Chapitre un. Juin 2030, le départ vers Ardon.

5 minutes de lecture

Toute la famille Beauchêne est réunie devant la télévision.

Il y à Paul, le père, quarante ans, jeune dirigeant de l’entToute la famille Beauchêne est réunie devant la télévision.

Il y a Paul, le père, quarante ans, jeune dirigeant de l’entreprise créé par son père. Marina, la mère, trente-cinq ans, qui travaille dans l’entreprise familiale en tant que secrétaire de direction. Et enfin, Léa, fille unique du couple, brillante élève au Lycée Henri IV à Paris.

Tous les regards sont braqués sur l’écran de télévision, qui diffuse les informations, sur la seule chaîne restante. Chacun est à la recherche du moindre signe d’espoir. Il n’y en a pas, il n’y en a plus !

Depuis le début de l’épidémie, dans le monde, les morts se comptent par centaines de millions. Malgré la recherche effrénée, aucun traitement ne parvient à combattre cette maladie. Quant au vaccin, qui vaincra cette pandémie, ce n’est toujours qu’un lointain et peut-être vain espoir.

Les informations ont pris fin, le grand écran plasma est redevenu noir. Les membres de la famille échangent des regards inquiets.

Paul prend la parole d’une voix éteinte :

- L’entreprise est finie, tout le monde est au chômage. Ton Lycée, Léa, est fermé depuis longtemps. Le mieux que nous aillons à faire c’est de partir d’ici. … De toute façon, plus rien ne nous retient à Paris ! Qu’est-ce que vous en pensez ?

Toutes les deux acquiescent d’un mouvement de tête. Léa, rendue, soudainement, presque folle d’angoisse, vient se réfugier dans les bras de sa mère, pour y pleurer à gros sanglots.

Elle finit par demander dans un gémissement :

- Maman, qu’est ce que nous allons devenir ?

- Je ne sais pas ma chérie. Mais il y a une chose dont je suis certaine. C’est que nous allons réussir à nous en sortir. Quel sera notre avenir ? Je ne le sais pas. Mais nous réussirons à être heureux de nouveau. Sois en certaines ma fille adorée. Elle conclut ce petit discours, en déposant un bisou, plein de tendresse, sur la joue de celle qui a, enfin, cessé de pleurer.

Paul toussote légèrement :

- L’idéal, ajoute-t-il, ce serait de partir s’installer dans notre maison d’Ardon. Là-bas, c’est la campagne, nous nous en sortirons mieux que si nous étions restés en ville.

- D’accord, répondent les deux femmes d’une même voix.

- Pour le moment, je vais chercher un moyen de mettre du carburant dans le réservoir de la voiture. Dont ce sera sûrement le dernier voyage. …

Un long silence s’installe, seulement brisé par le tic-tac de l’horloge murale. Quand celle-ci sonne l’heure, tout le monde sursaute.

Après un énorme soupir, Paul poursuit :

- Nous allons prendre le plus de choses possible. Charger au maximum la voiture ainsi que sa remorque. Prenez des vêtements, des vivres, des médicaments. Heureusement que nous sommes tous en bonne santé ! … Il ne faut pas que l’on oublie les vélos, ainsi que de quoi les réparer. Ce sera sûrement notre futur moyen de déplacement, avant d’aller à pied. Nous ne devons prendre que des choses utiles et pratiques. … Surtout, ne prenez pas d’appareil électrique, qui est capable de dire combien de temps nous serons approvisionnés en électricité ?

Trois jours plus tard, toute la famille est dans la voiture.

Léa pleure toutes les larmes de son corps. Elle vient d’abandonner la vie qu’elle connaissait depuis toujours, pour rouler vers un avenir des plus incertains.

Surtout, elle vient d’abandonner Marion, sa petite amie. Depuis quelques mois, elles s’aiment le plus discrètement du monde. C’est son secret, qu’elle n’a pas encore eu le courage, ou la force, de partager, avec qui que ce soit.

Marina finit par s’en apercevoir, elle se tourne, pour regarder sa fille et lui dit :

- Léa, mais tu pleures ma chérie !

- Ex … excuse-moi, maman.

- Ne t’excuse pas ma chérie, c’est normal d’être triste dans ces circonstances. … Moi aussi je suis triste, tu sais.

