V

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Ils avaient enterrés, dans une fosse commune tous les assaillants et enterré à part Volkan. Waël ne le connaissait pas, mais il regrettait qu'un autre homme ait à offrir sa vie pour les Dieux. Ceux-ci n'en avaient cure d'eux, il en était persuadé, et c'était la raison pour laquelle il avait tourné le dos au Temple. Mais ce n'était pas le cas de Volkan, et il avait fait ce qu'il pouvait pour lui offrir une sépulture décente, avec tout le respect qui lui était dû. Ils s'étaient ensuite regroupés autour de la tombe fraîche, en silence. Il avait bien cherché quelques mots à dire, mais il ne connaissait pas le Templier, et n'avait su quoi dire. Ce n'était, de toute façon pas le premier compagnon de route, éphémère ou éternel, qu'ils enterraient, loin s'en fallait, et ce n'était sûrement pas le dernier non plus. Alors ils restèrent ainsi silencieux, en arc de cercle, à fixer la tombe. Chacun vaquait à ses pensées. Cela dura une dizaine de minutes. Zu, le premier, rompit le silence en soupirant.

— Cette mission part déjà en couille. Est-ce que tu as éliminé leur chef ?

Waël savait sa réputation et savait surtout qu'elle était méritée, sinon recherchée. Il fut surpris de la question mais n'en montra rien. En temps normal, il ne cachait rien à ses amis. Malgré son air glacial et détaché, il les respectait trop pour leur mentir. Mais son instinct lui cria, pour une fois, de mentir. Il n'en connaissait pas la raison, mais il avait toujours suivis son instinct, et il ne ferait pas exception. Il hocha la tête.

— Sinon je ne serais pas là.

Zu hocha la tête et le Templier crut voir un voile lui passer devant le visage. Il plissa légèrement les yeux, hésitant à l'interroger, mais son attention fut soudain détourné par un détail qu'il n'avait pas remarqué jusque-là. Il regarda autour de lui, comme s'il cherchait quelque chose qu'il aurait fait tombé au sol. Et c'était d'ailleurs, presque ça.

— Où est le mioche ?

Une part de lui, plus sombre que les autres, espérait qu'on lui annonce sa mort, mais une fuite lirait, en vérité, très bien. Tout ce qu'il souhaitait, c'était de ne pas l'avoir dans les pattes. Il ne voulait pas se sentir responsable de lui. Et s'il était mort, par ailleurs, on pourrait dire que s'il n'était pas parti...Mais non, on ne lui annonça ni sa mort, ni sa fuite. Ils se regardèrent les uns les autres, comme s'ils partageaient un secret imposant, que chacun rêvait de raconter, sans le pouvoir sans trahir l'autre. Waël plissa de nouveau les yeux.

— Qu'est-ce qui se passe ? Qu'a t-il fait ?

— Ce n'est pas ce que tu crois, s'empressa d'annoncer Phillia qui craignait que son mentor pense trahison.

Le mercenaire ouvrit la bouche, agacé, pour exiger des réponses, mais ils firent mieux que cela. Atryonas et son frère s'écartèrent soudain, laissant Waël apercevoir ce qu'ils cachaient subtilement depuis tout à l'heure : un tas de corps. Waël, craignant de comprendre le message subliminal s'approcha en silence du tas de cadavre. Il se mit la main devant la bouche, estomacqué. Certains corps avaient des blessures évidentes, comme des plaies béantes. Mais d'autre, la plupart, avaient des plaies ne ressemblant à rien à ce qu'il avait pu voir jusque là. En tout cas, rien qui ne pouvait être causé par un mortel ou par une arme : une tête tournée à 360° par ci, un trou béant dans le ventre, qui continuait dans le dos par là...

— Mais...Qu'est-ce qui s'est passé ? C'est quoi ce... Il se tut.

C'était la réponse à sa question précédente. Il fixa Phillia, comme cherchant confirmation de ses craintes. Elle détourna les yeux, trouvant le sol soudainement très intéressant.

— Où est-il ?!

Hilik désigna quelque chose dans son dos et l'ancien Templier se retourna pour voir Garet inconscient, appuyé contre un arbre. Il s'approcha de lui et dégaina lentement son épée.

