Chapitre 12

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Paris, vendredi 2 février 2024

 « Quelqu’un veut te voir ce soir. Cherche le macaron argenté. »

 C’est par ces mots que Chloé prit connaissance de mon intention de l’inviter à dîner ce soir-là. Et parce que je ne sais décidément pas faire simple et que j’avais bien l’intention de piquer sa curiosité, j’avais décidé de lui faire suivre un petit jeu de piste tout au long de cette journée. La première étape consistait à lui laisser ce mot dans son carnet à croquis.

 Pour suivre le déroulement de la deuxième étape, je m’étais confortablement installé autour d’un chocolat chaud à la cafétéria de l’école. C’est peu après 10h15 qu’elle débarqua. Noyé dans la foule d’étudiants affalés devant leurs ordinateurs, elle ne remarqua pas ma présence, même lorsqu’elle passa tout près de moi. Je la vis s’approcher du comptoir. Elle fixait avec attention les pâtisseries. Sans quitter la rangée de macarons des yeux, elle demanda à la vendeuse : « C’est tout ce que vous avez comme macarons ? Vous n’en avez pas des argentés ? ». Surprise par la question, la vendeuse répondit que tous les parfums de macarons étaient présents en vitrine et que non, elle n’en vendait pas des argentés. Déçue par la réponse, Chloé tourna les talons et commençait à s’éloigner lorsque son regard fut attiré vers le tableau des petites annonces. Sur ce tableau où les étudiants proposaient mobilier, matériel de peinture et objets en tout genre à la vente, une feuille au format A4 trônait en son centre, bien visible au milieu des post-it et autres bouts de papier déchirés à la va-vite. Chloé s’approcha du tableau avec un sourire non dissimulé. Un dessin de macaron argenté très voyant occupait les trois-quarts de la feuille. Dessous, trois mots suivis d’un numéro de téléphone: « Appeler si intéressée ». Chloé arracha la feuille et s’en alla avec.

 C’est là qu’intervint la troisième étape de mon plan. Car au bout de la ligne indiquée, il n’y avait personne. Enfin, pas tout à fait. Il y avait bien une voix, mais une voix de synthèse, enregistrée. Son timbre métallique laissait entendre ceci : « Laissez-moi vos coordonnées. Vous recevrez vos instructions par SMS. ». Chloé n’avait pas quitté la cafétéria depuis cinq minutes que je reçus un message vocal sur mon téléphone. Le message, très bref, comportait son numéro de téléphone, comme prévu, ainsi qu’un « A ce soir » rempli de malice.

 Satisfait d’apprendre qu’elle avait mordu, non sans plaisir, à l’hameçon que je lui avais jeté, je passai à la quatrième et dernière étape de mon plan. Un lapidaire : « Rdv à 20 heures sur le pont de la Tournelle. Tenue de soirée exigée. » lui fut envoyé par SMS en fin d’après-midi alors que nous terminions notre dernier cours de la journée. J’étais occupé à ranger mon matériel lorsqu’elle passa devant moi. Sans s’arrêter, elle me lança un bref : « J’espère que ton smoking sera à la hauteur. », avant de disparaître. Un sourire idiot resta suspendu à mes lèvres toute l’heure qui suivit cette séduisante mise en garde.

 Il était à présent un peu moins de 20 heures et je contemplais Notre-Dame illuminée depuis le pont de la Tournelle. Mais c’est une autre demoiselle, tout aussi radieuse, qui attira soudain mon regard.

 Elle venait de se faire déposer par un taxi. Sublime, elle était vêtue d’une petite robe noire à tomber. Cette dernière s’effaçait progressivement au niveau des genoux pour dévoiler une paire de jambes nues aussi gracieuses que courageuses en ce froid hivernal.

 Elle se rapprocha de moi d’un pas lent mais assuré. Lorsqu’elle passa sous l’éclat fugitif d’un des réverbères du pont, je pus enfin admirer son visage avec plus de netteté. D’ordinaire simples et légers, sa coiffure et son maquillage étaient ce soir d’une prodigieuse sophistication. Son chignon bas noué de côté était un chef d’œuvre de courbes et volutes entrelacées. Il dégageait les traits de son visage, dévoilant des yeux d’un vert profond, scintillants sous les lumières de la ville.

 — Si le but est de me faire paraître minable avec mon smoking, c’est réussi, ironisai-je.

 — Toi et moi savions dès le départ que tu n’avais aucune chance...

 Le sourire qu’elle afficha alors termina de m’achever.

 — Tu es resplendissante.

 — Merci de le remarquer, répliqua-t-elle le plus naturellement du monde, où va-t-on ?

 — Tout près.

 — Dieu merci.

 — Pourquoi ? Ce sont les stilettos que tu portes qui te font souffrir ?

 Je ne manquai pas de lui faire remarquer avec amusement ce point, car je savais pertinemment qu’elle s’était promis de ne plus jamais en porter.

