Une journée de roi

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Chapitre 3 - Une journée de roi 


Louis XIV annonce à Colbert qu'il veut tenir conseil à Versailles, ce qui décide du premier agrandissement. Un chantier qui au final, durera plus de cinquante années. Au plus fort de l'activité quinze mille hommes seront employés à cette tâche. Dans un premier temps, le roi se contente d'embellir l'ouvrage existant, d'en faire un petit château où il se rend pour de courts séjours en galante compagnie. À l'avant-cour, l'architecte Le Vau construit les communs. Le parc et les jardins avancent rapidement suivant les tracés du jardinier André Le Nôtre. Puis on raccorde les dépendances au château, et les façades sont embellies de colonnes, de balcons et de sculptures. La demeure primitive est littéralement enveloppée de nouveaux bâtiments, dont on ne peut nier, dans le style, l'influence baroque italienne, même s'il n'a pas son côté excessif et que sa facture est bien plus classique.


En 1682 Louis XIV peut enfin fixer sa résidence officielle à Versailles. Un lieu qui représentera la monarchie absolue et le siège du gouvernement français, jusqu'à la révolution. Une insurrection que ne connaîtra pas Louis XIV qui aura « déjà » tiré sa révérence en 1715. Bientôt quelques trois mille princes, ministres, courtisans et serviteurs y résident à demeure. Louis XIV est parvenu à affranchir la monarchie des frémissements de la capitale et des complots dont il conserve des cauchemars depuis l'enfance.


À l'entrée du château, la deuxième grille, disparue aujourd'hui, constitue à l'époque le véritable accès de l'édifice. C'est par là que pénètrent tous ceux qui sont en affaire à la Cour. Condamnée la nuit mais ouverte le jour, elle est en permanence surveillée par des gardes chargés de contrôler les armes à feu, les carrosses autorisés à se ranger dans la cour royale ainsi que la tenue vestimentaire de chacun. Comme il arrive des personnes de toutes conditions et de tous horizons, l'usage pour les plus pauvres, est de louer épée et chapeau. Le style reste de mise à Versailles ! 


La vie du monarque est réglée comme du papier à musique, tel le soleil, seul astre à se lever et à se coucher. À tel point que l'on peut à tout moment, sans être présent, deviner sans peine le déroulement de sa journée. 


À 8 h 00 a lieu le Petit Lever, le Premier valet tire les volets intérieurs, la clarté pénètre jusqu'au lit du roi, qui se trouve au centre de la chambre, elle-même au centre du château. Il se penche alors et murmure : « Sir, voilà l'heure » et le rituel s'enclenche. Les médecins ainsi que les familiers et quelques favoris y pénètrent successivement. Le suzerain est alors lavé, mais seulement un jour sur deux, peigné et rasé. 

Puis a lieu le Grand Lever observé seulement par les personnages les plus importants de la Cour. Le monarque est  habillé et déjeune d'une tisane ou d'un bouillon. Une centaine de personnes, toutes masculines, se pressent à cet événement : Officiers de la chambre et de la garde robe, mais aussi évêques, ambassadeurs, gouverneurs de province, premiers ministres, présidents de parlement, réveillés à l'aube dans l'unique but d'être remarqués par leur souverain. Tous assistent émerveillés à ce cérémonial.


À 10 h 00 le roi sort de ses appartements et traverse la foule qui s'est rangée en procession dans la galerie des Glaces. Certains attendent ce moment avec impatience car c'est l'un des rares où ils peuvent observer sa Majesté de près, lui glisser un petit mot, se faire voir d'elle. Mais le monarque dont l'emploi du temps est très chargé, ne leur prête guère attention. Il doit assister à la messe qui a lieu en sa Chapelle et profiter de l'occasion pour écouter chanter les chœurs accompagnés des accords de Lully, son compositeur attitré. 


À 11 h 00 de retour à ses appartements, Louis XIV tient conseil et s'applique à diriger son royaume. Habité par sa fonction et soucieux d'accomplir « son métier de roi », il gouverne lui-même tout en écoutant les conseils de ses ministres dont il exige rigueur et ponctualité. Au conseil journalier s'ajoute les audiences, les signatures ou l'examen des placets : requêtes écrites, même par le plus humble de ses sujets qui peut ainsi lui demander grâce ou justice pour peu qu'il sache lire et écrire. Dans le cas contraire il lui  reste à trouver quelqu'un susceptible de rédiger cette doléance à sa place.  


À 13 h 00 le monarque dîne le plus souvent seul dans sa chambre, de sa fenêtre il contemple la magnificence de ses jardins, c'est l'heure du Petit couvert. Tout un rituel se met en place à cette occasion. L'huissier de salle frappe le sol de sa baguette en annonçant : « Messieurs, à la viande du Roy » , il s'en suit alors un cortège d'officiers de bouche présentant toutes sortes de plats alléchants, la foule se presse espérant voir manger « Sa Grandeur ». Peut-être qu'aujourd'hui, ils auront la chance d'être choisis. 


À 14 h 00, sa Majesté part pour sa promenade quotidienne dans les jardins, soit à pied, soit en calèche avec les dames. Parfois Mansart ou Le Nôtre, ses deux architectes, l'accompagnent. L'occasion pour lui de deviser en leur compagnie de l'avancement de ses travaux intérieurs comme extérieurs. Mais il peut aussi choisir d'aller chasser dans le parc ou dans les forêts alentours. 


À 18 h 00, trois à quatre fois par semaine et jusqu'à 22 h 00, le suzerain offre à ses courtisans des soirées d'appartements. Il préside aux divertissements. Les jeux de cartes avec mises sont à l'honneur, ce qui permet au roi de faire de la noblesse son obligée en renflouant ses pertes. Il y dévoile également ses talents de joueur de billard ou de danseur, au son des hautbois et des violons. Bientôt il laissera à son fils le soin de divertir pour s'en aller étudier un dossier important dans les appartements de Madame de Maintenon.  


22 h 00 est l'heure du souper ou du Grand couvert. Les officiers de bouche ont dressé la table du souverain et des membres de la famille royale. Dans la foule qui se presse dans l'antichambre, on retrouve les dames et seigneurs mais aussi les curieux de passage placés selon leur rang. Une fois le repas terminé, Louis XIV se rend dans le salon afin de saluer les dames de la Cour, puis se retire dans son cabinet afin de converser plus librement avec les membres de sa famille et quelques proches. 


23 h 30 est l'heure du Coucher. On y retrouve le même rituel qu'au Lever en moins détaillé. Qui sera pour un soir, l'heureux bénéficiaire de la charge de tenir le bougeoir de sa Majesté, afin d'éclairer une dernière fois le monarque avant qu'il ne sombre dans ses rêves de roi ? 



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