Chapitre 4 : Diane

8 minutes de lecture

C'est à huit heures du soir qu'une autre interne pénétra dans leur chambre, pour les convier au dîner collectif.

Cette dernière fut interloquée par la scène qu'elle trouva sous ses yeux, en entrant dans la pièce. En effet, elle trouva Juliana, dans les bras de Diane, toutes les deux endormies, à même le sol.

Plutôt gênée, elle s'approcha de Diane, la seule des deux qu'elle connaissait, et tenta doucement de la sortir des bras de Morphée. La lycéenne émergea après quelques tentatives, légèrement surprise, et une fois qu'elle comprit la situation, elle lui assura qu'elle réveillerait Juliana, et qu'elles se joindraient rapidement aux autres élèves. Cela fait, la fille partit.

Diane entreprit donc de réveiller sa nouvelle amie, en faisant preuve d'une tendresse bienvenue et bienveillante. La concernée reprit rapidement conscience, apaisée, elle rinça rapidement ses traces de larmes, et, après que Diane ait gentiment caressé sa joue et ses cheveux, elles se firent un câlin réconfortant.

Puis, elles descendirent au réfectoire.

C'était une grande salle, bien aménagée, où étaient disposées de longues tables rectangulaires, aux coins arrondis. Une fois arrivées, les adolescentes prirent possession de leurs plateaux, et les remplirent rapidement, sous le regard indulgent d'une cantinière. Après quoi, elles découvrirent avec soulagement que deux places en vis-à-vis étaient disponibles, et s'y installèrent.

Après quelques minutes de papotage, Diane pensa qu'il serait intéressant qu'elle et Juliana prennent un jour de repos, le lendemain.

C'était une autre spécificité de Sainte-Alice, qui s'inscrivait dans la démarche globale de l'établissement, les élèves pouvaient prendre des journées ou des demi-journées de repos, en prévenant le bureau la vie scolaire au plus tard le jour même, à sept heures du matin. La quantité de ces jours était cependant attribuée selon le niveau ou la situation personnelle de l'élève.

Elle lança :

« ― Julia, il te reste des jours à poser ?

― Oui, j'en ai utilisé aucun depuis le début de l'année

― Tu voudrais pas en poser un demain ?, proposa-t-elle, histoire de te remettre de...tes émotions, moi aussi j'en poserai un pour qu'on passe du temps ensemble, dit-elle, rassurante

― Bien sûr, mais, t'as prévu de faire quoi ?

― Alors, on se réveille à 8h, histoire de bien commencer la journée, puis...

― Mais, comment on va poser ce jour si on va pas à la vie sco à sept heures ?, l'interrompit-elle, étonnée

― T'inquiètes, après manger, on peut aller déposer nos demandes dans leur boîte aux lettres, ils l'ouvrent chaque matin

― D'accord, j'y avais pas pensé. Et du coup, on fait quoi après ?

― Donc, on sort prendre le p'tit-déj' en ville, je connais un super resto, à moins d'une demie heure, ça te dit ?

― Ah, je..., répondit Julia gênée

― Oh, c'est moi qui invite, te fais pas de bile pour ça !

― Merci beaucoup, t'es trop gentille, dit-elle les yeux brillants, ça me branche !

― C'est rien, t'inquiète, dit-elle humblement. Mais du coup, je disais : après ça, on passe à la boutique de l'Étoile Noire, pour toi. Ensuite, on traîne un peu en ville, j'ai de supers endroits à te montrer !, puis à 11h30 on décolle, vers le bahut, et logiquement à midi on pourra manger au self, tu me suis ?

― Oui, mais on fait quoi, après ?

― Donc, à 13h , on se pose dans notre chambre, et jusqu'à 16h, c'est temps mort ; on fait nos devoirs, et tous les trucs un peu chiants...Enfin bref, à 16h, on redescend en ville, on passe au salon, pour se faire poser des ongles, ensuite à , on va au ciné, on choisit un film pas trop long, pour être parties à 17h30 et à 18h, on est à l'inter' , pour l'appel du soir. Et, après manger, de 21h à 22h, je te prépare... pour la soirée !

― Quelle soirée ?