 — Les pestes sont trop belles pour que je les laisse au placard.

 — Alors tu seras ravie d’apprendre que notre restaurant se situe juste au bout de ce pont.

 Elle tourna la tête vers la rive gauche.

 — La Tour d’Argent ?!

 — Celle-là même.

 — Je comprends mieux maintenant le pourquoi du comment du macaron argenté...

 Il est dans Paris mille visages suivant l’heure du jour ou de la nuit : la jeune fille radieuse des matinées ensoleillées, le vieillard morne et misérable des après-midi de pluie, l’homme colérique des soirs venteux, ou bien encore la jeune frivole des automnes langoureux. La vue depuis le sixième étage du restaurant m’en dévoila un nouveau ce soir-là, un que je n’avais encore jamais croisé auparavant : celui de la nuit venue, de la femme froide et délicate, fragile mais conquérante.

 Le temps de rejoindre notre table et cette élégante s’effaça complètement devant la grâce poétique de Chloé. Si bien que j’en oubliai tout le reste, le restaurant et son cadre, la salle et ses clients épars, les vins et leur sommelier cérémonieux, les plats et leurs serveurs polis, la vaisselle gravée et leurs serviettes brodées. Tout ce dont je me souviens, c’est de la candeur de Chloé qui apportait un peu de fraîcheur dans cette atmosphère guindée :

 — Non mais, tu connais un peu les prix de ce genre de restaurant ?!

 — Oui, j’ai la carte avec les prix indiqués, moi.

 — Ce doit être une folie !!! se récria-t-elle

 — Oui, mais c’est là que ça devient intéressant, glissai-je calmement.

 — En quoi se ruiner pour un repas, aussi bon soit-il, pourrait-il être intéressant ?

 — En fait, ça remonte à la soirée de la Saint Sylvestre. J’étais voiturier au Casino de Deauville. C’est loin d’être le petit boulot le plus stimulant du monde, mais c’est plutôt facile et ça paie bien. J’attendais mon prochain client quand j’ai vu arriver une magnifique Alpine coupé. Tu aurais vu cette voiture, quelle nervosité, quel style ! Toute en muscles, la silhouette ramassée, sportive avec juste ce qu’il faut d’agressivité. J’ai vraiment adoré la conduire jusqu’au parking du Casino. Pas comme ces dizaines de berlines allemandes qui m’ont été confiées tout au long de cette soirée… Bref, je vois donc cette merveille s’arrêter devant moi. Le type qui en sort, un homme charmant. La quarantaine bien portante, vêtu d’un impeccable smoking, les cheveux gominés rejetés en arrière. Là, il s’approche de moi et me tend les clés en me demandant d’en prendre soin tout en me tapotant amicalement l’épaule. Il avait tout pour lui, vraiment : très aimable et naturellement élégant. Cinq heures plus tard, je le vois ressortir du casino, toujours aussi affable. Je lui ramène donc sa voiture et, au moment de lui rendre ses clés, je lui glisse ceci : « M. le Député, vous feriez bien de vous débarrasser de ce qu’il y a dans votre boîte à gants, cela pourrait nuire à votre carrière. ». Il me regarde alors le plus sérieusement du monde, reprend ses clés, puis glisse deux jetons de casino dans la poche intérieure de ma veste et me souhaite une très bonne année.

 — Qu’est-ce qu’il y avait dans la boîte à gants ?

 — Une fine poudre blanche suffisamment illicite pour mettre un sérieux coup d’arrêt à sa carrière politique.

 — Voilà une histoire fort intéressante, mais je ne suis pas sûre de bien comprendre ce que ça a à voir avec cette soirée ?

 — Les jetons de pourboire qu’il a glissés dans ma poche. Deux jetons d’une valeur de mille Euros chacun...

 — Non ?!

 — Si. Alors, on peut remercier M. le Député pour ce repas.

 — Attends, t’es en train de m’expliquer que tu as fait chanter un homme politique pour lui soutirer de l’argent ?

 — Non, pas du tout. A l’origine, je voulais juste le prévenir de faire plus attention. Je n’ai pas pensé un seul instant qu’il prendrait ma mise en garde pour une forme de chantage et qu’il achèterait mon silence avec ces jetons.

 — C’est fou ! Mais alors, ce député, c’est qui ? Il est particulièrement connu ?

 — Très connu. Et avec une ambition autrement plus grande que de rester député toute sa vie. C’est pour cette raison, je pense, qu’il ne pouvait pas se permettre la moindre allégation sur ses penchants pour les paradis artificiels.

