Dans les yeux d'un enfant

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Que pouvait-elle y faire, si elle n’arrivait pas à l’oublier ? Que pourrait-elle faire, s’il se passait la même chose avec Kazumi ? Le boss lui en voudrait-il ? Probablement. Après tout, le lien qu’ils entretenaient était parfois étrange, ni vraiment filial, ni vraiment amical et décidément pas typique d’une relation de travail. C’était… ambigu et les gens se tromperaient facilement.

- Renouveau !

Elle sursauta et tenta de se redresser, avant que la douleur ne lui rappelle qu’elle n’était pas alitée pour rien. Paniquée, elle releva la tête et croisa le regard rubis de son protégé, qui brillait si fort qu’elle ne put s’empêcher de lui sourire. Oui, il se passerait forcément la même chose avec lui, parce qu’il n’était pas comme les autres. Parce qu’il lui ressemblait, quelque part et qu’il comblait le vide que son frère avait laissé dans son cœur.

Il était là et c’était le plus important. Il était un peu emballé dans des bandages, mais il avait l’air en forme, surtout pour quelqu’un qui venait de se faire retirer une balle dans l’abdomen. Elle lui fit signe de s’asseoir sur le bord de son lit et ne put s’empêcher de rire en le voyant si petit à côté d’elle. Elle lui aurait volontiers tendu la main, mais malheureusement, elle n’était pas en état. Lorsqu’il y fut parvenu, elle se contenta de le regarder en souriant, tandis qu’il gardait un air interrogatif. Après un instant de silence, il lui s’étonna presque de la voir aussi détendue et se résolut à lui poser la question qui l’inquiétait le plus.

- Dis, on est où ?

- On est chez moi, Kazumi, sourit-t-elle. On est chez moi.

- Ben non, répliqua-t-il en secouant doucement la tête. On est pas chez toi, y a des monsieurs ici… Et puis y a pas de fenêtres et les murs ils sont tous ronds, y a pas de portes…

- Eh oui ! J’habite avec plein de gens, mais tu verras, ils sont tous très gentils ! En plus, cette maison, on l’a faite nous-même, c’est pour ça qu’elle est toute arrondie, on trouvait ça plus joli !

- Alors… Tu as deux maisons ?

- C’est ça, une pour le travail et une pour moi.

- Et on est là où tu travailles ?

- Euh… Oui, on peut dire ça comme ça.

- Alors c’est tous tes collègues ?

- Bien sûr, mais ce sont aussi des amis ! ajouta-t-elle avec un enthousiasme qu’elle était loin de ressentir. Et je suis sûre que toi aussi tu vas te faire des amis ici !

Son air circonspect l’inquiéta plus que de raison. À vrai dire, des milliers d’inquiétudes se bousculaient d’ores et déjà dans son esprit, il n’y avait aucune raison que celle-ci ait une place particulière… Mais la tristesse qu’elle sentit dans sa voix, lorsqu’il lui reposa une question, ne la rassura pas beaucoup.

- Dis, on pourra sortir jouer quand ?

- Je ne sais pas si on pourra sortir, admit-elle à demi-voix, son sourire fanant un peu sur ses lèvres sèches. Mais on pourra jouer, si tu veux, enfin quand je serai en état, parce que là je vais avoir du mal…

- Mais ça sera bientôt guéri, hein ?

- Je ne sais pas, le docteur n’est pas encore passé me le dire, mais je suis sûre que ça ne prendra pas longtemps !

- Tu crois ? Parce que moi y m’a dit que ça devrait aller, que dans un mois je pourrais tout refaire normalement, mais que jusque-là, je devais pas trop bouger, parce que j’allais avoir très mal, mais j’lui ai dit que j’avais peur de rester tout seul, alors y m’a dit que tu voulais rester avec moi pasque toi non plus tu voulais pas rester toute seule et y m’a emmené ici.

- Et tu n’as pas trop mal ?

- Non, s’exclama-t-il vigoureusement, avant d’ajouter d’une toute petite voix : mais c’est tout bizarre, j’ai pas mal et j’ai pas…

- Ne t’inquiète pas, c’est normal, c’est les médicaments. Tu ferais peut-être mieux de t’installer dans un lit, ça sera plus confortable, non ?

- Mais je veux rester avec toi !

- Je ne suis pas loin, regarde ! insista Zelda en désignant du menton le lit le plus proche. Va t’installer, on pourra discuter tranquillement après.

- Non, je veux rester avec toi ! cria-t-il en s’accrochant

- Écoute-moi, s’il-te-plaît. Regarde-moi. Tu me disais que tu n’avais pas mal, c’est ça ? Et je t’ai dit que c’était les médicaments. Quand ils auront arrêté de faire effet, tu vas avoir très mal et tu seras mieux allongé, tu comprends ?

- Mais si je veux pas te laisser toute seule ?

- Tu sais, soupira-t-elle en souriant, j’ai l’habitude…

- Ça veut dire que t’es tout le temps toute seule ?

- Ça veut dire que ça ne me dérange plus, d’être seule… Allez, va t’asseoir au moins, tu verras, ça va te faire du bien.

- T’es sûre que je peux te laisser toute seule ?

- Mais oui et puis je ne serais pas vraiment seule, tu seras à côté de moi, tu sais…

- Mais… Mais…

- Mon chou, tout va bien, ne t’inquiète pas. Va t’installer, on parlera de ce que tu voudras, après, d’accord ?

- D’accord…

Il se laissa glisser précautionneusement au bas du lit. Avec des gestes étonnamment lents et prudents, il se hissa sur un lit et s’allongea. Quelques instants de silences inquiétèrent Zelda, mais lorsque la petite voix résonna à nouveau, elle se figea douloureusement.

- Je peux te poser n’importe quelle question ?

- C’est ça, n’importe laquelle.

- Pourquoi est-ce que tu tues des gens ?

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