Pourquoi du houx à Noël et du gui à l’an neuf

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Il y a environ 2 500 ans

Pourquoi du houx à Noël et du gui à l’an neuf

La fête au solstice d’hiver



De nos jours, trois végétaux sont associés à Noël, le sapin, le gui et le houx. Cette association, typiquement française, est la rencontre de trois traditions que nous avons rassemblées.

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La plus ancienne est celle du gui que l’on fait remonter aux Celtes et bien sûr aux druides. Le sixième jour de l’année celtique, commençant au solstice d’hiver, les druides allaient couper le gui en s’exclamant : « O Ghel an heu », une expression qui signifie littéralement « Que le blé germe ! ». La proximité des sons avec « Au gui l’an neuf ! » fait dériver cette dernière expression de celle des druides, en ligne directe. C’est passer un peu vite sur l’histoire des langues et des patois. En revanche, il est avéré que cette plante était bien sacrée pour nos ancêtres les Celtes, sans doute car il reste vert l’hiver alors que son arbre hôte est dénudé. Plante médicinale (vasodilatateur et sédatif) et porte-bonheur, un rameau était attaché à l’entrée de leurs maisons, car en séchant, il devient jaune comme l’or.

La tradition voulait aussi que deux ennemis se croisant sous le gui déposent leurs armes pour faire une trêve, c’est sans doute à elle que l’on doit de toujours pouvoir s’embrasser sous le gui. Une autre tradition, d’origine nordique, disait qu’un couple s’embrassant sous le gui le jour de l’an se marie l’année suivante. Ce qui peut expliquer les baisers volés sous ce gui…

Les Grecs et les Romains vénéraient aussi le gui, puisque c’était un talisman indispensable à emporter aux Enfers, si on voulait en revenir.

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L’Empereur Aurélien, vers l’an 270, avait fixé au 25 décembre, jour du solstice dans le calendrier romain, la fête officielle du Sol Invictus. Cette nouvelle divinité, le Soleil invaincu, était issue des cultes d’Apollon et de Mithra, était destinée être la divinité commune à toute l’armée de l’empire.

Ce Dieu sera vénéré par les successeurs d’Aurélien, y compris par Constantin qui décrètera que le Die Solis (jour du soleil) sera désormais un jour de repos. Saint Augustin, au 5e siècle, jugera nécessaire de prêcher contre ce culte, alors qu’en 354, le pape Liberus avait fixé la date de la naissance du Christ au 25 décembre, habile récupération de cette fête païenne.

Le nom même de Noël vient du latin novellum, qui nous a donné nouvel, nouveau, nouveau soleil et reprise du cycle annuel. Les chrétiens trouvèrent une autre plante toujours verte, le houx, symbolisant l’immortalité et rappelant la couronne de Jésus par ses épines et son sang par ses boules rouges. Le houx deviendra donc la plante du Noël chrétien. Le gui perdura dans les traditions et coutumes populaires puis glissa vers le Nouvel An, surtout depuis que Charles IX décréta en 1564 que le début de l’année serait, pour tout son royaume, le 1er janvier, ce qui sera repris dans la réforme grégorienne du calendrier de 1582.

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Le dernier végétal de Noël, le sapin, est beaucoup plus récent chez nous et d’origine germanique. Cette coutume des arbres de Noël était à peu près inconnue chez nous (sauf dans le Berry) avant la guerre de 1870. C’est à l’Alsace que nous l’avons empruntée, et il y a quelque chose de touchant dans cette adoption par toute la France d’une coutume locale venant de notre province perdue.

Comme le houx, le sapin et l’épicéa étaient vénérés aussi par les Celtes comme symboles d’espoir capable de tenir face à l’hiver. Ils étaient également liés à l’enfantement et la légende chrétienne de Saint Boniface recycla cette tradition. Ce moine évangélisateur de la fin du 7e siècle, voulant alors convaincre la population que le chêne n’était pas un arbre sacré, en fit abattre un. En tombant, l’arbre écrasa tout sur son passage, à l’exception d’un jeune sapin. Saint Boniface déclara alors : « Désormais, nous appellerons cet arbre, l’arbre de l’Enfant Jésus ». Depuis lors, des sapins furent plantés en Allemagne pour célébrer la naissance du Christ, et la tradition du sapin de Noël fit son apparition en Alsace, où on le mentionne vers 1521. Inutile de préciser que le terme de sapin s’accorde à tous les résineux de petite taille à cette occasion et non exclusivement au sapin commun, ou pectiné, Abies alba.

Les boules de Noël accrochées au sapin sont l’objet d’une autre légende. Une coutume aurait existé dans l’est de la France consistant à décorer un épicéa avec des pommes rouges ou des fleurs. Une grande sécheresse sévit pendant les années 1857 et 1858. Dans les Vosges du Nord, pays de tradition verrière, un souffleur de verre de montre aurait eu l’idée d’utiliser les boules en verre qu’il soufflait pour décorer les sapins. Cette coutume se serait répandue dans le monde entier à la fin du 19e siècle et au 20e siècle.

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Plusieurs autres traditions d’origines diverses sont régulièrement proposées pour Noël, en plus de ces trois plantes. On trouve ainsi les treize desserts provençaux, manger des lentilles, avaler douze grains de raisin, prendre un bain de minuit, se passer du Champagne derrière l’oreille, mettre des pétales de roses dans le lit ou porter de la lingerie rouge, à jeter le lendemain matin… Chacun peut donc trouver son bonheur à Noël.

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À Noël s’attache le souvenir du grand Klaus, Saint Nicolas, associé à son Père Fouettard, sont bien connus, eux aussi, des enfants du monde germanique (alsacien et lorrain en France), bien qu’ils passent le 6 décembre. Il sera décliné en Santa Claus par nos amis américains, déformation du nom par des colons néerlandais importateurs du concept, Sinter Klaas. Dès les années 1840, Santa Claus était assez célèbre pour que les magasins l’utilisent comme appel pour les ventes de Noël. C’est un caricaturiste, Thomas Nast, qui dessine en 1880 le premier portrait du personnage tel que nous le connaissons encore, rond, gai, barbe blanche et habit rouge (la légende de l’attribution de cette couleur par Coca Cola est infondée). Ce qui demeure, c’est que le père Noël est une pure création commerciale à laquelle seuls les petits enfants portent crédit. Le culte du Père Noël est une ordure est, lui, cinématographique.

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