 Rien de tout cela n’était vrai. Je n’avais jamais été voiturier dans un Casino, je n’avais jamais conduit d’Alpine et je n’avais jamais surpris de politicien en possession de drogue. Mais je ne pouvais pas lui dire la vérité et lui avouer que j’étais suffisamment riche pour pouvoir l’inviter dans ce restaurant chaque soir pendant les dix prochaines années. L’argent était pour moi un moyen d’arriver à mes fins, et il devait le rester. Hors de question qu’il se transforme en statut social. Je comptais bien continuer à vivre comme n’importe quel autre étudiant de 23 ans, c’est-à-dire vaguement fauché, dans un appartement qui tenait plus de la cage à poules que du logement décent, avec un ordinateur pour seul bien de valeur.

 — Tout cela est très intéressant, me fit remarquer Chloé, mais le problème avec ce genre de restaurant, c’est qu’on se fait tout de suite remarquer au milieu de la clientèle habituelle et plutôt âgée : le serveur vient tout juste de nous traiter de « fils de bourges ».

 — Comment ? m’étonnai-je en me retournant.

 Il y avait bien un serveur derrière nous, mais il était à l’autre bout de la salle, occupé à discuter avec l’hôtesse d’accueil.

 — Le serveur est beaucoup trop loin, comment tu pourrais savoir ce qu’il est en train de raconter ?

 — Bah enfin Nathan, tu as déjà oublié que je savais lire sur les lèvres ? Ma mère est malentendante de naissance, c’est elle qui m’a enseigné cette technique bien pratique. Et je te confirme que le serveur vient bien de nous traiter de « fils de bourges » en s’adressant à sa collègue. Tu devrais peut-être lui raconter comment tu peux te permettre de m’inviter dans ce restaurant, pour dissiper tout malentendu, me proposa-t-elle avec un brin de malice.

 — Hmm, peu importe, laissons-le cracher son venin, balayai-je d’un revers de main. En attendant, je suis à peu près sûr de ne jamais t’avoir entendue dire que tu savais lire sur les lèvres.

 Elle esquissa un sourire.

 — Tu as probablement raison, je ne sais plus trop à qui j’en ai déjà parlé et à qui je n’en ai jamais parlé.

 Ce nouveau talent de Chloé dévoilé, j’en profitai pour m’amuser un peu et lui demandai ce que pouvaient bien raconter les gens autour de nous. Elle me parla de ce vieux couple gangréné par la monotonie, dont le mari était en train d’expliquer à sa femme combien il était intéressant de placer son argent sur un contrat d’assurance-vie ; elle me parla également de cet homme chauve et bedonnant qui tentait de faire comprendre à sa maîtresse plus jeune de quinze ans que la dépression de sa femme l’empêchait de demander le divorce pour le moment ; elle me parla aussi de cette famille de touristes américains dont les enfants boudaient leurs plats et reprochaient à leurs parents de ne pas les avoir emmenés au KFC. Nous passâmes ainsi une grande partie du dîner à nous moquer de nos voisins de table, de la vacuité de leur existence et de leur hypocrisie sans borne.

 — Le repas était excellent, déclara-t-elle alors que nous sortions du restaurant.

 Dehors, le froid s’était fait plus vif. Il était 23 heures passées et Chloé frissonna malgré elle. Je posai ma veste sur ses frêles épaules.

 — Je te raccompagne ? lui proposai-je

 — Avec plaisir, me répondit-elle. Par contre, je suis dans la plus totale incapacité de marcher avec ces talons.

 — Pas de problème, j’attrape un taxi.

 — Tu plaisantes ? Une princesse ne voyage pas en taxi ! feignit-t-elle de s’indigner.

 — Pardonnez-moi princesse, mais je doute de pouvoir vous trouver un carrosse en cette heure avancée.

 — Alors il vous faudra me porter jusque chez moi, trancha-t-elle d’un air hautain.

 Elle se déchaussa et porta ses chaussures à sa main droite.

 — Hmm, non pas que je veuille me défausser de mes responsabilités de gentilhomme, mais je crains de ne pouvoir vous porter dans mes bras tout au long de la demi-heure qui nous sépare de votre charmante demeure.

 Elle ne put s’empêcher de sourire. Puis, sans un avertissement, elle sauta sur mon dos.

 — Et comme ça, ça ira ?

 — On devrait y arriver, souris-je.

 Une très longue demi-heure plus tard, c’est harassé que je parvins en bas de son immeuble.

 — Vous voilà arrivée, très chère, soufflai-je.

 — Merci mon brave.

 Ses chaussures toujours entre les mains, elle sauta pieds nus sur le bitume froid du trottoir.

 — Il ne me reste plus qu’à vous souhaiter une très bonne nuit, mademoiselle.

 Mais la demoiselle ne répondit rien, déjà elle poussait la porte d'entrée de son immeuble et faisait un pas à l'intérieur. Lorsqu'enfin elle daigna se tourner vers moi, son visage était plongé dans l'obscurité du hall d'entrée. Elle m’observa ainsi longuement, silencieuse et pensive, avant qu’un éclair de malice ne chasse subitement la pénombre de ses traits :

 — Mes parents se sont absentés ce soir. Tu veux passer prendre un dernier verre ?