Marina laisse un silence s’installer entre elles …. Puis, elle poursuit :

- Mais, ma chérie, malgré ma tristesse, je te l’ai déjà dit l’autre jour, je suis certaine que tout finira par aller bien pour nous. Ne me demande pas comment je le sais. Je le sens tout au fond de moi, appelle cela de l’intuition féminine, si tu le veux.

La mère et la fille échangent un regard au travers duquel Marina essaie de transmettre toute la confiance qu’elle a en l’avenir.

Léa finit par sourire légèrement. Marina est rassurée :

- Voilà qui est mieux ma chérie.

La voiture et la remorque sont si lourdement chargées, qu’ils se traînent sur l’asphalte de la route qui mène les Beauchêne à Ardon.

Pour parcourir les quelque deux cents kilomètres, il va leur falloir huit longues heures ! Tant la circulation est dense et la voiture lente. Heureusement que Marina avait prévu du café fort. D’un autre côté, tous sont tellement stressés, que s’endormir dans un moment pareil aurait été un exploit !

Une fois le véhicule immobilisé dans la cour, tous ses occupants poussent un énorme soupir de soulagement. Puis, ils laissent exploser leur joie d’être, enfin, arrivés à bon port. Ils s’embrassent, rient et pleurent à la fois.

Paul, le premier, retrouve son calme et sa sérénité coutumière, il murmure :

- Maintenant, je peux vous le dire, je n’étais pas sûr que la voiture soit capable de nous amener jusqu’ici.

- Ah oui, pourquoi ? demande Marina.

- Depuis plusieurs kilomètres, un voyant rouge était allumé sur le tableau de bord. En plus, le réservoir est presque vide, je roule sur la réserve depuis au moins cinquante kilomètres.

Marina passe les bras autour du cou de son mari. Elle dépose un baiser tout léger sur ses lèvres, tout en murmurant :

- Le principal, c’est que nous y soyons arrivés, mon chéri.

Une fois la porte d’entrée ouverte, Léa et sa mère commencent par aérer la maison qui en a un grand besoin. Elles en profitent pour retirer les housses et les draps qui protègent les meubles de la poussière.

Pendant ce temps-là, Paul commence à décharger les affaires.

La situation se complique un peu plus quand la famille se rend compte qu’il n’y a plus d’électricité. Paul, qui préfère éviter les conclusions hâtives, se rend à la cave vérifier le disjoncteur et le tableau électrique. Quand il remonte, il a sa mine des mauvais jours :

- Bon, mes chéries, le disjoncteur, le tableau électrique, tout est parfait. Il va falloir apprendre à vivre sans courant électrique !

Pince-sans-rire, il ajoute :

- Voyons le bon côté des choses. Ce n’est plus la peine de se préoccuper de la chaudière ou du niveau de mazout qui reste dans la cuve.

Après quelques instants de silence, il continue :

- Heureusement qu’au moment de la construction, nous avons fait installer deux cheminées. Une à insert dans notre chambre, l’autre, à foyer ouvert, dans le salon.

Marina, toujours pratique, lance :

- C’est vrai, je n’y pensais plus. Qu’à cela ne tienne, nous dormirons tous dans la grande chambre. Et nous allons transformer le salon en cuisine, ce sera rustique, mais efficace.

Devant la mine contrariée de sa fille, elle ajoute :

- Ne t’inquiète pas ma chérie, si je me souviens bien, il y a un paravent à la cave. Comme cela tu auras ton intimité.

- Merci, maman, répond-elle du bout des lèvres, l’air pas du tout convaincu

Paul ajoute :

- Dans notre malheur, nous avons la chance d’avoir fait rentrer quelques stères de bois coupés, l’an dernier. Il doit être assez sec pour bien brûler, maintenant. … Par contre, je pense à ça. … Pour allumer le feu ?

Les deux époux échangent un regard consterné. Paul réagit le premier :

- Léa, si tu veux bien, cherche dans la maison, des vieux journaux, ainsi que des cagettes en bois. Ça ira très bien pour allumer un feu. … Si tu n’en trouves pas, va dans le bois ramasser des brindilles de bois mort, ça ira aussi bien

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 3 versions.

Vous aimez lire domi59143 ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0