An - 2

Quand Garet réalisa que son oncle était sûrement le même jour que ses parents ? Difficile à dire. Depuis ces funestes jours, il avait erré, frôler la mort de faim ou de soif plusieurs fois, vivant de la générosité d'autrui ou de petits larcins faciles. Faciles car la peur de la corde ou de la hache du bourreau faisait régulièrement son petit tour dans l'esprit du jeune Nordien. Il avait migré vers l'Est à la recherche de terres meilleures et plus...Généreuses. Mais sa vie ne s'était guère amélioré. Heureusement que ce vieux visage l'accompagnait un peu partout pour ne pas le laisser sombrer dans la folie ! Mais il ne pouvait être là. Garet en était conscient. D'ailleurs, Sven n'était pas tout le temps là, et régulièrement, il disparaissait, parfois pour plusieurs jours.

Mais il revenait, tout le temps, et l'avait aidé à survivre jusque-là, alors Garet n'avait jamais cherché à comprendre, il suivait son oncle aveuglément, écoutant le moindre de ses conseils. Et chacun d'entre eux l'avait guidé jusque-là, et ce même si Garet savait que cet homme, quiqu'il soit, n'était pas son cher oncle. Il tenait ce bout de papier, visiblement placé sur le mur de la grange abandonnée dans laquelle il dormait à la va-vite. Sven vînt à lui en s'appuyant sur son bâton de marche, et regarda par-dessus l'épaule de son neveu.

— Qu'est-ce que c'est ? Ils ont dû placarder ça pendant qu'on dormait. Ça doit être récent. Fais-moi voir.

Sans lâcher le papier, Garet le présenta à Sven. Il n'y avait pas grand chose sinon une simple inscription écrite à la main :

"À tous les crieurs et colporteurs de rumeurs : le Temple de Maskar cherche des bras armés ! Immense récompense à la clef, temps limité"

Sven siffla. Devant l'air interloqué de son interlocuteur, l'oncle du jeune Nordien - ou son image - soupira en levant les yeux au ciel.

— Le Temple fait rarement appel à des mercenaires. Ça doit donc être sérieux !

Garet hocha la tête pour signifier sa compréhension. Il n'avait pas eu le temps d'avoir une grande éducation, mais il savait que le Temple était une Eglise indépendante des royaumes, et implantés dans chacun des royaumes humains, sans gérance d'aucun roi, et possédait même sa propre force militaire. C'était une institution donc d'une puissance redoutable, et lorsque les bandits de grands chemin voyaient une cape blanche, ils se terraient, préférant la fuite à l'affrontement direct. Effectivement, si le Temple demandait de l'aide, l'affaire devait être sérieuse.

— C'est ta chance, Garet. Celle que tu attendais.

Garet regarda autour de lui, comme si son oncle imaginaire s'adressait à un autre Garet.

— Chance ? De quoi ?

— D'être un héros.

Sven plaisantait-il ? Garet se le demanda sérieusement. Il écarta les bras, se désignant du bout des doigts. Il était habillé avec des loques, chippés sur des marchés. Le pantalon, il l'avait trouvé sur un nain, certainement mort, dans une ruelle. Il était pas bien grand, et rondouillard malgré sa vie de vagabond. Il ne lui poussait pas de barbe mais un duvet d'adolescent. Plaisanterie ou pas, Sven éclata de rire comme si son neveu venait de sortir une grande blague hilarante.

— Roh ! Ne sois pas idiot ! Je te l'ai toujours dis, Garet, je crois en toi, moi. Ne te dénigre pas. Un jour le monde saura.

Oui, son oncle lui disait souvent ça. Prend confiance. La tête haute. Il parvînt à sourire, regardant de nouveau l'affiche. Il repensa à ses parents. Il revit les flammes, le regard de sa mère, la mort de son père. Oui, peut-être qu'il y avait une chance qu'il les rejoigne. Après tout, que risquait-il ?