 Je ne dormis pas chez moi cette nuit-là.

Lundi 5 février 2024

 — Tu peux m’expliquer pourquoi tu me donnes toujours rendez-vous dans cette salle ? Elle m’angoisse.

 La galerie d’anatomie dans laquelle nous nous trouvions, Charles et moi, était une pièce étriquée où le temps semblait figé en une époque lointaine. Une époque où Darwin et ses confrères naturalistes révolutionnaient la biologie. Une époque où l’on disséquait les corps en chœur, où l’on exposait les coupes anatomiques dans les écoles primaires et où l’on mettait en scène la mort de manière esthétique. Cette salle des Beaux-Arts était un concentré de tout cela : sur ma gauche, un rayon de soleil oblique venait frapper le sommet de dizaines de crânes, humains comme animaux, lesquels s’entassaient sur de poussiéreuses étagères en bois verni ; en face, perdue dans la pénombre, une représentation de rite funéraire mettait en scène de véritables squelettes de fœtus humains armés de minuscules faux, lesquels veillaient sur un autel où reposait le cadavre momifié d’un des leurs ; enfin, au fond de la pièce, oscillant entre ombre et lumière, une sculpture d’homme écorché tendait le bras devant lui comme un dernier avertissement au monde des vivants. J’avais personnellement très bien reçu le message et ne souhaitais pas m’éterniser en ce lieu sinistre. Mais Charles y tenait particulièrement :

 — Plus personne ne donne de cours ici depuis les années 50. C’est l’endroit le moins fréquenté de toute l’école, et donc le plus discret.

 — Il n’empêche que plus lugubre, tu meurs.

 — Bon alors, dis-moi, qu’est-ce qu’il te faut aujourd’hui ? Un portrait féminin ? Une nature morte à la Bruegel ? Un paysage florentin ?

 — Rien de tout cela : Tu vois le tableau de Delacroix, la Liberté guidant le peuple ?

 — Très bien, mais avec Delacroix on s’éloigne de la Renaissance, me fit-il remarquer.

 — Je sais bien, mais la responsable de notre atelier a décidé de nous faire participer à l’exposition célébrant les 150 ans de l’entrée de ce tableau au musée du Louvre.

 — Et donc ?

 — Et donc, chacun des étudiants doit reproduire une partie de ce tableau à l’échelle 2:1. J’ai hérité de Gavroche et du pistolet de cavalerie qu’il brandit au-dessus de sa tête.

 — A réaliser sur son temps libre ou durant les cours ?

 — Durant les cours bien sûr, ce serait trop facile sinon.

 — Ouais, trop facile... grommela-t-il. Je te réalise une dizaine d’ébauches à plusieurs stades d’avancement, comme d’habitude ?

 — C’est toi qui vois, c’est toi l’expert.

 — Et toi l’usurpateur, répliqua Charles sèchement. Pas trop difficile de faire semblant de peindre jusqu’à maintenant ?

 — Je me débrouille. Je fais en sorte de m’installer tout au fond de l’atelier, contre le mur, pour que personne ne puisse avoir de vue directe sur mon travail. Et ensuite je passe l’heure à donner des coups de pinceaux dans le vide devant une de tes ébauches.

 — Et lorsqu’un professeur vient constater l’avancement de ta toile ?

 — A ce moment-là, je prends une pose réfléchie et j’écoute ses conseils jusqu’à ce qu’il reparte.

 — Et personne n’a eu de doute jusqu’à maintenant ?

 — Ceux qui en ont eu ne sont plus là pour en parler... Plus sérieusement, je fais plutôt bien illusion jusque-là. Personne, des étudiants aux professeurs, ne semble encore se douter de quoi que ce soit.

 Charles s’empara d’un crâne humain près de lui et, dans une gestuelle très shakespearienne, fit mine de s’adresser à la défunte relique :

— Pas même Chloé ?

— Quoi Chloé ? Comment tu la connais ?

 Très loin de l’ingénuité avec laquelle il venait d’évoquer Chloé, Charles leva vers moi un regard aussi dur et froid que ne l’était le crâne qu’il tenait entre ses mains :

 — J’ai eu une vie avant de me compromettre avec toi, commença-t-il. Et tu n’es pas le seul à pouvoir suivre discrètement tes camarades lorsqu’ils quittent cet établissement.

 — Qu’est-ce que tu racontes ? Tu m’as suivi ?!

 — Absolument. Et j’ai pu constater de mes propres yeux à quel point tu étais obnubilé par Chloé. Tant et si bien que j’en suis venu à me demander si toute cette mascarade, cette vaste escroquerie dans laquelle tu m’as entraîné avec toi n’avait pas pour unique but de te rapprocher d’elle.

