regarder dans les yeux et me dire que ce démon est votre fille ? »


La chose se remit à pleurer. Ma fille ne pleurait pas. Ma fille était forte et belle. Cette chose qui se tenait à mes pieds ne méritait même pas le nom d’humain.


« … Non. Ce n’est pas ma fille. Ma fille était belle. Cette chose est un monstre ! Il a volé le corps de ma chère fille ! Adélie est morte !


- Oui, c’est exactement ça. »


La chose s’était mise à crier :


« Non maman ! Non ! Ne me laisse pas ici ! Aide moi maman ! »


J’ai regardé ce monstre, cette chose qui se faisait passer pour mon enfant mais qui n’est qu’un démon :


« Ma fille est morte, tu n’es pas ma fille. »


Hector a enfermé le démon dans la cave. Je vins de remonter. J’avais raison, je ne suis pas folle. Il y a un démon dans ma cave. Cette chose n’est qu’une usurpatrice.


Ma fille est morte, cette chose n’est pas ma fille.

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