Chapitre 3 - Effondrement - Partie 1

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 Plongés dans la nuit, les paysages paréliens restaient indiscernables pour l’archiviste Romani. Il avait décollé de Diop depuis à peine plus d’une heure. Une fois passée la zone de transit, il engagea la pleine puissance des propulseurs. Son inquiétude grandissait à mesure qu’il se dirigeait vers le site d’extraction de la comite. Avaient-ils rencontré l’Homme-ombre ? Avaient-ils été assez maladroits pour questionner le personnel du site ? Assez pour éveiller des soupçons et contacter les autorités ? Les lois étaient claires. Depuis les dernières interactions avec les colons, les Hommes-ombres les avaient invités à ne plus faire appel à eux. En effet, une fois l’humanité fermement enracinée sur Parelas-d, pour assurer un développement correct de cette toute jeune société, il était préférable qu’ils disparaissent et qu’ils rejoignent Parelia. Ainsi, il était formellement interdit de rentrer en contact avec eux. Les « Chemins des ombres » étaient la seule exclusion. Les mourants y étaient menés, déposés seuls, légèrement sédatés à l’abord du gouffre. Les agents quittaient les lieux. Quelque temps plus tard, en l’espace d’un battement de paupières, ils disparaissaient. Les agents revenaient sur place plus tard pour récupérer les potentiels effets personnels, affaires ou appareils médicalisés pour les recycler.

 Pourtant, cette récente observation de l’Homme-ombre avait secoué les plus hautes instances paréliennes. Pourquoi une ombre était apparue ? Quelle menace l’avait fait remonter ? Pour les membres du conseil, c’était devenu un point important sur lequel ils devaient porter toute leur attention. La colonie humaine sur Parelas-d était bien trop jeune pour traverser des crises d’envergure. Et à vrai dire, ils n’en avaient jamais connue depuis la disparition des Hommes-ombres.

 Que risquaient de déclencher les deux jeunes ? Quoi qu’il advienne, l’archiviste Romani en porterait la responsabilité. Une sueur froide le parcourut. La simple crainte se muait lentement en une peur terrible. Il imaginait le possible, l’impossible, l’irrationnel. D’un seul coup, Alban Romani se redressa sur son siège et coupa le pilote automatique. En quelques secondes, il annula son plan de vol initial vers le site d’extraction de comites, sans invalider son arrivée. Il verrouilla sa nouvelle destination sur un destin qu’il voulait reprendre en main. Quoiqu’il en coûte.

 Le responsable de la station de navette du site d’extraction n’avait pas l’habitude des visites. Ces derniers jours, les plans de vol déclarés dépassaient en nombre ceux de l’année passée. Toute la journée il avait préparé une des pistes. La plus grande, celle qui accueillait des navettes imposantes et nécessitait une maintenance différente des plus petites. Il y passerait encore plusieurs heures, rien qu’à réviser des procédures qu’il n’avait pas appliquées depuis des lustres. À l’aube, une délégation vardienne était attendue. Leur récent intérêt pour le site l’interpella. Et puis cette demande arrivée au dernier moment, depuis Diop, cela en faisait trop. Il décida de contacter le responsable du site. D’une action sur son PIM, le visage de son supérieur s’afficha devant lui.

 « Salutations. Un problème à la station ?

 — Je voulais m’entretenir avec toi, Tomas. C’est quoi tout ce monde ? On devient une zone touristique ou quoi ? Je viens d’avoir encore une validation de plan de vol à effectuer.

 — J’en sais rien. Je peux juste te dire que ce n’est pas le site en question qui intéresse Vard. Ils n’ont pas voulu m’en dire plus.

 — Le dernier, ça ne venait pas de Vard, mais de Diop. Bon. De toute façon, ça ne m’avance pas plus. Je vais rappeler un technicien pour préparer la petite piste. J’en connais un qui va encore râler.

 — De Diop ? Encore ? Au fait, les deux jeunes sont revenus ?

 — Ah non. Je n’ai reçu aucune notification d’approche.

 — OK. Pourtant, ils devraient être rentrés. Je vais voir de mon côté. En même temps, les jeunes doivent profiter un peu de la vue nocturne du site de loin. Je devrais aussi refaire un tour le soir avec les aurores, c’est vrai que c’est magique. Tu as d’autres questions ? demanda Sverson.

 — Non, non. C’est bon, répondit son subordonné qui ne souhaitait pas éterniser la discussion.

 — Très bien », termina le responsable du site, coupant la communication. Il se dirigea vers la baie vitrée de ses quartiers. Il réduisit fortement l’éclairage de la pièce, malgré la luminosité du site, les aurores remplissaient les cieux de leur lente danse majestueuse. Qu’est-ce qu’ils fabriquent, ces deux-là ? s’inquiéta-t-il soudain.

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