 — Peut-être bien. Mais nous avions un accord : je te paie et tu ne poses pas de question.

 — Que veux-tu, ma curiosité s’est faite plus forte. Mais je n’arrive toujours pas à comprendre pourquoi. Il y a bien d’autres méthodes pour approcher une fille. Celle-ci est pour le moins...

 Il marqua une courte pause.

 — ... extrême.

 — Probablement, acquiesçai-je. Mais je ne savais pas qui elle était lorsque je l’ai rencontrée la première fois et il fallait que j’en découvre le plus possible à son sujet. D’où toute cette comédie, toi qui dessines pour moi, moi qui fraude pour rentrer dans cette école, qui la suis jusque chez elle et qui va jusqu’à espionner ses courriels. Je sais bien que tout cela peut paraître délirant, voire carrément malsain, mais...

 — Ça l’est, me coupa-t-il.

 — J’entends bien. Mais il faut que tu comprennes que j’étais mort avant de la rencontrer, Charles. Aussi mort que ce crâne que tu tiens entre les mains. Et si j’ai aujourd’hui l’impression de revivre, c’est grâce à elle.

 — Tu penses pouvoir continuer comme cela encore longtemps ?

 — Non, je me rends bien compte maintenant qu’elle doit rester comme elle est, avec sa part d’ombre. Du peu que j’ai retenu depuis mon arrivée dans cette école, c’est que tout l’intérêt du clair-obscur réside dans ce savant dosage d’ombre dans la lumière et de lumière dans l’ombre. Vouloir lever toute ombre au tableau, c'est prendre le risque de retirer son éclat à la lumière.

 Incrédule, Charles fronça les sourcils :

 — J’espère que tu dis vrai et que tu sauras modérer tes excès.

 Je disais vrai. Depuis la soirée au restaurant, depuis notre nuit passée ensemble, je ne ressentais plus le besoin de sonder chacun des aspects de sa vie. Je me sentais parfaitement bien pour la première fois depuis des mois, depuis mon réveil un matin de juin à Saint-Pétersbourg. L’envie irrépressible de venir aux Beaux-Arts qui avait suivi, le besoin quasi-vital de connaître le moindre de ses faits et gestes, tout cela avait subitement disparu. Sa présence seule me contentait et c’est tout ce qui importait désormais.

 — Elle mérite quelqu’un de bien, ajouta Charles.

 — Je sais.

 Puis un silence pesant s’installa entre lui et moi. Silence que rompit finalement ma curiosité :

 — Je peux te demander comment tu la connais ? Parce qu’il ne me semble pas t’avoir vu la côtoyer depuis mon arrivée ici.

 — Comprends bien que mis à part toi, tous ceux qui se trouvent ici ont étudié le dessin et la peinture avant d’intégrer cette école. Elle et moi avons suivi les mêmes cours de dessin. Il y avait aussi Louis, que tu dois connaître également. Je crois qu’il est dans le même atelier que Chloé et toi.

 — Oui, un prétendant malheureux, à ce que j’ai compris.

 — Ils sont nombreux dans ce cas. Mais méfie-toi particulièrement de lui, il n’abandonne pas facilement la partie.

 — Alors nous sommes deux dans ce cas, conclus-je en me dirigeant vers la sortie.

 Je pris congé de Charles et quittai enfin l’angoissante galerie aux accents de fin du monde. Je repensai à la conversation que je venais d’avoir avec Charles et à mes excès que je devais modérer. Il avait raison, mille fois raison. Et pour sceller définitivement ce changement d’état d’esprit, il fallait que je me débarrasse au plus tôt de toutes ces informations récoltées sur Chloé et qui recouvraient le mur de ma chambre de bonne.

Mercredi 7 février 2024

 — Non mais c’est quoi ton problème ?!!

 C’est par ces mots passablement énervés que Chloé m’accueillit sur le perron de son appartement.

 — Lequel exactement ? demandai-je ingénument.

 — Ne joue pas à ça avec moi ! Tu sais très bien de quoi je veux parler.

 Elle semblait vraiment furieuse.

 — Non, vraiment pas.

 — Depuis quand tu me suis ?

 Ma gorge se noua brusquement et une angoisse profonde me submergea tout entier.

 — Mais, non... balbutiai-je péniblement.

 — Et ne me mens pas s’il te plaît, ne me prends pas pour plus bête que je ne suis. Louis m’a montré une vidéo de toi en train de me suivre.

 Ce bâtard de Louis. Il m’avait suivi lui aussi. Et moi qui n’avais remarqué ni Charles ni Louis. Trop arrogant, trop confiant dans mes aptitudes pour la prédation, je n’avais pas vu que de plus gros prédateurs avaient fait de moi leur proie. Quel amateurisme...

