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Les dossiers s'accumulent déjà sur mon bureau et il n'est même pas 10h. Je me plains mais je jubile intérieurement de ne pas avoir à bouger de cette chaise pour le reste de la journée. Au moins ici on me fiche la paix et c'est tout ce que je demande en ce moment.

Je n'ai revu ni Caro ni Mireille depuis notre café de l'autre jour. Entre temps les couleurs sont revenues au globe 64, mais nos soupçons sont toujours intacts sur les failles que peut présenter le système. Il n'y a toujours aucune trace de John ou de Sophie, la maman de Mireille. Cette fille est vraiment sympa, je regrette un peu de ne pas l'avoir rencontrée plus tôt et dans d'autres circonstances. Nous savons tous les trois que quelque chose se trame sans avoir les outils pour pouvoir percer le mystère à jour. Ça me semble pourtant trop grave pour laisser tomber.

Mon ventre commence à se tordre, indiquant comme une horloge interne que c'est bientôt l'heure du déjeuner. Je passe la tête dans le couloir et constate que la majorité des bureaux est vide. Presque tous mes collègues sont déjà partis en vacances, et plus j'avance dans les locaux, plus j'ai cette sensation un peu trop lourde de solitude qui m'enserre la poitrine. Je suis définitivement bien seul dans la vie!

J'attrape un plateau repas et me sers un peu de chili et de la salade de fruits qui baigne dans un liquide plus que douteux.

"Pense à toi."

Le message de Caro apparaît sur l'écran verrouillé de mon téléphone toujours en silencieux.

Je suis sensé répondre quoi moi hein?

Je panique un peu, tiraillé entre un sourire incontrôlé  et une boule d'angoisse dans le bas ventre. Qu'est-ce qu'il lui prend de m'envoyer ça. Ça n'a jamais été comme ça entre nous, ça ne peut pas être comme ça. Pourtant le constat est là, c'est réciproque. Je n'ai pas arrêté de penser à elle depuis la dernière nuit qu'elle a passé à la maison. J'aimerais qu'elle revienne, j'aimerais encore pouvoir sentir son parfum en partant au bureau le matin... J'aimerais ne plus être seul.

J'ai peur que la solitude qui me pèse au quotidien soit le moteur de ces nouveaux sentiments pour elle, je suis terrorisé à l'idée de la perdre si ça ne marche pas. Elle est un pilier tellement important dans ma vie, j'ai besoin de savoir qu'elle est là quelque part, en vie et heureuse. Même si on s'est parfois perdus de vue quelques mois, on revient toujours et c'est le plus important. Je réponds à son message sans artifice, sincèrement:

"Moi aussi, pense à toi."

J'attends une réponse, ne quittant pas mon téléphone des yeux. Mon chili est presque froid, la salade de fruits me dégoûte rien que de la regarder... Je remonte dans mon bureau, rempli d'une excitation nouvelle qui me lève le cœur.

"On peut se voir chez toi avec Mireille ce soir ? Elle a des infos."

Des informations ? D'un coup la réalité me rattrape. Je suis pressé de voir ce que Mireille a trouvé qui puisse nous aider. Mais je me surprends à être encore plus impatient de voir Caro, chez moi qui plus est.

17h15. Allez, j'y vais.

Il est vraiment tôt. Mais c'est vendredi,  il n'y a personne au bureau pour m'obliger à faire acte de présence, je décide de partir.
En rentrant, je passe chez Zaan pour acheter de quoi faire un dîner sympa pour ce soir. J'achète du riz, des tomates, du basilic... De quoi faire un risotto, accompagné d'une bouteille de vin blanc. Pour une fois que je reçois, j'ai envie de le faire bien. 

Lorsque les filles sonnent à la porte, je me précipite dans l'entrée. J'ai gardé sans faire attention mon torchon sur l'épaule et Caro me jette un regard amusé en me découvrant sur le seuil.

"Dis donc! Ca sent bon par ici! lance Mireille après m'avoir fait la bise.

_ Je vous ai concocté un bon petit plat les filles, ce soir c'est moi qui régale!"

Nous buvons un verre et grignotons des gâteaux apéritifs en se racontant notre semaine, on forme vraiment une bonne équipe tous les trois. Ça fait du bien de pouvoir discuter d'autres choses et avec d'autres personnes que de boulot avec les collègues à la cafétéria.
Nous passons  un véritable bon moment, j'en apprends plus sur Mireille et Caro ne me lâche pas des yeux... Ce que j'apprécie.
Le plat est un succès, les filles sont comblées et moi aussi. Au moment du dessert Mireille prend la parole pour finalement nous rappeler l'objet de leur visite :

"Bon, j'ai emmené un rapport que m'a donné un de mes amis qui est sénateur. Je ne vous dirai pas qui c'est, moins on en sait et mieux on se porte j'ai l'impression.

_ Qu'est-ce qu'il dit ce rapport ? Tu l'as lu ?

_ Oui tout à l'heure. Pour faire court, le gouvernement a déboursé des sommes astronomiques pour faire construire quelque part un centre de conservation des données.

_ Des données ? demande Caro perplexe.

_ Des datas oui, sur toi, sur moi, sur tout le monde apparemment.

_ A quoi ça va servir ?

_ J'en sais rien. Il ne sait pas... Tout reste flou, apparemment l'initiative vient de vraiment haut... Peut-être même de l'Europe?

_ Tu veux dire que le sénat n'a pas d'autres informations ?

_ Il m'a dit que non. Je lui fais confiance, s'il dit qu'ils ne sont pas au courant je veux bien le croire. Ce ne serait pas la première fois que nos dirigeants trafiquent sans convier les assemblées.

_ On a aucune idée de ce à quoi ce centre va servir, et on ne sait pas non plus où il se trouve, ni qui est derrière tout ça donc... dis-je pour récapituler la situation.

_ C'est ça... Mais à mon avis ça a quelque chose à voir avec nos disparus.

_ Caro, il y a moyen que tu fouilles un peu dans les affaires de notre chère procureur ?

_ Moi non, mais Mireille a des accès que je n'ai pas. me répondit Caro en lançant un regard plein d'espoir à son amie.

_ C'est possible oui, par contre il va falloir être très prudents. Si on se fait attraper à fouiner dans leurs plans je sens qu'on va passer un mauvais quart d'heure."

La voix de Mireille se fait plus disctète, elle a vraiment peur. Nous mangeons le dessert dans le calme, on est tous les trois un peu refroidis par l'enquête dans laquelle nous nous lançons à l'aveuglette.

Le téléphone de Caro sonne sur le comptoir et je vois de loin que c'est un texto alors qu'elle se lève déjà pour aller voir.

23h passé, qui peut lui écrire à cette heure ?

"48.68 ; 2.36/36. nous lit Caro à haute voix. Qu'est-ce que c'est que ça ?

_ Ça vient de qui ? la questionne Mireille.

_ Numéro inconnu, je ne sais pas. Vous pensez que ça veut dire quoi ?

_ Ce sont des coordonnées GPS...

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