IV

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Le temple était plus grand que ce à quoi s'attendait Garet. L'intérieur d'un blanc lumineux et éblouissant, seulement cassé par le tapis rouge qui menait d'un autel à la porte principale, et par quelques rares tableaux. Mais aussi par le sang. Les villageois s'affairaient pour le moment à nettoyer leurs maisons, et ne s'étaient pas approchés du temple, pourtant au centre de l'attaque, et de leur protection. La superstition ? Le choc ? Garet l'ignorait, mais la vision des gardiens du temple allongés - ou éparpillés pour certains - le renvoya encore une décennie en arrière. Phillia le regardait parfois du coin des yeux, et lui trouva quelque chose de mignon, ayant l'impression de voir un chiot blessé. Il semblait être effrayé, terrorisé, parce qu'il voyait. Elle surprit un regard méprisant de Waël, qui la regarda ensuite. Elle haussa de nouveau les épaules, alors qu'ils entraient à ce moment dans le temple, à la recherche de preuves ou d'indices. Elle quitta le jeune homme à ce moment-là, regardant les griffures sur les murs, rejointe bientôt par Zu. Ils se connaissaient depuis longtemps, s'étant rencontré bien avant le reste du groupe.

— Quelle bête a bien pu faire ça ? Demanda t'elle.

— Quelque chose qui dévorerait sans peine les tripes de ton nouvel ami.

— Serais-tu jaloux, Zu ?

— Non. Mais tu ne devrais pas l'inciter à continuer dans cette voie. C'est dangereux.

Elle lui lança un regard froid, se demandant où il voulait en venir.

— C'est un grand garçon, non ? On te demande pas de le protéger, s'il doit crever, il crévera, alors où est le problème ?

— Ouai je sais, c'est ce qu'a dit Volkan. Mais c'est dangereux...Pour lui.

Elle le regarda de nouveau. Il se faisait des soucis pour le nouvel arrivant ? Pourquoi ? Sans un mot de plus, Zu la quitta rejoignant Waël sous l'oeil médusé et interrogateur de son amie.


Malgré lui, à force de parcourir le temple la tête levée vers le plafond, Garet s'était rapproché de Waël et de Volkan, qui observaient un autel vide.

— Il était là ? Demanda Waël.

— Oui. On se doutait pas qu'on nous le prendrait un jour.

Waël eut un léger rire.

— Vous êtes sérieux ?! Avec tout le danger que représente ce livre, vous le laissez à la portée du premier venu ?

— Du premier venu ? Waël, dois-je vous rappeler qu'une trentaine de Templiers gardaient ce lieu ? Pensez-vous que le premier venu peut vraiment venir à bout d'une trentaine de nos soldats les plus chevronnés ?

Waël soupira en secouant la tête.

— Volkan, nous nous approchons de l'an 0...Cela ne peut être une coïncidence.

— Je sais. C'est pourquoi je béni les cieux que vous soyez là.

— Je ne fais plus parti du Temple, ne l'oubliez pas. Y a pas encore si longtemps, vous vouliez ma tête.

— C'était avant que tout ça arrive...Que voulez-vous jeune homme ?

Garet, qui regardait les deux hommes la tête dépassant à peine d'un pilier, déglutit, avant de se cacher. Crétin, avance toi, tu es repéré. "Merci tonton d'être aussi présent pour m'insulter, ça m'aide beaucoup" à ton service ! Cela dit, son oncle avait raison, Garet le savait. Il soupira et s'avança. Volkan le regardait sourcil froncé. Il était difficile de savoir ce qu'il pensait. Par contre, c'était tout l'inverse pour Waël, qui ne cachait pas son mépris.

— Je crois savoir vers où ils sont partis...Au sud.

J'espère que tu sais ce que tu fais, Garet.

— Et j'peux savoir comment tu sais ça ? Demanda Volkan.

— J'ai entendu des rumeurs parlant d'une nouvelle forteresse construite dans le territoire Saldins.

— Et ? T'en as conclu que des voleurs de bouquin dans le Northendre ne pourraient se diriger que vers une quelconque forteresse ? Ou alors insinus-tu que le peuple Saldin nous a déclaré la guerre ? Grinça, sceptique et agressif, Waël.

Garet avala difficilement sa salive. Je t'avais dis de te méfier de ce type. Ne l'attaque jamais si tu n'es pas sûr de ne pas le rater. S'il existe une chance, même infime, que ton coup ou ta langue le rate, ne tente même pas le coup.