 — C’est comme ça que tu as su que je passerais près de la Madeleine la première fois qu’on s’est croisés en dehors de l’école ? Moi qui pensais à une nouvelle facétie du hasard, j’ai été bien conne, ajouta-t-elle dépitée.

 La tête baissée, mes yeux fuyaient les siens et balayaient le parquet du regard. Mais rien n’y fit, je sentais toujours le poids de sa déception sur mon être :

 — Je... J’ai simplement voulu accélérer le destin. Je te promets que...

 — Est-ce que tu te rends compte à quel point c’est flippant et malsain ?

 Je relevai péniblement les yeux pour affronter mon accusatrice. J’affichais alors cette expression penaude et misérable qu’ont les enfants lorsqu’ils sont pris la main dans le sac, aussi effrayés par la sanction à venir que sincèrement désolés d’avoir causé du tort :

 — Mais on se connaît toi et moi, me défendis-je maladroitement. Tu sais bien que je ne suis pas... ça.

 Ma voix tressautait et tout mon corps vacillait.

 — Non Nathan, je pensais te connaître. Mais je ne sais plus qui se tient face à moi aujourd’hui. Qui peut bien savoir ce que tu as réellement en tête ?

 — Moi. Moi, je sais. Et je n’ai que toi en tête. Je veux juste être avec toi. Dis-moi comment me faire pardonner. Je ferai tout ce que tu voudras.

 — Sors de ma vie et ne m’adresse plus jamais la parole.

 Et la porte de claquer brusquement. Et moi de me retrouver subitement seul sur le palier, immobile, sans savoir quoi faire de ce corps cataleptique qui était le mien. Je venais de la perdre et ne pouvais m’en prendre qu’à moi-même.

Samedi 10 février 2024

 — T’as pas mal foiré effectivement.

 C’est sur ce constat relativement lucide que Charles réagit lorsque je lui annonçai mon altercation avec Chloé. Nous étions attablés en terrasse d’un bar-restaurant. C’était un samedi soir comme il en était des milliers à Paris. Les gens autour de nous venaient souffler l’espace d’une soirée. A la table derrière Charles, une jolie brune, la trentaine passée, tentait de noyer la monotonie de son quotidien dans un verre de vin. Un peu plus loin, ce qui ressemblait à un groupe de collègues employés dans une même banque quelconque relâchait la pression d’une existence servile autour d’une côte de bœuf saignante. Et derrière moi, un homme à la voix usée par le tabac s’attachait à tromper l’ennui de son auditoire par un flot ininterrompu de plaisanteries plus ou moins grasses.

 — Je n’ai pas pris la menace Louis suffisamment au sérieux, confiai-je à Charles. Et il vient très habilement de m’écarter du jeu.

 — Parce que Chloé n’est qu’un jeu pour toi ? Permets-moi de te rappeler qu’on parle d’une vraie personne, avec des sentiments !

 — Je ne suis pas venu prendre une leçon de sémantique, Charles. Si je suis venu te parler, c’est parce que tu sembles avoir la tête sur les épaules. Et j’ai besoin des conseils de quelqu’un de plus calme et réfléchi que moi.

 — Quelqu’un de calme et de réfléchi te conseillerait de laisser du temps au temps. Mais le problème, c’est que Louis est bien décidé à passer à la vitesse supérieure pendant que toi, tu restes sur la touche. Il organise en ce moment même la soirée de l’année dans son château familial en périphérie de Paris. Et aux dernières nouvelles, Chloé a accepté d’être sa cavalière.

 Mon sang ne fit qu’un tour. Il me fallut plusieurs secondes pour réussir à calmer la rage qui m’animait intérieurement et adopter une attitude plus posée :

 — Donc en tant que personne nouvellement décidée à devenir raisonnable, j’imagine qu’il faudrait que je la laisse aller à cette soirée sans chercher à m’interposer.

 — Très certainement. Mais Louis va tout faire pour la séduire ce soir et te la ravir une bonne fois pour toute.

 — Je fais confiance à Chloé, elle ne ressent rien pour lui.

 — Ce n’est pas affaire de sentiments.

 — Qu’est-ce que ça veut dire ?

 — Qu’il la prendra avec ou sans son consentement. Il a déjà eu des ennuis avec la justice à propos d’une fille alors qu’il n’était encore qu’au lycée, mais ses parents et leur avocat ont tout fait pour étouffer l’affaire. Ça s’est soldé par la signature d’un gros chèque. Il se sent intouchable depuis.

 — Comment tu sais ça ?

 — Parce que j’ai bien connu la fille en question.

 Il ne me fallut pas trois secondes pour mettre au placard ma récente résolution de tempérance :

 — Il se situe où ce château ?

 — A une quarantaine de kilomètres au sud-ouest de Paris. C’est le château du Marais. Mais il va te falloir un moyen de locomotion si tu veux t’y rendre.

