Chapitre 8

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Après une longue journée de cours, Felix et Fleur rentrèrent ensemble au manoir.

Arrivée sur le perron, la jeune fille fit volt face et barra le chemin à son frère.

— Maeva en sait beaucoup trop, déclara-t-elle d’un air dur.

Felix en était conscient, c’est pourquoi il ne dit rien.

— Tu dois arranger ça. Fais lui croire n’importe quoi, invente un bobard, mais tiens-la loin des démons et de notre secret. Je n’ai aucune envie de déménager encore une fois.

— Je vais voir ce que je peux faire, concéda Felix. Je serai vigilant à l'avenir.

— Tu as intérêt, surtout qu’elle va développer une affinité avec les démons. Ils vont la sentir et vouloir l’approcher.

Fleur attrapa la poignée de la porte avant de se retourner à nouveau.

— J’allais oublier. Tiens.

Elle fouilla dans son sac et en sortit une fiole en cuivre gravée d’un sceau en cristaux de sel. Felix reconnut le symbole que sa sœur avait dessiné sur le sol des toilettes.

— Je te laisse le ranger dans la cave. Mets le bien derrière pour que maman ne le voit pas.

— Quoi ? s’étrangla Felix. Mais je n’ai pas de démon. Ils vont me dévorer si je descends !

— Arrête de faire ta chochotte. Ils sont tous scellés de toute manière.

— Oui, mais le Keïtos d’Orient est juste attaché !

— Descends. Dans. La. Cave, ordonna Fleur en insistant sur chaque mot.

Le garçon baissa la tête, abattu.

— Tu ferais bien de te dépêcher. Les parents ne vont pas tarder.

Ils déposèrent leurs sacs dans le hall et ne trouvèrent aucune trace de Clément au rez-de-chaussée.

— Tu parles, il passe son année sabbatique à jouer à la console, le décria Fleur.

Une douce lumière s’infiltrait dans la cuisine et balayait la pièce de rayons dorées. Tous les deux s’y installèrent pour préparer des sandwichs.

— Je t’ai entendu, jeune ignorante, et sache que tes mots ne ralentiront point mon ascension, déclara Clément sur un ton théâtral.

Felix et Fleur se vrillèrent la nuque pour découvrir la cachette de leur frère mais ne le trouvèrent nulle part. Ils fouillèrent les placards, mêmes ceux trop petits pour un corps humain, jetèrent un coup d’œil sous la table et finirent même par remuer les paquets de céréales pour voir s’il s’y cachait.

— Il est où bordel.

— Toi qui vis dans la lumière ne pourra jamais voir le malin dans l’ombre, récita Clément.

Il marcha dans la cuisine et les rayons dorés du soleil révélèrent progressivement son corps.

— Nom d'un chien ! s’écria Fleur. Qu’est-ce que tu fais à poil ?

— J’ai appris à disparaitre dans l’ombre pour réapparaitre à la lumière. Un art qui a désormais un maitre, lança-t-il en effectuant une révérence.

— Va t’habiller, maintenant.

Il s’en alla dans le salon, de nouveau invisible, et grimpa les escaliers qui grincèrent sous le poids du fantôme.

— Faut avouer que c’est classe comme compétence, s’extasia Felix en terminant de préparer son sandwich.

Fleur le lui arracha des mains pour le croquer à pleines dents.

— Hé !

— Dépêches toi d’aller ranger la fiole et je te rends ton sandwich. Du moins, s’il en reste encore.

Comprenant que ses protestations seraient vaines, il se leva et marcha jusqu’à l’entrée de la cave.

— Allez, tu peux le faire, murmura-t-il pour se donner du courage.

— Fais l’aller-retour en criant, ça aide, lui conseilla Fleur.

— Tu crois ?

— Toujours faire confiance à sa sœur.

— Bon…

Felix tira le tapis qui gisait au milieu du salon et dévoila une vielle trappe en bois. Il attrapa l’anneau métallique qui figurait en son centre et le tira en arrière. Des marches en brique rouge jaillirent des ténèbres, comme la langue d’un monstre prêt à le happer pour l’entrainer dans les profondeurs de son gosier.

— Ok, c’est parti. AHHHHHHHHHH !

Son cri s’évanouit sous les fondations du manoir. Il dévala l’escalier à toute allure, appuya sur l’interrupteur in-extrémis et continua de s’égosiller en apercevant toutes les fioles en cuivre qui gigotaient sur les armoires. Il y en avait des milliers, entreposées sur des étagères métalliques, toutes marquées par le sceau des Malcius.

Felix se calma. Le souvenir de la cave était plus effrayant que l’endroit lui même.

Il posa le croque mitaine derrière une rangée de démons emprisonnés et s’apprêta à rebrousser chemin lorsqu'une silhouette se rua sur lui.

— AHHHHHHHHHH !

Fleur consultait son téléphone portable quand son frère referma la cave.

Son teint blême et ses cheveux trempés la firent sourire.

— Je te déteste. Non, en fait, je vous déteste. Toi et maman.

— Je suppose que tu as rencontré le Keïtos ?

— Il m’a vomi dessus !

— Il semblerait que ça soit sa particularité, indiqua Clément en se joignant à la conversation, habillé cette fois.

— Pourquoi ne pas le mettre dans une fiole comme tous les autres ?

— Parce que les Keïtos vomissent sans arrêt et qu’ils finissent par se noyer. Du coup, maman a préféré l’enchainer au fond de la cave. Puis c’est un démon vagabond qui est arrivé pendant le mois de charité. L’enfermer serait une drôle de façon de l’accueillir.

Marc et Mathilda s’annoncèrent et la famille se retrouva autour de la table à manger.

— Vous en faites une drôle de tête, fit remarquer Fleur.

— Nous avons diné avec Pierre et sa famille, confia Mathilda en serrant les dents. Une vraie partie de plaisir.

— On a essayé d’en savoir plus concernant les Jeux de cette année. Vraisemblablement, rien n’a été modifié. Les disciplines sont les mêmes.

— Au moins, on sait sur quoi on va tomber, minimisa Clément.

— On sait aussi qui sont les autres participants, ajouta Marc. Et c’est là que les choses se corsent.

— Qui sont-ils ? s’enquit Felix.

— Vous ne les connaissez pas et c’est peut-être mieux ainsi. Aussi, vous devez nous promettre une chose.

Leurs trois enfants les observèrent, intrigués.

— Au moindre danger, vous abandonnerez les Jeux Obscurs.

— Il en est hors de question, s’exclama Fleur en frappant du poing sur la table. Cette année, les Malcius remportent le trophée.

— Non, ma chérie. Cette année, la seule chose que notre famille remportera, c’est le droit de vivre.

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