― Ah, je me disais que j'avais oublié de te dire quelque chose...En fait, demain soir y'a une super soirée, chez mon...frère, d'ailleurs c'est lui et mon copain qui doivent venir nous chercher un peu avant 23h,

― Quoi ?, répondit Juliana, médusée, on a le droit de faire ça ?

― Bah non, faut qu'on se tire en douce, mais t'inquiète on se fera pas choper, je l'ai déjà fait plusieurs fois, dit-elle à voix basse, Tu peux venir ?

― Je sais pas...j'aime pas trop l'idée de partir seules, dans la nuit avec des gens que moi, je connais pas...

― Je comprends, mais, ne t'inquiète pas, je serai là pour toi. Je sais qu'on se connaît depuis quelques heures, mais je t'apprécie déjà beaucoup et je sens que t'es une fille bien, à qui on peut faire confiance, j'espère que c'est réciproque.
Et toi, tu me fais confiance ?

― Oui, répondit-elle, sans hésitation

― Du coup, tu viens ?

― Euh...Oui, dit-elle, plus mitigée »

Juliana n'acceptait pas tellement par envie que par amitié pour Diane, elle avait beau l'avoir connue le jour même, assez naïvement, elle lui accordait déjà sa confiance. Sa première réponse venait du cœur.

Après cette discussion, les filles débarrassèrent leurs places, et passèrent dans leur chambre, récupérer de quoi noter leurs demandes de jours de repos. Après les avoir notées, elles les déposèrent dans la boîte aux lettres de la vie scolaire, puis reprirent le chemin de la chambre 402, une fois pour toute.

Une fois qu'elles y furent, c'est avec difficulté qu'elles réglèrent le réveil de la chambre sur 8h.

Après moult papotages, elles éteignirent les lumières et s'endormirent.

*

Mercredi 18 septembre

Le lendemain, comme prévu, la machine sonna à 8h pile. Juliana avait agréablement dormi, et, c'est elle qui, cette fois-ci, fut la première en éveil, et réveilla Diane, après quoi elles commencèrent à se préparer, ce qui leur prit une demie heure, dans la foulée, elles quittèrent l'établissement.

A 9h, elles étaient attablées dans une crêperie, où elles mangèrent en une petite demie heure, après quoi elles prirent le chemin de la boutique.

Elles y furent aux environs de 9h30 ; le petit commerce proposait une gamme de vêtements bien précise : minijupes, micro-jupes, hauts échancrés, bas résille dans des tons flashy ou sombres. Ce style peu commun était le fait de Gisèle, la patronne, qui avait été un soutien de première heure, dans la lutte pour la libération sexuelle. Selon elle, proposer aux femmes des vêtements courts, brisant les règles de bienséance, contribuait à leur émancipation.

Aussitôt que les filles furent entrées, un garçon svelte, encore adolescent, accourut vers elles, ses cheveux courts étaient teints de la même couleur blond platine que ceux de Diane. Il colla deux bises bruyantes à cette dernière, puis, d'un ton chaleureux lui adressa ces mots :

«― Salut ma belle !

― Salut Marcel !

― Ça va, depuis la dernière fois ?

― Bah oui ! Écoute, tant que ça se passe bien avec Marco tout va bien, Et toi ? C'est comment avec Pavlos ?

― Oh, c'est...intense, dit-il, la mine ravie

― Faudra que tu me racontes ça... dit-elle avec un sourire en coin

― Enfin bref, quel bon vent t'amène ici ?

― Alors, je cherche une tenue de soirée pour cette jeune fille, dit-elle en tournant le regard vers sa jeune accompagnatrice

Marcel se mit à sa hauteur

― Que voudrais-tu, mademoiselle ?

― Euh...je...

― Julia ne sait pas trop, intervint Diane, mais j'ai une petite idée

― Je pense que je sais, mais, dans le doute, dis-le

― J'aimerais bien trouver ma tenue préférée, mais dans une taille plus petite, sûrement un 36

― Je le savais ! C'est une super bonne idée, je vais te chercher ça en rayon ! dit-il débordant d'enthousiasme »

Il partit d'un pas dynamique et revint rapidement avec un sac contenant divers vêtements.