 — Rectification : il va TE falloir un moyen de locomotion si tu veux rentrer chez toi ce soir. La moto trail garée devant le bar, c’est la tienne ?

 — Oui...

 — Les clés, s’il te plaît. Je te la ramène demain.

 — Ok, mais tu sais conduire une moto ? T’as le permis pour ça ?

 — Un permis russe pour les véhicules de catégorie B, ça passe ?

 — Euh...

 — C’est un beau permis, vraiment. Il m’a couté pas moins de 150 000 Roubles en pots-de-vin pour corrompre et l’examinateur, et le fonctionnaire en charge de me le délivrer.

 Il me regarda fixement, tentant de déceler la plus infime trace de plaisanterie sur mon visage. Puis, visiblement blasé, me lança ses clés.

 Dix minutes plus tard, je filais vers le sud-ouest de Paris en moto.

 Je garai la bécane dans le fossé d’un chemin forestier qui longeait le mur d’enceinte du domaine. Et pour plus de discrétion, je veillai à mettre mon téléphone en mode silencieux. Un dernier coup d’œil sur celui-ci m’indiqua qu’il était bientôt minuit. Il était grand temps de se lancer.

 L’escalade du mur d’enceinte constitua l’étape la plus simple. Même si celui-ci était relativement haut, son délabrement avancé rendait nombreuses les prises d’accroche. Je n’eus aucune difficulté à parvenir de l’autre côté.

 J’atterris entre les arbres, dans un coin désert du parc. Le domaine était immense, mais je pouvais percevoir la musique au loin. A la sortie du bosquet dans lequel j’étais fourré, je pus enfin distinguer les lumières du château. Charles n’avait pas exagéré lorsqu’il avait parlé de la soirée de l’année : le parc et le château étaient éclairés par un bon millier de chandelles dont l’éclat venait se refléter dans l’eau du grand bassin, renforçant l’impression de féérie.

 Un bruit quelques mètres derrière moi vint m’arracher à la contemplation de cette symphonie de lumières pour mieux me ramener à la réalité de ma présence ici. Très vite je me jetai derrière un arbre. Quelques secondes plus tard, un couple passait sans même me remarquer : elle parce que trop occupée à redonner un semblant de décence à sa coiffure ; lui parce qu’il n’avait d’yeux que pour sa conquête d’un soir.

 La menace n’était pas tout à fait écartée que minuit sonna. Alors une foule qui se trouvait auparavant à l’intérieur du château se précipita au-dehors. Un flottement plus tard et ce fut un déluge de pyrotechnie qui illumina tout le parc. Je restai à l’abri derrière mon arbre tout le temps que dura le feu d’artifice, ce qui me parut une éternité.

 Le ciel enfin rendu à la nuit, la foule retourna à l’intérieur et je pus sans trop de risques m’approcher du bâtiment principal, une bâtisse rectangulaire de style Louis XVI dont la toiture d’ardoises jouait des arrondis et des arêtes tranchantes. Au centre, l’entrée principale formait un monumental portique composé de quatre immenses colonnes doriques. Autant préciser que ce n’est pas l’entrée que j’utilisai. Je me dirigeai plutôt vers l’angle nord-ouest, le pavillon des cuisines. En pleine effervescence, celui-ci était traversé par un va-et-vient incessant de serveurs trop occupés à recharger leurs plateaux en flûtes de champagne, petits-fours et autres délicates friandises pour me prêter la moindre espèce d’attention. Je n’eus ainsi pas le moindre mal à emprunter un tablier qui traînait par là et à me procurer un plateau de mignardises. Le reste de ma tenue était suffisamment sobre pour faire illusion le temps de pénétrer dans le bâtiment principal. Je m’incrustai dans le flot ininterrompu des serveurs et longeai l’étroit corridor qui enjambait les douves et reliait les cuisines au château proprement dit.

 Un voyage dans le temps et l’espace. C’est l’impression qui se dégageait immédiatement après avoir pénétré dans le grand salon. L’ambiance et le décorum ne devaient guère différer des festivités du Paris de la Belle Epoque : une musique lancinante, envoûtante ; des invités au visage dissimulé par des loups de satin noir et de dentelle ; des femmes en robe 1900 au décolleté pigeonnant ; des hommes en costume trois pièces sobre et sombre à la fois ; une odeur entêtante de cire brûlée et des dizaines de couples dansant une transe enflammée, mêlant leurs corps et leurs âmes pour mieux verser dans l’abîme, le tout sous les regards impassibles de leurs illustres ancêtres de marbre et de peinture.

 Je ne parvenais pas à distinguer Chloé dans le tourbillon des masques, des robes et des étoffes. Alors je changeai de stratégie et me mis en quête de Louis. Je me débarrassai de mon tablier et de mon plateau pour plus d’aisance et tentai de déterminer vers qui l’on prêtait le plus d’attention, vers qui les regards se tournaient. Mais autour de moi, les regards pétillaient de désir et les visages s’empourpraient d’ivresse sans jamais m’assister dans ma quête. Il devait bien y avoir cinq cents convives dans cette salle et je déambulais parmi eux sans parvenir à débusquer ni Louis ni Chloé.