— Non non mais j'ai entendu dire que les Saldins n'étaient pour rien dans cette construction et qui le voyaient d'un mauvais oeil...

— Ouai, j'ai entendu parlé de ça, moi aussi. C'est vrai que c'est louche, confirma Atryonas.

Garet, surpris d'avoir un soutien quelconque, se tourna pour voir que tout le groupe était réuni.

— Je ne vois pas en quoi cela prouve quoique ce soit, enchaina Waël.

— Je dois avouer que moi non plus, fit Zu.

J'aime ton raisonnement, mais il va être difficile de les convaincre. Garet le savait, mais que faire d'autre ? Il était intimement persuadé que les deux évènements étaient liés, mais impossible d'expliquer comment.

— Euh, je...

Une nouvelle fois, son salut vînt de Volkan.

— C'est étrange, mais je crois que le gamin a raison. Souviens toi, on approche de l'an 0. Quelque chose se prépare. Ça pourrait correspondre, et on a pas de meilleure piste de toute manière. Je vais envoyer de messagers aux temples, s'ils apprennent quoique ce soit, je le saurai très vite. Allez.

Waël fixa Garet avec un oeil mauvais alors que tous prenaient la direction de la sortie. Et soudain, ce fut comme si le monde s'arrêtait, comme si le temps était mort et que rien d'autres hormis les deux hommes n'existaient. Garet fixait Waël, qui le fixait en retour. Quelque chose passa entre les deux hommes. Le jeune Nordien sentit que Waël ne verrait jamais un allié précieux en lui. Précieux jamais, mais si tu vas dans son sens, tu seras peut-être son allié un jour. Crois-moi, si tu veux être son ennemi, soit sûr de toi. Garet finit par baisser les yeux et se retourna pour suivre Volkan et les autres. Attends. Prend une épée et un bouclier. Trouvant l'idée bonne, Garet ramassa l'épée et le fourreau d'un gardien au sol, ainsi que son bouclier.

— Tu fais quoi là ?!

À la colère dans ses yeux, Garet devina que l'idée ne semblait pas aussi bonne à Waël. Dis lui...

— Volkan a bien dit qu'il trouvera une arme ici, non ?

Waël se tourna vers Phillia, qui lui accorda un clin d'oeil. Il soupira en levant les yeux au ciel. Cette gamine allait le rendre fou.

— Très bien, mais sois-en digne.

Waël quitta le temple sans un mot de plus, sous le regard de Garet. Phillia lui leva le pouce avant de suivre son chef. Intrigué, ne sachant trop quoi penser de ce qu'il venait de voir, il lui emboîta le pas, enfin armé pour sa deuxième chance.


Immobile, Garet observa les mercenaires charger la charette du marchand. Les deux colosses tekhtons prenaient des tonneaux et les lançaient comme s'ils étaient fait de paille. À l'intérieur, Phillia et Zu les rangeaient, le tout sous l'oeil du marchand grassouillet. Pour plus de vitesse et surtout de discrétion, ils ont décidé de partir avec un marchand itinérant. Il leur fournirait ressources, leur évitant ainsi de perdre un temps précieux sur le chemin à se réapprovisionner ou à devoir faire des détours pour traverser des cités en échange de leur protection et d'un "menu" dédommagement de la part du Temple. Il jubilait et ses yeux pétillants trahissaient son avarice. Il clamait haut et fort que c'était un honneur pour lui d'aider et qu'il l'aurait fait pour rien, mais même Garet n'en croyait pas un mot.

Tu réalises, Garet ? Ça y est. De là où ils sont, tes parents te regardent. Tu peux retrouver leur estime. Garet baissa les yeux. Il n'en était pas sûr. À son âge, déjà, sa mère savait se battre, et elle n'aurait jamais laissé quelqu'un la regarder comme Waël le regardait. Cela dit...Il regarda l'arme qu'il avait attaché sur une bandouillère que lui avait prêté le marchand. Oui, c'était un premier pas. Garet, il faut que tu saches quelque chose.

Tâchant de rester impassible pour ne pas attirer les regards ou effrayer ses nouveaux compagnons de route, il attendit que Sven continue. Je ne pourrais plus t'apparaître. Je pense que tu sais pourquoi. Mais ne t'en fais pas, je continuerai à t'accompager, comme je le fais actuellement.

— Bon, Garet, tu te bouges le cul ? Lança, agacé, Waël.

Le jeune Nordien réalisa alors que le groupe avait terminé de charger la charette et semblait l'attendre. Il eut le sourire le plus heureux qu'il avait fait depuis bien longtemps et hocha la tête.

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