Avec entrain, il déclara alors :

« ― Que les essayages commencent ! »

Puis, sous les regards captivés de Diane et Marcel, Juliana entra en cabine d'où elle ressortit quelques minutes plus tard, timidement. Elle portait un caraco satiné rose poudré, une minijupe vert forêt, des bas résille et des bottines noires à talons moyens. Dans ce genre de tenue, auquel elle n'était pas habituée, elle était mal à l'aise, et les talons la faisaient vaciller.

Malgré tout, ses observateurs ne tarirent pas de compliments à son égard, ce qui réussit à la convaincre

Diane avait décidé, ce serait cette tenue et pas une autre.

Après avoir choisi quelques pièces supplémentaires pour son amie, Diane passa en caisse.

Les filles avaient passé plus de temps que prévu à la boutique et prirent directement le chemin de l'établissement.

Pendant qu'elles prenaient leur déjeuner avec des amies de Diane, Juliana repéra la table de ses anciens amis, et la fixa. Son regard croisa celui de Lola, un regard noir, un regard qui fusillait et qui voulait dire « dégage ! ». Puis, après quelques instants, elle détourna son regard, qui rencontra celui de Seb, c'était là un regard désolé, résigné, c'était un regard de repentance, il lui demandait pardon. Tout cela s'arrêta quand Lola, outragée, réprimanda Seb. Ces échanges avaient troublé Juliana, qui, malgré tout, tentait de faire bonne figure. De toute façon, Diane n'avait rien remarqué, trop occupée à discuter de choses graveleuses.

A 13h, elles rentrèrent au dortoir.

Quand elles y furent, elles firent une petite sieste, puis accomplirent les tâches pénibles. Le reste de la journée se déroula comme prévu, elles allèrent au cinéma, passèrent au salon, firent acte de présence et à l'appel de 18h, mangèrent à 20h et vers 21h15, Diane était en train de coiffer son amie.

Pendant qu'elle la peignait, elle tenta d'en apprendre plus sur elle :

«― Je veux pas te mettre mal à l'aise, mais, il t'es arrivé quoi, hier ?

― T'inquiète pas, j'ai besoin d'en parler

― Ah, d'accord, et bien je suis là !

― Bah, en fait, je me suis fait téj' par mon groupe de ''potes'', voilà

― Comment ? Pourquoi ? T'es géniale pourtant !

― Merci, mais en fait c'est que... »

Et elle lui raconta tout; l'amitié de Seb, l'inimitié d'Ayden, Maël et Candice, l'éloignement de Lola, puis, finalement, la dispute.

Diane sembla extrêmement touchée. Toute compatissante, elle déclara :

«― Ma pauvre ! Ils ne te méritaient pas !

― Je ne sais pas si je les méritais, ni même si je mérite des amis, répondit-elle tristement

― Si ! Tu le mérites ! D'ailleurs, moi, je suis ton amie, je serai là pour toi !

― Vraiment ?, demanda-t-elle sans oser y croire

― Bien sûr, répondit-elle d'un ton rassurant »

Puis, elle plongea ses yeux dans ceux de Juliana, se mit à son niveau et la prit dans ses bras. Elle acheva ensuite de la mettre en beauté, avant d'elle-même se mettre en beauté

Diane avait tout prévu. À 22h45, lorsqu'il était sûr que les surveillantes dormaient, les filles sortirent en douce de l'internat. Julia était trop maquillée, serrée dans sa minijupe trop courte et son caraco trop léger pour la saison.
Les chaussures à talons étaient vraiment difficiles à porter, et la jeune fille les avait enlevées pour mieux se déplacer et marchait donc pieds nus sur le sol froid. Malgré cette fraîcheur automnale et la peur Juliana exaltait à l'idée de suivre Diane.

Enfin, elle avait trouvé une amie, quelqu'un qui s'intéressait à elle ; elle l'aurait suivie jusqu'au bout du monde. Alors, ni les corridors sombres, ni les froids escaliers de béton, ni même la grande cour goudronnée n'étaient des obstacles infranchissables ; ce n'étaient que des étapes vers un bon moment...

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire MaximilianaRoxane ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0