 Et quand bien même serais-je tombé en cet instant sur Chloé, qu’aurais-je bien pu lui dire ? Que son cavalier du soir était un dangereux psychopathe ? Je n’étais guère plus estimable à ses yeux. Non, elle m’aurait probablement intimé l’ordre de déguerpir d’ici. Et Louis se serait fait un plaisir d’exaucer son vœu. Mais qu’il essaie, peu importe. Il fallait que je la voie et que je la prévienne.

 C’est au hasard d’un bouchon de champagne propulsé dans les airs que je levai les yeux et portai mon regard vers le fond de la salle. Là, sous les flammes tremblantes d’un lustre doré, je vis un couple monter les marches d’un escalier aux boiseries finement ciselées. Je la reconnus immédiatement, malgré le voile insondable de son masque de soie, malgré l’éclat satiné de sa longue robe de soirée, malgré la pudeur des longs gants blancs qui recouvraient ses bras. Aucun de ces artifices ne pouvait dissimuler la manière si particulière qu’elle avait de nouer ses cheveux en arrière, la manière si particulière qu’elle avait de refléter la lumière sur sa peau claire, la manière si particulière qu’elle avait de jouer avec son collier de perles entre les doigts. Nul doute, c’était bien elle. Et l’homme masqué qui l’accompagnait au premier étage ne pouvait être que Louis. Elle montait les marches avec difficulté et son cavalier l’aidait en lui maintenant la taille. Qu’elle eût trop forcé sur l’alcool me paraissait improbable. Mais peut-être était-elle gênée par les plis de sa robe. Quoi qu’il en soit, je n’allais pas laisser Louis l’emmener dans sa chambre à coucher sans réagir.

 Je me précipitai pour traverser le grand salon, bousculai plusieurs personnes et renversai même un plateau de coupes de champagne. Je n’eus pas le temps de grimper trois marches qu’un gorille m’attrapa par le bras.

 Je fus rapidement mis à l’écart, dans la bibliothèque du rez-de-chaussée. L’agent de sécurité referma la porte derrière lui et la musique se fit plus sourde.

 — Vous avez bu, monsieur ? s’enquit l’agent.

 — Non, pas du tout. Ecoutez, je suis désolé pour le plateau renversé, mais je dois vraiment y aller.

 — Pourquoi vous n’êtes pas en tenue d’époque comme tous les autres ? continua-t-il.

 — Je m’y suis pris trop tard et il n’y avait plus aucun costume de disponible.

 — Pourtant, un costume était exigé pour pouvoir participer à cette soirée. Vous pouvez me montrer votre carton d’invitation, monsieur ?

 — Oui, bien sûr. Un instant, il doit être dans une de mes poches.

 Je fis semblant de fouiller dans les poches de mon pantalon. J’en ressortis un uppercut qui alla s’écraser en plein dans le ventre de l’agent de sécurité. Le souffle coupé, plié en deux par la douleur, il chercha à atteindre le talkie-walkie accroché à sa ceinture. J’en profitai pour me saisir d’un bibelot qui traînait par là et le fracasser sur son crâne afin de le mettre définitivement hors-jeu. La seconde d’après, j’avais déjà rejoint le grand salon et son escalier. Je grimpai quatre à quatre les marches et parvins au premier étage.

 Le couloir était vide et mal éclairé. Il donnait sur une dizaine de portes, toutes closes. Une seule d’entre elle laissait filtrer de la lumière. Je me précipitai pour l’ouvrir, mais celle-ci était fermée à clé. Un violent coup de pied au niveau de la poignée régla ce dernier détail.

 A l’intérieur, une simple lampe de chevet éclairait la pièce. Chloé était allongée sur le lit, à moitié dénudée, la robe relevée au-dessus des genoux. Louis, encore habillé, se tenait au-dessus d’elle. Je lui hurlai de la lâcher. Surpris par mon arrivée, il se redressa et bondit sur le sol de sa chambre. Chloé, elle, bougea à peine. Je me jetai alors sur lui, le saisis à la gorge et le projetai contre le mur. Ma rage était telle qu’il n’était plus qu’un pantin entre mes mains. Après un coup de genou dans les côtes, je l’envoyai valdinguer à l’autre bout de la pièce. Il se fracassa contre une armoire et s’écrasa au sol. J’étais bien décidé à en finir, mais l’agent de sécurité que j’avais croisé précédemment surgit soudainement, accompagné de deux de ses collègues. Je me précipitai sur Louis avant qu’ils n’aient le temps de m’en empêcher. Puis ce fut le trou noir.

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