Les trois reflets

de Image de profil de Marc Boyer BressollesMarc Boyer Bressolles

Avec le soutien de  C. Garcia - Auteur, Maude 
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Image de couverture de Les trois reflets

« A celui qui ouvrira la porte.

Bienvenue mortel.

Tes yeux se posent sur la terre de Nihyen. Le monde originel.

Sors donc de cette pièce pour découvrir la récompense de tes efforts. Ceux de ton espèce qui ont franchi le seuil ne sont qu’une poignée.

Observe le ciel, la terre, l’horizon. Cette vue t’évoque-t-elle un souvenir ? Rien de surprenant car tu te trouves désormais dans le monde dont le tien est issu.

Ne t'émeus point des lueurs argentées qui illuminent le lointain. Ce sont mes enfants. On les appelle les Uns, les Anciens, les Éternels ou, par leur nom d’origine, les Celestians.
Peu nombreux sont ceux qui ont connaissance de notre existence tant elle fut gardée secrète depuis les premiers âges.

Avance le long du sentier pour apercevoir ma demeure. Du haut de ce temple, j’observe les miens. Je garde notre monde.

Entends-tu les clapotis d’une cascade à quelques pas de toi ? Approche-t-en si le cœur t’en dit. Découvre le lieu de ma naissance, l’origine de la vie.

Les mortels croient en un dieu créateur : Ohm. Nous y avons veillé. Mais ce n’est là qu’une fable dont le but est de canaliser vos croyances. Sans repères, sans foi, vos esprits éphémères auraient tôt fait de définir de quelconques forces supérieures. Pourquoi, me demandes-tu ? Ne connais-tu pas les tiens ? La soif de pouvoir, la faiblesse de devoir se rassurer face à un monde aux rouages inconnus, telles sont vos tentations.

Cette cascade est la « Vidome ». La source qui donna le jour à nos terres jumelles. Premier de ses fils, je suis Byanar. Le souverain des Celestians et leur guide.

Qui sommes-nous ? Les gardiens des races mortelles. Les observateurs d’un équilibre éternel.

Nos corps vif-argent foulent Nihyen mais les esprits de certains des miens sont ailleurs. Traversant la porte à notre gré, nos âmes peuvent posséder vos enveloppes charnelles sans effort. Sous vos traits, nous surveillons. Nous préservons. Impossible dis-tu ? La connaissance ne s’arrête pas au regard de celui qui croit la posséder. Elle va bien au-delà des simples chimères qui tronquent vos vues.

Tu pleures ? Le soleil de ce ciel sans nuages t'éblouit-il ? Pose-toi sous le couvert de ce chêne et laisse-toi enivrer par le nectar de nos fleurs délicates. Tu entres dans mon jardin.

Tu ne cours aucun danger en ces lieux. Plus jamais, tu n’auras à craindre pour ta vie. Ce monde ne connaît pas la violence. J’y veille.

Tourne le regard par-delà mon temple. Contourne le si besoin est.

Tu ne rêves pas. Il s’agit bien d’un palais flottant. N’est-il pas grandiose ?

Devant toi, se dresse la demeure des Jumeaux Divins. Je conçois ta surprise. Un mensonge de plus enrobe les pensées des tiens. Les esprits de l’Ombre et de la Lumière cohabitent en ce lieu sacré depuis toujours. Leur affrontement sur Neogaia est un acte feint. Que croyais-tu donc ? Ils ne correspondent en rien aux valeurs morales avec lesquelles, mortels, vous tenez à définir leur existence. Ombre et Lumière sont un fait, deux réalités physiques qui se complètent en une parfaite harmonie. Eux aussi sont nés de la source de vie. Comme moi.

Pourquoi cet émoi teinte-t-il l’iris de tes yeux ? La fatigue pèse-t-elle sur ton cœur ?

