III

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Bien des années auparavant


— Allez-y, je vous rejoins ! Lança le jeune homme roux.

Il avait, en ce temps-là, les cheveux longs aux épaules. Son visage était aussi étonnement plus doux, sûrement épargné par les âffres de la misère humaine, de la guerre, du sang, du chaos. Il était, à cette époque, plétrit de bonnes intentions, et considérait lui-même avoir l'âme pure. Parfois il surprenait ses amis le regarder avec le même oeil qu'il utilisera, bien plus tard, avec Phillia. Un oeil avec une teinte de paternalisme, certes, mais aussi remplit d'une affection sincère. Il la regardait comme on regardait le dernier louveteau de la portée, très actif et excité, mais aussi l'oeil remplit d'innocence et d'amour. La vie ne lui avait pas encore brûlé le voile qui cachait les horreurs de ce monde à son âme encore frêle. C'était certainement cet élan de générosité qui l'avait poussé à s'arrêter près de cette jeune fille, qui regardait les cavaliers défilés dans sa bourgade. Elle était sale, mal coiffée et portait des vêtements déchirés.

Elle hurlait la pauvreté et les épreuves de la vie. Pourtant, elle souriait. Elle paraissait pas nécessairement impressionnée, mais heureuse de les voir. Pourtant, ils n'étaient pas de preux chevaliers, et n'étaient pas venu à leur rescousse pour ce joli sourire ou par charité. Zu faisait déjà parti d'un groupe de mercenaire, beaucoup plus imposant que celui qu'il intégrera plus tard, mais se plaisait à croire qu'il y avait du bien dans chaque mission. Il trompait, et s'il n'accepterait que bien plus tard de l'admettre, une part de lui comprenait déjà qu'il se leurrait la face, et ce sourire avait quelque chose de réconfortant. C'était comme si cette part de lui pouvait s'accrocher à ce sourire. Comme si il pourrait garder son humanité à travers ce sourire. Il s'accroupit près d'elle, lui prenant les bras.

— Où sont tes parents, ma petite ?

Il connaissait la réponse bien sûr. Alors pourquoi la posait-il ? Quel besoin avait-il d'entendre la réponse ? Il vous dirait qu'il l'avait fait machinalement, mais il se mentirait à lui-même. En vérité, cette part de lui, qui craignait de perdre ce qui faisait l'essence de tout être humain, désirait ardemment entendre la réponse pour pouvoir, une fois de plus, apporter quelque chose à quelqu'un. Même un simple réconfort. Elle se pinça légèrement la lèvre et Zu comprit qu'elle forçait à ne pas pleurer. Malgré tout, ses yeux s'embuèrent, et pour une raison qu'il comprendrait bien plus tard, il se sentit soudain coupable de la peine de la petite fille. Il la prit contre lui et la serra un moment, et alors qu'il sentait le coeur de la petite fille battre sous sa main, il sut qu'elle mourrait si il la laissait ici. Elle ne trouverait personne pour l'aider et croupirait ici, dans ce village isolé, condamnée à mendier. On finirait par la battre, la violer, la tuer. C'était son destin, il le lisait comme un livre ouvert. S'il se relevait maintenant, même avec toutes les bonnes intentions du monde et toute l'affection dont il était capable, il l'abandonnerait et effacerait toute l'intérêt de la bonne action qu'il venait de faire. À quoi bon mettre fin aux sévices d'un groupe de bandits, si c'était pour suite abandonner cette fillette à son sort ? Alors il prit une décision. Une décision dont il pourrait rester fier éternellement : il prit la jeune Phillia par les bras :

— Veux-tu venir avec moi ? Je t'apprendrais tout ce que je sais et peut-être pourrions nous ensuite parcourir ensembles ce monde.

Elle ne dit mot, mais son sourire s'élargit un peu plus.

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