— Waël ? Qu'est-ce que tu fais ? Lança Phillia quand elle remarqua son geste.

— Il est dangereux.

Phillia comprit que son mentor allait assassiner froidement le jeune homme. Elle en prit un coup dans l'estomac. Ils en étaient là ? Elle regarda ses compagnons, les uns après les autres. Aucun ne bougeait. Atryonas et Hilik trouvaient la forêt soudainement intéressants, le marchand regardait ce qu'il pouvait bien y avoir sous ses chausses. Seul Zu serrait les dents, signe qu'il n'approuvait pas ça. Néanmoins, il ne bougeait pas, et ne bougerait pas. Aucun n'oserait s'opposer à Waël. Comme souvent, elle serait la seule. Elle s'empressa de s'interposer entre Waël et Garet. Le mercenaire n'arrêta pas sa course pour autant, la forçant à reculer, mais elle ne lâcha pas l'affaire.

— Waël, il nous a sauvé !

Le mercenaire savait que la jeune femme allait s'opposer à l'exécution. Elle était la plus sensible de tous, la plus...Gentille. En temps normal, il appréciait ça. Elle était leur garde fou, leur assurance de ne pas basculer du mauvais côté. Mais en temps que chef, il devait prendre les décisions difficiles, même si elle n'en voyait pas la nécessité. Il l'ignora, hésitant même une seconde à la repousser. Il choisit de simplement faire comme si elle n'était pas là, avançant en silence. Plusieurs fois, elle l'injectiva, sans succès. Il finit par lever son épée quand il fut proche de lui, lentement, comme s'il craignait de le réveiller. Phillia était toujours là, devant lui, mais elle s'écarterait. Il en était persuadé. Ce n'était pas la première fois qu'elle s'opposait à lui, surtout à propos d'une telle décision, mais à chaque fois, il avait eu gain de cause. Elle boudait ensuite quelques jours, une semaine tout au plus, puis retrouvait sa gaieté de vivre. Cette fois ne ferait pas exception. Mais elle ne s'écarta pas, et alla même plus loin en poussant Waël. Ce ne fut pas violent mais, l'épée levée, ce fut suffisant pour le déstabilisé, et il dût faire un pas en arrière, tout en rabaissant son arme. Il jeta un regard brûlant à sa jeune amie.

— Qu'est-ce qui te prend ?!

— Il nous a sauvé !

— Oui, cette fois ! Il est dangereux, Phillia. Ne t'interpose pas de nouveau sinon...

— Sinon quoi ? Waël fit un pas en arrière quand il vit un voile doré, presque rouge passer brièvement devant l'iris de Phillia. Oserait-elle faire ça ? Il hésita, regardant Phillia puis Garet. Il se tourna ensuite vers les autres, comme pour leur demander de choisir un camp. Atryonas fit la moue, alors que Zu secoua lentement la tête. Il soutiendrait Phillia, c'était évident. Hilik portait son casque, comme toujours, et il était impossible de lire ses pensées. Il inspira profondément, avant de se tourner vers Phillia, furieux.

— Très bien, Phillia, mais je te préviens ! C'est ton choix, tu es responsable de lui, s'il fait quoique ce soit...Tu l'auras sur la conscience...

Phillia fixait Garet alors que le groupe rassemblait les affaires. Ils avaient pillés les cadavres, partagés ce qu'ils pouvaient emmener, et s'apprêtaient à reprendre la route. Pourquoi avait-elle fait ça ? Était-ce le bon choix ? Elle avait blessé, profondément, Waël et il serait véritablement vigilant. Si Garet leur faisait défaut, elle tomberait avec lui. C'était une certitude, elle connaissait assez leur chef pour le savoir. Il l'appréciait et la voyait un peu comme sa petite soeur, et elle lui rendait cette affection, mais elle savait aussi que c'était plus solide de son côté. Même si cela devait lui briser le coeur, il n'hésiterait pas à la chasser du groupe et de sa vie. Elle soupira, se demandant ce qui lui prenait de s'attacher à un aussi insignifiant petit homme. Enfin...Était-il seulement un petit homme ?

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