La présence des vingt temples t’interpelle ? Ta vue ne te trompe pas, sois rassuré. Tu distingues bien chaque demeure dédoublée. Une série de dix qui relie l’ouest du palais des Jumeaux divins à la terre ferme. De parfaites répliques à l’est sises dans le même but.

Les Gardiens y résident et veillent pour l’éternité sur nos deux mondes. Ils font office d’intermédiaire entre mes enfants et les Jumeaux. En tant que guide des Celestians, je suis leur interlocuteur et je préside nos assemblées communes. Notre but te semble nébuleux ? Il n’est autre que de veiller sur l’équilibre et l’harmonie de nos terres et des tiennes.

Je perçois ton trouble, petit mortel. Ton existence te semble-t-elle futile face à notre raison immuable d’exister ? La brume de fables dont on t’abreuve depuis ton enfance s’évanouit devant tes yeux. C’est un privilège. Tu as gagné le droit à la connaissance et à la vérité. Au repos également. Tu as lutté pour une cause que tu croyais juste et par ce fait tu as veillé sur l’ordre établi, sans le savoir.

Pose tes armes, baisse ta garde, ouvre ton âme. Oublie Neogaia, la terre des éphémères. Tu foules le sol sacré de Nihyen pour l’éternité. Le monde des miens.

Nous sommes au dessus du Bien, nous sommes au dessus du Mal, nous sommes les Celestians. »

Retranscrit le cinq-cents trentième jour après le passage de la porte, par Bélinar de Tyrmesan, Vingtième tisseur de rêve du peuple de Nyx

...

L’humain reposa le parchemin sur la table et éclata d’un rire moqueur; face au sourire nostalgique de son frère.

  • Avoue qu’il est divertissant de relire de vieux bouts de grimoire que l’on croyait perdus depuis des éons, lança le premier, une fois sa crise d’hilarité passée.
  • Tu ne devrais pas te comporter de façon aussi irrespectueuse, Thanatos, riposta son interlocuteur, d’un ton badin. Les choses n’ont pas tant changé, quand on y pense. Tout n’est qu’illusion et chimère. Le bien, le mal, cette façon simpliste de penser… Cela me rappelle les contes que nous aimions tant lorsque nous étions enfants. Ceux avec une morale à la fin… A ton avis, peut-on faire une belle histoire d’un mensonge ?
  • A peine cinq minutes ensemble et tu deviens déjà désagréable, Hypnos…

Mal à l’aise et désormais furieux, le dénommé Thanatos se mit à faire les cent pas devant le regard amusé de son frère, confortablement assis dans un fauteuil placé derrière une grande table d’ivoire.

  • Ne fais pas ta mauvaise tête, petit frère. Tu ne comprends donc plus la plaisanterie ? admonesta Hypnos, un sourire désarmant aux lèvres. Que dirais-tu d’une partie de tarot pour me faire pardonner ? A moins que… Tu ne préfères les échecs, pour changer de nos habitudes ?

Face à une telle proposition, Thanatos surmonta sa mauvaise humeur à grand peine, et fit apparaitre d’un claquement de doigt un second fauteuil de l’autre côté de la table, avant de s’y installer à son aise. Un échiquier géant couvert de figurines de diamant apparut alors entre les deux frères. Ces derniers se mirent à l’observer avec attention.

  • Même si habituellement ce sont les blancs qui commencent, je te laisse porter le premier coup, annonça Hypnos. Je te sens impatient d’agir…

Le menton posé sur sa paume de main, son frère commença à mettre au point un début de stratégie. Après plusieurs minutes de réflexion, il saisit une pièce noire sur l’échiquier et la bougea de deux cases.

  • Cette partie va être passionnante ! Quelle douce ironie… souffla Hypnos, les yeux brillants.
  • J’adore faire jouer les fous en premier… chuchota son jumeau, les yeux rivés sur le damier.
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IntroductionChapitre4 messages | 5 ans
La première pièceChapitre1 message | 5 ans

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